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EUSTATHE D’ANTIOCHK (SAINT]


de ce qu’Eustathe eut à souffrir ensuite pour la foi de Nicée : car Athanase le désigne comme « confesseur » dès avant de commencer le récit de l’arianisme. Cavaliera, Le schisme d’Anlioche (iV-V siècle), Paris, 1905, p. 33. Devenu évêque de Bérée, Eustathe se signala par l’orthodoxie de sa foi et par son zèle pour la vérité : son ami, l'évêque d’Alexandrie, saint Alexandre, lui fait tenir une copie de la lettre qu’il envoie au sujet d’Arius à Alexandre de Constantinople. Théodoret, H. E., i, 3, col. 909 ; S. Jérôme, De viris, c. lxxxv, col. 691. Le transfert d’Eustathe à. tioche eut lieu probablement en 324. Sozomène, H. E., I, 2, commet une erreur en plaçant ce fait après le concile de Nicée et en l’attribuant à une décision de cette assemblée. Il faut s’en rapporter au témoignage de Théodoret, H. E., i, 6, col. 917, affirmant la présence d’Eustathe à Nicée comme évêque d’Antioche. Mansi, Concil., t. ii, col. 693, 698. Son élection à ce siège, déclare le même historien, ibid., fut l’acte unanime des évêques, des prêtres et des laïques de la ville et de la province. Il y aurait été le successeur immédiat de Philogone, ibid., lequel est mort au plus tôt le 20 décembre 322, S. Chrysostome, De S. Phi/og., orat. xxxi, P. G., t. xlviii, col. 747 sq. ; cf. Tillemont, Mémoires pour servir à l’histoire ccclésias//çue, Paris, 1706, t. vii, p. 201 sq. ; Boschius, Hisl.palr. Anlioch., dans Acta sanctorum, t. iv julii, p. 30 sq. ; mais la Chronique de saint Jcrômv, Chroninm, an. 2345, P. L., t. xxvii, col. 677, suivie par Théophane et par d’autres, intercale entre l’un et l’autre, pour un court intervalle, un certain Paulin (à distinguer de Paulin de Tyr). Voir Tillemont, op. cit., p. 22 sq., 646 sq. Eustathe prit une grande part au concile de Nicée. D’après une lettre de Jean d’Antioche à Proclos, citée par Facundus d’Hermiane, Pro defensione irium capit.^ XI, i, P. L., t. lxvii, col. 795, il y aurait même occupé la première place. Théodoret, H. E., I, 6, col. 917, affirme qu’il y prononça devant Constantin l’allocution d’ouverture. « C’est par une fausse interprétation de la Vita Constantini, III, 11, écrit à ce sujet F. Cavaliera, op. cit., p. 34-35, en note, que l’auteur des titres attribue ce discours à Eusèbe de Césarée. L’affirmation identique de Sozomène, H. E., 1, 19, n’a pas d’autre explication. On a fait honneur à la modestie d’Eusèbe du silence que peut expliquer son animosité contre Eustathe ou son parti pris. L’ensemble de la Vita, et notamment le c. xlv du I. IV montrent qu’Eusèbe n’a point l’habitude de dissimuler ce qui le concerne. On s’explique mal d’ailleurs pourquoi Eusèbe aurait été à la droite de l’empereur. » M. Seeck, Zeitschrift fiir Kirchengeschiclile, 1896, p. 347, n. 4, admet à tort que les titres sont d’Eusèbe. Cf. Heikel, Eusebius Werke, t. i, Einleitung, p. cm. Déjà Valois avait remarqué excellemment cette différence entre l’Histoire ecclésiastique et la Vita. P. G. t. XX, col. 905, note 1. Le discours d’Eustathe, dont Théodoret donne le résumé, est censé reproduit dans l'œuvre de Grégoire de Césarée : Orutio in SS. Patres Niceenos. Cf. Boschius, Acta sanctorum, t. iv julii. De S. Eustathio, i, n. 5 sq., 130 sq.

