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que la principale a été reconnue. Le Christ étant Dieu et homme, oublier qu’il est I lieu pour ne l’honorer que comme humain, seraii lui manquer gravement, et pécher contre toutes les lois du culte. Les mages ont pu olliir l’or au roi Jésus, et la myrrhe à l’enfant mortel, mais après qu’ils avaient résolu de lui offrir l’encens comme à un Dieu. Xotre culte doit donc toujours s’adresser au Dieu en même temps qu’à l’homme ; il a pour terme la personne divine qui s’est unie à l’homme et dés lors un seul culte est possible, celui de latrie. Les jansénistes s’imaginaient que l’Église faisait abstraction en Jésus de la divinité et accordait à l’humanité un culte de latrie : c’était une calomnie. Sans doute l’humanité séparée ne mérite pas un culte de latrie, mais historiquement et dans le culte, elle ne fut jamais et n’est jamais séparée de la divinité et c’est à juste titre que Pie Via condamné la proposition pistorienne rapportée plus haut. — 3. L’humanité du Christ a passé pur plusieurs phases : phase de vie mortelle, phase de mort et de sépulture, phase de vie eucharistique et phase simultanée de vie glorieuse dans le ciel. Dans aucune de ces phases elle ne fut séparée du Verbe ; même pendant les trois jours de mort, l’âme et le corps de Jésus étaient séparés l’un de l’autre, mais l’un et l’autre étaient hypostatiquement unis au Fils de Dieu. L’union hypostatique autorisant, exigeant même le culte de latrie pour tous les éléments unis au Verbe, le corps et l’âme deNotre-Seigneur, son humanité furent toujours et sont toujours adorables d’un culte de latrie. Le corps ressuscité du Sauveur reçoit les adorations des élus ; son corps eucharistique doit recevoir et reçoit les nôtres. Les espèces eucharistiques, ne faisant qu’un tout, même accidentel, avec Notre-Seigneur, sont coadorées avec lui, comme la pourpre du roi est vénérée dans le même acte qui vénère la personne et la majesté royales. Nous disons qu’elles sont coadorées, alors que cette expression est prohibée pour l’humanité du Christ. La raison est visible. Il y a union hypostatique entre l’homme et le Dieu dans le Sauveur ; dans l’eucharistie, il n’y a pas union hypostatique entre Notre-Seigneur et les espèces eucharistiques. Celles-ci peuvent donc être coadorées avec Xotre-Seigneur. Mais si on les considère isolément, le culte qu’on leur accordera ne sera que relatif. — 4. Ce culte de l’eucharistie nous amène à remarquer l’opportunité du culte des divers mystères de la vie de Notre-Seigneur. Par sa nature humaine Notre-Seigneur se manifeste à nous, et met sous nos yeux et nos sens une portion de son être par laquelle se révèlent sa divinité, sa bonté infinie, son amour, sa miséricorde, sa sagesse et sa toute-puissance. Cette nature humaine, étant unie à la personne du Verbe, est adorable et son apparition facilite notre culte en nous rendant sensible la charité du Verbe incarné. Or, chacun des mystères de la vie du Sauveur, sa conception, sa naissance, son enfance, sa vie cachée, sa prédication, ses discours et ses miracles, sa passion, son agonie et sa mort, sa résurrection, ses apparitions, son ascension, sont autant de révélations de sa bonté, de son humanité adorable ou de sa divinité. Dans ces faits théandriques, nous retrouvons l’objet de notre adoration, avec les raisons mêmes de cette adoration. Dès lors, il est juste d’avoir un culte pour chacun de ces mystères, à condition de vénérer en eux, non le fait simple, mais le Christ qui en eux exerce et nous montre les délicatesses de sa providence sur nous et y dévoile les trésors de ses perfections infinies. Cf. Franzelin, De Verbo incamato, th. xlv, Rome, 1874, p. 467.

V. Histoire du culte.

Nous n’avons pas à entrer dans les détails du culte, ni dans la description des formes qu’il a prises ou qu’il prend maintenant. Tout cela concerne la liturgie. Un rapide coup d’oeil sur l’histoire du culte en éclairera les raisons théologiques et établira sa valeur dogmatique.

