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COMMUNION EUCHARISTIQUE (DOCTRINE GÉNÉRALE ;


conséquences, pour chaque fidèle en particulier, s’étendent jusqu’au corps. En effet, d’après les Pères, en raison de cette union le fidèle est sanctifié corps et âme par l’eucharistie. Cf. S. Grégoire de Nysse, loc. cit. Il participe à l’incorruptibilité du corps du Christ ; il est comme rétabli dans l’intégrité originelle. Cette dernière pensée est expliquée elle-même parles Pères de deux façons qui se complètent. — a) L’eucharistie, disent-ils, modère ou même éteint les feux de la concupiscence. S. Jean Chrysostome, Homil., xlvi, in Joa., P. G., t. lix, col. 261. — b) Surtout, l’eucharistie est un remède qui nous rend immortels, S. Ignace, Ad Eph., n. 29, P. G., t. v, col. 662 ; S. Justin, Apol., I, 66, P. G., t. vi, col. 428429 ; S. Irénée, Cont. hser., 1. IV, c. xviii, n. 5 ; 1. V, c. ii, n. 2, 3, P. G., t. vii, col. 1027, 1124-1128 ; une sorte de semence d’immortalité. S. Grégoire de Nysse, Cat., 33, P. G., t. xlv, col. 81 ; S. Cyrille d’Alexandrie, In Joa., VI, 55, P. G., t. lxiii, col. 559 sq. Cette propriété de l’eucharistie est développée dans beaucoup de Pères en commentaire de la promesse faite par Jésus-Christ, Joa., vi, 55, de ressusciter au dernier jour celui qui aurait reçu dignement son corps et son sang. Cf. Franzelin, De eucharistiæ sacramento, c. xix ; P. Batiffol, Études d’histoire et de théologie positive, 2e série, Paris, 1905, p. 149, 160-162, 260-261.

3. Tous ces effets, avons-nous dit, découlent de cette union mystique que l’eucharistie entretient et resserre entre les fidèles et Jésus-Christ. En effet l’Écriture enseigne formellement : a) que l’Église est un corps dont les fidèles sont les membres et dont Jésus-Christ est le chef, Eph., i, 22 ; I Cor., xii, 12, 27, corps dont la vie surnaturelle lui vient de l’inllux du chef auquel il est uni, Eph., iv, 15, 16 ; b) que cette unité de tous les fidèles en Jésus-Christ est symbolisée et maintenue par l’eucharistie. I Cor., x, 16, 17. Or, si le sacrement de baptême qui détermine cette union ne sanctifie pas seulement l’âme, puisque par lui les membres du chrétien deviennent le temple de Jésus-Christ, I Cor., vi, 11, 19, de même, la vie béatifique, qui est la raison d’être et la consommation de cette union, ne s’adresse pas seulement à l’àme ; le corps y aura sa part. Il est donc manifeste que l’eucharistie, qui entretient cette union, étend ses effets également au corps. Du reste, cette union crée entre le fidèle et Jésus-Christ une sorte de parenté, de concorporéité même et de consanguinité, comme disent l’Ecriture, Eph., v, 29, 30, et les Pères, qui est nettement symbolisée par la manducation sacramentelle du corps et du sang divins. Il en résulte que Jésus-Christ considère le corps des fidèles comme son propre corps et qu’il l’entoure d’une protection spéciale, Eph., vi, 29. pour le conduire jusqu’à la ressemblance parfaite avec son propre corps glorifié, dans l’état de résurrection glorieuse.

4. On peut concevoir un double mode d’action de l’eucharistie sur le corps : a) une action médiate consistant en ce que les grâces accordées au fidèle communiant l’aident à dominer la concupiscence, celle surtout de la chair ; b) une action immédiate affaiblissant l’inflammabilite de telle ou telle nature vis-à-vis drs excitations charnelles. Ce second mode d’action est certainement possible. Une vertu guérissante sortait du corps de Jésus-Christ, Luc, VI, 19 ; n’est-elle pas la même dans l’eucharistie ? Le sacrement d’extrême ion ne concourt-il pas efficacement à la guérison des malades, quand celle-ci est dans les desseins de Dieu ? Il

ertain que l’eucharistie agit tout au moins de la premier rnanii re et cela suffit pour justifier le nom qu’on lui donne de « vin qui produit les vierges » . Zach.. ix, 17.

