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DIMANCHE


que la parole, l’expression de la pensée ou de l’enseignement d’autrui ? L’acle étant par lui-même une appropriation de la pensée d’autrui, ne peut, malgré son expression matérielle, être renfermé dans le cadre d’une œuvre purement ou principalement servile. Suarez, De religione, tr. II, 1. II, c. xxv, n. 2 sq. L’argumentation de Suarez fut bientôt communément acceptée par les théologiens, avec d’autant plus de facilité que l’on admettait dès lors unanimement que le fait de rechercher un gain ou un salaire ne peut de soi faire considérer une occupation comme servile. Bonacina, loc. Ciï. /Laymann, op. cit., p. 693 ; Sporer, op. cit., p. 276 ; Salmanticenses, op. cit., tr. XXII, c. i, n. 269 sq. ; S. Alphonse de Liguori, op. cit., 1. III, n. 279 ; Ballerini-Palmieri, Opus theologicum morale, 2e édit., Prato, 1892, t. ii, p. 524 ; Lehmkuhl. op. cit., t. i, n. 549 ; Noldin, op. cit., t. i, n. 290. Depuis saint Alphonse aucun tliéologien n’a soutenu l’opinion de Sylvius, loc. cit., de Mastrius, loc. cit., et de Billuart, loc. cit., considérant comme œuvre servile le travail de transcription accompli ex munere aut ex ofjicio. On s’appuie sur ce raisonnement des théologiens de Salamanque : que le scribe ex officio ait en vue le gain matériel et non la connaissance de l’intelligence, cela ne peut changer la nature intime de l’acte qui se juge d’après sa propre fin et non d’après celle qui lui est imposée par l’agent. Op. cit., n. 272.

L’enseignement théologique sur le caractère non servile de l’acte de transcription fut, par analogie, appliqué à l’agencement des caractères d’imprimerie. Laymann, op. cit., p. 694 ; S. Alphonse de Liguori. op. cit., 1. III, n. 282 ; Gury-Ballerini, op. cit., t. i, n. 356 ; Mùller, op. cit., t. ii, p. 226 ; Berardi, op. cit., t. I, n. 674 ; Lehmkuhl, op. cit.. t. i, p. 549 ; Noldin, op. cit., t. iii, n. 270, cependant avec cette restriction, nisi in publica of/icina a multis fiât..Mais le reste du travail d’impression, à cause de la prédominance du travail physique, tombe sous l’interdiction. Suarez, De religione, tr. II, l. II, c. xxv, n. 8 ; Laymann, op. cit. ; S. Alphonse de Liguori, loc. cit. ; Lehmkuhl, loc. cit. ; Noldin, loc. cit.

Ce que les théologiens disent de la transcription et de la composition des caractères d’imprimerie doit proportionellement s’appliquer aux machines à écrire, au travail de correction des épreuves, au tracé de dessins ou de plans, à la transcription de la musique, au règlement ou à la transcription de comptes.

b) La classification des occupations artistiques ou libérales et mécaniques ou serviles subit aussi quelques modifications, a. Tandis que la peinture même réputée artistique continuait à être rangée parmi les occupations illicites par Cajetan, loc. cit. : Suarez, De religione, tr. II, l. II, c. xxvi ; Bonacina, loc. cit., les théologiens de Salamanque, loc. cit., n. 238 sq., soit à cause du doute persévérant sur son caractère non servile, soit à cause de sa profonde différence avec l'écriture, elle était assimilée par d’autres théologiens autorisés à une transcription artistique probablement permise, modo id /iat sine magno apparatn scilicet colores miscendo, tabulas edolando. Laymann, loc. cit. ; S. Alphonse de Liguori, Theologia moralis, l. III, n. 280 ; Homo apostolicus, tr. VI, n. 10 ; Sporer, op. cit., t. I, p. 276 ; Scavini, Theologia moralis universa, 4e édit., Novare, 1850, t. ii, p. 98 ; Gury-Ballerini, t. i, n. 357 ; Millier, Tlieologia moralis, 7e édit., Vienne, 1894, t. il, p. 227 ; Marc, Institutiones morales alphonsianse, t. I, n. 661 ; Lehmkuhl, t. I. n. 549 ; Aertnys, op. cit., t. i, p. 208 ; Génicot. t. i. n. 331 : Berardi, t. i, n. 674 ; Noldin, t. ii, n. 270.

