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CLEMENT XIII

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lion se réalisa quelques jours après. Dans la nuit du 2 au 3 février, le pape, qui avait assisté le matin à la longue cérémonie de la Chandeleur, se sentit défaillir ; sur les onze heures du soir, il appela au secours et mourut presque aussitôt. Ravignan, Clément XIII, t. I, p. 234.

III. Divers actes.

En France.

Les douleurs

causées à Clément par la suppression de la Compagnie de Jésus ne furent qu’une partie de ses épreuves. Dans tous les pays chrétiens il eut à constater la révolte contre l’Église romaine. En France, les jansénistes, soutenus par la plupart des parlements, continuaient leur opposition à la bulle Unigenitus ; en novembre 1763, Clément XIII écrivait à des évêques français qu’une des causes de la décadence de la foi et des mœurs dans le royaume lui semblait être la persistance des jansénistes dans leur révolte « poussée à ce point qu’on voit, au mépris du pouvoir de l’Eglise, sur l’ordre de magistrats laïques, la sainte eucharistie sacrilégement administrée à des adversaires notoires de la constitution Unigenitus » , Bullarium, p. 828, 835 sq. ; pour obvier à ces malheurs, il avait expressément recommandé à l’assemblée du clergé, réunie en 1760, de garder les règles établies par Benoît XIV, pour l’administration des sacrements aux mourants. Ibid., p. 227.

A partir de 1765, de graves négociations avaient commencé entre le gouvernement de Louis XV et les évêques français pour la réforme des religieux du royaume. L’assemblée du clergé de 1765 avait justement décrété de recourir pour cette cause au souverain pontife, de lui envoyer un rapport s^r l’état des ordres religieux en France, et de lui demander de désigner des commissaires. Pral, Essai, appendice, p. vu. Sans tenir compte de ce vote, un arrêt du conseil nomma, le 31 juillet 1766, une commission de réforme, composée d’évêques et de conseillers d’État ; le pape n’avait même pas été prévenu. Prat, Essai, p. 162 sq. Clément XIII protesta vigoureusement dans une lettre adressée le 24 décembre à l’archevêque de Reims, président de la commission. « Nous n’avons, disait-il, aucun rôle dans une œuvre où nous aurions dû avoir le premier… Nous craignons cet esprit qui s’est insinué depuis peu dans les âmes des laïques, et leur fait regarder comme conquis par le pouvoir civil tout ce qui est enlevé à l’autorité du siège apostolique, au pouvoir et à la juridiction de l’Église. » Bullarium, p. 1121. Malgré cette réclamation, la commission continua ses travaux sans contrôle de Rome, et après un rapport de Loménie de Hrienne, alors archevêque de Toulouse, donna le 25 mars 1768 un édit en douze articles qui reculait l’âge des vœux, limitait le nombre des couvents dans les villes, éteignait les monastères où les sujets étaient trop peu nombreux. Prat, Essai, appendice, p. XIV, 190. Cette affaire se continua sous Clément XIV. Cf. Picot, Mémoires, t. iv, p. 218 ; Prat, Essai, p. 192 sq.

En Allemagne.

Le pape avait concédé à Marie-Thérèse,

comme reine de Hongrie, le titre de Majesté apostolique, Bullarium, p. 22, et la permission que son nom et ceux de ses successeurs fussent prononcés au canon de la messe après ceux du pape et de l’évêque, ibid., p. 495 ; il avait recommandé aux électeurs de l’empire en 1766 le choix de Joseph II, et s’était hâté de continuer l’élection. Ibid., p. 1078. Ces faveurs n’empêchèrent pas l’impératrice et son fils de lui donner de nombreux sujets de plaintes. Ils soutiennent mollement le landgrave de Hesse-Cassel menacé de perdre ses Etats à cause de sa conversion au catholicisme, ibid., p. 317, et se prêtent trop facilement aux sécularisations des principautés ecclésiastiques, avidement convoitées par les princes protestants. Ibid., p. 60, 62, 107, 504, 712. Malgré les supplications du pape, ils n’interviennent pas efficacement auprès des cours bourboniennes en faveur des jésuites persécutés. Theiner, Histoire, t. i, p. 135. Ils laissent le comte de Finnian, gouverneur du

Milanais, retirer la censure des livres à l’archevêque et à l’inquisiteur général, Bullarium, p. 1 129, et interdire li publication accoutumée de la bulle In cœna Domini. Ravignan, Clément XI11, t. i, p. 226 sq.

