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BALE (CONCILE DE)

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une capitulation imposée par les cardinaux à l’élu quel qu’il. lût : le futur pape s’engageait à réformer la cour pontificale dans son chef et dans ses membres ; il ne pourrait pas la transférer d’une ville à une autre sans le consentement du sacré collège ; il devrait réunir le concile général et procéder avec son concours à la réforme générale de l’Église, clercs et laïques ; il se conformerait, pour la nomination des cardinaux, aux règles établies à Constance ; il ne se permettrait aucun acte pouvant atteindre un cardinal dans sa personne ou dans ses biens, sans l’assentiment de la majorité de ses collègues ; il ne ferait rien pour restreindre la liberté de tester des cardinaux ; tous les vassaux et fonctionnaires des Étals de l’Église prêteraient serment de fidélité au collège des cardinaux comme au pape ; le sacré collège jouirait de la moitié de tous les revenus de l’Église romaine ; enlin le pape ne pourrait se passer de son approbation, dûment exprimée, avec le nombre des votants, pour toutes les mesures d’importance, la paix ou la guerre, par exemple, concernant les États de l’Eglise. Raynaldi, an. 1431, n. 5. Telles étaient les conditions que le cardinal Condulmaro avait acceptées et qu’Eugène IV publia aussitôt après son élection. C’était un état de choses nouveau, contraire à la constitution de l’Église, et qui ne pouvait avoir de durée, que ce partage du pouvoir entre les cardinaux et le pape. Mais les prétentions des cardinaux et les dangers qu’elles taisaient courir à la puissance pontificale n’étaient rien à côté des exigences et des menaces qui allaient venir du concile.

II. Réunion du concile de Bale ; l’œuvre qu’il se propose ; ses ressources ; ses causes de faiblesse.

— Le concile aurait dû s’ouvrir en mars 1431. A cette date, l’abbé de Vézelay était seul arrivé ; en avril, on vit venir trois députés de l’université de Paris et un évoque. Ce ne fut que le 23 juillet que, sous la présidence de Jean de Palomar, représentant le cardinal Césarihi, alors à la croisade, le concile put inaugurer ses séances ; encore la salle était-elle à peu près vide.

L’œuvre qui s’imposait au concile était immense comme étendue et comme difficulté. Il fallait reprendre la réforme laissée inachevée à Constance ; il fallait essayer de mettre un terme à l’hérésie hussite et de rendre la paix à la chrétienté déchirée, tant par la guerre des Français et des Anglais, que par l’épouvantable guerre de religion que les hussites avaient déchaînée sur l’Allemagne ; il fallait enfin travailler à l’union de l’église grecque et de l’église latine, les Grecs se sentant de plus en plus pressés par les Turcs. Or, à chacune de ces œuvres s’opposaient de grands obstacles.

La reforme.

Le concile passait pour la panacée

de tous les maux de l’Eglise ; parce qu’un concile avait mis fin à une funeste scission, on s’imaginait qu’un autre concile n’avait qu’à le vouloir pour accomplir la réforme ; mais comment triompher de la mauvaise volonté’des intéressés ? Comment vaincre, sans provoquer le plus grave des conllits, les défiances trop souvent justifiées de la papauté elle-même ? Asoulever tant de questions, à heurter tant d’intérêts, ne risquait-on pas de renouveler le schisme ?

La question hussite.

Voir Hussites. La condamnation

de Jean IIuss et de Jérôme de Prague par le concile de Constance n’avait pas mis fin à l’hérésie. Les Tchèques avaient vu dans le supplice de l’hérésiarque unt injure jetée à la face de leur race. Les questions religieuse et nationale, déjà si étroitement liées pendant les querelles de l’université de Prague, s’étaient confondues. lies le mois de septembre qui suivit la mort de Jean lluss (1415), les seigneurs tchèques formèrent une ligue hussite à laquelle répondit une ligue catholique formée surtout d’Allemands. Le symbole des Tchèques était, par allusion à la communion sous les deux espèces qu’ils réclamaient, le calice substitué à la croix, d’où le nom deçaliXtinSfOU.d.’utraquisleS. De très bonne heure la masse

