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DIEU (SON EXISTENCE)

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l’athéisme déclaré, comme Faust interrogé par Margue riir, Gœthe, Faust, Berlin, 1873, p. 137, que pour tomber dans un vague panthéisme, Loisy, Quelques lettres, 1908, p. 44 ; que d’autres reprennent la vieille thèse de l’âme du monde, William James, Principles, t. i, p. 370 ; Denzinger, 10e édit., n. 2109, sauf à nous proposer aussi le polythéisme, V ariettes <>{ religious expérience, Londres, 1902, p. 526 ; que d’autres s’en tiennent à la religion de l’Inconnaissable, Spencer, Premiers principes, c. v ; Principes de sociologie, d’où il suit que d’autres enfin ne voient aucune difficulté à proposer aux agnostiques, comme planche de salut, « l’émotion cosmique en face de l’énergie du système sidéral » ou la religion de l’Humanité. Fortnightly Review, février 1885. La religion de l’Humanité, pense M. Harrison, op. cit., faite d’un sentiment de gratitude pour les services passés de l’organisme social et d’un sentiment de bienveillant dévouementpour les services futurs du même organisme, remplit toutes les conditions de la vraie religion. Ces conclusions et d’autres du même genre montrent assez quels écueils n’évitent pas les écrivains qui concèdent que toute notre idée naturelle de Dieu se réduit à celle d’un « idéal » et « à la conscience que nous prenons de notre élan pour aller au delà. » Cf. Desbuts, loc. cit., p. 253 sq. Cette intuition de l’idéal désigne Dieu, mais sub rations communi, non sub ratione propria, pour parler avec les anciens scolastiques, en ce point fidèles rapporteurs de la pensée des Pères

Saint Augustin a écrit : Sicut ergo mentibus nostris impressa est nolio beatitatis, itætiam sapientiæ notionem Itabemus impressam. De libero arbitrio, l. II, c. xiii, P. L., t. xxxii, col. 1254. Boèce a dit de même : Inserta est mentibus hominum, veri bonique cupiditas. De consolations, pliilosophise, I. III, prosa ii, ix-xl, P. L., t. lxiii, col. 724, 768. Ces tendances natives de notre esprit et de notre cœur posent bien le problème de l’au-delà et ne nous permettent pas de l’oublier complètement, de rester froids devant la solution, quand elle nous est proposée ; elles sont à la racine de notre inquiétude religieuse : Fecisli nus ad te, et irrequietum est cor noslrum donec requiescat in te. Et c’est pourquoi on peut les prendre pour base d’une argumentation en faveur de l’existence de Dieu. Cf. Hettinger, Apologie du christianisme, t. I, c. ni, p. 162. Mais par elles-mêmes elles ne résolvent pas la question qu’elles soulèvent. Les raisonnements de saint Augustin lui-même, quand il y a recours, le montrent assez. Cf. Jean de Saint-Thomas, In i ai ", q. II, disp. III, a. 1, n. Il j d’Aguirre, Theologia sancti Anselmi, tr. I, disp. VI, sect. iv, n. 31, Rome, 1688, t. I, p. 142.

Connaissance spontanée et confuse de Dieu.