h. La sculpture continua à être communément considérée comme un art mécanique, tombant sous l’interdiction des œuvres serviles. S. Alphonse, loc. cit., n. 281. Puis à cause de l’analogie avec la peinture

artistique que l’on considérait désormais comme probablement permise, on autorisa de même le perfectionnement artistique d’une œuvre de sculpture. Sporer, op. cit., t. i, p. 276 ; Gury-Ballerini, t. i, n. 357 ; Ballerini-Palmieri, op. cit., t. il, p. 525 sq. ; d’Annibale, op. cit., t. iii, n. 121 ; Marc, op. cit. ; Lehmkuhl, t. i. n. 549 ; Génicot, t. i, n. 334 ; Aertnys, Theologia moralis, 5e édit., Paderborn, 1898, t. i, n. 118 ; Noldin, t. ii, n. 270.

c. Les ouvrages de broderie artistique bénéficièrent de la permission octroyée à la peinture soit à cause du travail artistique qui y prédomine, soit plutôt à cause d’une coutume autorisée dans l’Eglise au témoignage des théologiens. Sporer, loc. cit. ; S. Alphonse, loc. cit., n. 281 ; Mùller, loc. cit. ; Gury-Ballerini, t. I, n. 358 ; Lehmkuhl, loc. cit. ; Marc, loc. cit. ; Génicot, loc. cit. ; Berardi, loc. cit. ; Noldin, loc. cit. Noldin ajoute cependant que cela ne peut être permis quand c’est le travail quotidien.

d. Les arts mécaniques, où le travail matériel de l’homme est considérablement diminué par l’emploi de nombreuses machines savamment combinées et n’exigeant guère que l’impulsion et l’intelligente surveillance de l’homme, continuèrent à être rangés parmi les œuvres serviles, par la coutume des fidèles et l’interprétation des théologiens, à cause de la nature première du travail auquel la machine doit aider. D’ailleurs, les occupations matérielles qui exigent peu de travail et de fatigue ne perdent point pour cela leur nature servile, bien qu’un temps un peu plus considérable puisse y être requis pour constituer une matière grave. Gury-Ballerini, t. i, n. 356 ; Marc, op. cit., t. i, n. 659 ; Aertnys, op. cit., t. i, p. 208 ; Lehmkuhl, t. i, n. 548 ; Noldin, t. ii, n. 268.

c. La c/iasse et la pêche. — A la fin du xve siècle, Angelo de Clavasio jugeait que la chasse et la pèche étaient défendues aux jours de dimanche comme elles le sont en carême et aux jours de jeune ; toutefois il estimait que s’y adonner n'était point une faute grave, à moins qu’on ne le fit principalement en vue du gain ou que l’on omit l’assistance à la messe. Sylvestre de Prierio, au commencement du xvie siècle, enseigne expressément qu’elles sont permises, si elles se font ad honestam recreationem et non ad lucrum et si l’on n’omet point l’assistance à la messe. Summa syl> vestrina, art. Dominica, Lyon, 1594, 1. 1, p. 270. Cajetan estime que chasser par manière de récréation est permis, mais qu’y consacrer une grande partie du dimanche ou de la fête, c’est se détourner de la fin du précepte qui est la contemplation des choses divines, bien qu’il n’y ait point en cela faute grave. In II am 11', q. cxxii, a. 4. Dominique Soto admet aussi que animi gratia venatum ire non est opus servile. De juslitia et jure, 1. II, q. iv, a. 4, Venise, 1589, p. 146. Selon Azpicuelta, il n’y a point faute à chasser le dimanche, même en vue d’un gain, pourvu que l’on assiste à la messe. Manuale confessariorum, c. xiii, n. 12, Opéra, Borne, 1590, t. i, p. 128. Cf. Azor, loc. cit., p. 115. Suivant Suarez, De religione, tr. II, 1. II, c. XX Vin ; Laymann, loc. cit. ; Sporer, op. cit., t. i, p. 276, et les théologiens de Salamanque, Cursus tlieologiie moralis tr. XXIII, c. i, n. 243 sq., la chasse et la pêche, en elles-mêmes œuvres serviles, sont autorisées par la coutume qui a prévalu sur ce point à la connaissance et avec la tolérance des pasteurs de l'Église, bien que cette coutume ait peut-être pris naissance dans cette opinion commune que la chasse nobili modo exercita n’est point une œuvre servile et qu’elle ne cause aucun scandale.

Saint Alphonse de Liguori considère comme plus probable et plus commune l’opinion d’Azpicuelta et d’Azor, pourvu toutefois que la chasse et la pêche se fassent sine magno labore, sinon le pape Alexandre III