5. Certains théologiens, entre autres Contenson, Theo menlis et cor dis, I. XI, part. II, diss. III, efiect. 9, Ont imaginé que la résurreotion glorieuse était due à une certaine qualité physique, laissée par l’eucharistie

D1CT. DE TI1LOL. CATIIOU

comme une sorte de semence dans le corps du communiant. Cette théorie, peu compréhensible en elle-même, ne repose sur aucun fondement théologique sérieux. La résurrection glorieuse s’explique très suffisamment par le titre que donne l’eucharistie, telle que Jésus-Christ l’a instituée, à ressusciter un jour glorieusement comme lui, en raison de l’union de quasi consanguinité qu’elle crée entre le communiant et lui. La chair et le sang de Jésus, donnés sur la croix pour la vie du monde, sont donnés dans l’eucharistie pour entretenir dans les amer ; la vie divine, gage de la résurrection glorieuse. Cf. A. Loisy, Le quatrième Évangile, Paris, 1903, p. 455, 461 ; P. Batiffol, Eludes d’histoire et de théologie positive, 2= série, Paris, 1905, p. 97-100.

5 3 Questions connexes. — 1. Tandis que, dans les autres sacrements, c’est le signe sensible qui est cause de la grâce, dans l’eucharistie, c’est Jésus-Christ lui-même, dans son état sacramentel, qui opère les effets de l’eucharistie. D’une façon plus précise, c’est le Verbe de Dieu qui agit ici en se servant de sa nature humaine comme d’un instrument qui lui est hypostatiquement uni. De là vient que la chair de Jésus-Christ est appelée si souvent une chair vivifiante. Cf. la définition contre Bérenger, Denzinger, n. 298. — 2. Ainsi que ceux des autres sacrements, les effets de l’eucharistie répondent au degré de disposition du sujet. Sans doute, pour communier avec fruit, il suffit d’être en état de grâce, mais ce n’est point assez pour recueillir des fruits abondants. II faut, en outre, éviter en communiant les négligences, les inattentions, les pensées qui seraient des péchés véniels : l’effet du sacrement, dit saint Thomas, Sum. theol., III a, q. lxxix, a. 8, serait empêché en partie, l’on ne ressentirait point la douceur spirituelle du banquet eucharistique. Il faut aussi une disposition actuelle fervente et une coopération aux grâces de la communion fidèle et continue. L’importance de ce point est telle que saint Bonaventure, In IV Sent., dist. XII, punct. ii, a. 2, q. ii, pense qu’une communion bien préparée produit bien plus d’effet que de nombreuses communions faites avec négligence. C’est pourquoi l’Église, décret sur la communion fréquente, Denzinger, n. 1086, veut que la fréquence des communions se gradue poulies fidèles d’après le degré de leur dévotion et le soin qu’ils apportent à se préparer. Voir COMMUNION fréquente. — 3. Certains effets de la communion sont réversibles sur d’autres fidèles que le communiant, à la volonté de celui-ci. L’augmentation de grâce sanctifiante, les grâces actuelles venant du sacrement, en un mot, tous les effets ex opère operato sont nécessairement personnels au communiant et incessibles ; mais la communion avec tout le cortège d’actes de ferveur qui l’accompagnent a devant Dieu unegrande valeur impétratoire et satisfactoire. C’est cette valeur qui esta la disposition du communiant pour être appliquée en vertu de la communion des saints aux fidèles vivants ou aux âmes du purgatoire pour lesquels la communion est offerte.

1’Partie dogmatique. — S. Thomas, Sum. theol., III’, q. LXXIX, i.xxx, ainsi que tous ses commentateurs ; De Lugo, De sanctissimo eucharistie sacramento ; Franzelin, De eucliaristise sacramento ; Gihr, Die heiligen Sakramente, t. ii, S 22 sq.

2* Partie morale et canonique. — S. Alphonse de Liguori, Theologia moralis, 1. VI ; Ballerini-Palmieri, Opus theologicum morale, tr. X ; Lehmkuhl, Theologia moralis, t. n ; Génicot, Theologix moralis institutiones, t. n ; Berardi, Praxis confessariorum, passim ; d’Annihale, Summula theologia moralis, t. m ; Gaspairi, Tractatus canonicus de eucharistise sacramento ; Kirchenlexikon, t. iii, art. Communion.

3* Partie historique. — Marténe, De antiquis Ecclesise ritibus ; Renaudot, Collectio Uturgiarutn oricntalium ; Denzinger, llitus orientatium ; Chardon, Histoire des sacrements, dans le Cursus theologim de Migne, t xx ; Corblet, Histoire du sacre’ment de l’eucharistie, Paris, 1865, t. i, p. 27ït-44 ! i ; F. Probst, Sakramente und Sakramentalicn m den drei ersten chrisilichen Juhrhunderten, Tubiugue, 1872, p. 212-24’i.

II. MOUBEAl.

III.

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