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BAPTÊME D’APBÈS LES PÈBES GRECS ET LATINS

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son cadre liturgique, sa physionomie caractéristique.

Une remarque s’impose, c’est la pénurie de la langue

théologique à ses débuts. Les termes qui doivent plus

tard concrétiser l’enseignement et faciliter l’exposition du

dogme sont inconnus ; les Pères n’ignorent pas, du moins, ce que ces termes signifieront ; ils possèdent sur les éléments constitutifs du baptême, sur sa nature, son essence, son rôle, ses effets, des notions suffisantes, que la théologie n’aura plus qu’à recueillir et à désigner par des expressions appropriées.

Inutile de constater ici que Jésus-Christ est l’auteur du baptême : car personne n’en a douté pendant la période patristique ; quant à la question de savoir à quel moment N’otre-Seigneur a institué le baptême, elle n’a f ; iit l’objet ni d’un examen approfondi ni d’une controverse spéciale ; c’est à peine si quelques Pères ont signalé, en passant, le moment de cette institution, les uns le plaçant avant la passion, les autres après. Voir pour le second sentiment S. Léon le Grand, Epiât., xvi, c. iii, P. L.A. liv, col. 699.


I. Noms.
II..Matière.
III. Forme.
IV. Mode de collation.
V. Ministre
VI. Sujet.
VII. Symbolisme et figures.
VIII. Effets.
IX. Nécessité.
X. Rites de l’administration solennelle.

I. Noms.

La langue chrétienne, à l’origine, est remarquable par la richesse d’expressions dont elle s’est servie pour désigner le baptême. Ces expressions, elle les emprunte tantôt à la matière ou à la forme de ce sacrement, tantôt à son mode de collation ou à ses effets, tantôt à son symbolisme. Il suflit de signaler les principales, les plus caractéristiques ; car elles résument l’idée que les Pères se faisaient du baptême.

Le baptême, en effet, est appelé le sacrement de l’eau, non d’une eau quelconque, mais de l’eau de source, de l’eau courante, de l’eau fluviale, de l’eau vive, ’jôojp Çûv, Didaché, vil, 1, édit. Funk, Tubingue, 1887, p. 22 ; c’est le sacrement de l’eau vitale, Cyprien, Epist., LXXIII, 11, P. L., t. iii, col. 1110, de l’eau génératrice, tinda genitatis, p^Tpa’jSaTo ;, Clément d’Alexandrie, Slrom., iv, 25, P. G., t. viii, col. 1369 ; c’est le sacrement de l’eau qui sert de bain, sacramenturii aquæ, Tertullien, De bapt., 1, P. L., t. I, col. 1197 ; Xourpôv, dans lequel on plonge le baptisé, Clément d’Alexandrie, Slrom., i, 6, P. G., t. viii, col. 281, pour le laver, le purifier de ses péchés, lui communiquer la vie. Bain de la régénération et de la rénovation, Hilaire, lnps. lxiii, 11, P. L., t. ix, col. 412 ; De Trinit.f xii, 56, P. L., t. x, col. 472, c’est Vemundatin spiritualis et le novum natale de Tertullien, De bapt., 4, 20, P. L., t. i, col. 1204, 1224 ; et saint Augustin l’appelle le sacrement de la vie nouvelle et du salut éternel. Vont. Cresc, II, 13, 16, P. L., t. xliii, col. 476. Le baptême sanctifie les hommes et les rend enfants de Dieu, en les faisant passer comme le Christ, mais d’une manière symbolique, par une mort et une sépulture mystiques. Chrysostome, /l</ illumin. cat., i, P. G., t. xi.ix, col. 225. Par allusion à la profession de foi qui précède sa collation, il est aussi appelé le sacrement de la foi, Vobsignatio fidei, Tertullien, De pxiiit., 6. /’. L., t. i, col. 1239 ; et parce qu’il est conféré au nom des trois personnes divines, le sacrement de la Trinité. Augustin, Serni., cclxix, 2, P. L., t. xxxviii, col. 1235. Il est le commencement et la source des grâces divines, nous apprend Origène. Il sert d’initiation à la vie chrétienne, il conserve les enfants du Christ, il projette dans l’âme ifs initiés des Ilots de lumière : il est par excellence l’illumination, le q>Ti(T(Ab ;, Justin, Apol., i, 01, P. G., t. vi, col. ï20 ; pseudo-Denys, De eecl. hier., iii, I. 2, /’. G., t. il, col. 392, de là tant de catéchèses ou d’allocutions ad illuminât/dus, r.yiç cpirittÇouivovç.