populaire alla beaucoup plus loin, s’exaltant dans les réunions où elle s’organisait peu a peu. Iiéjà paraissaient les chefs, un prémontré, Jean de Zéliv, qui s’était échappé de son couvent, éloquent, très populaire, sans scrupules et sans craintes ; deux chevaliers, Nicolas de Hus et Jean de Trostnor, si célèbre plus tard sous le nom de Ziska. Le 30 juillet 1419, une émeute dirigée par Jean de Zéliv (défenestration de Prague) avait donné le signal des guerres hussites qui allaient, pendant près de vingt ans, couvrir la Bohème et une partie de l’Allemagne de ruines et de sang. Sigismond de Luxembourg avait dû signer les quatre articles de Prague qui lormaient la base des revendications hussites : 1° libre prédication ; 2° communion sous les deux espèces ; 3° suppression des biens du clergé et réforme des mœurs ; 4° punition des péchés publics.

Mais ce programme ne satisfaisait plus les avancés du parti, ceux qui prenaient le nom de taborites (de leur camp de Tabor, devenu leur centre et leur capitale). Ceux-ci n’admettaient d’autres sacrements que le baptême et l’eucharistie, altéraient le caractère du sacrifice de la messe qu’ils célébraient en tchèque, et reconnaissaient à tous les laïques le droit de prêcher l’Évangile et de l’interpréter. Ils voulaient aussi établir un ordre politique et social nouveau : quelquesuns allaient jusqu’au communisme. La masse des paysans et des chevaliers fut taborite : c’est eux surtout qui portèrent le poids de la guerre. Pendant onze ans, de 1420 à 1431, l’empire et le Saint-Siège lancèrent des armées de croisés contre les hussites ; toutes furent vaincues ; à Taus, en 1431, il n’y eut même pas de combat ; les Allemands prirent honteusement la fuite. Les choses en étaient là, au moment où le concile de Bâle se réunissait ; Césarini, témoin du désastre de la croisade et des dispositions effrayantes d’une partie de l’Allemagne, apportait au concile la pensée qu’on ne réussirait pas à dompter les hussites et qu’il fallait négocier, à tout le inoins, avec les plus modérés d’entre eux. Tel n’était pas l’avis d’Eugène IV, mais le concile devait s’y ranger.

Question de l’union avec les grecs.

Cette affaire

se présentait, à première vue, mieux que les deux précédentes. La chute de Thessalonique (mars 1430) qui mettait Constantinople à la merci des Turcs avait fait grandir le parti de l’union. L’empereur, Jean VIII Paléologue, était décidé à venir la négocier lui-même en Italie. Mais l’intention, manifestée par le pape, de traiter directement avec l’empereur et le désir formellement exprimé par les Grecs de tenir en Italie, dans la région d’Ancône, le concile d’union, faisaient prévoir pour le concile de Bàle nouveau conllit et nouvelles difficultés.

Causes de faiblesse.

Pour résoudre ces questions,

le concile de Bàle était loin d’avoir la force et l’autorité morale du concile de Constance. Ce qui avait fait la force de ce dernier concile, c’avait été’la division de la papauté, la présence de l’empereur résolu à le soutenir, l’ardent désir de tous les princes chrétiens d’en finir avec le schisme, etenfin, la réunion à Constance de tout ce qu’il y avait d’éminent dans la catholicité. En face du concile de Bàle se dressait la papauté unifiée : la chrétienté tremblait de voir renaître la division ; l’empereur se défiait. Si, au début, il soutint les Pères de Bàle, ce fut d’abord pour satisfaire l’opinion en Allemagne, ce fut aussi pour exercer une pression sur le pape, afin que celui-ci procédât à son couronnement. Il ne fit qu’une courte apparition à Bàle et ensuite se retourna du côté d’Eugène IV par opposition aux tendances révolutionnaires du concile. Enfin ce concile ne comptait qu’un lies petit nombre de hauts dignitaires ecclésiastiques, de sept à onze cardinaux qui, à l’exception du cardinal d’Arles, ne restèrent pas longtemps, une centaine d’évêques qui se réduisirent à une ving-