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CONCORDAT DE 1801


possibilité de fondations, c’est d’une façon très vague, avec l’arrière-pensée d’en régler la nature et les formes. Il se refuse même à préciser le chiffre et le nombre des traitements : il prétend la chose impossible avant toute organisation, bien qu’à Verceil il ait été moins réservé ; enfin, il ne s’engage que vis-à-vis des évêques et des curés. Ainsi naquirent l’article 14 : « Le gouvernement assurera un traitement convenable aux évêques et aux curés dont les diocèses et les paroisses seront compris dans la circonscription nouvelle, » et l’article 15 : « Le gouvernement prendra également des mesures pour que les catholiques français puissent, s’ils le veulent, taire en laveur des églises des fondations. » Sur toute cette question, cf. Taine, Les origines de la France contemporaine. Le régime moderne, in-8°, Paris, 1891, t. i.

Art. 16. Sa Sainteté reconnaît dans le premier consul de la République française les mêmes droits et prérogatives dont jouissait près d’elle l’ancien gouvernement.

Voici le détail de ces prérogatives d’après Boulay de la Meurthe : « la principale est d’avoir des cardinaux ; il faut aussi mentionner le droit pour le gouvernement français d’avoir à Rome un cardinal-protecteur, un auditeur de Rote, un ambassadeur avec des préséances, une juridiction et l’exclusive dans le conclave, des établissements, une académie des arts et une poste particulière. » Documents, t. iii, p. 758.

L’article 17 prévoit le cas où « quelqu’un des successeurs du premier consul actuel ne serait pas catholique » ; alors, les droits et prérogatives mentionnés et la nomination aux évèchés « seront réglés par rapport à lui, par une nouvelle convention « . C’était une mesure de prudence insuffisante. Mais Pie VII ne pouvait prévoir le régime parlementaire avec ses Chambres souveraines et ses ministères responsables qui devaient non seulement n’être pas toujours catholiques, mais même être parfois anticatholiques.

Le concordat ne parle ni des constitutionnels, et l’on a vu pourquoi, ni des prêtres mariés ou ayant renoncé manifestement à leur état : les uns et les autres seront l’objet d’un bref, ni des congrégations religieuses dont le contre-projet romain du 12 mai faisait mention, mais Bonaparte avait écarté la question.

Le concordat impliquait la reconnaissance de la République par le pape et la paix entre le pape et la France et successivement les garnisons françaises évacueront les villes pontificales qu’elles occupaient encore. La convention du’26 messidor rentre donc dans la série des traités politiques signés par la France en 1801.

La joie du pape fut vive, a raconté Cacault, en recevant cette convention. Il n’avait obtenu cependant de vraie satisfaction sur aucun point ; il avait dû céder sur tous. Mais il avait compris que le moment était mal choisi pour être intransigeant ; puis c’étaient bien des avantages réels qu’une situation officielle rendue à l’Église en France, que « la destruction du régime politicoreligieux qu’avait établi la Révolution, la fin du schisme, et le droit d’instituer les évêques rendu au pape » (Aulard). Quant à Bonaparte, on peut lui appliquer, à propos de tout le concordat, ce que Taine dit de lui à propos des articles 13-15 : « Personne ne s’entend mieux que Napoléon à faire de bons marchés, c’est-à-dire adonner peu pour recevoir beaucoup. »

III., li -i m - COMPLÉMENTAIRES NÉGOCIÉES AVEC ROME.

— Le concordat ne finissait rien. En dehors des ratilications nécessaires à tout traité, il restait au pape, i obtenir la démission des évêques légitimes, à régler la question des constitutionnels, à réconcilier les prêtres mariés ou notoirement démissionnaires, à fixer la nouvelle circonscription des diocèses, les nouveaux titulaires, toutes choses qui exigeaient plus ou moins l’entente avec le premier consul ei supposaient l’envoi en I rance d’un légat a latere. A Bonaparte il restait à faire

accepter le concordat par les assemblées, avant de le promulguer, et à fixer le règlement de police prévu par l’art. 1 er. Toutes ces questions n’auront leur solution officielle qu’en commun (avril 1802) ; sur plus d’une il y aura des conflits entre Paris et Rome, et le pape se verra obligé encore à bien des concessions. C’est que Bonaparte ne voulait présenter au suffrage des assemblées qu’une organisation religieuse définitive, sauvegardant ce que les gallicans appelaient « les droits de l’État » , tant il craignait leur hostilité vis-à-vis de Rome et mène du christianisme !