Le baptême n’est pas seulement la [irise de possession des âmes par Dieu, il est encore l’empreinte divine qui sert à les marquer d’une manière indélébile. Sceau du Seigneur, .sceau du Christ, sceau salutaire, il représente l’alliance de Dieu avec l’âme régénérée. Eusèbe, H. E., ! iii, 23, P. G., t. xx, col. 200. Il remplace le signe de l’ancienne alliance, la circoncision, ce qui lui vaut le titre de circoncision non nianufacta. Il est le sceau de la foi, Basile, Adv. Eunom., ni, 5, P. G., t. xxix, col. 665 ; la Tjpayùde l’eau, Cyrille de Jérusalem, Cat., ni. 4, P. G., t. xxxiii, col. 432 ; la Tçpayc ; de la régénération qui nous agrège au troupeau du Christ, Cat., i, 2, col. 372 ; la Tçpayt ; infrangible, à laquelle les anges reconnaissent les fidèles, pseudo-Basile, De bapt., homil. xiii, 4, 5, t. xxxi, col. 432, 433 ; la o-spay : ’;  ; qui distinque le soldat du Christ, Jean Chrysostome, In II Cor., homil. iii, 7, /’. G., t. lxi, col. 418 ; le caractère royal. Augustin, Epist., lxxxviii, 9, P. L., t. xxxiii, col. 307.

Clément d’Alexandrie avait expliqué quelques-uns des termes employés dans l’usage ordinaire pour désigner le baptême. C’est un bain, dit-il, car il lave les péchés ; un charisme, qui remet les peines dues au péché ; une illumination, qui permet de contempler la sainte et salutaire lumière ; la perfection, à laquelle rien ne manque. Psedag. , i, 6, P. G., t. viii, col. 281. Plus tard, Cyrille de Jérusalem multiplia les expressions ; il appelle le baptême : la rançon du prisonnier, la rémission des péchés, la mort du péché, la régénération de l’âme, un vêtement lumineux, un sceau saint et infrangible, un véhicule pour le ciel, les délices du paradis, la cause de l’obtention du royaume, le charisme de la filiation divine. Procal., 16, P. G., t. xxxiii, col. 360, 361. Le pseudo-Basile emploie les mêmes termes. De bapt., homil. xiii, 5, P. G., t. xxxi, col. 433. Grégoire de Nazianze l’appelle, à son tour, ôdipov, yàpiTtxa, fixiiTt.< ; [i.a, y_pi<7fia, ç(î>T’.'7|j.a, à ?0ap<r£a ; ëvoujjia, ), o-jTpbv 7ra>.cyy£ve<ria ;, (TspayïSa. Orat., xi., 4, /’. G., t. xxxvi, col. 361. A tous ces termes Chrysostome en ajoute d’autres, ceux de -raçr, , sépulture, de TispiTosrr, , circoncision, de sTïvpéç, croix. Ad Muni, cat., 1, P. G., t. xlix, col. 225. Le pseudo-Denys a ses expressions particulières : Ôïoycvsirio, Oséa yévvï)<n< ; àvot-Yêvvï |<HÇ, Aodtnia, [rj-rçaiç. De ceci, hier., il, 1, 2, P. G., t. iii, col. 392, 393, 396, 397. Toutes ces diverses dénominations ont leur raison d’être et désignent, chacune, le point de vue particulier sous lequel les Pères ont envisagé le baptême. Elles servent admirablement à caractériser ce sacrement. Les dénominations de « reppayt ; et de iwTi’jfj.o ; ont un fondement suffisant dans le Nouveau Testament, et il n’est pas nécessaire de supposer, comme le fait Harnack, Dogmengeschichte, 2e édit., t. i, p. 177, qu’elles ont été empruntées à la langue des mystères païens.

II. Matière.

L’auteur de la Didaché retrace en quelques mots ce qui touche à la collation du baptême. Il y a deux voies, dit-il, la voie qui mène à la vie, et celle qui conduit à la mort. Puis, dans une formule succincte, il signale les principaux devoirs du futur baptisé, ce qu’il doit faire, ce qu’il doit éviter. Après avoir enseigné ces choses, ajoute-t-il, baptise/ ainsi au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit, en plongeant le baptisé dans une eau vive (lleuve ou source), ou, à son défaut, dans toute autre eau (lac ou citerne), froide, à moins de raison particulière ; que si vous n’avez pas d’eau suffisante pour y plonger le baptisé’, versez-en trois fois sur sa tête ; kV/zov eiç ty|V xsçaXr, v Tpç viScop, vil, 1-3, édit. Funk, p. 20-22. Tel est le cadre primitif de la collation du baptême ; la matière ordinaire, c’est l’eau vive ; la forme est la formule trinitaire indiquée par l’Evangile ; le mode de collation c’est l’immersion ou, si l’immersion n’est pas possible, la triple infusion sur la tête. Nous allons successivement retrouver tous ces éléments.

L’eau, telle est la matière du baptême. C’est dans l’eau, avec de l’eau quon baptise ; c’est Yiinda goiitalis, le fluvius aquæ vitalis de saint Cyprien, la [ptpa ô^aro ; de Clément d’Alexandrie. Or, dès le ri siècle, la matière passant, aux yeux de certains hérétiques, pour être le