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EUNOMIUS


traire par la fuite au coup qui le menaçait ; mais le même auteur suppose manifestement dans un autre ouvrage, Hærelicarum fabularum compendium, iv, 3, P. G., t. Lxxxiii, col. 420, que l'évêque de Cyzique vint à Constantinople, ce qu’affirment aussi Sozomène, vi, 26, col. 1364, et Philostorge, vi, 1-3, col. 532 sq. D’après ce dernier, Eunomius invité à exposer publiquement sa foi, se serait justifié avec éclat ; mais, comme l'évêque de Constantinople ne tenait pas sa promesse de réhabiliter Aétius et qu’il exigeait même une adhésion signée au formulaire de Rimini, l’anoméen préféra rompre ; il se démit de son évêché et se retira en Cappadoce.

La première apologie d’Eunomius date de cette époque. C’est sans doute aux mêmes circonstances que Théodoret fait allusion, H. E., ii, 25, col. 1076, quand il parle de la résistance de l’hérésiarque à un décret synodal. Mais il pourrait aussi avoir en vue les faits qui suivirent. En effet, Acace de Césarée, qui n’avait pas approuvé la promotion de l’anoméen au siège de Cyzique, obtint de l’empereur de le faire juger dans un synode qui se tint à Antioche dans l’hiver de 360. Personne ne se serait présenté pour remplir le rôle d’accusateur, dit Philostorge, v, 4, col. 534 ; mais le fait que cet avocat passionné n’ose pas parler de réhabilitation, et les plaintes amères d’Eunomius, dont l'écho se retrouve dans saint Grégoire de Nysse, Contra Eunom., 1. I, col. 273, 276, prouvent que l’issue du débat ne fut pas favorable à l'évêque déposé de Cyzique.

L’avènement de Julien l’Apostat permit aux chefs anoméens de rentrer à Constantinople en 361. Avec la connivence d’Eudoxe, qui ne comptait plus alors sur la cour, ils unirent leurs efforts pour développer leur secte. Aétius fut promu à l'épiscopat, puis réhabilité dans un synode d’une dizaine d'évêques, tenu à Antioche en 362. Philostorge, vii, 6, col. 544. Mais le peu de zèle dont les homéens firent preuve en cette affaire fournit aux deux chefs des anoméens l’occasion de se constituer, sur la fin de 363, en parti distinct et pleinement indépendant. Voir Arianisme, col. 1834 sq. Ils nommèrent des évêques pour divers sièges, en particulier pour celui de Constantinople, ce qui consomma la rupture entre eux et Eudoxe. Philostorge, VIII, 2, 4, 7 ; col. 556, 560 sq. Aussi, quand ce dernier personnage rentra en faveur, après l’avènement de Valens à l’empire (28 mars 364), Aétius et Eunomius durent se retirer, le premier dans son domaine de Lesbos, l’autre à Chalcédoine, dans une maison de campagne qu’il y possédait. Ils continuèrent à diriger leur parti à distance, sans avoir charge d’une église déterminée. Eunomius renonça même définitivement à la célébration des saints mystères qu’il avait interrompue depuis son départ de Cyzique. Philostorge, IX, 3, 4, col. 568 sq.

On retrouve Eunomius à Constantinople pendant la domination de l’usurpateur Procope (28 septembre 365-27 mai 366). Il y était encore, quand Aétius, rentré aussi dans la ville impériale, finit ses jours. Philostorge, ix, 6, col. 573. Il restait, dès lors, l’unique chef et l’oracle de son parti. Mais l’hostilité du clergé le força bientôt à quitter Constantinople. Les relations qu’il avait eues avec Procope faillirent même, peu après, dans l’hiver de 367, lui coûter la vie ; le préfet du prétoire, Auxomc, prononça contre lui un édit de bannissement en Mauritanie. Au cours du voyage, l'évêque arien de Mursa, Valens, le retint en cette ville et sollicita sa grâce auprès de l’empereur qui l’accorda et aurait même, à cette occasion, accordé une audience à l’hérésiarque, si Eudoxe ne l’en avait pas dissuadé. Philostorge, ix, 7, 8, col. 574 sq.

