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CONTROVERSE


sirent beaucoup de personnages dont la science égale la piété… Parmi les théologiens catholiques, aucun n’a combattu par la plume, la parole et les actes, comme nous l’avons fait avec l’aide de Dieu, le P. de Gouda et moi. Plus d’une fois, le temps nous fit défaut pour célébrer la messe. C’est merveille qu’au milieu de si grandes fatigues, nous ayons conservé notre vigueur d’esprit et nos forces corporelles. » Braunsberger, op. cit., t. il, epist. cclxxi. Le même jour, 6 décembre, Canisius adressait à Jules Pllug un mémoire dans lequel il fait l’histoire des débats et justifie la conduite des catholiques. Ibid., epist. cclxix. Cf. Hergenrœther, loc. cit., n. 262, t. v, p. 597-599 ; Janssen, op. cit., t. iv, p. 19-31 ; Forner, Historia liactenus sepulta colloquii Wormat tenais, Ingolstadt, 1624. Voir Canisius, t. ii, col. 1514-1515. 11. Conférence à Bade, 18 novembre 1589, entre Pistorius, Jacques Andréa et Jacques Ueerbrand ; conférence à Emmendingen, 1590, entre Georges llànlin et Pappus. » — Pour achever la série des colloques entre catholiques et protestants en Allemagne, il convient de mentionner encore deux conférences tenues dans le grand-duché actuel de Bade. Elles ne présentent plus le caractère d’intérêt général de celles précédemment rapportées, et une conversion particulière en fut la raison d’être. Le margrave Jacques de Baden-Durlach élait résolu à embrasser la religion catholique ; de fait, il abjura le 15 juillet 1590 et mourut le 17 août suivant. Or, pour justifier sa détermination, il eut l’idée de recourir à une conférence religieuse, qui se tiendrait en sa présenceet à laquelle il pourrait au besoin prendre part. Fixée d’abord au

10 février 1589, elle commença seulement le 18 novembre, au château de Bade, et fut soutenue par Pistorius et deux théologiens luthériens de Tubingue, Jacques Andréa et Jacques Heerbrand. L’on devait, en s’appuyant sur l’Écriture sainte, discuter sur la véritable Église du Christ et puis sur les autres articles de la foi.

Il avait été stipulé que les débats se dérouleraient en observant la forme scientifique et les règles de la dialectique. Mais à la VIe séance, Pistorius et Andréa descendaient jusqu’à des subtilités sur le point de savoir s’il peut exister des hérétiques dans l’Église. Alors les théologiens de Tubingue refusèrent d’argumenter plus longtemps selon les règles de la dialectique, et le margrave prit le parti de dissoudre la conférence.

Il en réunit une seconde à Emmendingen, dans le comté de Hochberg, en 1590. Le docteur Georges Hànlin, de Fribourg, catholique, s’y trouva aux prises avec le protestant Pappus, de Strasbourg. Le margrave présidait et prit même la parole. En quatre jours et sept séances, l’on envisagea, sous tous ses aspects, cette question : L’Église est-elle toujours visible, et où était-elle avant Luther ? Aucune entente ne fut possible. Kirclienlexikon, t. iii, col. 1853 ; J. Pistorius, Jacobs Martgrafen von Baden Bekehrungsmolive, Cologne, 1591 ; Fecht, Historia colloquii Emendingensis, Bostock, 1594.

Colloques entre protestants.

Les divisions inévitables

que le principe même du protestantisme devait semer parmi les nouveaux croyants, ne tardèrent pas à germer. Elles occasionnèrent aussi des colloques, et ils furent, au point de vue de l’union poursuivie, tout autant stériles que les conférences avec les catholiques.

1. Conférence de Marbourg, 1-30 octobre 1529, entre zwingliens : Zwingle, Œcolampade, Bucer, Bedio, et luthériens : Luther, Mélanchtlton, Jonas, Osiandre, Agricola, Brenz. — Zwingliens et luthériens étaient profondément divisés. Les premiers rejetaient l’eucharistie, toute présence réelle et toute communion ; les seconds en étaient venus à la théorie de l’impanation et de l’ubiquité, afin de retenir la présence réelle au moment de la communion, tout en reniant la consécration et le sacrifice. Luther ne dissimulait pas la gravité de ces dissensions. Pour lui, Zwingle s’était

