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CONSTANTINOPLE (ÉGLISE DE)

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41 autres prélats. Cette encyclique est une sorte de profession de foi, dans laquelle Denys admet sept sacrements, maintient la nécessité de lVpiscopat, la supériorité du célibat sur le mariage, l’infaillibilité de L’Église, l’invocation des saints, le culte des images et l’usage du jeune, autant de points que niaient ou contestaient les calvinistes. Quant au concile de Jérusalem, il se réunit en mars 167-2, sous la présidence de Dosithée, et s’occupa exclusivement de repousser la doctrine protestante, surtout la doctrine attribuée à Cyrille Lucaris.

Tout en s’occupant de la réfutation du protestantisme, les candidats au trône œcuménique n’oubliaient pas leurs propres intérêts. Je n’en veux comme preuve que les exemples cités par un anglican, le chevalier Ricaut, qui séjourna à Constantinople en 1678 et qui nous a laissé un livre fort curieux, intitulé : Histoire de l’estat présent de l’Eglise grecque et de V Eglise arménienne, Middelbourg, 1692 ; ils visent la période allant de 1670 à 1678. « En l’an 1670, Méthodius estoit patriarche de Constantinople. Il n’y avoit que peu de temps qu’il possédoit cette dignité, quand il fut contraint par Parthénius de la quitter en diligence et de mandier un asyle chez l’ambassadeur d’Angleterre… Parthénius, qui supplanta Méthodius, estoit riche, fort connu et fort estimé à la Porte. Mais son crédit et ses richesses n’empêchèrent pas qu’au bout de l’an il ne fist place à Denis, évêque de Larisse. Le nouveau patriarche, non content d’avoir fait reléguer dans l’isle de Rhodes son prédécesseur, le fit encore excommunier. Il voulut même que sa sentence d’excommunication fust prononcée à haute voix, dans un synode ou dans une assemblée de tous les évêques, , qui estoient alors à Constantinople. Denis ne fut guéres plus heureux que Parthénius. La femme de Panaïoti, interprète du grandvizir, lui donna de l’occupation et du chagrin… Il s’en fit une ennemie irréconciliable. Panaïoti entra dans les sentiments de sa femme et résolut de se venger du patriarche. L’occasion s’en présenta peu après. Gérasime, évêque de Tirnovo sur les frontières de Valachie, parut comme prétendant à la première dignité de l’Église. Il ne pouvoit mieux s’adresser qu’à Panaïoti qui, estant Grec et ayant l’oreille du premier vizir, estoit très propre à le conduire. Et en effet cet interprète… agit avec tant de diligence et de chaleur, que Gérasime obtint le patriarchat. Denis fut donc déposé ; et il falut qu’il se contentastde l’évêché de Philippopolis, où il demeura en qualité de proédros. Parthénius apprit dans son exil de Rhodes tous ces changements. Il ne douta point dans les dispositions où estoit la Porte, qu’à la faveur des richesses qu’il avoit eu soin d’amasser, lorsqu’il estoit patriarche, il ne pust se rétablir… Peu après la mort de Panaïoti, le protecteur de Gérasime, il brigua si puissamment que, bien qu’il eust de grandes difficultés à surmonter, et malgré les anathèmes lancez contre lui, il emporta le patriarchat. Mais il ne le posséda pas longtemps. Denis, évêque de Philippopolis, marcha sur ses traces et le supplanta pour une seconde fois. C’est ce Denys, qui est à présent (1678) dans le siège de Constantinople, jusqu’à ce qu’un autre, qui fera de nouvelles offres, le dépouille de sa dignité. » Ricaut, op. cit., p. 109-113. On ne saurait mieux dire, tant cette dernière phrase résume bien l’histoire de la Grande Église, depuis qu’elle est placée sous la domination ottomane. Et ne convient-il pas de faire nôtre la réflexion de Ricaut, op. cit., p. 113, après cette triste énumération : « En cette disposition d’affaires, ne peut-on pas dire que le Grand Seigneur est le véritable chef de l’Église grecque, et le seul arbitre des différens qui y arrivent ? »

