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CONTRAT

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alors seulement, il y aura promesse obligatoire, la pollicitation sciant transformée en un contrat.

Nous examinerons successivement les qualités du consentement et les vices du consentement.

1. Qualités du consentement.

Pour être valide, le consentement doit être intérieur, externe, mutuel, libre.

a. Intérieur. — Le contrat étant par définition l’accord « le deux ou plusieurs volontés produisant une obligation, exige nécessairement l’existence de ces volontés, c’est-à-dire l’acte réel de vouloir, le consentement intérieur.

D’ailleurs, l’intention d’exécuter la convention n’est pas absolument requise pour la validité du consentement. On peut avoir en même temps la volonté de s’obliger et l’intention, répréhensible sans doute, de manquer plus tard à ses engagements. De ce qui précède concluez que le consentement fictif, c’est-à-dire purement externe, rend le contrat inexistant. Au for extérieur, le consentement exprimé sera toujours réputé valide, sauf preuve du contraire. En outre, au for de la conscience, celui qui a donné un consentement fictif, est tenu de réparer les dommages causés par ce fait, et même de donner un consentement réel, si le dommage ne pouvait être réparé d’une autre manière, par exemple dans le cas du mariage invalide par défaut de consentement intérieur.

b. Externe, c’est-à-dire manifesté par quelque signe sensible. Le contrat exigeant le concours de deux volontés, il s’ensuit que ebacun des contractants doit percevoir la volonté de l’autre partie, ce qui demande une manifestation sensible.

Le droit naturel ne détermine aucun signe particulier pour le consentement et permet de contracter oralement, par écrit, par geste, même par le silence en matière favorable suivant l’axiome : qui tacit consentire videtur. Quant au droit civil, il détermine les conditions de validité du consentement dans certains contrats, tels que la vente, la donation, l’adoption, etc.

c. Mutuel, parce que le consentement est un concours de volontés. Il n’est pas nécessaire d’ailleurs que les deux actes de volonté soient posés simultanément. Tant que la pollicitation subsiste, celui à qui l’offre a été faite peut l’accepter et la transformer en contrat.

d. Libre, c’est-à-dire pleinement délibéré ; s’il n’était le fruit de la liberté et de la délibération, le consentement ne serait plus un acte humain et partant serait incapable de produire l’obligation.

Suffit-il à la formation du contrat valide que la pollicitation ait été acceptée ? Est-il en outre nécessaire que le pollicitant ait pris connaissance de l’acceptation ? Pour résoudre cette question controversée, il y a lieu de distinguer les contrats gratuits et les contrats onéreux. Dans les premiers, dans la donation par exemple, il suffit que la volonté du donateur soit connue et acceptée par le donataire. Par son acte de donner, le possesseur se dépouille de la propriété de l’objet ; dès lors, rien n’empêche le donataire de le l’aire sien par son acceptation. Cette solution est valable en droit naturel, mais le Code civil, a. 932, exige pour la validité de la donation entre vifs que l’acceptation du donataire soit juridiquement constatée.

S’agit-il de contrats onéreux, la doctrine et la jurisprudence sont divisées sur ce point. Plusieurs moralistes, Lebmkuhl, n.1061 ; Haine, n.913 ; Allègre, t. il, appendice i, enseignent que le contrat est parfait dès que la pollicitation est connue et acceptée par la contre-partie sans que le pollicitant ait connaissance de cette acceptation. Cependant plus communément les théologiens tiennent que cette dernière condition est nécessaire à la validité du contrat. Sans doute, au moment où la contrepartie accepte la pollicitation les deux volontés contractant coexistent, mais pour qu’il y ait consentement mutuel et par suite contrat, il ne suffit pas que les volontés coexistent, il faut de plus qu’elles concourent,

