Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 2.djvu/547

Cette page n’a pas encore été corrigée
1081
1082
BOSSUET


tante controverse. Molanus lui envoya ses Cogitationes privatse de methodo reunionis Ecclesix protestantium

cttm Ecclesia catholico-romana a theologo quodam Augusiansv Confessioni sincère a Idicto. Bossuet donnait sur les doctrines proclamées à Trente toutes les explications désirables ; il n’exigeait même pas de rétractation formelle des erreurs professées : « Il suffira, disait-il, de reconnaître la vérité par forme de déclaration et d’explication. » Réflexions de M. l’évêgue de Meaux sur l’écrit de Molanus, part. II, c. v. Il laissait espérer pour les luthériens convertis de très larges concessions disciplinaires, ibid. ; mais il ne souffrait pas qu’on prétendit laisser en suspens l’autorité du concile de Trente ; et il repoussait de la communion de l’Église ceux qui refuseraient de s’y soumettre. Bé/lexiotis, etc., part. II, c. VI. Leibniz qui, en 1692, noue des relations épistolaires avec l’évêque de Meaux, n’y apporta point le même désintéressement et la même sincérité que l’abbé de Lockum, auquel il s’était substitué. Toute l’argumentation de Leibniz peut se résumer ainsi : l u le concile de Trente n’a pas été vraiment œcuménique, et l’on ne peut exiger que l’adhésion à ce concile soit une condition de la réunion ; 2° en admettant même qu’il ait été œcuménique, les luthériens sont de bonne foi en le restant, et, en conséquence de cette bonne foi, on ne peut pas les regarder comme hérétiques. Fatigué d’objections qui revenaient sans cesse sous la plume subtile et inépuisable de Leibniz, Bossuet laissa tomber la correspondance vers 1694 ; elle recommença en décembre 1699, à l’occasion d’un ouvrage du controversiste Véron. Leibniz demandait à l’évêque de Meaux sur quels principes se fonde l’Église romaine pour discerner ce qui est de lui de ce qui n’en est pas. C’est alors que fut traitée entre les deux illustres controversistes la question du canon des Écritures, définitivement résolue à Trente. Pas plus que la première fois, l’on ne put s’entendre ; et, à partir d’août 1701, toute correspondance cessa. Pourquoi, chez l’auteur du Systema theologicum, le refus d’aller jusqu’où Bossuet et peut-être aussi sa conscience l’appelait ? Lst-il vrai, comme le craint le prince Albert de Broglie, que « Y orgueilleuse faiblesse attachée à la royauté de la science comme à toute autre » , lui ait fait « redouter d’échanger le rôle de docteur accrédité’d’un parti contre celui de pénitent et de néophyte dans un autre… ; que, pour sauver la transition, il n’ait voulu passer qu’avec armes, bagages et tous les honneurs de la guerre, faisant des conditions au lieu d’en subir, entrant dans l’Église la tête levée, suivi d’un cortège de nations, et avant droit à autant de reconnaissance qu’il offrirait de soumission » ? Leibniz et Bossuet, dans le Correspondait du 25 novembre 1860. Aux considérations d’ordre personnel s’ajoutaient sans doute chez Leibniz des considérations tirées de la politique. Dévoué à la maison de Hanovre, que l’exclusion des Stuarts catholiques allait élever au trône d’Angleterre, il craignit de compromettre les intérêts de ses princes, en travaillant efficacement à rapprocher de Borne l’Allemagne luth arienne. Leibniz rompt toute correspondance avec Bossuet, dans l’année même où la mort du dernier fils de la reine Anne fait de l’électeur protestant de Hanovre un héritier présomptif. Leibniz mal Bussuet, dans Hist. polilisc/te Blàtler, Munich, 1903, t. cxxxii, p. 615-629.

En cette même année 1701, le pape Clément XI, pour faciliter la réconciliation du duc de Saxe-Gotha, demanda à llussuet communication dis acles les plus importants de sa correspondance avec Leibniz. L’évêque de Meaux, abrégeant le mémoire qu’il avail rédigé sur les Cogitationes privatse. de Molanus, écrivit le De professoribus Confestionit Augustanse ad repetendam unitatem callmh, u)>i dmponendis.

