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4843 CORAN (POLÉMIQUE CHRÉTIENNE CONTRE LE CORAN) — CORAS 1844

glais ut français lui ont dédié de véritables panégyriques. Caryle le proclamait un demi-dieu, un de ces hommes providentiels qui ont légitimement enchaîné ou fasciné une partie de l’espèce humaine. Imberdis exalte le Coran, livre majestueux qui à côté du monde idéal fait une large part aux passions de la terre, Mahomet et l’islam, étude historique, Paris, 1876, p. 126, et invite les musulmans et les chrétiens à se mettre d’accord, à se traiter en frères pour le fond et pour la forme, p. 173. Renan aflirmait n’être jamais entré dans une mosquée sans une vive émotion, sans un certain regret de n’être pas musulman. Montet, La propagande chrétienne et ses adversaires musulmans, Paris, 1890, p. 17-18. Barthélémy Saint-Hilaire se montra plein d’admiration pour la doctrine religieuse et morale du Coran. D’après Meynier, Mahomet est sans contredit la plus étonnante personnalité de son époque, une des plus grandes figures de l’histoire, et la morale du Coran ne laisse pas d’être quelquefois sublime. Étude sur l’islamisme et le mariage des Arabes en Algérie, Paris, 1868, p. v, 27. Lake a même comparé Mahomet à Jeanne d’Arc et a trouvé que leurs visions offrent une ressemblance frappante. Islam, its origin, genius and mission, Londres, 1878, p. 39. Boswort Smith a comparé le Coran au christianisme dans leurs doctrines et dans leur développement historique, et a prétendu que les reproches adressés aux musulmans en raison de leurs croyances religieuses peuvent aussi être faits aux chrétiens. Mohammed and Moltammedanism, Londres, 1876, p. 233, 356-357. Vambéry s’est plu à abaisser le christianisme devant le Coran. Der Islam im neunzehnlen Jahrhundert, Leipzig, 1875, p. 238-264. Le D r Hans Batch, Tùrke, wehre dich, Leipzig, 1898, clans sa défense de la religion coranique, en est arrivé jusqu’à la haine du christianisme. Le comte Henry de Castries, dans ses Impressions et études sur l’islam, Paris, 1899, s’est appliqué à montrer que les reproches des polémistes chrétiens contre la polygamie, l’intolérance et le fatalisme prêches par le Coran, sont dénués de fondement.

Et à côté de ces écrivains de l’Occident, qui se flattent d’avoir rétabli la vérité historique sur l’œuvre de Mahomet, des musulmans commencent à faire l’apologie du Coran. A Constantinople, un rédacteur du Maalumat, Zéki bey, a écrit un Essai sur la culture islamique, traduit en français, où il tâche de démontrer que le Coran n’a jamais été un obstacle à la civilisation et au progrès. En Russie, le représentant le plus autorisé de la défense de l’islam est l’imam Baïazitov, qui en 1887 publiait en russe la première apologie scientifique de l’islam, Otnoclieniia islama k naukie i k inovierlzam (Les relations de l’islam avec la science et les hétérodoxes), Saint-Pétersbourg, 1887 ; La réponse au discours de Renan sur l’islam et la science, Saint-Pétersbourg, 1883, et Islam i progress, Saint-Pétersbourg, 1898, tendant à présenter le Coran comme un code religieux qui, au point de vue de la morale et de l’influence civilisatrice, n’a rien à envier à l’Évangile. Les musulmans des Indes anglaises ont trouvé leur meilleur apologiste de l’islam dans Syed Ameer Aly, pour qui la religion de Mahomet est la religion idéale. The life and leachings of Mohammed, or the spiril of islam, Londres, 1891, p. 281.