Les ratifications.

Le concordat signé, Bonaparte

avaii fait ajouter cette clause : « Les ratifications seront échangées à Paris dans l’espace de quarante jours, a Elles ne le furent que le 23 fructidor an IX (10 septembre 1801). Avant de ratifier l’œuvre de Consalvi, le pape la soumit au jugement de la petite, puis de la grande Congrégation et même de tout le Sacré-Collège, moins Maury relégué dans son évêché de Montefiascone. Deux articles seulement furent discutés par le Sacré-Collège, le 1 er et le 13 e. Finalement le 1 er fut accepté par 18 voix contre Il et le 13’par 22 contre 7. Le 15 août, Pie VII ratifiait donc la convention. Suivant la coutume, cette convention devait être insérée dans une bulle rendue publique. Pie VII la donna le 15 août. C’est la bulle Ecclesia Christi, mais elle ne sera publiée qu’en avril 1802 par Caprara. Son texte avait été l’objet de négociations parallèles à celles du concordat. Mais en attendant cette ratification solennelle, Bonaparte en demanda « une petite » . Pie VII la donna également le 15 août. C’était une ratification sans réserve. Il en avait lait parvenir à Spina une seconde qui contenait des réserves, mais Spina crut nécessaire de choisir la première. Bonaparte ne donna la sienne que le 21 fructidor an IX (8 septembre 1801). L’échange se fit à Paris le 10 septembre. Spina agissait alors de nouveau au nom du pape ; Consalvi avait quitté Paris le 25 juillet et le légat n’était pas arrivé.

La démission des évêques légitimes.

Le pape

avait à obtenir la démission, totale ou partielle, des évêques légitimes, non seulement de l’ancienne France, mais des pays annexés, Avignon et Comtat-Venaissin, Nice et la Savoie, Genève, Porrentruy et partie de l’évêché de Bàle, Belgique, déjà soumis à la loi du 7 vendémiaire, et rive gauche du Rhin acquise depuis le 9 février 1801. Cet empire constituait 159 diocèses dont 95 seulement avaient un titulaire. Après l’échange des ratifications, le pape adresse à ces 95 évêques, mais plus spécialement aux Français, le bref Tarn multa, daté du 15 août comme la bulle Ecclesia Christi, avec une lettre individuelle d’un modèle uniforme, pour leur demander leur démission : ainsi s’exécutait l’article 3 du concordat. Le bref reçu, les évêques avaient dix jours pour répondre ; passé ce délai, ils seraient considérés comme refusants ; le pape voulait par là les empêcher de se concerter ; il n’y réussit qu’imparfaitement. Sur les 135 sièges épiscopaux de l’ancienne France (un 136% Moulins, avait un titulaire nommé, alors à Londres, des Gallois de la Tour, mais n’était pas encore érigé canoniquement) 53 avaient cessé d’être occupés. Des 82 évêques restants, 6, Alais, Angers, Maçon, Marseille, Saint-Papoul et Senlis n’étaient jamais sortis de France ; 5 y étaient rentrés depuis le régime de la séparation : c’étaient Nimes, Saint-Claude, Saint-Malo, Vaison et Vienne ; tous les Il donnèrent immédiatement leur démission (septembre 1801). Les évêques du dehors se divisèrent : 36 refusèrent leur démission plutôt par fidélité à la royauté que par raison religieuse. Les refus vinrent surtout d’Allemagne, 19 35 ei d’AnglHrrre, 13/18. Les évêques émigrés en Allemagne subissaient l’influence de Louis XVIII, réfugié d’abord à Mitau, et depuis janvier 1801, à Varsovie. Il agissait sur eux par l’intermédiaire de Talleyrand-Périgord, arche-