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COMMUNION EUCHARISTIQUE (DOCTRINE GÉNÉRALE)


n’en est ainsi pour aucun autre sacrement. Le baptême, dit saint Thomas, Sum. tlieul., IIP, q. lxxviii, a. 3, ad 6um, est le sacrement de la foi, parce qu’il est comme une profession de foi, tandis que l’eucharistie est le sacrement de la charité qu’il signifie et produit en même temps.

b) En unissant ainsi le communiant avec Jésus-Christ, l’eucharistie unit en même temps les fidèles entre eux. — a. Cette union s’accuse visiblement par la participation de tous les fidèles, sans distinction de situation sociale, au même pain eucharistique. Saint Paul le rappelle aux Corinthiens, I Cor., x, 17, et les Pères aiment à développer cette pensée. Cf. S. Augustin. Serm., ccxxvii, P. L., t. xxxviii, col. 1101 ; S. Chrysostome, In I Cor., homil. xxvi, n. 3, P. G., t. lxi, col. 216. — b. Mais l’eucharistie n’unit pas les fidèles seulement de cette façon purement extérieure, elle entretient en eux et augmente l’afllux de cette sève divine qu’est la charité dans tous les rameaux de cette vigne dont Jésus-Christ est le cep, Joa., xv, 1 ; par là, elle tes relie plus fortement et plus intimement avec lui et aussi entre eux, puisque la charité envers le prochain jaillit nécessairement de celle envers Dieu. Ainsi, tous sont un en Jésus-Christ. Gal., iii, 28. Il est donc naturel de chercher dans l’eucharistie le secret de tant d’actes héroïques de charité, non seulement envers Dieu, mais envers le prochain dont l’histoire de l’Eglise est pleine. — c. En un autre sens, plus il se fait dans l’Église de communions ferventes et plus le corps mystique de Jésus-Christ se perfectionne et s’édifie, grâce à son union plus étroite avec son chef. Cf. Eph., IV, 26 ; S. Bonaventure, In IV Sent., dist. X, dub. IX.

c) L’union spirituelle se produit au même moment que l’union sacramentelle, c’est-à-dire, suivant l’opinion commune, à l’instant où les espèces consacrées sont reçues dans l’estomac du communiant. C’est à ce moment que l’àme reçoit l’augmentation de grâce sanctifiante ainsi que les dons habituels qui y sont joints. Une opinion, commune au temps de deLugo, disp. XII, n. 46, soutient que les effets de l’eucharistie se prolongent aussi longtemps que la consécration des espèces dans le corps du communiant, en ce sens que, si durant ce temps les dispositions du sujet deviennent plus parfaites, il reçoit une nouvelle augmentation de grâce. Il est du moins hors de doute que les grâces actuelles accordées au sujet pendant que Jésus-Christ réside sacramentellement en lui le sont ex opère operato.

3° L’eucharistie, aliment do la vie surnaturelle. — Selon la parole de Notre-Seigneur, Joa., vi, 53, 54, son corps est un aliment réel, véritable, vivifiant, qui conserve la vie et la perfectionne. Le résultat de l’alimentation, c’est la nutrition qui se fait par l’assimilation. Or Jésus-Christ, devenu nourriture de l’âme, lui communique la vie divine et surnaturelle. Calmes, L’Évangile selon S. Jean, p. 255-256 ; P. Batill’ol, Études d’histoire et de théologie positive, 2 « série, P ; iris, 1905, p. 105. — La comparaison que font les Pères et les conciles entre les effets de l’eucharistie et ceux de la nourriture matérielle n exprime qu’une très lointaine analogie. Les effets du sacrement sont beaucoup plus variés, bien plus complets el à certains égards ils sont totalement différents. — 1. L’aliment eucharistique n’est pas assimilable au sens matériel, car le corps et le sang sont intangibles et incorruptibles dans l’état sacramentel. —

2. Aussi, cet aliment n’a aucune action immédiate sur le corps, puisque c’est l’âme qu’il doit nourrir. —

3. Cette nourriture spirituelle ne se transforme pas en celni qu’elle nourrit, mais elle a au contraire la propriété d’assimiler à elle-même celui qui la mange. On prend ce pain, dit le pape Urbain IV, const. Jransiturus, il n’est pas consommé, on le mange et il n’est pas altéré, parce qu’il ne s’assimile pas à celui qui le

mange, mais il se l’assimile, s’il est dignement reçu. Tandis que dans la nutrition ordinaire la nourriture s’identifie au corps, le contraire se produit dans l’alimentation eucharistique : l’âme s’assimile à la nourriture, qui revêt une nouvelle forme. — 4. Jésus-Christ a attaché à sa chair, pour la vie surnaturelle des justes, toute la vertu de sa passion. Il n’est donc aucun besoin auquel l’eucharistie ne puisse donner satisfaction, dans une mesure qui n’a d’autre limite que celle des dispositions du sujet.

