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DOGMATIQUE


et avant l’incarnation, dans une partie spéciale traitant

de l’ensemble des moyens qui doivent diriger l’homme vers la fin dernière, I » II 1’, partie qui est ensuite complétée dans la II a II K par l’étude détaillée de chacune des vertus et par celle des obligations spéciales à certains états de vie. D’ailleurs, saint Thomas l’emporte sur ses prédécesseurs par des divisions plus méthodiques, mieux accusées et plus fidèlement suivies.

On sait qu’en fait dans toute la période du moyen âge la synthèse de Pierre Lombard fut habituellement suivie dans ses divisions principales par presque tous les ouvrages de théologie ordinairement publiés sous la forme de commentaires des Sentences du Maître de la scolastique.

4° Au xvie siècle et dans la première moitié du xviie, la plupart des théologiens restés fidèles à la méthode scolastique, prennent pour texte de leurs commentaires la Somme théologique de saint Thomas au lieu des Sentences de Pierre Lombard et suivent par le fait même la synthèse du docteur angélique, soit qu’ils se bornent comme Cajetan à un commentaire du Maître, soit qu’ils aient eux-mèrnes, comme Vasquez et Suarez, leurs divisions particulières ou leurs traités, harmonisés au moins substantiellement arec l’ordre général de la Somme.

Depuis le milieu du xviie siècle jusqu’à la seconde moitié du xixe, la synthèse de saint Thomas est remplacée, chez beaucoup d’auteurs, par un grand nombre de traités distincts, dont on se préoccupe assez peu de marquer l’ordonnance méthodique ou la connexion intime avec la synthèse générale de la dogmatique.

D’où diminution sensible de la science dogmatique pour laquelle de larges vues synthétiques sont si nécessaires. De là aussi beaucoup de questions omises ou insuffisamment traitées par suite du morcellement trop considérable des matières ou du manque de plan d’ensemble. Inconvénients encore aggravés par la séparation de la théologie morale définitivement constituée en science particulière et de laquelle d’ailleurs les questions spéculatives tendent de plus en plus à disparaître pour faire presque exclusivement place à une casuistique toute pratique. Th. Bouquillon, Catholic University Bulletin, Washington, 1899, p. 258 sq. Ajoutons encore qu’au XVIIIe et au XIXe siècle l’apologétique fondamentale, dont l’importance devenait si considérable, fut souvent et bien à tort adjointe à la dogmatique, sous le nom de dogmatique fondamentale ou d’introduction à la dogmatique, comme l’attestent les manuels classiques de l’époque. Ce qui ne pouvait que nuire gravement aux méthodes diverses que doivent suivre l’une et l’autre science.

5° Depuis la restauration de la scolastique dans la dernière période du xixe siècle, de louables efforts ont été faits pour adapter les grandes divisions dogmatiques de la Somme théologique de saint Thomas aux conditions actuelles de la science théologique. Il nous suffira de résumer ici dans un cadre général les indications fournies par les principaux auteurs. — I. Etude préliminaire sur la nature de la théologie dogmatique et sur ses principes fondamentaux, où l’on indique particulièrement dans quelle mesure l’Ecriture sainte et la tradition doivent être considérées comme sources des dogmes. 2. Dieu considéré en lui-même dans sa nature et dans ses attributs. 3. Dieu étudié dans la trinité des personnes. 4. Dieu opérant dans les créatures ; de la création en général ; et de l’action divine dans la conservation et le gouvernement des êtres créés ; des créatures en particulier, principalement des anges et de l’homme, avec les dons de la nature et de la grâce conférés par Dieu en vue de leur fin surnaturelle ; la chute des anges et ses conséquences ; la chute de l’homme et ses conséquences. 5. De la fin surnaturelle à laquelle l’homme est destiné, de la grâce

et des vertus surnaturelles nécessaires à l’homme pour se diriger vers sa fin surnaturelle. 6. De la restauration de l’homme par l’incarnation et la rédemption.

7. De l’Église dépositaire immédiat de tous les moyens de salut donnés par Jésus-Christ à l’humanité rachetée ; d’où autorité de l’Église et devoirs envers elle.

8. Des sacrements établis par Jésus-Christ et confiés à son Église pour la sanctification et le salut éternel des fidèles ; étude de ces sacrements considérés d’une manière générale et étude de chacun d’eux en particulier. S). De la sanction divine établie par Dieu dans l’autre vie pour le bon ou le mauvais emploi de sa grâce en cette vie et pour l’observance ou le mépris de ses commandements pendant la durée de l’épreuve, c’est-à-dire du ciel, de l’enfer et du purgatoire. 10. De la communion spirituelle entre les fidèles de la triple Eglise militante, soutirante et triomphante.

Quelques mots d’explication aideront à mieux comprendre la raison d’être de plusieurs divisions de ce cadre général, ou la place particulière assignée à quelques-unes, ainsi que l’omission de traités autrefois rattachés sans raison à la dogmatique : a) L’apologétique tout entière est omise, parce qu’elle est une science distincte de la dogmatique, ayant un objet propre et une méthode spéciale. Voir Apologétique.

b) L’étude des questions dogmatiques sur l’Écriture et sur la tradition doit être placée à l’entrée de la dogmatique pour fournir une direction sûre dans l’emploi théologique des preuves scripturaires. Cette forte direction est particulièrement nécessaire à l’époque actuelle, en face du développement considérable des études scripturaires et parfois d’un manque de formation théologique en ces matières si délicates. —

c) L’étude rationnelle de l’existence de Dieu et des attributs divins relève principalement de la philosophie. Ces données de philosophie rationnelle sont mentionnées en dogmatique seulement à titre secondaire, pour faciliter la réponse aux objections contre les vérités de la foi ou pour montrer la convenance de l’enseignement révélé avec les conclusions rationnelles. Si l’on donne assez souvent à ces preuves un développement considérable en dogmatique à cause de leur importance apologétique en face des erreurs actuelles, leur nature intime n’est cependant point changée : elles restent des vérités en elles-mêmes rationnelles, ne relevant point par conséquent des principes surnaturels sur lesquels s’appuie la dogmatique. — cl) La doctrine révélée sur la création en général et sur la création de l’homme en particulier, malgré les nombreuses questions scripturaires ou critiques qu’elle suscite, appartient dans son ensemble à la dogmatique, et doit y être traitée, avec l’appoint fourni par l’exégèse et par les sciences critiques ou par les sciences naturelles. — e) Le traité’de la grâce peut être placé, comme il est dans la Somme théologique de saint Thomas, avant l’étude de l’incarnation, parce que toute grâce, même concédée à l’humanité, ne dépend pas nécessairement de l’incarnation ; telle fut particulièrement, selon saint Thomas, la grâce conférée à nos premiers parents. D’ailleurs, l’étude de notre fin surnaturelle avec toute la merveilleuse économie de notre principe de vie, de nos facultés et de nos actions méritoires dans l’ordre surnaturel, prépare effectivement le traité- de l’incarnation et de la rédemption, la notion de cette grâce sublime par laquelle nous participons réellement à la vie divine et que nous avions perdue par le péché nous faisant mieux comprendre la raison d’être, le mode d’accomplissement et les fruits de ces ineffables mystères. — P) Le traité dogmatique de l’Église, distinct du traité apologétique où la raison prouve simplement la divinité de l’Église catholique, a sa place marquée après l’étude de l’incarnation et de la rédemption, puisqu’en vertu de l’institution divine, l’Église continue sur la terre-