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CONTRAT


fait dont l’appréciation est souvent délicate. Donnons des exemples. En voici un emprunté à Pothier : J’achète une paire de chandeliers que je crois être en argent et que le marchand m’a présentés de bonne foi comme tels, mais qui ne sont en réalité que du cuivre argenté. Il y a erreur sur la qualité substantielle de la chose et la vente est nulle, car voulant acheter des chandeliers d’argent, si j’avais su que ceux qu’on m’offrait étaient de cuivre, je ne les aurais certainement pas achetés. Cependant, si les chandeliers avaient été achetés comme objet d’art ou comme antiquité, l’erreur sur la matière pourrait n’être pas substantielle : la matière étant d’importance tout à fait secondaire pour un antiquaire.

Autre exemple : Pierre achète du vin d’office pour ses domestiques ; il avait demandé du bordeaux, le marchand lui envoie du bourgogne ; la convention reste valable. Si. au contraire, il avait demandé, pour le conserver, du vin de Bordeaux d’un cru coté, l’acheteur aurait le droit d’exiger la résiliation de la vente, dans le cas où le marchand lui aurait envoyé un autre vin. Il est évident, en effet, que dans l’espèce, le crû, l’année même du vin sont une condition sine qua non de la convention.

Paul a acheté des titres qui, à son insu, étaient amortis, c’est-à-dire appelés au remboursement par le tirage au sort au moment de la vente. Il y a erreur de sa part sur une qualité substantielle de la chose ; il la croyait productive d’intérêts et en réalité elle ne l’était plus. La vente est donc nulle.

L’erreur sur les qualités accidentelles de l’objet n’est pas une cause de nullité, Code civil, a. 1110 ; le législateur a voulu assurer parla la stabilité des conventions. Toutefois, au for de la conscience, les contrats gratuits sont nuls par le fait d’une erreur accidentelle antécédente, c’est-à-dire cause de l’engagement. Le contrat gratuit, parce qu’il procède d’une pure libéralité, exige une spontanéité pleine et entière. Telle est l’opinion la pluscommune parmi les moralistes. Bulot, n. G98 ; Lugo ; Reuter, n. 115. Tous, d’ailleurs, admettent que dans ce cas, le contrat est annulable au gré de la partie victime de l’erreur.

En principe et dans les contrats onéreux, l’erreur sur la personne avec laquelle on contracte n’est pas une cause de nullité. Ainsi un libraire vend un livre qu’on lui paie comptant ; peu lui importe que ce soit à Pierre ou à Paul, l’erreur est ici indifférente.

Toutefois, lorsque la considération de la personne est la cause principale de la convention, l’erreur devient un motil’de nullité. Ceci a toujours lieu dans le contrat de mariage ou de fiançailles, très souvent aussi dans les contrats gratuits, la donalion par exemple. Étant inspirée par un sentiment de bienveillance et d’affection tout personnel, s’il y a eu de la part du donateur erreur sur la personne du donataire, la donation est nulle.

ii. I.’i violence. — La violence exercée sur quelqu’un

pour le contraindre à an acte peu ! être physique ou

morale. Quand elle est physique, c’est-à-dire quand on

forer matériellement la main, il n’v a ni volonté-,

nsentement, et donc pas de convention. La violence

al morale, quand nous nous résignons à faire quelque

h rr ; urii" de nous exposer à un mal.

La crainte 06 celle qui provient d’une cause’jamais le consentement nul ou annulable, que la crainte soit grave ou légère. En effet, relui qui est sous l’empire de la crainte peu !

de consentir en subissant le mal auquel il est exposé. D’autre pari, la crainte provenant de i i naturelles ne viole aucun des droits du contractant. Le consentement reste donc libn pen dant qu’elle atteigne un degré tel qu’elle enlève l’usage de i.i i lison.

La violence morale, pourvu qu’elle soit juste, ne bl pas la alidilé du ( nt. I ne june fille a été

séduite par un jeune homme ; le père de celle-ci va trouver le séducteur, et par des menaces obtient de lui une promesse de mariage, pour réparer le tort causé à la malheureuse. Comme en l’espèce la violence morale est juste, la promesse de mariage est valide. Cf. Bulot, n. 701 ; Lessius, 1. II, c. xvii, n. 41.

La crainte légère est réputée au for extérieur n’avoir aucun effet sur la validité des contrats de bie-nfaisance. Au point de vue de la conscience, la crainte légère qui a été la cause du consentement rend ces sortes de contrats nuls ou du moins annulables. Il en va de même, à plus forte raison, pour la crainte grave. Il est, en effet, essentiel au contrat gratuit de procéder d’une libéralité absolument spontanée. Reuter, n. 12V ; Molina, Lessius, etc.

Dans les contrats, au contraire (sauf peut-être les fiançailles), la crainte légère ne rend le contrat ni nul ni annulable. Par le fait même qu’on la suppose légère, la crainte est sans influence prépondérante sur le contrat et par conséquent incapable de vicier profondément le consentement. Lehmkuhl, n. 1065 ; Marrés, 1. III, n. 99.

La seule crainte révérentielle envers le père et la mère, ou tout autre ascendant, ne suffit pas, en soi, pour annuler le contrat. Code civil, a. 1114. Au for extérieur, les caractères que doit avoir la violence pour entraîner la nullité d’un contrat sont indiqués par l’art. 1112 ainsi conçu : « Il y a violence lorsqu’elle est de nature à faire impression sur une personne raisonnable, et qu’elle peut lui inspirer la crainte d’exposer sa personne ou sa fortune à un mal considérable et présent. On a égard en cette matière à l’âge, au sexe et à la condition des personnes. » Ainsi la violence injuste, exercée contre l’un des contractants, l’autorise à demander en justice l’annulation du contrat, alors même que la violence qu’il a subie n’aurait pas été exercée envers la personne même avec laquelle il a contracté. Code civil, a. 1111, 1117.

Au point de vue de la conscience, la question est controversée. Plusieurs théologiens soutiennent la nullité radicale du contrat onéreux, passé dans ces conditions. Le consentement donné, ainsi raisonnent-ils, provient d’un acte injuste. Or, l’injustice ne saurait former un lien de droit. Mais la plupart des docteurs estiment qu’un pareil contrat est simplement annulable. En effet, la violence, fût-elle grave, ne détruit pas la liberté du consentement, et le lien de droit est formé non par l’injustice de la personne qui commet la violence, mais à l’occasion de ou malgré cette injustice, par la libre volonté du contractant. En soi, la convention est donc valable ; mais elle peut être annulée, paire que la parlie qui a commis l’injustice de la violence et le dommage qui en résulte est tenue à réparation, et donc la parlie lésée doit avoir la faculté de résilier l’engagement. Cf. de Lugo, Inc. cit., n. III sq. ; Lehmkuhl. n. 1066, 1007 ; Reuter. n. 123 ; Lacroix, n. 636 ; Bulot, n. 703.

Notons cependant que d’après le droit canon les contrats suivants sont certainement nuls, lorsqu’ils ont été passés sous l’influence d’une violence grave et injuste : a) la profession religieuse et en général tous les vœux ; b) le mariage et les conventions dotales ; contrats concernant les biens <l<- l’Église et la renonciation à un bénéfice ecclésiastique ; d) l’élection d’un prélat et probablement la collation de la juridiction ecclé la itique.

Si la violence subie p ; ir l’un « les contractant ! n’a p.-s lercée par la personne même avec laquelle il a le contrat il l’agll d’un contrat onéreux — Jide. D’une part, en effet, le consentement donné librement ; d’autre part, la eontre-partli i

i M er mu point commise. lia mulli proba-