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toute bonne foi cette divine autorité, exister suffisamment pour le salut, en dehors de la soumission actuelle à cette même autorité. C’est l’enseignement formel de saint Thomas, expliquant comment un homme, en dehors de tout secours de la prédication chrétienne et même de tout commerce humain, nutritif* in silris vel inter bruta animalia, peut arriver à posséder la foi nécessaire au salut. Quæst. disp., De veritatc, q. xiv, a. 11, ad l um. Enseignement habituellement reproduit d’une manière explicite par les théologiens subséquents, et appliqué par eux aux païens ou infidèles négatifs, ignorant invinciblement ! a révélation chrétienne, particulièrement depuis le XVIe siècle où, après la découverte des Indes, l’attention des théologiens fut attirée sur les conditions du salut des infidèles. Dès lors, les théologiens enseignèrent expressément que la proposition de l'Église, bien qu’elle soit la règle de la foi pour tous ceux qui connaissent suffisamment son autorité, n’est pas cependant si absolument nécessaire que la foi ne puisse point exister, en dehors d’elle, pour ceux qui l’ignorent invinciblement. Suarez, De fide, disp. III, sect. x, n. 6 sq. ; Salmanticenses, Cursus Iheologicus, tr. XVII, De fide, disp. I, dub. v, n. 158 sq. ; disp. II, dub. iv, n. 103 ; Lugo, De virtute fidei divinx, disp. XII, sect. iii, n. 50 sq. : Pranzelin, Tractalus de divina traditione et Scriptura, ¥ édit., Rome, 1896, p. 649 sq.

C’est certainement la pensée qui a dirigé le concile du Vatican dans l’adoption du texte actuel de la sess. III, c. m. Denzinger-Bannwart, Enchiridion, n. 1793. Après le passage qui affirme nettement toute l'étendue de l’obligation qui incombe aux catholiques de croire tout ce que l'Église, par ses définitions solennelles ou par son magistère ordinaire et universel, propose comme divinement révélé et comme obligatoirement imposé à notre foi, le concile a adopté, à dessein et après discussion, des expressions très générales pour désigner la foi absolument nécessaire au salut : Quoniam vero sine fide impussibile est dacere Deo, Heb., il, 6, et ad filiorum ejus consortium pervenire, ideo nemini unquam sine illa contingit justificatio. Ces expressions très générales substituées à dessein à la rédaction primitive, hsec est illa fuies sine qua impossibile est placere Deo, visant apparemment la seule foi catholique, montrent manifestement la volonté formelle du concile de ne point affirmer la nécessité absolue de la foi catholique pour le salut. A. Vacant, Etudes théologiques sur les constitutions du concile du Vatican, Documents xv-xviii, Paris, 1895, t. il, p.. Il sq.

Quant à la manière dont la foi strictement nécessaire au salut peut être suffisamment obtenue en dehors de l'Église, soit dans les religions non chrétiennes, soit dans les sectes séparées du catholicisme, elle sera exposée à l’article Foi.

2e objection. — Selon l’enseignement constant el universel de la tradition catholique, il ne peut point y avoir de rémission des péchés, conséquemment point de salut, en dehors de l'Église catholique. Ce principe est tellement assuré qu’il sert même à établir l’argument traditionnel en faveur du dogme catholique. — Réponse. — a) D’après l’exposé de cet argument traditionnel, tel que nous l’avons précédemment indiqué, il s’agit uniquement, dans tous ces textes, de ceux qui sont coupablement en dehors de l'Église catholique. Leur persistance volontaire et opiniâtre dans une telle violation du précepte divin, tant qu’elle dure, les maintient évidemment dans un état de péché grave, inconciliable avec le salut éternel assuré à ceux-là seuls qui possèdent, par la grâce sanctifiante, l’amitié de Dieu. L’anathème, porté par l’enseignement traditionnel, n’atteint donc aucunement ceux qui, ignorant invinciblement la vérité ou les droits de l'Église catholique, ne commet tent en réalité, au moins sous ce rapport, aucune faute de rébellion envers Dieu.