La connaissance confuse est celle qui distingue son objet de tout autre par des dénominations extrinsèques, sans que l’esprit porte de jugement déterminé sur la nature intime de cet objet. C’est le mininum de connaissance de Dieu que les théologiens requièrent pour que l’homme puisse commencer sa vie morale et religieuse. Omnes, natura duce, co vehimur, deos esse, avait dit Cicéron. De natura deorum, l. I, c. i. Or les anciens donnaient à leur Dieu principal le nom d’Optimus, Maximus. C’est donc que la divinité était conçue par eux, même dans le paganisme, comme une nature supérieure. Cf. Cicéron, ibid., l. II, c. vi. Les platoniciens désignaient volontiers Dieu par l’excellence et la bonté. Saint Augustin, qui connaissait le passage de saint Luc, xviii, 19, remarque que pour tous le nom de Dieu signifie en latin une nature supérieure : Omnes latinae linguae socios, quum aures sonus iste tetigerit, movet ad cogitandum excellenlissimam quamdam immortalemque naturam. De doclrina christ., l. I, c. vi sq., P. L., t. xxxiv, col. 21. Hune plane falebor Deum, quo nihil superius esse constiterit, phrase qui probablement inspira plus tard saint Anselme. De libero arbitrio, l. II, c. VI, P. L., t. xxxii, col. 1248. I.n second lieu, rien n’était [il us fréquent dans la littérature de l’antiquité païenne, grecque et romaine, que la désignation de Dieu sous les noms de principe des choses, d’architecte de l’univers ; les beaux développements de l’argument de l’ordre du monde de Socrate, cf. Xénophon, Memorabilia, l. I, c. iv, 4 ; l. IV, c. iii, 3, de Platon, De legibus, l. X, XII, et de Cicéron, sont connus de tous. Les Pires y reviennent fréquemment, plus souvent qu’à l’argument de contingence, quand il s’agit de prouver aux païens qu’ils ont l’idée du vrai Dieu. Minucius Félix, Octavius, c. XVII sq., P. L., t. m. col. 286 ; S. Théophile Ad Autolgcum, l. I, 5, P. G., t. vi, col. 1031 ; à rapprocher de Maimonide, Guide des égarés, trad. Munk, Paris, 1856, t. i, p. 157 ; S. Athanase, Oratw contra génies, n. 27, 43. P. G., t. xxv, col. 54, 86 ; S. Augustin, De civilate Dei, l. XI, c. IV, 2, P. L., t. xli, col. 319 ; Confessiones, 1. XI. c. iv, t. xxxii, col. 811 ; S. Grégoire de NaLianze, Oral., xxviii, n. 6. P. G., t. xxxvi, col. 32 ; S. Grégoire de Nysse, Oratio catechetica, P. G., t. xlv, col. Il ; S. Jean Damascène, De (ide orlhodo.ca, l. I, c. iii, P. G., t. xciv, col. 796. Le monde tout entier est une école où par les choses visibles Dieu nous montre les choses invisibles. Voir col. 842. S. Basile, In Hexæmeron, hornil. I, n. 6, P. G., t. xxix.col. 15. Bien entendu, la considération de l’âme humaine, faite à l’image de Dieu, n’est pas exclue. S. Athanase, ibid., n. 30, col. 59 sq. ; S. Basile, Homil. Attende, P. G., t. xxxi, col. 196 ; S. Augustin, De doclrina christiana, 1. 1, c. vin sq., P. L., t.xxxiv, col. 22 ; De Trinitate, l. VIII, c. v sq., t. xlii, col. 952 ; l. IX, c. m-vi, ibid., col. 962 ; De Genesi ad lit ter am, l. X, c. xxiv, t. xxxiv, col. 426 ; S. Thomas, Sum. theol., I 1, q. lxxxviii, a. 1, ad l am ; q. lxxxiv, a. 7, ad3 unt ; Contra génies, I. I, c. iii, n. 2 ; c. xxxi. Et cela inclut la présence et l’action de Dieu dans l’âme. Minucius Félix. Octavius, c. xxxii, P. L., t. iii, col. 341 ; S. Thomas, Contra génies, l. I, c. XXVI, à la fin ; De veritate, q. x. a. 9, contra, ad 7 l, m ; a. 11, ad lluu> ; hi Boeth. de Trinitate, q. i, a. 1.

Enfin, bien que l’antiquité classique ait eu des systèmes de philosophie et de morale sans Dieu, la philosophie populaire et la littérature des païens n’avaient pas séparé l’idée de Dieu de celle de la loi morale et religieuse. Les discours de Socrate dans sa prison sont présents à tous les esprits ; on sait aussi que les Érynnies poursuivaient le coupable, que les païens, même dans le bonheur, n’ignoraient point que l’impie n’a point la paix. Job, xv, 21. Les Pères se servirent de ces faits indéniables pour convaincre les païens qu’ils avaient quelque connaissance d’un Dieu unique et provident ou rémunérateur. C’est le sens de Tertullien, lorsqu’il raisonne sur les exclamations, qui, en certaines circonstances, échappaient aux païens, au singulier : Deus videt omnia r et Deo commendo, et Deus in ter nos judicabit. Vnde hoc tibi non christiana :’De testimonio animas, c. il, P. L., 1. 1, col. 612. Cf. S. Hilaire, /v Trinitate, L I. 2-11, P. L., t. x, col. 27. Les Pères entrèrent d’autant plus facilement dans cette voie que leurs expériences personnelles du monde et du cœur païens se trouvaient confirmées par l’Écriture. Celle-ci, en effet, suggère les arguments dont ils se servaient. Yoircol.812.851. Elle ne laisse d’ailleurs aucun doute sur la culpabilité de ceux qui errent sur Dieu, Rom.. I, 20, ita ut sint inexcusabiles ; Sap., xiii. 8 : nec liis débet ignosci. On n’est tombé dans ces erreurs que par un juste châtiment de Dieu qui, connu, n’a pas été honoré et remercié. Principale crime » generis humani, dit Tertullien, summus sxculi reatus, tola causa judicii, idololatria. De idololatria, P. L., t. i, col. 663. Merilo igitur omnis anima rea et testis est, in tantum et rea erroris in quantum testis verilatis. Ibid., col. 618. Cf. S. Athanase,