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CONSTANTINOPLE (ÉGLISE DE)


examens aux instituteurs et aux institutrices. C’était lui encore, qui devait accorder l’autorisation d’ouvrir des écoles et de les fermer. Le patriarche désigna également un censeur, auquel seraient soumis tous les livres destinés à l’impression ; l’examen porterait d’abord sur le manuscrit pour y faire les corrections nécessaires, ensuite sur l’ouvrage imprimé, afin de vérifier si l’on avait tenu compte des observations. Dans ce dernier cas seulement, l’imprimatur serait donné et la vente permise. Ces règles n’ont pas changé.

La commission centrale de l’instruction s’occupe en même temps de la situation matérielle des écoles. Afin de prévenir ou de supprimer les désordres’et les abus, les éphores particuliers, proposés dans chaque diocèse à l’inspection et à la direction des écoles, doivent rendre compte de leur administration à une commission spéciale établie au patriarcat. Les églises paroissiales sont associées aujourd’hui à l’œuvre d’entretien des écoles ; elles doivent fournir une contribution annuelle dans une mesure déterminée, le reste est prélevé sur les services. Les patriarches Joachim II et Sophrone III régularisèrent la commission centrale qu’avait établie Grégoire VI et, en 1873, Anthime VI créa la commission pédagogique centrale, à laquelle il donna une constitution particulière. Elle se compose de six membres, trois clercs et trois laïques, désignés par le saint-synode et par le conseil mixte. C’est, en somme, le ministère de l’instruction publique pour le patriarcat et, comme toutes les institutions analogues, elle jouit de prérogatives illimitées, de la part des Grecs bien entendu, car du côté des Turcs certaines réserves et certaines restrictions sont imposées. Dans l’archevêché de Constantinople, cette commission exerce directement ses pouvoirs et, dans les autres diocèses, par l’intermédiaire des métropolites. Nomination, déplacement et renvoi des professeurs, admission des livres scolaires, ouverture et fermeture des écoles, programme à suivre, comptabilité, tout relève d’elle ou de ses délégués. S’il survient un conllit entre le métropolite et les éphores diocésains, l’affaire est portée devant le tribunal de la commission. Ces droits, qui nous semblent très étendus, paraissent abusifs aux yeux du gouvernement impérial, qui n’a cessé, depuis le milieu du xixe siècle, de mener une campagne très active contre les privilèges dont jouissent les chefs de l’Église phanariote. En 1882, la Porte exigea que les manuels scolaires, les programmes et les diplômes des maîtres fussent soumis à son examen ; Joachim III, loin de céder devant les réclamations ministérielles, en appela aux bérats, firmans et autres documents officiels, qui, depuis Mahomet II jusqu’au sultan actuel Abd-ul-Hamid II, avaient conféré ces privilèges à ses prédécesseurs et à lui. Apaisé un moment, le conflit renaquit sous le patriarcat de Denys V (1887-1891), et le grand-vizir Kiamil pacha déclara dans une circulaire que, « si les programmes étaient laissés au choix du patriarche et des métropolites, le gouvernement turc se réservait dorénavant la ratification des diplômes et des certificats conférés par les professeurs ; » il prescrivit aussi certaines mesures à prendre pour les inspecteurs, au cas où les manuels adoptés ne leur conviendraient pas. Un peu plus tard, sous Néophyte VIII (1891-1891), la Porte demanda que l’enseignement du turc fût obligatoire dans les écoles moyennes et élémentaires. Le patriarche n’acquiesça qu’au premier point, ce qui lui coûta son siège, et la Porte accepta ce compromis sous Anthime VII. Nul doute que ses prétentions à cet égard ne croissent de jour en jour et que les ministres n’essayent de reprendre un à un tous les privilèges concédés jadis à la nation grecque.

