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901 CONFESSION (DU CONCILE DE LATRAN AU CONCILE DE TRENTE) 902

contre les gentils, saint Thomas ne soulève plus cette question et le tour qu’il donne cette fois à sa pensée dans l’exposé de la thèse pénitentielle semble bien exclure son opinion première. Cont. gent., 1. IV, c. lxxii. Quoi qu’il en soit, cette théorie, sans avoir été jamais en grande faveur, trouvait encore quelque crédit vers la fin du xve siècle. Denys le chartreux la fait sienne, Summa fidei orthodoxe, 1. IV, a. 119, q. ii, Anvers, 1569, p. 182, et concède nettement que la confession faite à un laïque a quelque chose de sacerdotal. Quum confessio laico facta sacerdotale quid sit. In IV Sent., 1. tV, dist. XVII, q. vii, Venise, 1584, t. iv, p. 245. Les théologiens ultérieurs seront à peu près unanimes à rejeter cette doctrine et chercheront à interpréter dans un sens entièrement favorable le texte de saint Thomas. Cf. Grégoire de Valentia, Commentarii tkeologici, 1. IV, disp. VII, q. x, p. i, Venise, 1608, t. iv, col. 1439-1441 ; Salmanticenses, De pœnitenlia, disp. XII, dub. vi, n. 54, Paris, 1883, t. ii, p. 741.

Pratiquement, des théories qui rattachaient au sacrement de pénitence la confession faite aux laïques, se dégagsait une bien lourde obligation et qui n’était point sans de graves inconvénients, celle de se confesser à un laïque, à défaut du prêtre, dans le cas de nécessité. Ct. Albert le Grand, In IV Sent., 1. IV, dist. XVII, a. 41, p. 731. Saint Thomas dit lui-même expressément : Débet psenilens confilcri cui potest. In IV Sent., 1. IV, dist. XVII, q. iii, sol. 2 a, ad l ura. Gilles de Rome qui admet, lui aussi, cette obligation, reconnaît toutefois que cette opinion rigide n’est point universelle. Op. cit., c. xxv, p. 297 b. Il faut ajouter qu’elle ne tarda point, au cours du xive siècle, à être abandonnée tout à fait. Duns Scot, loc. cit., va jusqu’à discuter la licéité même d’une pareille confession, admise sans difficulté par Alexandre de Halèset par saint Bonaventure, ibid., e>Durand l’ait justement remarquer que cet aveu est permis, mais à la condition de ne pas le considérer comme une confession sacramentelle. Loc. cit., p. 296.

L’Église a d’ailleurs défini expressément la doctrine qui refuse à la confession faite au laïque tout caractère sacramentel. Dans l’article 20 de la bulle Inter cunctas, Martin V enjoint d’interroger sur ce point spécial ceux qui sont suspectés d’attachement aux hérésies de Wiçlef et de Jean Hus : Utrum credat quod christiamts ultra contritionem cordis, habita copia sacerdotis idonei, soli sacerdoti de necessitate salutis con/iteri teneatur, et non laico seu laicis, quantumcumque bonis et devotis. Denzingcr, Enchiridion, n. 564. L’instruction du pape Eugène IV aux Arméniens est plus décisive : elle établit que le pécheur doit confesser tous ses péchés à son prêtre et que le ministre du sacrement est le prêtre. Peccalor omnia peccala… suo sacerdoti confitealur… Minister liujus sacramenti est sacerdos. Denzinger, n. 594. Enfin les réiormés ayant repris sous une torme plus pressante, au nom de l’Écriture et de la tradition primitive, les attaques des wicleffistes et des hussiles contre le droit sacerdotal de recevoir les confessions, l’ancienne erreur lut de nouveau condamnée succinctement par Léon X, dans la bulle Exsurge Domine, du 16 mai 1520 : Ubi non est sacerdos, œque tantum quilibet clirislianus [facit], eliamsi mulier aut puer esset. Il est à remarquer que cette proposition, empruntée aux premiers écrits de Luther, ne peut être rigoureunt identifiée avec la théorie de certains scolastiquea touchant la valeur de la confession faite aux laïques, l’ne telle coniession est valide, avait enseigné Albert le Grand. Valet confessio facta laico. In IV Sent., 1. IV. dist. XVII, a. 58, (), , era, Paris, 1894, t. xxix, p. 754. Mus Albert distinguait soigneusement, comme tous les tenants de cette opinion, le pouvoir spécial du prêtre en matière de coniession, et loin d’attribuer, comme Luther, ce pouvoir aux laïques, il le leur refu i t formellement. Ibid.