a) Le concile de Trente, sess. XIII, " c. ii, dit de l’eucharistie qu’elle préserve des péchés mortels. C’est en cela surtout que consiste l’effet de sustentation qui lui est attribué par rapport à la vie surnaturelle. Mais l’eucharistie ne peut-elle donc pas remettre les péchés mortels ? Certes, répond saint Thomas, Sum. theol., IIP, q. lxxix, a. 3, si elle ne les remet pas, ce n’est pas par défaut de puissance, c’est parce qu’instituée pour être une nourriture spirituelle et pour nous unir au Christ, elle suppose essentiellement la vie de la grâce. Pourtant si un pécheur repentant de sa faute s’approche de la sainte table avec une contrition qu’il croit véritable, mais qui, en réalité, n’est qu’une simple attrition, sa faute ne lui sera-t-elle pas remise ? Saint Thomas, ibid., ad l um, répond affirmativement. Ce pécheur, dit-il, recevra du sacrement la grâce de la charité et la rémission de sa faute. Cette opinion est suivie par la généralité des théologiens thomistes, tandis (pue d’autres, tels saint Bonaventure, Vasquez, de Lugo, disp. XII, n. 1 sq., etc., soutiennent que dans ce cas la communion, sans être sacrilège, restera sans effet, à cause du péché qui lui fait obstacle. La première opinion a cet avantage de faciliter l’explication des textes de certains Pères, où il est dit sans aucune distinction que l’eucharistie remet les péchés. Cf. S. Ambroise, De benedict. palriachar., c. v, P. L., t. xtv, col. 686 ; S. Cyprien, Epist., lxiii, n. 75, P. L., t. iv, col. 371 ; S. Cjrille d’Alexandrie, In Joa., 1. VI, c. lvi sq., P. G., t. lxxiii, col. 582. En outre, l’opinion thomiste parait mieux appuyée en raison. Les sacrements, dit le concile de Trente, sess. VII, can. 6, 7, confèrent la grâce à ceux qui n’y mettent point obstacle ; or, dans le cas présent, le pécheur ne met aucun obstacle. Il est vrai que l’eucharistie n’a été instituée que pour alimenter la vie des justes, mais on voit par l’extrême-oncliun qu’un sacrement des vivants peut accidentellement remettre les fautes graves. L’opinion thomiste entraîne cette conséquence que si le pécheur susdit était à l’article de la mort sans pouvoir se confesser ni recevoir l’extréme-onction, l’eucharistie serait pour lui un sacrement d’absolue nécessité pour le salut. S. Alphonse, 1. VI, n. 386. — b. Comment l’eucharistie préserve-t-elle des péchés mortels ? De Lugo, disp. XII, n. 85, l’explique comme il suit : a. L’eucharistie apporte au communiant une abondante augmentation de grâce sanctifiante. — b. Elle est pour l’âme une source de délices qui diminuent l’attrait des tentations. — c. Elle met en fuite les démons, car elle est le signe de la passion du Christ, c’est-à-dire de son triomphe sur eux. Le psendo-.lean Chrysostome surtout, Homil. ml popul., au bréviaire lxi,

sai li dans l’octave de la Fête-Dieu, développe cette

vertu de l’eucharistie. — d. En raison de la familiarité qui s’établit entre Jésus-Christ et lui, le communiant reçoit des grâces spéciales de lumière, cf. Joa., viii, 12 ; Luc, xxiv, lia, qui diminuent et apaisent les tentations.

— e. Elle diminue la concupiscence et empêche ou affaiblit les révoltes de la chair comme l’enseigne l’Église, posteommunion du xxiv c dimanche après la Pentecôte.

b) L’eucharistie augmente la vie surnaturelle en un double sens : elle est en cette vie le sacrement de la perfection chrétienne et, très spécialement, le sacrement de la vie éternelle.

a. Pour recevoir l’eucharistie avec fruit, il faut déjà