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COMMANDEMENTS DE L’ÉGLISE — COMMERCE


theologia ! mcralis. tr. XXIII, Venise, 1728. t. v, p. 274 sq. ; Amorl, Theologia moralis, tr. III, sect. x, Augsbourg, 1758, t. i, p. 510 ; S. Alphonse de Liguori, Theologia moralis, 1. III, n. 1004 sq. ; Ballerini-Palmieri, Optes theologicum morale, 2° t’dit-, Prato, 1892, t. il, p. 780 ; Lehmkulil, Theologia moralis, t. i, n. 1201 sq. ; Génicot, Theologix moralis institutiones, t. I, n. 434 ; Kirchenlexikon, t. v, col. 161-164.

E. DUBLANCHY.

    1. COMMERCE##


COMMERCE. — I. Le commerce et l’économie sociale. II. Le commerce et la morale. III. Le commerce et le droit canon.

I. Le commerce et l’économie sociale. — i° Définition. — La production se fait en vue de la consommation, c’est une vérité banale ; mais pour se mettre en rapport avec le producteur le consommateur a souvent besoin d’un intermédiaire : c’est le commerçant, le marchand. Il n’est pas difficile de distinguer un commerçant de tout autre industriel ; et de ce fait élémentaire d’observation, il semble aisé de déduire et de formuler la définition du commerce. Et cependant sur cette définition les économistes ne sont pas d’accord. J.-B. Say définit le commerce : « l’industrie qui met un produit à la portée de celui qui doit le consommer. » Cette description s’applique au transport, mais le transport des marchandises ou bien est une branche ou bien n’est qu’un acte particulier du commerce. Le comte Verri dans ses Meditazioni sulla economia polilica affirme que « le commerce n’est en réalité autre chose que le transport des marchandises d’un lieu dans un autre » . Mais n’est-il pas évident que le seul fait de déplacer un objet, une marchandise, sans échange, sans achat ni vente, ne saurait constituer une opération commerciale ?

Dans son livre De la liberté du travail, Dunoyer s’exprime ainsi : « Nous faisons tous des échanges dans la société, nous sommes tous marchands de quelque chose, nous sommes tous commerçants ; mais commercer, vendre, acheter, échanger n’est proprement un métier pour personne. » Il ne nie pas la réalité de la fonction commerciale, il admet même volontiers la définition qu’on en donne ; mais il conteste énergiquement la propriété du terme par lequel on la désigne. D’après Dunoyer, le mol commerce désigne l’ensemble des relations que les hommes ont entre eux pour la satisfaction de leurs désirs. Pourquoi refuser au commerce le sens spécial que lui donne l’usage de toutes les langues et de tous les pays ? c’est du pur arbitraire. « Tout acte d’association, dit Carcy, est un acte de commerce, les termes société et commerce ne sont que des manières différentes d’exprimer une idée identique. » Principe de la science sociale. Cette définition est beaucoup trop vaste, elle s’applique à tous les rapports sociaux.

1. Dans un sens large, le commerce est l’échange des biens matériels effectué par et entre les hommes. A cette notion appartiennent le simple troc et l’échange civil. Dans un sens restreint, le commerce est cette forme de l’activité humaine qui fait payer les marchandises du producteur au consommateur dans un but de lucre. On appelle marchandises tout ce qui possède une valeur d’usage : les meubles et immeubles, les produits de la terre, les objets manufacturés, le sol, etc. L’échange lucratif, tel est donc le commerce. L’intention de réaliser un bénéfice est un élément essentiel au commerce proprement dit : supprimez ce but et il ne reste plus que l’échange ; or, personne ne songera à donner le nom d’opération commerciale au simple (’change de deux objets. Le commerce comprend l’échange, mais l’échange Bans production, c’est-à-dire sans modification ou altération des propriétés de la matière. C’est ce qui le distingue de l’industrie, cette forme de l’activité humaine qui transforme la matière et en fait un produit.