IL Obligation. — Le caractère obligatoire de la confession n’est contesté par aucun des théologiens scolastiques, qui discutent seulement sur l’origine de cette obligation et s’accordent généralement à distinguer un double précepte, dont il s’agit de déterminer l’étendue : le précepte du Christ et le précepte de l’Église.

Précepte divin.

1. Son existence. — Les docteurs

catholiques, dit Jean Médina, se sont donné une peine immense pour établir que la nécessité de la confession dérive du droit divin. De pœnitenlia, tr. II, q. I, Brescia, 1590, p. 132. Cet aveu d’un homme qui écrivait à la veille du concile de Trente et qui cherchait, pour répondre aux accusations des Réformés, à résumer la pensée scolaslique, est précieux à recueillir : il montre nettement que la question soulève une difficulté des plus sérieuses et que les théologiens de l’École en ont parfaitement reconnu la gravité.

Les anciens scolastiques sont unanimes à affirmer que la confession sacramentelle est d’obligation divine. Mais les divergences se manitestent dès qu’il s’agit de formuler la preuve.

a) Les uns, avec Guillaume d’Auxerre († 1232), Summa aurea, 1. IV, tr. VI, c. iii, q. i, Paris, 1500, fol. 28, s’appuient sur le texte de saint Jacques : Confitemini ergo alterutrum peccala vestra, v, 16, qu’ils entendent d’ailleurs d’une simple promulgation. Tel est l’enseignement très net d’Alexandre de Halès : Fuit ergo confessio a Domino insinnala, ab apostolis aucloritale ipsius tradila, a Domino in clavium collatione instituta et ab apostolo Jacobo promulgata. Op. cit., 1. IV, q. XVIH, m. iii, a. 2, p. 567. Saint Bonaventure reconnaît également que Notre-Seigneur n’a pas institué expressément la confession comme il a institué les autres sacrements : il s’est servi pour cela de l’intermédiaire des apôtres, en leur conférant d’ailleurs l’autorité requise pour cette institution. Quoad materiale, quod est peccati delectio, non per se inslituit sive promulgavit, sed per apostolos auctoritatem dando et insinuando. In IV Sent., 1. IV, dist. XVII, p. il, a. 1, q. iii, p. 441. Telle était la thèse communément reçue vers le milieu du xiiie siècle. Cf. S. Pierre Célestin, Opusctda, opusc. I, c. iii, dans Maxima bibliolheca vetemm Patrum, Lyon, t. xxv, p. 774. Les protestants ont abusé de ces textes pour combattre le caractère divin de l’obligation de la coniession. Il suffit de remarquer que ces auteurs recourent, en dernière analyse, à l’autorité même du Christ, et que, pour eux, l’institution de la confession est implicitement contenue dans l’institution même du sacrement de pénitence. Voluntas Christi exprimebatur per apostolos, dit formellement Albert le Grand, In IV Sent., I. IV, dist. XVI, a. 12, Paris, 1894, t. xxix, p. 569. Ailleurs il conclut à une institution tacite, c’est-à-dire implicite, de la confession par le Christ, avec le caractère obligatoire qu’elle comporte. Sic ergo Christus inslituit cunfessionem tacite, sed apostoli promulgavcrunt cam expresse. Compendium theologicæ veritalis, 1. VI, c. xxv, Lyon, 1649, p. 486. Ci. Bichard de Middletown, loc. cit., a. 2, q. I, p. 247 ; Gilles de Borne, loc. cit., p. 294.

b) D’autres, à la suite de Pierre de Poitiers, loc. cit., p. 198, invoquent le commandement donné aux lépreux : Ile, oslendite vos sacerdotibus, Luc., xvii, 14, ou bien, avec Pierre de la Palue, In IV Sent., 1. IV, dist. XVI, q. ii, a. 2, Paris, 1518, t. iv, fol. i.xxix, le texte de saint Jean, v, 22 : Nequeenim Pater judicat quemquam, ped omne judicium dédit Fiho. Il en est qui se contentent d’en appeler à une tradition purement orale. Cf. Jean de Bassols, In IV Sent., 1. IV, dist. XVII, q. II, Paris, 1517, t. iv, fol. xcin.

c) Mais l’ensemble des théologiens s’efforça de dégager une preuve directe et solide des paroles mêmes de l’institution. Saint Thomas, le premier, semble-t-il, insista sur cette démonstration. Dans son Commentaire sur les