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CONFIRMATION DANS LA SAINTE ÉCRITURE


miracles, mais et lui de transmettre l’Esprit-Saint par l’imposition des mains, 18 a, 19 6.

Si ces conclusions étaient admises, le livre des Actes ne ferait connaître que la pensée de son rédacteur et des contemporains sur ce dernier geste, et cette pensée ne serait pas celle des communautés primitives. Si le système de Waitz, pris dans son ensemble, ne rallie pas tous les suffrages des critiques et n’a peut-être pour tenant que son auteur ; du moins, un grand nombre d’historiens de l’Église primitive attribuent au rédacteur des Actes, c’est-à-dire à Luc ou à un écrivain inconnu de la fin du I er siècle, ce qu’ils appellent la conception hiérarchique et sacramentelle, les traits catholiques du récit. C’est cet auteur, ce sont ses contemporains qui auraient vu dans le don de l’Esprit une faveur indépendante du baptême, manifestée par la glossolalie, transmise par l’imposition des mains, accordée par les seuls apôtres. H. Holtzmann, Die Apostelgeschichte, p. 64-65 ; Einleitimg, 3e édit., Fribourg, 1892, p. 406 ; B. Weiss, Die Apostelgeschichte, p. 129 ; Weinel, op. cit., p. 215 ; A. Jùlicher, Einleitung, p. 315.

Mais on peut dire que la distinction des sources dans ce chapitre n’est pas démontrée. Les observations par lesquelles on la motive appellent des réserves. Simon, dit-on, apparaît comme un magicien dans lesꝟ. 9, 11, 13, comme une puissance céleste auꝟ. 10. Inutile de crier à la contradiction : puisqu’il opère des prodiges, >. 9, 11, ne peut-il pas être tenu par le peuple pour un être supérieur ?ꝟ. 10. — Au début, ꝟ. 9, observe-t-on, il est parlé de la capitale et plus loin, ꝟ. 14, du pays de Samarie. Mais, si les habitants de la principale cité se sont convertis, ne peut-on pas dire que « la Samarie » , « les Samaritains » ont reçu la parole de Dieu ? — D’après leꝟ. 10, tous s’attachaient à Simon, de même que, d’après leꝟ. 6, tous s’attachent à Philippe, la répétition, conclut-on, est voulue. Elle est, en effet, assez marquée pour qu’on puisse la croire intentionnelle, mais qui l’a opérée, la première ou la seconde main ? On s’étonne que Simon, un magicien, ꝟ. 9-13, demande à Pierre non pas le pouvoir de faire des prodiges, mais celui de communiquer l’Esprit-Saint, y. 18, 19. Les affirmations peuvent concorder et sont conciliées par le texte lui-même, car il est dit que s’il propose aux apôtres d’acheter le droit d’imposer les mains, c’est a] » ’ès avoir vu que par ce geste l’Esprit était donné, c’est-à-dire sans doute après avoir constaté les effets merveilleux de cette grâce, ꝟ. 18 ; d’ailleurs, quand Simon adresse sa demande, il est converti, il a cru, a été baptisé, ꝟ. 13 ; si son cœur n’est pas droit, . 21, si sa pensée est fausse, ꝟ. 20, s’il doit se repentir de sa méchanceté et de son iniquité, ꝟ. 22, 23, il demande encore qu’on prie pour lui le Seigneur, ꝟ. 24. Rien ne prouve donc qu’il n’ait pas pu, sans inconséquence, demander le pouvoir de donner l’Esprit. — Pierre seul agit, ajoute-t-on, Jean ici, comme dans les autres scènes du livre des Actes où il lui est adjoint, n’est qu’un figurant, il n’est même plus nommé dans 1rs derniers versets 18-24 ; conclure que le rédacteur a glissé son nom dans le récit primitif sans prendre la peine de lui attribuer un rôle actif, c’est aller trop vite et trop loin. Les faits n’ont-ils pas pu se passer comme ils sont racontés, la source, si elle a existé et si on admet qu’elle donnait les Actes de Pierre, ne pouvait-elle pas déjà mettre en avant et faire parler un seul apôtre ? — On ne saurait être surpris non plus de ce que l’acteur soit d’abord Philippe, ꝟ. 5-13, puis Pierre, . 18-24 : évidemment si, pour les raisons qui viennent d’être exposées et qui ne sont pas décisives, on voit une interpolation, une addition du rédacteur dans le récit de l’envoi par les douze de deux d’entre eux, il y a un heurt, et on passe, sans être averti, du diacre à l’apotre ; mais l’hiatus disparaît, tout s’explique naturellement si on accepte la teneur actuelle du texte. Restent les