c’est-à-dire qu’elles se joignent. Or, elles ne peuvent se ! joindre que si l’acceptation est connue par les deux parties. Cette nécessité est analogue à celle de la promulgation. Pour obliger, la loi doit être promulguée au sujet, c’est-à-dire lui être authentiquernent manifestée. De même, le pollicitant ne peut être lié par la volonté de son co-contractant que si celle-ci lui a été intimée, en quelque sorte promulguée. Bulot, n. G96 ; Génicot, n. 587 ; Marc, n. 1045 ; Marrés, 1. III, n. 52 ; Gury, à la suite de Lugo, disp. XXII, n. 22 ; Lacroix, n. 656 ; d’Annibale, t. ii, p. 330. Ainsi je vous écris pour vous proposer de vous vendre 1000 hectolitres de froment à 20 fr. l’hectolitre ; plusieurs jours se passent, puis vous me répondez que vous acceptez ma proposition. Or, le jour même, ignorant cette acceptation, je vous écris pour retirer mon offre, nos lettres se croisent, le contrat est nul, parce que j’ai retiré mon offre avant qu’elle fût obligatoire. La jurisprudence encore hésitante est cependant plus favorable à cette solution.

Les négociants, qui annoncent dans des circulaires, prospectus, affiches, etc., les prix et conditions de leur négoce, sont dans un état permanent d’offre à l’égard du public, tant qu’ils ne l’ont pas retirée, de telle sorte que la demande conforme à ces conditions constitue une acceptation, et forme, dès qu’elle est parvenue à la connaissance du négociant, le lien juridique. Ainsi, une marchandise a-t-elle été mise à l’étalage à un prix indiqué, dès qu’un acheteur déclare vouloir la prendre à ce prix, le marchand est obligé de la livrer ; en cas de refus, il serait passible de dommages et intérêts.

2. Vices du consentement.

Les vices qui altèrent le consentement de manière à le rendre nul ainsi que la convention qui en résulte peuvent se ramener à trois : Yerreur, la violence, le dol. Code civil, a. 1109.

a. L’erreur. — L’erreur substantielle, c’est-à dire celle qui porte sur la nature même, ou sur Yobjel de la convention, rend le consentement invalide. Exemple : Je vous remets une somme d’argent en dépôt, vous la recevez croyant que je vous en transmets la propriété à titre de prêt ; il n’y aura dans ce cas ni prêt ni dépôt. Pierre a deux maisons, l’une à Paris, l’autre à Marseille ; il vend à Paul la maison de Paris, celui-ci croit acheter la maison de Marseille. C’est un malentendu et aucune des deux maisons n’est vendue.

L’erreur sur le motif qui nous détermine à contracter n’est pas en soi une cause de nullité. Quelle que soit en effet la gravité de cette erreur, elle n’empêche pas que, le consentement ayant été donné, l’accord des volontés se produise et forme un contrat valide. Exemple : J’achète un cheval, le motif qui me détermine à faire cet achat, c’est la nouvelle que je viens de recevoir de la mort d’un de mes chevaux, mais il se trouve que cette nouvelle est fausse. L’erreur où je suis tombé n’est pas un obstacle à la validité de la vente.

Il peut arriver cependant que le motif altère gravement l’objet du contrat ; dans ce cas, l’erreur sur le motif principal, et non pas sur le motif accessoire, frappe la convention de nullité. Je fais une avance à un pauvre que je crois honnête et qui en réalité est un fripon ; la donation est valide. Mais si ce pauvre n’était qu’un faux mendiant, la donation dans ce cas serait nulle. C’est que la pauvreté du donataire est le motif principal de l’aumône, la bonne conduite du pauvre n’est que le motif accessoire.

L’erreur qui porte sur les qualités substantielles de l’objet rend nul le consentement. Sous le nom de qualités substantielles, on entend celles que les parties ou l’une d’entre elles ont eu principalement en vue en contractant, ou encore celles sans lesquelles elles n’auraient pas contracté. Dans ce cas, l’erreur vicie profondément le consentement, et doit à juste titre être assimilée à l’erreur substantielle. De savoir si une qualité est ou non substantielle c’est une question de