Toute industrie a un côté commercial, puisque l’industriel ne travaille pas seulement pour produire, mais produits et réaliser un bénéfice. Cependant le commerce se développe en industrie spéciale

toutes les fois que le producteur (’prouve de la difficulté à se mettre en contact avec le consommateur. Par exemple, lorsqu’il s’agit du trafic des objets trop éloignés, ou encore, ce qui arrive dans la grande industrie, lorsque le producteur est absorbé par le travail de la production.

2. Définition juridique. —Dans la langue du droit, le mot commerce a un sens empirique et tout artificiel. Lorsqu’ils traitent des actes commerciaux, les rédacteurs du code ne se laissent point guider par des considérations théoriques, ou par les données de l’économie sociale ; ils n’ont en vue que l’utilité pratique et le départ entre la juridiction des tribunaux de commerce et celle des tribunaux civils.

D’une manière générale, le code comprend, sous le nom de commerce, l’ensemble des opérations qui ont pour but de réaliser des bénéfices en spéculant sur la transformation des matières premières, sur leur transport, sur leur échange et sur tous les actes énumérés dans les art. 632-634 du code de commerce. Ainsi, au point de vue juridique, acheter et vendre, non pour se procurer un bénéfice, mais pour ses affaires personnelles, cela n’est point un acte commercial. Exemple : Pierre vend les meubles de son salon et en achète d’autres qui lui conviennent mieux.

Il est parfois difficile de déterminer si un acte est légalement commercial ou non, les jurisconsultes sont en désaccord, la jurisprudence est divergente. En général, le code l’ait rentrer dans le commerce l’industrie manufacturière et l’industrie commerciale des économistes. Il s’ensuit que l’industrie extractive — l’agriculture et l’exploitation des mines — n’est pas comprise dans le commerce et que par conséquent les dispositions du code de commerce ne lui sont pas applicables. Acheter et vendre des immeubles dans un but de lucre devrait être du ressort du commerce, et cependant le législateur français a soustrait ces actes au droit commercial. Pourquoi cette anomalie ? D’une part, on a craint de confier aux tribunaux de commerce la connaissance des questions immobilières ; d’autre part, on n’a pas voulu admettre en matière d’immeubles la preuve par tous les moyens possibles, conformément à la règle générale qui régit les actes de commerce. Le droit commercial est surtout le droit mobilier, mais les intérêts fonciers exigent plus de stabilité et partant plus de restrictions et de garanties que la circulation mobilière. Pas de mobilisation à outrance, pas de commercialisation excessive, disait avec justesse l’économiste allemand Roscher. Il importe au bon ordre de la société, de laisser subsister quant à l’élément le plus stable de la fortune, la propriété foncière, une législation protectrice qui sacrifie moins à l’intérêt de la célérité et de l’économie des procédures.

Analyse du commerce.

L’élément fondamental

du commerce est l’échange, c’est-à-dire la convention par laquelle on cède à autrui la possession d’une chose pour obtenir la possession d’une autre chose appartenant à celui-ci. Pour analyser l’acte d’échange, considéronsle dans un cas idéal très simple. Supposons deux hommes d’humeur pacifique vivant dans une ile et qui se rencontrent. L’un, par son travail, a ramassé une grandi’quantité de combustible, mais il manque de vivres. L’autre, adonné à la chasse, a abattu beaucoup de

gibier, mais il n’a pas de bois. I.e bûcheron et le chasseur avant chacun en abondance ce qui manque à l’autre, il suffit d’un accord entre eux pour les tirer d’embarras. Ils font un échange : celui qui a du bois en cède une partie et acquiert du gibier, celui qui possède (lu gibier en abandonne une certaine quantité et reçoit du combustible. La raison qui détermine cet (’change, cVd l’avantage des contractants. Grâce à lui. chacun d’eux

obtient ce qui lui manque avec moins de peine que s’il (levait l’acquérir par son travail. Inutile de faire intervenir dans cette convention le sentiment de solidarité