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DOGMATIQUE


tluclion ou d’action : ce qui constitue toute la structure théologique du traité de la grâce. Ce fut encore dans le même but que l’on appliqua à l’élude de l’incarnation et de l’eucharistie les diverses questions dialectiques an sit, qualis sit, air et unde sit, dont la solution fournit une connaissance plus approfondie de ces mêmes vérités. — y. De ces notions et de ces principes communs l’on put ensuite déduire de nombreuses el solides conclusions que l’on eut soin de coordonner dans une forte synthèse, résumant et classifiant toutes les connaissances résultant de ce procédé comparatif. C’est ainsi que par l’apport des générations successives de théologiens, particulièrement dans la période scolastique, furent définitivement constitués nos traités actuels de théologie dogmatique, du moins dans leur partie spéculative.

il) Connaissance scientifique provenant desdéductions théologiques obtenues en comparant les dogmes chrétiens avec la fin surnaturelle de l’homme : a. Cette comparaison est indiquée par l’ordre providentiel comme devant servir à la connaissance des dogmes révélés. Car c’est une vérité certaine que Dieu, en nous communiquant son enseignement pour que nous y adhérions par la foi, veut avant tout nous fournir la lumière nécessaire pourque nous nous guidions nous-mêmes vers le salut éternel. Marc, xvi, 15 sq. ; Joa., m, 16 sq. ; vi, 135, 40 ; xi, 25. C’est en ce sens que saint Thomas assigne à la révélation et à la foi le rôle capital de nous faire connaître la fin surnaturelle à atteindre et les moyens qui doivent nous en assurer la possession. Sum. théol., IIa-IIæ, q. ii, a. 13, 5 ; Conl. genl., l. I, c. v. Puisque dans le plan providentiel il doit toujours y avoir harmonie entre les moyens et la fin, une attentive comparaison entre l’enseignement divin et le salut éternel vers lequel il est dirigé, projettera certainement quelque lumière sur cet enseignement lui-même. — b. En fait, cette comparaison projette une plus vive lumière sur chacune des vérités révélées, en même temps que sur l’admirable cohésion de tout l’ensemble de la révélation. Ainsi en regard de cette fin surnaturelle de la vision béatifique qui est une participation à l’intime connaissance que Dieu a de lui-même, l’on comprend mieux la nature de la grâce sanctifiante qui doit rendre l’homme capable de mériter cette vision intuitive, en lui donnant dès cette vie une participation initiale à la nature divine. Dès lors aussi se manifeste avec plus d’éclat toute l’économie de la révélation chrétienne comprenant ces trois grandes divisions : vérités à croire sur Dieu un et Irine et sur la création, particulièrement sur l’homme ; lois morales naturelles et surnaturelles auxquelles nos actes doivent être soumis pour obtenir la possession de la lin assignée par Dieu ; et les moyens providentiels internes et externes conduisant à cette fin, particulièrement la grâce, l’incarnation, l’Eglise et les sacrements. Plan qui en réalité synthétise merveilleusement toute la théologie comme nous le verrons bientôt. — c. En regard de cette fin surnaturelle se manifeste, avec non moins d’évidence, une loi providentielle qui a présidé’à toute la révélation chrétienne. En vertu de cette loi, les vérités surnaturelles nous ont été principalement communiquées, non dans la mesure nécessaire pour satisfaire toule la légitime curiosité de notre intelligence ou pour construire une synthèse scientifique entièrement complète, mais plutôt dans la mesure où la connaissance

de ces vérités est particulière nt utile pour diriger

l’ensemble de l’humanité vers le bonheur éternel. Ce qui doit cependant s’entendre non du minimum de connaissance normalement exigé de chaque individu pour l’accomplissement des obligations imposées à notre foi, mais encore de ce qui est nécessaire pour que toute la société des fidèles puisse être efficacement dirigée dans la pratique de leur foi et suffisamment protégée