En Allemagne encore, le pape dut lutter contre l’usage de cumuler plusieurs évêchés, Bullarium, p. 466, et contre l’attribution aux tribunaux laïques des jugements des clercs. Ibid., p. 723, 1054.

En Pologne.

Clément fit tous ses efforts pour

préserver la Pologne des tristes divisions qui devaient aboutir au premier partage de ce noble pays. En 1764, l’impératrice de Russie, Catherine II, avait fait arriver au trône son favori Stanislas-Auguste Poniatowski. Les protestants et les schismatiques de Pologne sollicitèrent du nouveau roi leur admission à toutes les charges de l’État. Le roi était pour eux ; mais les diètes polonaises leur (’(aient défavorables ; pour triompher de cette opposition ils formèrent des confédérations dissidentes à Thorn et à Sluck ; la tsarine et son ambassadeur le prince Repnine les soutenaient ouvertement. Le pape multiplia ses lettres au roi, aux évêques, aux diètes de Pologne, pour les encouragera réprimer vigoureusement cette révolte ; il écrivit également à Marie-Thérèse, aux rois de France et d’Espagne pour obtenir leur appui aux catholiques polonais (1766 et 1767). Bullarium, p. 1107, 1147, 1 154 sq., 1289, 1292, 1359. A la diète de 1767, le prince Repnine, ambassadeur de Catherine II, fit arrêter les évêques de Cracovie et de Kiew, qui encourageaient les catholiques à la résistance en s’appuyant sur les brefs du pape ; ils furent transportés en Sibérie ; à la suite de cette violence, la diète céda, et vota quatre articles qui concédaient aux « dissidents » l’accès à toutes les dignités, sauf à la couronne, et la pleine liberté de leur culte, alors qu’en Courlande, où les protestants dominaient, les catholiques étaient soumis à toutes les vexations. Clément XIII protesta contre ces concessions, et encouragea de tout son pouvoir la confédération formée à Bar en février 1768, par les principaux évêques et sénateurs catholiques, pour la défense de la religion nationale. Bullarium, p. 1390. Cf. Theiner, Histoire, t. i, p. 312 sq. ; Picot, Mémoires, t. IV, p. 264 sq.

En Hollande.

Les jansénistes continuaient le

schisme d’Utrecht ; ils tinrent en septembre 1763 leur premier synode dont les actes parurent en 1764. Clément les condamna le 30 avril 1765, Bullarium, p. 950, et excommunia le nouvel archevêque d’Utrecht, élu en 1768. Ibid., p. 1432.

A Venise.

La patrie du pape ne resta pas longtemps

en bon accord avec la cour romaine ; Clément XIII eut la douleur de voir, en 1762, l’église Saint-Georges, construite pour les Grecs unis, recevoir un clergé schismatique, et le conserver malgré les protestations de Rome. Bullarium, p. 618. Le gouvernement vénitien interdit la publication du bref pontifical contre le duc de Parme, et supprima la lecture annuelle de la bulle In csena Domini. Surtout, le 10 octobre 1767, parut un décret qui apportait de grandes entraves au recrutement et à la vie commune des ordres religieux ; défense leur (tait faite de recevoir des legs ou dons et d’admettre des novices jusqu’à nouvel ordre, d’envoyer de l’argent hors de l’État vénitien ; ils étaient en tout soumis aux évêques. Un des derniers actes du pape fut un ordre au patriarche et aux évêques de sa patrie de résister à ces entreprises de leur gouvernement. Bullarium^ p. 1472. Beaucoup ne tinrent pas compte de cet ordre ; ceux qui lui obéirent furent exilés.

En Corse.

En 1759, le pape nomma un visiteur

en Corse pour étudier les remèdes à apporter aux innombrables abus qui s’étaient introduits dans cette ile révoltée contre Gènes. Les Génois virent d’un très mauvais œil la mission et l’entravèrent de toutes façons, Bullarium, p. 255, 353 ; ils en vinrent à promettre une récompense de 6000 écus à qui leur livrerait l’évêque de