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CAJETAN


de Léon X, le 19 décembre 1519. Pendant qu’il était encore en Allemagne, le pape l’avait nommé, le 13 avril 1519, au petit évêcbé de Gaète, sa ville natale. Cajétan, mécontent de l’esprit qui régnait à la curie où il avait vainement, depuis assez longtemps, cherché à persuader la nécessité de réformes ecclésiastiques importantes, demanda, sans l’obtenir, semble-t-il, de pouvoir être exonéré d’assister aux consistoires, sauf pour les cas d’affaires importantes. Son attitude sévère et quelque peu protestatrice lui aliéna l’esprit du monde d’humanistes qui gravitait autour de Léon X. Le pape avait toutefois une confiance illimitée dans ses conseils. C’est ainsi que le cardinal prit une part très active à l’examen des affaires luthériennes et dut se rendre au consistoire du 23 mai 1520, tout malade qu’il était, parce qu’on devait y traiter ces matières et en particulier la condamnation solennelle de l’hérésiarque. C’est de ce consistoire que sortit la célèbre bulle Eocurge Domine du 14 juin suivant. A. de Altamura, Bibliotheca dominicana, p. 259 ; Pallavicini, Hist. du concile de Trente, 1. 1, c. xxi ; Gams, Séries episcopor uni, Batisbonne, 1873, p. 881, 952 ; Pieper, Zur Entslehungsgesch., p. 61 ; Flavius, op. cit., p. 905 ; Quétif-Echard, op. cit., p. 173 ; Cossio, op. cit., p. 391 ; P. Kalkoff, Zu huiliers rômischen Prozess (Brieger’s Zeilschrift fur Kirchengeschichte, t. xxv [1904], p. 90-147).

(i° Cajétan électeur d’Adrien VI (9 janvier 1522) et légat en Hongrie (1523-1524). — La mort de Léon X, 4 décembre 1521, ouvrit une succession des plus difficiles. Les cardinaux divisés semblaient ne pouvoir s’entendre pendant le conclave. Le cardinal Cajétan, poursuivant ses vues de réformes ecclésiastiques, fit prévaloir la candidature du cardinal Adrien d’Utrecht qu’il avait connu pendant sa légation en Allemagne. Il servit aussi d’appui au nouveau pape dans ses tentatives de réformes, et supporta avec lui les critiques que les gens de la curie firent tomber sur ces propagateurs de l’esprit chrétien.

Le projet de croisade contre les Turcs ayant échoué par suite de l’agitation luthérienne, Soliman avait poursuivi sa marche de conquête et les frontières orientales de la chrétienté se trouvaient en extrême danger. Pour parer à cette situation, Adrien VI envoya, le 1 er juin 1*523, le cardinal de Saint-Sixte comme légat en Hongrie, Bohême, Pologne, Allemagne et autres lieux frontières. Il était porteur d’une première somme importante, destinée à être employée contre les Turcs. Malheureusement, l’état intérieur de la Hongrie et surtout le peu de confiance que son jeune roi Louis inspirait au légat comme à ses sujets ne permirent pas d’obvier aux dangers qui menaçaient le royaume de saint Etienne. Le légat fit distribuer l’argent dont il disposait pour aider les villes de Dalmatie et de Croatie proches de l’ennemi. Il prit une part active aux négociations de Wiener-Neustadt, au mois d’octobre 1523, où la Pologne, la Hongrie et l’Autriche projetèrent une expédition pour le printemps de l’année suivante. La mort d’Adrien VI, 14 septembre 1523, surprit Cajétan en pleine légation. Clément VII le rappela à Borne. Flavius, .. op. cit., p. 906 ; Bull. ord. prxd., t. iv, p. 413 ; H. von Hôfler, Papstvdrian VI, Vienne, 1880, p. 90, 237, 417 ; Cossio, op. cit., p. 404, 419.

