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300000 piastres pour les établissements de bienfaisance ; ’100 000 piastres pour les aumônes aux pauvres et les cadeaux à l’occasion Hes fêtes pascales ; 50000 piastres affectées à l’église patriarcale, et nous aurons 1 153 000 piastres, représentant les dépenses annuelles communes de la caisse nationale du patriarcat. D’après les règlements, cette caisse devrait recevoir (i 000 florins des monastères grecs, qui ont des dépendances en Moldovalachie, 2000 des monastères du Sinaï, 8000 de la caisse du Saint-Sépulcre et 4000 de la caisse du mont Alhos, soit 20000 florins ou 1040000 piastres. On prévoyait encore 150000 piastres provenant des taxes du secrétariat et 00000 piastres des revenus des monastères stavropégiaques ; ce qui donnait une somme totale de 1 250000 piastres, de quoi établir d’une manière très satisfaisante l’équilibre du budget annuel. Par malheur, la plupart de ces sommes prévues ne rentrent jamais en caisse, parce que le gouvernement roumain s’est approprié les biens des couvents dédiés que possédait le Phanar en Roumanie, que les monastères du mont Alhos font la sourde oreille à toutes les réclamations, ainsi que les dépendances du Sinaï et du Saint-Sépulcre. On compense ces pertes par les revenus annuels des monastères stavropégiaques, c’est-à-dire soumis directement au patriarcat, et qui étaient en 1901 au nombre de 72, non compris les vingt del’Alhos ; parles frais de chancellerie qui sont assez élevés et qui constituent le meilleur avoir de la nation ; par les 88000 piastres or que le gouvernement austro-hongrois verse annuellement au patriarcat au nom de l’Église de Bosnie-Herzégovine ; par les héritages des métropolites défunts et dont le tiers doit être affecté au patriarcat ; enfin, par les revenus des immeubles, les dons, legs et cotisations volontaires, qui sont assez considérables, surtout de la part de riches banquiers.

L’état financier n’est donc pas très brillant et l’on aurait tort de parler aujourd’hui de ressources énormes que possède le patriarcat œcuménique. Ces ressources ont existé, il est vrai, mais elles sont taries de nos jours et le Phanar reste toujours sous le poids d’une grosse dette. Celle-ci est postérieure à l’arrivée des Turcs, en 1453 ; elle provient surtout de l’ambition des prélats grecs, qui, pour se faire élire patriarches, offrirent au gouvernement ottoman une somme assez considérable, à partir de 1466. La somme alla sans cesse croissant, tant et si bien qu’au dire de l’évêque de Smyrne qui le raconta à Ricaut, elle montait en 1672 à 700 bourses, c’est-à-dire à 350000 écus, non compris les intérêts, fort élevés en Turquie. Ricaut, Histoire de Vestat présent de l’Église grecque, Middelbourg, 1692, p. 106. A cette époque encore, un patriarche payait aux Turcs 25000 écus pour son installation, alors qu’il n’en payait autrefois que 10 000. Ricaut, op. cit., p. 114. Et bien qu’on s’assurât toujours des biens d’un patriarche, en même temps que de sa personne, afin d’acquitter une partie des dettes de l’Église et de payer ce que le nouveau patriarche avait avancé pour son installation, la dette patriarcale était loin de diminuer. Au xviii c siècle, le patriarche Samuel la déclarait haute et lourde comme les pyramides et lui-même, durant son premier passage au pouvoir, 1763-1768, cherchait un moyen de l’amortir. « Il obligea donc chaque évêché à se charger d’acquitter une partie de la dette ; cette quote-part, inscrite sur un registre créé à cet effet, constitua la délie aulique de chaque évêché. Le remède était pire que le mal ; car, pour se libérer de cette dette, les évêques eurent recours à des emprunts forcés sur leurs propres sujets. Ils délivraient, en retour des sommes reçues, des obligations appelées elles aussi auliques et marquées du sceau de la communauté. Cette dernière disposition faisait peser sur la communauté tout entière la dette particulière de chaque éparchie et c’est ainsi que les gérontes pouvaient multiplier les dépenses sans grever leur propre budget. Pour