indices tirés du vocabulaire ou de la construction et qui ont fait parler de retouches, de mots superflus, d’une introduction, ꝟ. 4, et d’une conclusion, ꝟ. 25, ajoutées par le dernier rédacteur, de déplacements, de transpositions, de surcharges. B. Weiss, op. cit., p. 126130. Plusieurs des observations qui ont été faites, toute spécieuses qu’elles paraissent, ne sont pas prises en considération par de bons juges ; ainsi Harnack admet l’unité littéraire des Actes. Il ne croit pas que le rédacteur des Actes ait mis en œuvre des sources grecques, en les retouchant et en les frappant de sa marque personnelle. D’ailleurs, ces remarques n’obligent pas du tout à exclure du récit primitif l’imposition des mains : ce sont des démarches accessoires qui seraient ajoutées. On a dit pourtant que leꝟ. 16 sépare deux phrases faites pour être rapprochées et qu’il paraît être une réflexion du rédacteur (car [l’Esprit] n’était encore tombé sur aucun d’entre eux, mais ils avaient seulement été baptisés au nom du Seigneur Jésus). La remarque fût-elle fondée, impossible de rien conclure, car si le verset 16 souligne plus expressément la distinction entre les deux gestes liturgiques de l’initiation, en réalité, il n’ajoute rien au texte, le récit faisant donner le baptême par Philippe, ꝟ. 12-13, l’Esprit par l’imposition des mains de Pierre et de Jean, ꝟ. 1 4-1 7 comme le constate Simon, ꝟ. 18, 19.

Ce qui complète la démonstration, c’est la hardiesse insuffisamment justifiée des procédés (suppression totale de Philippe), les vides et les heurts qui déparent les récits restaurés, voir par exemple la succession de versets proposée par II. Waitz, 8, 9, 11 ; c’est enfin la diversité des systèmes auxquels aboutissent les divers essais de reconstitution.

D’autres critiques sont parvenus, dans la même recherche de la source du c. VHI, à des résultats différents, qu’il est inutile de signaler. Cf. P. Feine, Einc vorkanonische Uberlieferung des Lukas in Evangelium und Apostelgeschichte, Gotha, 1891, p. 195-198 ; F. Spitta, Die Apostelgeschichte, ihre Quellen und deren geschichtlicher Wert, Halle, 1891, p. 124-126, 327, 359 ; J. Jùngst, Die Quellen der Apostelgeschichte, Gotha, 1895, p. 78-82. Les chercheurs de sources grecques dans les Actes ont fait fausse route, même s’ils se bornent à distinguer un seul document, la Wirquelle, qui comprendrait quelque chose du c. viii, d’après II. Wendt, Die Apostelgeschichte, Gœttingue, 1899, p. 29, mais qui, au sentiment d’A. Jùlicher, Einleitung in das N. T., 3e et 4e édit., Tubingue et Leipzig, 1901, p. 354, ne parlait que de saint Paul. En effet, A. Harnack, Lukas der Arzt, der Verfasser des dritten Ecangeliums und der Apostelgeschichte, Leipzig, 1906, p. 83-85, exclut catégoriquement toute source grecque, en raison de l’indéniable unité de langage et de style dans le livre entier, et il admet seulement, pour la première partie du récit des Actes, l’emploi par Luc d’un ou de plusieurs documents araméens. Il pense en particulier que le diacre Philippe (un extatique par excellence) a renseigné oralement saint Luc « l’enthousiaste » , p. 102, non seulement sur les faits, dont il fut un des acteurs, mais même sur les actions de saint Pierre, p. 88, 108109. Les événements racontés au c. VIII, y compris l’histoire de Simon le magicien, maladroitement, mais peut-être à dessein, intercalée entre les actes de Pierre et ceux de Philippe, p. 85, proviendraient de la tradition orale.

Ces hésitations, cette multiplicité d’opinions prouvent qu’il est difficile, impossible même de s’appuyer sur les seuls critères internes tirés du c. VIII pour reluser de voir un rite apostolique dans l’imposition des mains telle que la décrivent en cet endroit les Actes. Cette condamnation est plutôt motivée par les exigences d’un système historique préconçu. On tient pour démontré qu’à l’origine l’impression produite par la prédication