7° Dernières années de Cajétan (1524-1534). — Bentré à Borne, Thomas de Vio se livra plus que jamais à une vie d’étude qu’il n’avait d’ailleurs jamais abandonnée. Ne pouvant servir l’Église en faisant prévaloir ses conseils, il lui fournit le concours d’une activité littéraire intense. La politique malheureuse de Clément VII vint lui rappeler, une fois encore, qu’il semblait voué à être le proche témoin des désastres de l’Église et, malgré ses avertissements, à ne pouvoir les empêcher. Au mois de mai 1527, Rome fut mise à sac par les troupes du connétable de Bourbon. Le cardinal de Saint-Sixte fut

fait prisonnier, couvert, comme plusieurs de ses collègues, des plus basses humiliations par une soldatesque forcenée, et condamné à payer pour sa rançon 5000 pièces d’or. Cajétan, qui était pauvre, dut recourir à l’emprunt pour satisfaire aux exigences des vainqueurs, et recevoir même des vêtements en aumône. Pour acquitter ses dettes autant que pour détourner ses regards des événements publics, il se relira dans son évêcbé de Gaète. [1 y resta jusqu’à l’automne de 1529, et revint alors à Borne, où les malheurs de l’Église commençaient à tourner les esprits vers des projets plus sérieux de réforme.

Dans la grave affaire du divorce du roi d’Angleterre, Clément VII commit au cardinal de Saint-Sixte l’examen des mémoires écrits sur cette question. Cajétan, dans sa consultation datée de Borne, 13 mars 1530, conclut contre les prétentions d’Henri VIII. Il adressa, quelques années plus tard, le 27 février 1534, un mémoire au roi d’Angleterre, à l’occasion de son mariage avec la veuve de son frère.

Les projets d’un futur concile firent porter les yeux de plusieurs vers Cajétan. Le cardinal Sadolet s’inlorrnait près de lui de ce qu’il fallait penser de cette affaire. Quand en 1534 Clément VII tomba malade, le nom du cardinal Cajétan fut mis en avant comme pouvant être celui du pape des réformes. Mais le cardinal de Saint-Si. vte se sentait gravement atteint et se préparait, avec une admirable résignation, à la mort. Elle survint le 10 octobre 1534. Il fut enseveli, en simple habit religieux et sans aucune pompe, selon ses désirs, sous le porche de l’église de la Minerve. Poursuivant jusque dans la mort ses idées réformatrices, il n’avait pas voulu contribuer à un abus qui encombrait, disait-il, de dépouilles mortelles des temples que l’on devrait réserver à la seule sainteté de Dieu. Flavius, op. cit., p. 906 ; J. Sadoleli Epislolx proprio nomine scriptse, Borne, 1760, part. I, p. 301, 319 ; C. Milanesi, Il sacco di Ronia del mdxxvii, Florence, 1867, passim ; C. Bavioli, Le guerre dei sette anni sotto Clémente VI, Borne, 1883, p. 79 ; A. Ciaconius, Vit se et res gestx pontif. roman, et S. R. E. cardinalium, t. iii, p. 392 ; Bullar. ord. prxd., t. iv, p. 466 ; Quétif-Echard, Script, ord. prxd., t. il, p. 15 ; Cossio, op. cit., p. 425-472.

II. Œuvres. — L’activité littéraire de Cajétan a été très considérable, et l’on aurait peine à comprendre qu’un homme, qui occupa si longtemps de hautes charges administratives, et dut prendre part aux plus graves affaires de son temps, ait pu la fournir, si l’on ne savait que Cajétan ne cessait d’étudier et d’écrire, même au milieu des occupations les plus absorbantes. Comme presque tous ses écrits portent la date à laquelle ils ont été achevés, il est aisé de voir comment leur composition coïncide quelquefois avec les moments où il aurait dû être le plus absorbé par les affaires extérieures ou le moins libre d’esprit. C’est ainsi que dix de ses opuscules portent les dates de divers jours du mois d’octobre 1518, c’est-à-dire du temps où il eut à traiter avec Luther à Augsbourg ; que la Summula peccatorum et les Jentacula furent écrits pendant sa légation de Hongrie ; qu’il continuait ses commentaires sur l’Écriture au milieu des horreurs du sac de Borne, en 1527.

Les écrits de Cajétan peuvent se diviser en œuvres philosophiques, théologiques et exégétiques. Dans leur ensemble elles ont été composées dans cet ordre, et nous l’adopterons dans le catalogue qui va suivre. Comme presque toutes les compositions de Cajétan sont datées, nous donnerons entre parenthèses, après le titre, ce renseignement fourni par l’auteur lui-même. Quétif-Echard ont dressé le catalogue de 82 opuscules théologiques selon leur ordre chronologique, p. 19-26 ; et Cossio, p. 497-501, a réuni, en une suite semblable, 114 titres d’ouvrages. Nous rapprocherons de préférence, ici, les écrits de Cajétan d’après leur affinité naturelle.