totalement séparé’du Christ, ses livres étaient aussi dangereux que le poison de l’enfer, toute sa science n’était que bavardages et invectives. Cependant les villes du sud de l’Allemagne se montraient favorables à Zwingle. C’est alors que dans une pensée de politique personnelle, le landgrave Philippe de Hesse, assez porté vers le zwinglianisme, voulut tenter l’union des deux partis, et choisit le moyen d’une conférence qu’il indiqua pour le 1 er octobre 1529, à Marbourg. Du coté des zwingliens, on y vit Zwingle d’abord, Œcolampade, Bucer et Gaspard Hedio de Strasbourg, disciple de Capito, absolument dominé par Bucer. Du côté des luthériens, vinrent Luther. Mélanchthon, Juste Jonas, Osiandre, Etienne Agricola et Jean Brenz, encouragés par l’électeur de Saxe, Jean Frédéric. Malgré que les zwingliens se soient montrés plus condescendants que leurs adversaires, il fut néanmoins impossible de s’entendre sur la doctrine de l’eucharistie. Luther maintint son dogme de la consubstantiation. Le corps de Jésus-Christ, disait-il, est dans le pain comme l’épée dans le fourreau ; les paroles de Jésus-Christ sont un discours abrégé, comme lorsqu’on parle d’une épée et qu’on a également en vue le fourreau. A mesure qu’avançait la conférence, les esprits devinrent plus excités et plus séparés que jamais. Les zwingliens se plaignaient de l’attitude blessante de leurs adversaires, et s’attribuèrent la victoire aussi bien que ceux-ci. Toutefois pour ne pas clore les réunions sans résultat que l’on pût montrer au public, l’on dressa quinze articles de foi et d’union sur lesquels on était plus ou moins d’accord, et on les signa le 30 octobre. Ces articles concernaient la trinité, la rédemption, la foi et la justification, l’autorité. L’art. 13 définit la tradition : des règlements humains portés sur des objets spirituels ou ecclésiastiques ; quand elle n’est pas contraire à la parole de Dieu, on est libre de l’observer ou de la négliger. L’art. 14 approuve le baptême des enfants. L’art. 15 déclare que l’on doit user de l’eucharistie. Bien que l’on ne put s’entendre sur la doctrine eucharistique, on convint qu’il fallait témoigner aux autres de la charité chrétienne, tant que la conscience le permettait et demander à Dieu, dans la prière, la véritable intelligence. Malgré cette résolution Luther ne cessa point de considérer comme hérétique la doctrine de Zwingle ; et de leur cùté les zwingliens persistèrent à rejeter les 17 articles de Torgau, dans lesquels, avant les réunions, Luther avait consigné les conditions possibles de l’union mutuelle. Bucer attribuait à Mélanchthon tout l’insuccès de la conférence : il n’a cessé, disait-il, de jeter de l’huile sur le feu. Hergenrœther, loc. cit., n. 74-75, t. v, p. 298-301 ; Janssen, op. cit., t. iii, p. 166-168 ; Kirchenlexikon, t. III, col. 1842-1844.

2. Concorde de Wittenberg, mai 1530, entre lutlœriens et zwingliens. — Comme plusieurs villes d’Allemagne se montraient favorables aux opinions de Zwingle, Bucer entra en négociations avec Mélanchthon d’abord, à Cassel, puis avec Luther, à Wittenberg. Dans la Concorde de cette dernière ville, on abandonna, en apparence seulement, le sentiment de Zwingle sur l’eucharistie. Hergenrœther, loc. cit., n. 85. p. 316-317.

3. Dispute de Leipzig, 1550, entre syner gis tes (Jean Pfeffinger) et luthériens rigides. — Jean Pfeffinger, nommé professeur à l’université de Leipzig en 1519, enseignait la nécessité de la coopération de l’homme’dans l’œuvre de sa conversion. L’année suivante, 1550, il soutint publiquement cette doctrine dans une dispute. De là. un grand scandale chez les luthériens rigides. Flacius et Amsdorff s’en firent l’écho dans des écrits virulents contre la « très savante et impie bande de Leipzig » , composée de « chrétiens renégats » et de « mameluks » . Hergenrœther, loc. cit., n. 218, t. v, p. 523 : J. Dœlliimer. Die Reformation, Batisbonne, 1816-1848, t. ii, p. 119 sq., 320-328 ; t. iii, p. 437-493.