contre les attaques de l’erreur et de l’infidélité. Car le devoir de satisfaire cette double nécessité pour toute la société chrétienne entre dans le plan providentiel, comme l’indique saint Thomas. Sum. theol., II a II 38, q. ii, a. (5.’>. A la connaissance positive et scientifique des vérités révélées la dogmatique joint encore, au moins à titre auxiliaire, une apologie particulière de chacune des vérités révélées. — a) Bien distincte de l’apologétique générale ou apologétique proprement dite, qui s’occupe d’une manière générale de la crédibilité du dogme catholique qu’elle veut prouver d’une manière vraiment scientifique, cette apologie particulière a pour objet un mystère ou un dogme particulier que l’on veut justifier contre des attaques réelles, en employant des arguments qui ne sont pas toujours nécessairement scientifiques. Ce travail d’apologétique se ramène à ces deux points : montrer en détail la non-valeur démonstrative des diverses objections alléguées par les incroyants contre chacune des vérités révélées et en rnêmetempsfaire ressortir les harmonies intellectuelles, morales et sociales, de chaque vérité avec les divers besoins individuels et sociaux de l’humanité. Cette double apologie particulière déjà employée par les théologiens scolastiques, particulièrement par saint Thomas, Sum. theol., I », q. i, a. 8 ; q. xxxii, a. 1 ; xi.vi, a. 2 ; IIa-IIæ, q. ii, a. 3-5 ; III a, q. i, a. 1, 2 ; Cont.gent., l. I, c. vit, ix ; l. IV, c. 1 sq., recul depuis le xvie siècle des développements considérables occasionnés surtout par les erreurs protestantes et par les attaques des rationalistes. — b) Cette apologie particulière qui est un complément de toute science théologique, S. Thomas, Sum. Ûieol., I a, q. i, a. 8, doit se rencontrer aussi en dogmatique dans la mesure exigée par les besoins de la défense catholique..Mais l’on doit soigneusement y observer les recommandations tracées par saint Thomas. Loc. cit. — a. Les arguments rationnels servant à l’apologie d’un dogme ne doivent jamais être considérés comme des arguments démonstratifs. Ils ne font que montrer la non-valeur démonstrative des objections, S. Thomas, Sum. theol., I », q. i, a. 8 ; Cont. gent., l. I, c. vii, ou insinuer la convenance des dogmes déjà possédés par la foi. Cont. genl., I. I, c. ix. — b. On doit être particulièrement prudent dans l’exposition ou présentation d’un dogme à ceux qui ne partagent point notre foi. On doit rigoureusement s’y interdire de donner comme démonstratives des preuves qui ne 1° sont point, de peur que les incroyants ne soient autorisés à conclure que notre foi repose sur de telles preuves : cum enirn aliquis ad p> obandam (idem inducit rationes quæ non sunt cogentes, cedit in irrisionem injidelium. Credunt enim quod hujusmodi rationibus innilamur et propice eas credamns. Qum igitur /idei siuit, non sunt tentanda probare nisi per auctorilates /lis gui auctoritates suscipiunt. Apud aliosvero sufficit defendere non esse impossibile quod prsedicat /ides. S. Thomas, Sum. theol., I », q. XXXII, a. I. Doctrine également affirmée, b 1, q. i.xvin, a. 1, et (Jusest. disp., De potentia, q. iv, a. 4.

4° Des considérations qui précédent nous pouvons déduire trois importantes conclusions relativement aux principes immédiats sur lesquels repose la dogmatique : a) Les vérités divinement révélées et suffisamment connues comme telles par la proposition de l’Église ou par la tradition catholique unanime et constante, sont en réalité les seuls principes immédiats sur lesquels s’appuie la dogmatique. Car en cette science, comme en toute science théologique, c’est uniquement sur le témoignage divin que repose toute véritable démonstration. S. Thomas, Sum. theol., I q. i, a. 8. — b) Les arguments de simple raison, tant négatifs que positifs, ne peuvent jamais être considérés en dogmatique comme principes ellectifs d’une véritable