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CLEMENT D’ALEXANDRIE

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ment il considère, dans la nnture humaine et dans l’âme, des parties de diverses sortes : fonctions de l’organisme, facultés sensibles et intellectuelles, les cinq sens, la l’acuité du langage, etc. Quant à la nature de ces parties et quant à leur nombre, sa terminologie, incohérente et variable, donne lieu à de grands dissentiments parmi les commentateurs : dix parties dans l’homme, d’après Strom., II, c. xi, P. G., t. viii, col. 985 ; VI, c. xxi, P. G., t. îx, col. 368 ; trois parties dans l’âme, le Xoyco-Tixov, le 00jj.17.ov, ]’èir19u(j.rjTtxov, d’après Pœd., 1. III, c. I, P. G., t. viii, col. 556 ; Strom., V, c. xii, P. G., t. ix, col. 120 ; deux parties, ro Xoytxbv, tô aXoyov, d’après de fréquents passages. Mais la question se pose de savoir si Clément a entendu mettre une effective et réelle distinction entre l’âme raisonnable et l’âme non raisonnable, ou bien, s’il a considéré les deux âmes comme des fonctions, des virtualités que nous révèle le caractère distinct de leurs opérations. Assurément, de nombreuses expressions ont un caractère plus ou moins franchement trichotomiste. Cf. Strom., VII, c. xii, P. G., t. ix, col. 509 ; c. xi, col. 485, 488 ; VI, c. vi, col. 273 ; c. xvi, col. 360. Pourtant, d’après Ziegert et Capitaine, Clément n’aurait pas enseignéune réelle distinction de l’âme et de l’esprit ; il aurait seulement considéré un principe qui est, d’une part, la racine de toutes les facultés spirituelles et, d’autre part, comp’nètre et vivifie toute la partie sensitive de l’homme. Cf. Capitaine, op. cit., p. 133-145, qui s’appuie particulièrement sur Strom., VI, c. xvi, P. G., t. ix, col. 360.

2° La destinée de l’homme est de réaliser en lui la similitude divine. — Tel est véritablement son souverain bien. Voir sommaire du Strom., II, col. 148. Clément s’efforce de rapprocher les donnée de la révélation et les formules platoniciennes et stoïciennes. Le philosophe Platon définit la béatitude parfaite en disant qu’elle est la conformité divine, réalisée dans la mesure du possible. S’est-il inconsciemment rencontré avec le livre de la Loi ? (Les natures d’élite ont je ne sais quel instinct du vrai.) Est-ce quelque tradition reçue ?… La Loi nous dit : « Marchez à la suite du Seigneur votre Dieu, et gardez ses commandements, > : Platon disait : Assimilation. La Loi dit : Poursuite. Mais cette poursuite, c’est une assimilation dans la mesure du possible. Le Seigneur a dit : « Soyez miséricordieux, comme votre Père céleste est miséricordieux. » Dans le même ordre d’idées, les stoïciens ont mis la perfection dans la vie conforme à la nature : image qu’ils substituent opportunément à l’appellation de Dieu, ÈvTaûŒv xai oi Srtoixo’i tô o/.o>.o’j6(j) ; t>, sf jTîi Çr ( v téXo ; ecvai è80y[iittcrav, xbv Osbv Et ; çjatv lASTovoixâsavTj ; evitpeitûç. Strom., II, c.XIX, P. G., t. vin. col. 1046. Même idée, Strom., V, c. xiv, P. G., t. ix, col. 139, 141 ; cette assimilation divine, affirmée par Platon, porte chez Moïse un autre nom ; c’est une poursuite divine, àxoXouSia. Et je pense que tout homme vertueux est le poursuivant, àxoXovOrf ;, el le thérapeute de Dieu. En conséquence, les stoïciens ont fait consister la perfection philosophique dans la vie conforme à la nature, tandis ((lie Plalon la met dans l’assimilation divine. La synthèse de ers divers points de vue est meilleure et particulièrement nette dans Strom., IV, c. xxii : il nous est propose de parvenir à la fin sans limite, en obéissant aux commandements, c’est-à-dire à Pieu, en y conformant notre vie sagement et sans reproche par la connaissance du vouloir divin. D’ailleurs l’assimilation au ).6yot’to’i’ji, dans la mesure du possible, voilà notre fin ; et c’est aussi le rétablissement dans la parfaite adoption par le Fils, l’éternelle glorification du Père par le soum grand-prêtre, relui qui daigne nous appeler ses (rèr< - i i ses cohéritiers, f, tiïv 61 a-i.ro ? ; eLrtXoc àteXev-’. r-.’ri àçiy.êVjai rcpôxecTai, neiOouêvot ; raî ; EvroXaï ;, to-j--. {t. : t>'.) 6e<î), xai /a : ’aO- : * ; (Jtàxracrcv àvsiriXT)irrtoç xai (7noTy]fi<Svù>ç, ’, : >. t/ : toG’) ;  ; ov 8e) f : ’).u-’i : yveiæcoî" r t te "fi ; ’.'h ôpObv /, ’i/ ci ; otôv tê è ; o, ao : u)<rc ; ti/o ; ÈaTi, xal