b) Pour ceux dont la nonappartenance à l'Église est ainsi exempte de toute culpabilité, la rémission des péchés peut s’obtenir, ou uniquement par la contrition parfaite possédant toutes les conditions requises, ou par l’attrition jointe au sacrement de baptême ou à celui de pénitence, si ces deux sacrements se donnent validement dans la communion religieuse à laquelle on appartient. Car il n’est pas douteux que ces sacrements puissent exister en dehors de l’Eglise, dès lors qu’ils y sont administrés avec toutes les conditions requises pour leur validité, y compris le pouvoir d’ordre qui peut persister en dehors de l'Église, puisqu’il est inamissible. C’est l’enseignement formel de l'Église, portant anathème, au concile de Trente, contre ceux qui nieraient que le baptême conféré par les hérétiques au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit, avec l’intention de faire ce que fait l'Église, n’est pas un véritable baptême, sess. VII, De baplismo, can. 4 ; et ce que l'Église définit pour le baptême, doit, de la même manière et pour la même raison, être admis pour les autres sacrements. Dès lors rien ne s’oppose à ce que les âmes de bonne foi qui adhèrent à l’hérésie ou au schisme d’une manière simplement matérielle, et qui apportent, d’autre part, les dispositions nécessaires pour recevoir le fruit du sacrement, le reçoivent en réalité. De fait, dans quelle mesure ces sacrements existent-ils avec toutes les conditions de validité dans les sectes hérétiques ou schisma tiques ? il est facile de s’en rendre compte, en ce qui concerne le baptême et la pénitence, d’après l’exposé précédemment fait aux art. Baptême, t. ii, col. 328 sq. ; Absolution, t. i, col. 214 sq., 222 sq., 230 sq., et Coni kssion, t. iii, col. 930 sq. Dans les diverses sectes scbismaliques orientales, ces deux sacrements se rencontrent habituellement avec toutes les conditions d’administration valide, sauf ce qui concerne la juridiction au tribunal de la pénitence, en dehors du danger ou péril de mort. La juridiction, toujours nécessaire pour la validité de ce sacrement, existe certainement dans le cas ou dans le péril de mort, puisque, selon la déclaration du concile de Trente, sess. XIV, c. vii, la pratique de l’ICglise a toujours été qu’il n’y eût jamais aucune réserve à l’article de la mort, et que tous les prêtres peuvent conséquemment absoudre de tous les péchés et de toutes les censures. En dehors de cette circonstance, les prêtres adhérant publiquement aune secte hérétique ou schismatique séparée de l'Église sont, à cause de l’excommunication publique qui en est la conséquence rigoureuse, toujours nécessairement privés de tout pouvoir de juridiction.

Dans les sectes protestantes, selon les principes précédemment exposés, le baptême est le plus souvent douteux, à tel point que l’on doit, selon les décisions du Saint-Office du 20 novembre 1878 et du 21 février 1883, s’informer, dans chaque cas particulier, de la validité du baptême antérieurement conféré, et, dans le cas de doute encore persistant, réitérer le baptême sous condition. Voir t. ii, col. 337-341.

En ce qui 'concerne le sacrement de pénitence, la foi dans sa divine institution et dans le pouvoir sacerdotal d’absoudre est habituellement absente, sauf chez les ritualistes d’Angleterre.

D’ailleurs, chez ceux-ci, tout pouvoir sacerdotal fait défaut, du moins en ce tout qui provient des ordinations anglicanes, celles-ci étant certainement nulles, d’après la pratique constante de l’Eglise romaine, et d’après la décision portée par Léon XIII par ses lettres apostoliques du 13 septembre 1896, publiées après un nouvel examen approfondi de toute la question.

Dans tous ces cas où les sacrements de baptême et de pénitence font défaut ou peuvent faire défaut, la con-