Quoi qu’il en soit de l’affirmation de Théodoret, il est sûr qu’Eustathe attaqua vivement les ariens et contribua beaucoup à leur condamnation. S. Jérôme, Epist., i.xxiii, 2, ndEvangelum, P. L., t. xxii, col. 677 ; Facundus d’Hermiane, toc. cit. C’est probablement alors, selon la remarque de Tillemont, op. cit., p. 23, qu’Eustathe lia avec Osius de Cordouc cette intimité dont parle le conciliabule de Philippopoli. S’il faut en croire Gélase de Cy/.ique, Hisl. conc. Nicarii, II, xxvii, P. G., t. LXXXV, col. 1344, Eustathe fut chargé de faire exécuter les décisions conciliaires dans les provinces de CœlésjTie, de Mésopotamie et des deux Cilicies. Mais c’est surtout à Antioche qu’il usa de toute son

autorité pour étouffer l’hérésie. Grâce i son infatigable vigilance, les fidèles furent prémunis contre « le fléau qui montait de l’Egypte, » selon le mot de saint Chrysostome, Orat. in Eustathium, n. 3, P. G., t. L, col. 602. Il bannit de son clergé tous les membres suspects. Saint Athanase, à qui nous devons ce détail, Hist. arianorum, 4, note que la plupart de ces clercs furent dans la suite faits évêques pour renforcer le parti arien : tels sont Léonce et Etienne d’Antioche, Georges de Laodicée, Théodose de Tripoli, Eudoxe de Germanicie (plus tard évêque d’Antioche, puis de Constantinople), Eustathe de Sébaste. Saint Jean Chrysostome, loc. cit., rapporte que l'évêque d’Antioche envoyait des maîtres orthodoxes et de savants controversistes aux villes les plus menacées. Lui-même, il multipliait d’ailleurs les réfutations, sous forme de traités, de lettres, de sermons ou de commentaires exégétiques : Adversus arianorum dogma componens multa, dit de lui saint Jérôme, loc. cit. Théodoret, H. E., I, 7, col. 921, fait une mention spéciale d’un opuscule sur ce texte des Proverbes, viii, 22 : Dominus creavit me in initio viarum suarum, et il cite un extrait de la préface. Cette préface, qui « est un véritable manifeste, » Cavaliera, loc. cit., a été insérée par Nicéphore Calliste dans son Histoire ecclésiastique, viii, 21. Nous avons un assez grand nombre d’autres fragments (exactement 19) de cet opuscule sur ce texte des Proverbes derrière lequel, comme on sait, se retranchaient les ariens. Ces fragments se trouvent, pour la plupart, conservés dans Théodoret, Eranistes, P. G., t. lxxxiii, col. 87, 176, 285. « Quand, en 328, Athanase, jeune encore, fut choisi pour succéder à saint Alexandre, Eustathe était, avec Marcel d’Ancyre, le champion le plus en vue et le vrai chef de l’orthodoxie nicéenne. » Cavaliera, op. cit., p. 34-35.

Le vigoureux défi jeté aux hérétiques par Eustathe fut relevé par les deux chefs du parti, Eusèbe de Nicomédie et son homonyme de Césarée. L’antagonisme de ces deux prélats contre l'évêque d’Antioche datait du concile de Nicée. Sozomène, H. E., ii, 19, mentionne aussi, parmi les évêques attaqués par Eustathe dans ses polémiques, Paulin de Tyr et Patrophile de Scythopolis, qui comptaient dans l'épiscopat oriental un bon nombre de partisans.

Eustathe avait accusé Eusèbe de Césarée de revenir sournoisement aux erreurs anciennes ; celui-ci ripostait en chargeant Eustathe de sabellianisme.Socrate, //.£., I, 23. Cf. Sozomène, ii, 18, qui diffère de Socrate pour la forme seulement. La discussion menaçait de durer longtemps. « Eusèbe de Nicomédie se rendit compte que la ruse était une meilleure arme pour triompher, il organisa un guet-apens. » Cavaliera, op. cit., p. 36. Il flatta la vanité de l’empereur par une requête sollicitant l’autorisation d’aller visiter les constructions grandioses que la piété de Constantin faisait élever à Jérusalem (la basilique du Saint-Sépulcre, dont la dédicace solennelle eut lieu le 17 septembre 335). Il partit pour la Palestine, accompagné de Théognis de Nicée. A leur passage par Antioche, les deux voyageurs reçurent d’Eustathe le plus fraternel accueil, et ils se séparèrent de lui avec toutes les apparences de l’amitié. Mais, poursuivant son but, Eusèbe de Nicomédie rallia ses partisans syriens et palestiniens : Eusèbe de Césarée, Patrophile de Scythopolis, Aétiosde Lydda. Cf. Tliéodote deLaodicée, -.Théodoret, H. E., I, 20, col. 968. A son retour, il les amena avec lui à Antioche (330), où se trouvaient déjà d’autres évêques, mais ceux-ci fermement attachés, pour la plupart, à la foi de Nicée.

Si l’on en croit Théodoret, H. E., i, 21, col. 968, une accusation portée contre les mœurs d’Eustathe par une femme de rien aurait servi de prétexte à la réunion d’un synode. Soudoyée par les ennemis du saint, cette