sic tt)v TeXetav uîoOsirt’av 8tà toû Yioû àitoxocTao-rao-i ;, ôoEâÇouo-a dut tov Ilaxépa Scà toû p.EyâXou àpyiepe’ox toû àScXcpoù ; xai auyx).7"pop.ôvouç xaTaijtojo’avTo ; ’ôp-âç EÎ’rtîïv. P. G., t. viii, col. 1081, 1084. A maintes reprises revient cette doctrine de l’assimilation ; elle constitue un molit de morale théologique, voir sommaire du Strom., III, col. 149 ; elle est, avec l’àiiàŒia, le couronnement de la perfection gnostique et le fruit de la contemplation désintéressée, sommaire du Strom., IV, col. 150, du Strom., VI, col. 152, et du Strom., VII, col. 153.

3° Les moyens, naturel et surnaturel, d’action.’— 1. Liberté.

a) Notion et appellation de la liberté ; elle est un pouvoir personnel. — Pour la gnose hérétique, particulièrement pour Basilide, le salut était l’œuvre d’un déterminisme naturel, un produit de l’activité spontanée. Strom., III, c. i, P. G., t. viii, col. HOi ; V, c. i, P. G., t. ix, col. 12. Voir Basilide. A ce déterminisme et à cette spontanéité de la nature, Clément oppose la notion du libre arbitre. C’est l’enseignement du Seigneur dans l’Écriture que l’homme a reçu la maitrise du vouloir et du non-vouloir, a"pso-iv xai çuyriv a-JToxpaTop ! xv|v Strom., II, c. iv, P. G., t. viii, col. 944. Il l’appelle : poûcia êXedSspa xai x-jpia, Strom., III, c. v, col. 1144, TrpoaipïTc/.r, Sûvaixtç, Strom., VI, c. XVI, P. G., t. IX, col. 360, aùQa’psTov vrjç àv6pa> ; uvï) ; ty’jyr, ;, Strom., VII, c. ni, col. 420, simplement irpoat’pEO-iç. H y a des déterminations dont nous sommes maîtres, qui sont véritablement en nous, àcp’^p-tv. Toute cette terminologie, remarque Winter, op. cit., p. 70, indique bien le principe efficace de notre vie morale et non un postulat aprioristique, sans aucune relation avec l’activité de cette vie.

Clément fait encore comprendre le libre arbitre en lui attribuant le développement de notre personnalité ; c’est par son exercice que l’individu, tic avOpojitoç, acquiert son mérite et son caractère personnels, Strom., IV, c. xxiii, col. 1360 ; bonté et vertu morale ne sont point choses de nature, mais de vouloir. Strom., I, c. vi, col. 728, 729 ; cf. Strom., II, c. iv, col. 914 ; c. xv, col. 1000.

b) Preuves de son existence. — Outre la preuve par l’Écriture déjà mentionnée, preuves rationnelles : par le fait des sanctions temporelles et sociales, récompenses et punitions, louanges et blâmes, Strom., I, c. xvii, P. G., t. viii, col. 797, 800 ; sans la liberté la foi n’aurait aucun mérite, Strom., II, c. iii, col. 941 ; le martyre non plus. Strom., IV, c. xii, col. 1292.

2. La grâce.

a) Sa nécessité. — S’il insiste souvent sur le réel pouvoir du libre arbitre, Clément reconnaît l’impuissance de l’homme, dans l’ordre du salut, sans le secours de la grâce ; voir Pa’d., I. I, e. ii, P. G., t. viii, col. 253, 256, le Christ comparé â un médecin, guérissant l’infirmité de l’homme, la guérison du paralytique, la résurrection de Lazare ; avec cette remarque que nous recevons la grâce avant de recevoir le commandement ; et ce qui est dit de la grâce du baptême. Pœd., 1. 1, c. VI, P. G., t. VIII, col. 285. A l’œuvre du salut concourent la grâce et notre vouloir, voir Prot., c. xi, P. G., t. viii. col. 236 : la grâce qui nous sauve concourt à notre vouloir ; le libre arbitre et le principe vivifiant sont comme deux forces conjuguées, ôpoîiuyoûvTtov, to ; è’tto ; eîiteïv, TtpooipétTEO) ; xai

<i » iç. Voir encore Strom., II, c. vi, P. G., t. viii,

col. 962 sq., les comparaisons du jeu de balle, de l’aimant, de l’ambre qui attire les corps légers, la distinction de cause principale et de cause coopérante, aÏTta, o-uvaftia ; et Strom., V, c. i, P. ( » ’., t. ix, col. 15, 16, nécessité tout à la fois de la grâce d’après F.ph., il. 5, et des bonnes œuvres ; nécessité d’un esprit ferme et sain, ce qui requiert la grâce, l’attraction du Père, -r, : ro0 IlaTsb ; ispb « aJTÔ/ o/r, ;, allusion à.loa., VI. Si. Cf. Strom., V, c. Mil, col. 124 ; c. xii, col. 120 ; Vil, c. il, col. 413 ; IV, c. XXII, P. G., t. viii, col. 1518.