J Usons-le en laissant ce sujet, les catholiques d’aujourd’hui, non moins désireux que leurs devanciers du retour de tous lus dissidents, n’attendent rien des moyens

sur lesquels le XVII » siècle avait compté. Les âmes ont été détachées en foule de l’unité par les hérésies et par les schismes ; c’est une à une qu’elles reviendront, sans essayer avec l’Église de négociations, sans prétendre lui faire des conditions : Newman et.Manning ne lui en ont pas fait.

Autres travaux de cette époque.

Dans la dernière

période du xviie siècle, Bossuet écrivit son Mémoire sur la Bibliothèque ecclésiastique d’Ellies Du Pin, esprit facile, semi-teinté de pélagianisme, qui. dans l’affaire du Cas de conscience, par opposition à la doctrine reçue et à l’autorité, devait voter avec les jansénistes. Les Bemarques sur l’Histoire des conciles d’Ephèse et de Ckalcédoine sont une décisive apologie de ces grandes assemblées. En 1696. Bossuet écrivit ses Bemarques sur la Mystique Cité de Dieu de Marie d’Agréda.

/ ;. bossuet A meaux. — 1° Fonctions et honneurs proposés ou conférés à l’évêque de Meaux. — Il nous reste à étudier Bossuet dans son diocèse de Meaux. « Ce diocèse, moins étendu qu’il ne l’est aujourd’hui, comprenait environ 230 paroisses et comptait de 200 à 300ecclésiastiques. Là, comme dans les autres diocèses de l’ancienne France, le plus grand nombre des cures était à la collation des chapitres, des monastères, de quelques personnages laïques ; l’évêque n’en conférait (lue quatre-vingt-dix. Il y avait, dans le diocèse de Meaux. sept chapitres, cinq abbayes d’hommes, quatre abbayes de femmes ; dix-huit couvents ou communautés… >j H. Druon, Bossuet à Meaux, c. i. Un tel siège ne paraissait important que parce qu’il (Hait proche de Versailles ; l’opinion ne le jugeait pas digne de l’homme sans pareil qu’on y avait appelé. En 1688, le nom de Bossuet avait été prononcé pour le siège de Strasbourg, au cas où l’évêque de Strasbourg eût été postulé pour Cologne par le chapitre de cette métropole. A la mort de Harlay (6 août 1695), plus d’un — et le dauphin en premier lieu — désigna Bossuet pour l’archevêché de Paris. A M" 10 d’Albert, qui lui avait exprimé tout ensemble sa joie et sa crainte, l’évêque de Meaux répondait : « II y a toute apparence, et pour mieux dire toute certitude, que Dieu par miséricorde autant que par justice me laissera dans ma place. Quand vous souhaitez qu’on m’offre et que je refuse, vous voulez contenter la vanité ; il vaut bien mieux contenter l’humilité, et dire avec David sur cette petite humiliation, si c’en est une : Bonum mi/ii quia liumiliastime.n Lettre du "13 août 1695. Bossuet se réjouit de la nomination de Noailles. » Il n’y a plus à douter, malgré tant de vains discours des hommes, que je ne sois enterré aux pieds de mes saints prédécesseurs, » écrivait-il encore à M me d’Albert (22 août 1695). Et cependant, le vieil évêque semblait exprimer une déception qu’il ne s’avouait pas, quand, le 18 mai 1697, il écrivait à M. de La Broue, évéque de Mirepoix : « M. de Metz (Georges d’Aubusson de la Feuillade) est mort : on donne son évèché à M. l’abbé d’Auvergne, le cordon à M. de Paris, la charge de conseiller d’État à qui vous voudrez ; je ne demanderai rien. Betribuetur tibi in resurrectione justorum. »

Le nom de Bossuet avait aussi été prononcé pour le chapeau. « Le nonce, écrivaitil à son neveu, m’a dit très fortement qu’il fallait me faire cardinal » (lettre du ! ’juillet 1697) ; mais il ne tardait pas à voir qu’un tel désir ne s’accomplirait pas. « Ni M. de Reims, ni moi ne l’emporterons sur l’archevêque de Paris, dont la lamille… Ce n’est pas à moi qu’il convient de se donner du mouvement. Ma vraie grandeur est de soutenir mon caractère, d’édifier et de servir l’Église….le ne dois cire ni remuant ni insensible. » Lettre du 15 juillet 1697. Ce dernier mot achève, en l’humanisant, le lier portrait que, sans s’en douter, Bossuet trace de lui-même.

D’autres honneurs, moins relevés que la pourpre, furent conférés à Bossuet. Nommé i n 1695 conservateur des privilèges de l’université de Paris, il devint conseil-