L’histoire du conflit survenu à l’occasion des privilèges a été racontée par G. Papadopoulos, ’II jjy/povo ; îipup/ia tîk &oOoSo ; ou àv « To/.ix/, s ta&qriof i Athènes, 1895, p. 123-355, et par M. Séménof,

Collection des règlements ecclèsiastiqvs tin patriarcat de Constantinople de 1858 à 18’J’J (ei /.an, 1ÎXJ2, i

126. On trouve dans cet ouvrage, entre autres pièces, le fiirnan impérial du 14 février 1887 à Denys V, le Grmao’Je 1888 à Germain, métropolite d’Héraclée, la circulaire du grand-vizir, en date du 22 janvier 1891, aux gouverneurs des viiayets, et l’encyclique patriarcale et synodale de Denys V aux métropolites et aux evéques de son Église.

Voici comment s’exerce le fonctionnement des écoles dans l’archevêché de Constantinople et conséquemment dans les autres diocèses. Depuis 1897, les écoles primaires sont confiées à une éphorie générale des écoles paroissiales, placée elle-même sous la direction de la commission centrale du patriarcat et qui a dans ses attributions l’organisation, l’administration et l’entretien des écoles de toutes les communautés ou paroisses. Les revenus de ces écoles sont assurés par les églises de la communauté, les rétributions scolaires, les dons volontaires et testamentaires, les produits des immeubles, etc. De plus, chaque éphorie peut, avec l’autorisation patriarcale, se ménager d’autres sources de revenus. Les manuels des différents cours, avec le nombre d’heures de classe et la répartition des matières, sont imposés par l’éphorie générale des écoles paroissiales, laquelle prend elle-même pour guide le programme de la commission centrale du patriarcat. Outre l’éphorie générale, il y a une éphorie particulière pour chaque communauté, comprenant cinq membres pour les paroisses de première et de seconde classes, trois pour les paroisses de troisième classe, nommés pour deux ans et renouvelables annuellement par moitié. C’est cette éphorie, qui gère toutes les affaires concernant l’enseignement. Les examens annuels se passent dans la première quinzaine de juillet, d’après un programme élaboré en haut lieu ; quant aux bâtiments, ils s’élèvent d’ordinaire près des églises et prennent le nom du patron du lieu.

De 1453 à 1821, presque tous les établissements scolaires étaient connus sous le nom d’écoles communales élémentaires. On n’y faisait que des études d’un niveau fort peu élevé : lecture dans des ouvrages ecclésiastiques, calcul et écriture. Il n’y avait pas, à proprement parler, de bâtiments spéciaux aifectés à l’instruction primaire : l’église paroissiale ou les cellules d’un couvent servant d’ordinaire à cet usage, alors que les papas ou les moines étaient les uniques professeurs. Dès le commencement du xixe siècle, on pensa à imiter les méthodes suivies en France au xviie siècle et l’on introduisit l’enseignement mutuel. Après l’insurrection grecque et la réorganisation des écoles dans le royaume libre, de nombreux jeunes gens accoururent en Ilellade pour s’y former au métier d’instituteur, mais les persécutions, le manque de zèle et d’entente s’opposèrent à ce qu’on retirât tous les fruits de ces dévouements. La création du Syllogue littéraire en 1861 permit de réunir des fonds pour l’établissement d’écoles de garçons et de filles, en donnant une direction intellectuelle au pays. Dès lors, l’école communale se change peu à peu en école mutuelle ou lancastrienne, et depuis 1870, la plupart des centres grecs possèdent des salles d’asile, des écoles élémentaires et des écoles primaires. Inaugurées en 1868, les salles d’asile étaient, onze ans après, au nombre de 108 dans l’empire ottoman. Les écoles élémentaires ne sont que des constructions annexées aux églises et atfectées à divers usages ; en 1879, leur nombre s’élevait à 1069 comptant 220ÔG élèves. On demandait alors, un peu partout, que ces écoles élémentaires où l’enseignement était presque nul, fussent transformées en écoles primaires ; ces appels n’ont pas été suffisamment entendus. Les écoles primaires ne sont guère plus favorisées que les précédentes et les Grecs sérieux ne font aucune difficulté de convenir que, même dans les villes, ces établissements sont fort rudimentaires. En 1879, le nombre des écoles primaires s’élevait pour les garçons à 1247 ;