I" Nous possédons peu de choses sur le culte rendu à Dieu par les patriarches ; cependant nous retrou dans leur religion, la forme la plus haute du culte, le sacrifice. Abel, Caïn, Noé offrent a Dieu des sacrifices. Gen., iv, 3 sq, ; viii, 21. Cet usage est. du reste, tellement répanda parmi les peuples, tellement universel, qu’il faut bien reconnaître qu’il puise ses racines dans l’instinct religieux le plus profond, ou qu’il remonte à une institution tout à fait primitive. Évidemment les sacrifices étaient accompagnés de prières, de supplications, ils enveloppaient une Reconnaissance expresse de la majesté divine : autant de manifestations du culte. D’Lnos il est dit qu’il commença d’invoquer le nom de Dieu, Gen., iv. 26, ce qu’il faut entendre d’un culte public inauguré par cet apôtre de la religion familiale et nationale. L’oubli des leçons du déluge laissa naître et grandir l’idolâtrie. Dans le Ilot montant de l’erreur Dieu sauva une épave, Abraham ; il le choisit et en fit un patriarche, le père d’un peuple nouveau, chez lequel seraient conservées les traditions et les pratiques du vrai culte. Abraham comprit sa mission et nombreux sont les autels qu’il éleva soit pour y olfrir des sacrifices, soit pour en faire des monuments durables de la fidélité à Dieu et de sa reconnaissance pour les bienfaits du ciel. Gen., xii, 7, 8 ; xiii. 4, 18. Dieu, du reste, lui avait fait savoir quelles victimes lui étaient agréables. Gen., xv, 9. Puis par l’institution du rite de la circoncision, Dieu avait conclu avec Abraham et ses descendants un pacte qui faisait de ceux-ci le peuple choisi pour la conservation du culte divin dans la race humaine. Les repas annexés aux sacrifices se rencontrentaussi dansl’histoiredespatriarches. Gen., xxxi, 54 ; xlvi, 1. A l’instar des autels élevés en souvenir des apparitions de Dieu, des pierres étaient parfois choisies, établies et consacrées par l’huile sainte. Gen.. XXVIII, 18 ; xxxv. 14. Il n’y a pas jusqu’à ces deux formes de la religion, le vœu et le serment, qui n’aient été connues et pratiquées à l’époque patriarcale. Gen., xxviii, 20 ; xxxi, 53 ; xxiv, 3. Voir Hagen, Lexicon biblicum, v° Cultus, Paris, 1905, t. i. p. 1020.

2° Moïse, sous l’inspiration de Dieu, rédigea un code cultuel très riche et très détaillé. Ses prescriptions religieuses sont destinées, les unes à rappeler des souvenirs où la bonté de Dieu s’est traduite d’une façon plus éclatante, les autres à maintenir un peuple encore sensuel par le frein de nombreuses pratiques religieuses et aussi à donner à ce peuple, en face des nations, un caractère propre nettement déterminé. Le cérémonial de Moïse ne laisse rien au hasard ; les actes sacrés, en particulier toute la liturgie des sacrifices et des fêtes, les lieux saints, le tabernacle, les objets du culte, les jours saints, les personnes consacrées au culte, prêtres et lévites, les aliments purs et impurs, les impuretés légales ou irrégularités, tous ces points sont fixés nettement par le législateur des Hébreux. Cf. Wilmers, Histoire de la religion, § 32, trad. franc., Paris, 1898, t. i, p. 128 sq. ; Pelt, Histoire de l’Ancien Testament, c. xx, Paris, 1904, t. i. p. 234 sq. ;, Cornely Inllt)ductio specialis in Itistoricos Yetcri* Testamenti libros, diss. I, 1. 1, c. i, S 6. Paris, 1887. p. 128 sq.

A ce culte extérieur et public devait être joint un culte intérieur formé des sentiments et de la sincérité de l’âme : la loi le prescrivait et les prophètes ne cessent de le rappeler. Vous aimerez le Seigneur de tout votre cœur, est-il dit aux Hébreux. Deut., v. 29 ; vi. 5 ; vin. 3 ; x, 12 ; xi, 1 ; xxx, 16. 20. Les prophètes rappellent souvent que tout n’est pas fini avec les cérémonies légales et que celles-ci auront peu de prix aux yeux de Dieu si la piété et la religion ne les accompagnent et ne les animent. I Reg., xv, 22 ; Ps. xlix. 15.23 ; Is.. i. 11 ; il, 5 ; xii, 1 sq. : xxviii, 12 ; LV, 3 ; i.vin. 5 sq. ; lxvi, 2 ;.1er., vii, 3 ; Ose., vi, 6 ; Amos, v, 14, 15 ; Mich., iii, 11 ; vi, 8. Cf. Exod., xix. 5-8 ;.1er., vii, 22, 23.