Vraisemblablement Eunomius revint alors à Chalcédoine. En tout cas, il ne resta pas inactif, car le nou veau préfet du prétoire, Modeste (370 à 378), trouvant « qu’il troublait les églises et les villes, » le relégua dans l'île de Naxos (?). Philostorge, ix, 11, col. 577. Au début du règne de Théodose (379), l’hérésiarque reparait à Constantinople, d’où il part pour l’Orient, afin d’y traiter les affaires de son parti. De retour, il présente à l’empereur, comme chef des anoméens, en juin 383, son àxOcuic Tti’crrsw ; ou profession de foi, répudiée par Théodosc comme toutes celles des hérétiques. Socrate, v, 10, col. 588 sq. Voir Arianisme, col. 1847.

Eunomius restait également fidèle à la mémoire d' Aétius. Le clergé d' Antioche lui ayant offert d’entrer en communion avec lui, il posa comme condition préalable la révocation de la sentence portée jadis contre son ancien maître. Philostorge, x, 1, col. 584. Cette obstination intransigeante attira sur le parti les rigueurs impériales. S'étant aperçu, après le meurtre de Gratien (25 août 383), que plusieurs de ses propres chambellans étaient infectés de l’erreur eunomienne. Théodose les chassa du palais ; sur son ordre, leur chef fut arrêté dans sa campagne de Chalcédoine et déporté en Mésie, à Halmyris, sur le Danube. Les Goths s'étant emparés de cette ville, l’hiver suivant, Eunomius fut transféré à Césarée de Cappadoce ; mais comme les habitants supportaient dilTicilement la présence d’un homme qui avait attaqué jadis par écrit Basile, leur grand et saint évêque, on lui permit de se retirer dans ses terres de Dakora. Philostorge, x, 6, col. 585 sq. C’est là qu’il passa ses dernières années, sans cesser d'écrire contre la foi de Nicée. Sozomène, vii, 17, col. 1464. Saint Jérôme le supposait encore en vie, usque hodie vivcre dicitur in Cappadocia, quand il composa son De viris illustribas, c. cxx, P. L., t. xxiii, col. 709, c’est-à-dire en 392 ; mais dans un décret qui appartient à ses premiers actes, Césaire, devenu préfet du prétoire dans l'été de 395, ordonne de transférer son corps de Dakora à Tyana, pour empêcher ses partisans de le transporter à Constantinople et de le déposer dans le même tombeau que celui d' Aétius. Philostorge, xi, 5, col. 600. C’est donc au plus tard en 395 que doit se placer la mort d’Eunomius.

Photius nous a conservé, dans ses grandes lignes, le portrait enthousiaste que Philostorge a fait du chef de son parti, x, 6, col. 588 ; cf. iii, 21, col. 509. Le panégyriste y dissimule sous des périphrases étudiées certains défauts physiques, qu’un autre historien décrit ainsi : interius exleriusque morbo regio correplus. Rufin, H. E., I, 25, P. L., t. XXI, col. 496.

II. Écrits.

Saint Jérôme et Rufin, loc. cit., rapportent qu’Eunomius écrivit beaucoup, et jusqu'à la fin de sa vie, contre la foi de Nicée. Le premier de ces auteurs ajoute. Contra Vigilantium, c. viii, P. /, .. t. XXIII, col. 347, que l’estime des eunomiens pour les écritsde leurchef allait jusqu'à les mettre au-dessus des Évangiles. Par contre, les empereurs orthodoxes multiplièrent contre eux les édits de proscription. Dans l’un de ces édits, porté en 398, Arcadius ordonnait que tous les livres d’Eunomius fussent brûlés, sous peine de mort pour quiconque en conserverait quelque chose. Ce qui nous en reste se réduit à trois écrits ou fragments d'écrits.

1° W.nolo-cq-iY.6 :, apologie comprenant vingt-huit paragraphes, P. G., t. xxx, col. 835-868. Le texte grec, emprunté par Migne à Fabricius, Bibliotheca greeca, t. viii, p. 260, a été réédité plus correctement par Goldhorn, S. Basilii opéra dogmalica selecla, Leipzig, 1854, p. 588 sq. Cf. Rettberg, Marcelliana, p. 119-124. William Whiston a traduit en anglais r 'A710)rjYr|Ti/.ô :, dans Primitive christianity rcvived, Londres, 1711, t. i. Appendice. Eunomius composa cet écrit vers l’an 360, après qu’il eut été obligé de quitter l'évêché de Cyzique. Il fut réfuté par saint Basile,