Tous ces efforts pour la réhabilitation du Coran n’ont pas été inutiles. On a éloigné de la vie de Mahomet ce qu’il y avait de légendaire, voire même les appréciations injustes que l’on rencontre si fréquemment dans les écrits de polémistes chrétiens. Le Coran est apparu sous un jour plus favorable, et l’on s’est aperçu sans peine que, comme code religieux, il n’est pas un amas de niaiseries ou de doctrines infâmes et impies. Il n’y a aucun danger à le reconnaître, en particulier si l’on relléchilquelelégislateurduCorana puisé dans l’Ancien

et le Nouveau Testament. Les apologistes même les plus fougueux du christianisme contre l’islam ont rendu parfois justice au Coran, et ont reconnu les bons côtés de son influence morale. Ricold de Montecroix ne cachait pas son étonnement à ce sujet : Obstupuinn’S quomodo in lege tanlae per/idiæ polerant opéra tanlae perfectionis invenin.., Quis enim non obslupescel, si diiigenter consideret quanta in ipsis Sarracenis sollicitudo ad sludium, devocio in oralione, misericordia ad paupercs, reverencia ad nomen Dei, et prophetas, in loco sancto, gravitas inmoribus, a/Jabilitas adexlraneos, concordia et amor ad suos. Cf. Arnold, p. 345. Marracci est du même avis.

Mais en admettant la vérité partielle de la récente apologie de l’islam, on ne peut s’empêcher de regretter la partialité, et bien souvent la fausseté de la méthode de ses tenants. Ils agencent quelques textes du Coran pour en déduire que l’islam marche de pair avec le christianisme dans la voie du progrès, que l’on se tromperait fort en lui attribuant l’état de stagnation morale et intellectuelle dans lequel se trouve le monde musulman. Ils ne veulent pas convenir que le Coran contient des doctrines qui pourraient difficilement s’accorder avec l’idée du progrès et l’élévation morale de l’humanité. Sous la plume de ces apologistes de L’islam, le paradis de Mahomet, malgré les textes explicites du Coran, n’est pas un séjour de voluptueux ; le fatalisme musulman n’implique pas le renoncement à l’esprit d’initiative, aux efforts personnels, aux énergies de l’âme ; on s’évertue même à découvrir dans le Coran que l’inlolérance du fanatisme musulman n’est pas un dogme de Mahomet. La civilisation des Maures en Espagne est surtout l’argument préféré de ceux qui veulent réconcilier l’islam avec la société moderne. L’on oublie aisément que l’arbre se juge à ses fruits, et que les conditions actuelles du monde musulman, partout où le croissant a été arboré, est la meilleure réfutation de l’optimisme de ces apologistes. Le tort principal de ceux-ci est de mettre la religion de Mahomet sur le pied d’égalité avec la religion du Christ. Leur prétention n’aboutit qu’à mettre plus en relief les taches originelles de l’islam.

On pourrait à la rigueur soutenir que le code religieux de Mahomet, à cause de son monothéisme, peut servir de trait d’union entre les religions inférieures de l’humanité et le christianisme. Les peuplades sauvages ou moins civilisées, en passant à travers l’islam, pourraient atteindre le Christ. Après avoir admis l’unité de Dieu, le dogme fondamental du Coran, il serait plus aisé ensuite de comprendre le christianisme. Des historiens de l’Église, tels qu’Hergenrœther, ont partagé cette opinion. Voir De Castries, p. 253. Malheureusement l’expérience de plusieurs siècles a démontré que cet espoir est chimérique. L’islam n’a pas d’apostat. Les antinomies entre l’Évangile et le Coran ne s’effaceront jamais, et l’islam ou bien reculera lentement devant le christianisme, ou même vivra à ses côtés, en évitant tout contact avec lui, en le regardant toujours comme un étranger, dont il faut détester la foi, la puissance matérielle et même les conquêtes de sa civilisation.

Réville, Une apologie anglaise de Vislamisme, dans la Revue des Deux Mondes, 1° juillet 1877, p. 125-155 ; Zarinsky, ApoUh gia Izlamizma, dans Prav. Sobesiednik, 1878, t. ii, p. 134-100, ’252-288 ; Osman bey Kibrisli Zadé, // genio dell’islamismo, Turin, 1890 ; Krymsky, Musulmanstvo i ego buduchtchnost (/.e mahométisme et son avenir), Moscou, 1892, p. 105-114 ; Palmier !, Die Polemik des fslams, p. 82-137 ; Ostrooumov, Koran i progress, Tachkent, 1003, p. 230-248.

A. Palmieri.

    1. CORAS (Jacques de)##


CORAS (Jacques de), poète français, né à Toulouse

en 1630, mort en 1677. Par sa famille il appartenait à

la religion réformée. Il suivit d’abord le métier des

armes, puis étudia la théologie et fut ministre en