doi.ner le change, on créa, au Phanar, deux caisses, celle de la communauté et celle des éparchies ; mais toutes deux étaient administrées par le synode et quelques laïques triés avec soin. Ces agiotem> formaient la commission de la dette nationale. « Revue de l’Orient chrétien, t. m. p. 415, note 1. En 1830, la dette aulique s’élevait, au dire de Pitzipios, L’Église orientale, Rome, 1855, I » partie, p. 48, note 28, à la somme de 400000 piastres, et depuis elle atteignit en 1851 le chiffre exorbitant de sept millions de piastres. L’article 7 du règlement organique du saint-synode, publié le 27 janvier 1862, abolit ce prélèvement d’argent fait par les métropolites, sous prétexte d’éteindre les dettes de la communauté et les dettes auliques, en même temps qu’une commission mixte spéciale était nommée à cet effet. Quelles que soient la compétence et l’honnêteté des membres de cette commission, la dette n’est pas éteinte, bien que le montant actuel en soit ignoré. Il devait pourtant s’élever assez haut pour que le patriarche Denys V ait songé, vers 1890, à emprunter au gouvernement turc lui-même et, s’il ne le fit pas, il ne fut pas retenu par des scrupules religieux, mais parce que les Turcs se débattaient alors dans des difficultés analogues. Les autres patriarches ont essayé d’autres moyens qui n’ont pas mieux réussi et le patriarcat byzantin traverse aujourd’hui une crise financière, qui pourrait bien amener une banqueroute, pareille à celle du patriarcat de Jérusalem en 1830.

La situation du bas clergé byzantin au point de vue financier a toujours été déplorable. Trop nombreux pour les charges rémunérées, il a encouru jusqu’au milieu du xix 6 siècle un discrédit toujours croissant. La faute en incombait aux évêques, qui ordonnaient les premiers venus, sans s’informer si des postes curiaux ou autres étaient vacants pour les recevoir ou si les ordonnés avaient les qualités requises. Ils n’étaient sensibles qu’à l’argent que chaque candidat devait leur verser lors de son ordination. Qu’on juge alors de l’influence exercée sur le peuple par un homme ignorant, grossier, sans instruction, marié, père de famille et sans revenus assurés. Un voyageur anglais, d’une bienveillance extrême pour l’Église grecque, a résumé en ces quelques lignes la vie ordinaire d’un papas : « Les prestres séculiers tirent leur principale subsistance de la charité du peuple. Mais comme cette vertu est extrêmement refroidie, aussi bien que la dévotion, les Grecs contribuent fort peu aux jours d’offrande. De sorte que le clergé est presque contraint de vendre les mystères divins, dont il est dépositaire. Ainsi on ne peut ni recevoir ni estre admis à la confession, ni faire baptiser ses enfans, ni entrer dans l’estat du mariage, ni se séparer de sa femme, ni obtenir l’excommunication contre un autre, ou la communion pour les malades, que l’on n’ait auparavant accordé de prix. Et les prestres font leur marché le meilleur qu’ils peuvent, tirant d’un chacun selon son zèle et ses facultez. » Ricaut, Histoire de l’estat présent de l’Eglise grecque et de i Église arménienne, Middelbourg, 1692. Ce jugement, porté sur le cl grec du xviie siècle, n’a rien perdu de sa valeur. Aussi, depuis quelque temps, les patriarches se sont-ils préoccupés de remédier à cet état de choses. N’ayant pas encore de séminaire pour le bas clergé — ce qui relèverait incontestablement son niveau moral — ils se contentent de rappeler aux métropolites dans leurs encycliques que, pour être prêtre, il faut avoir reçu une éducation et une instruction préalables, posséder un titre d’ordination et se soucier du bien spirituel du peuple. C’est à cela que revient une lettre remarquable de Constantin V. en 1898, qui défendait sévèrement d’ordonner un diacre ou un prêtre sans aucune nécessite et s, m> avoir I âge canonique, de laisser les ordinations dépendre exclusivement de la volonté du peuple, etc. Il est peu probable que col appel ait été entendu, tant les racines