XX. Les patriarches des deux derniers siècles. — De Callinique II (1694-1702), qui ferme le xviie siècle et ouvre le XVIIIe, jusqu’à Néophyte VII (1798-1801), qui clôt le xviiie siècle, nous avons 31 patriarcats ; ce qui

donne une durée moyenne de trois ans pour chacun d’eux. Mais si nous avons 31 patriarcats, nous ne trouvons que 25 patriarches, par suite du retour au pouvoir de quelques-uns des titulaires. Ainsi, six patriarches ont exercé la charge suprême par deux fois, à savoir : Cyprien, Jérémie III. Néophyte VI* Cyrille Y, Samuel, Néophyte VII ; un autre, Païsios II, est monté quatre fois sur la chaire patriarcale en l’espace de 25 ans. Le plus long patriarcat est celui de Jérémie III, qui resta en charge, la première fois, plus de dix ans, du 23 mars 1716 au 19 novembre 1726 ; le plus court, celui de son successeur, Callinique III, qui mourut de joie, en apprenant la nouvelle de son élection. Ce dernier patriarche mourut donc sur son siège, privilège rare à Byzance, qu’il ne partagea, au cours du xviii e siècle, qu’avec quatre de ses collègues : Callinique II en 1702, Gabriel III en 1707, Sophrone II en 1780 et Gabriel IV en 1785. Tous les autres furent contraints de donner leur démission ou de subir leur déposition. Notons encore que Néophyte V, métropolite d’Héraclée, élu vers la fin de novembre 1707, n’obtint pas la confirmation du gouvernement impérial ; il ne put donc pas prendre possession de son siège. Et touchant le patriarche Athanase V, remarquons qu’il fut déposé en 1711, parce qu’il aurait innové en matière de foi et se serait montré trop favorable aux idées occidentales, c’est-à-dire au catholicisme. Un fait important qui se déroula au cours du xviiie siècle, c’est l’organisation de la dette à payer par chaque patriarche lors de son élection. Depuis que les compatriotes de Syméon de Trébizonde avaient mis pour ainsi dire aux enchères le patriarcat œcuménique, chaque élection de patriarche entraînait des dépenses considérables ; comme c’était la caisse patriarcale qui en supportait les frais, les ambitieux se livraient à mille intrigues pour arriver. Ainsi, Païsios II, élu le 20 novembre 1726, trouva que la dette du patriarcat s’élevait à 100769 piastres, c’est-à-dire 400000 francs environ, du fait de la nomination de Jérémie III, son prédécesseur, alors que sa propre élection avait coûté 36400 piastres, c’est-à-dire 145 000 francs. Pour barrer la route aux intrigants, le sultan Moustapha III décréta en 1759, que tout nouveau patriarche payerait désormais à ses frais les dépenses de son élection, qui s’élevaient alors à 120000 francs de notre monnaie. Et les historiens grecs d’applaudir à cette mesure, qui accordait à l’Église une plus grande indépendance pour la nomination de ses pasteurs. Un autre fait capital se place encore au XVIIIe siècle, la suppression de l’archevêché serbe d’Ipek, le Il septembre 1766, et celle de l’archevêché gréco-bulgare d’Ochrida, le 16 janvier 1767. Qu’il suffise de noter ici cette double suppression, qui a été signalée, voir Bulgarie, t. ii, col. 1200 sq., et sera étudiée ailleurs, voir Serbie, et de constater qu’en s’annexant injustement deux vieilles Églises, le patriarcat œcuménique posait pour le xixe siècle la question des nationalités.

Le fait théologique le plus intéressant de teut le xv]iie siècle, c’est l’affaire de la rebaptisation. La doctrine de l’Église orthodoxe sur ce point se laisse assez aisément reconnaître et il semble bien que, du IXe au xviiie siècle, la rebaptisation des Latins n’a jamais été admise par l’Église byzantine, comme un point de discipline incontestable. En de rares circonstances, il j avait eu des exceptions, inspirées par l’ignorance et par le fanatisme, mais qui n’avaient jamais reçu d’approbation formelle. C’est ainsi que le patriarche Cyprien (1708-1709), interrogé sur la validité du baptême latin, répondit qu’il ne fallait pas en douter ; c’est ainsi encore que Jérémie III, dans sa réponse du 31 août 1718 à Pierre le Grand, s’appuie sur la décision de son prédécesseur et affirme que l’onction du chrême est suffisante pour transformer des protestants en parfaits orthodoxes. Or, vers le milieu de ce même siècle, le moine Auxentios,