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BOSNIE-HERZEGOVINE


sous leur tutelle. Suivant les traditions de saint Jacques de la Marche, l’apôtre de la Bosnie, Acta Bosne, p. 163, ils devinrent, comme dit Pastor, le seul soutien du christianisme hosniaque. Gcscltichte der Pùpste seit dem Ausgang des Mittelalters, Fribourg, 1894, t. il, p. 228. Mahomet II leur avait accordé le libre exercice de leur culte. Fabianich, Firmani inediti dei sultani di Coslantinopoli ai conventi francescanie aile autorilà civili di fiosniae Erzegovina, Florence, 1884. Mais les bogomiles passés à l’islam, par fanatisme religieux et par esprit de vengeance, en massacrèrent un grand nombre, pillant et brûlant leurs couvents. Bakula, 1 martiri délia missione francescana di Erzegovina, Rome, 1862 ; Fabianic, Storia dei frati minori in Dahnazia e nella Bosnia, Zara, 1863. A partir de cette époque, la Bosnie devint pour l’ordre de Saint-François une pépinière de martyrs et de confesseurs.

Il serait trop long de raconter ce qu’ils ont fait et ce qu’ils ont souffert pour la conservation du catholicisme en Bosnie-Herzégovine. Pour les épisodes héroïques de leur lutte séculaire avec le cruel islamisme, nous renvoyons les lecteurs à l’ouvrage très documenté du P. Etienne Bralic, Monografia storica salle crudellà musulmane in Bosnia-Erzegovina, Rome, 1898. L’historien le plus célèbre de l’ordre franciscain, Wadding, n’exagère pas lorsqu’il dit de ses confrères de la Bosnie : In média barbarie, ad omnem virtutem pietatemque injormarc, sanelissimisque religionis mysteriis impertire nunquam nostri destiterunt, t. xviii, p. 72.

En 1514, les franciscains de Bosnie formèrent une seule province qui prit le nom de Bosna-Argentina. Acta Bosne, p. 307. Rome continua à créer des évêques bosniaques, mais ceux-ci ne pouvant guère exercer leur ministère, les religieux furent investis de privilèges spéciaux et très étendus. Ibid., p. 311-312. Des visiteurs apostoliques étaient envoyés de temps en temps, et ils étaient accueillis par la population avec une grande joie. Ibid., p. 312.

Au xviie siècle, les Turcs se livrèrent à d’horribles persécutions contre les missionnaires latins. Dans toute la Bosnie, y compris Djakova, il y avait environ 100000 catholiques. Acta Bosne, p. 478. En 1686, la persécution en obligea 20000 à passer en Hongrie. Kharusine, p. 173. Les missionnaires étaient surtout exposés à des souffrances inouïes. On les forçait à payer des sommes énormes, et, en cas de refus, on les jetait en prison, et on les torturait. Acta Bosne, p. 341. Un franciscain écrivait en 1631 : « Nous sommes toujours battus, persécutés, tyrannisés. » Ibid., p. 405.

La Propagande ne semblait pas cependant apprécier à leur juste valeur l’héroïsme de ces sentinelles avancées du catholicisme en Bosnie. Dans une relation sur les missions catholiques présentée par Mo r Urbano Cerri à Innocent XI (1676-1689), nous lisons les détails suivants sur le catholicisme bosniaque : « Les catholiques de la Bosnie sont 1000 [’?] environ ; ils entretiennent à leurs Irais quelques prêtres qui leur administrent les sacrements. Il y a dans un grand nombre de parties du royaume des frères mineurs de l’observance, qui y possèdent dix-huit couvents, et c’est la première province de Saint-François, mais elle est relâchée et ils sont tellement opposés au clergé séculier par la crainte d’être privés des revenus de ces paroisses, avec lesquels ils entretiennent leurs couvents que, avec tous les ordres qui sont donnés de Rome, il ne serait pas possible qu’on s’y introduise sans susciter la persécution des Turcs contre ce même clergé. » Compendiosae gênerai relalione dello stato délie missioni falta alla Santilà di N. Signore l’anno IGT7 da M$ T Urbano Cerri, segrelario délia S. C. di Propaganda fide, ms. de la bibliothèque Corsini, 284, ꝟ. 30 verso. Les patriarches grecs de leur côté insistaient auprès de la Sublime Porte pour anéantir (annichilare) l’Église romaine en Bosnie-Herzégovine, et y établir la prépon dérance orthodoxe. Ibid., p. 504. L’évêque titulaire bosniaque n’avait pas de cathédrale, pas de chanoines, pas de clergé séculier : les franciscains, au nombre de 300, répartis en 12 couvents, tenaient sous leur direction 54 paroisses. Ibid., p. 489. Malheureusement, les conflits de juridiction étaient fréquents. Plusieurs évêques se livraient à des querelles interminables pour la délimitation de leurs diocèses respectifs. Un missionnaire franciscain écrivait en 1640 : « La pluralité des évêques sera la ruine finale de cette province. » Ibid., p. 430. Les fidèles, bien que pressurés, gardaient intacte leur foi. Ils s’adressaient à Rome et proposaient à la Propagande les noms de leurs candidats à la dignité épiscopale. Ibid., p. 413-414. Dans leurs églises, ils chantaient en latin et en slave le Gloria, le Credo, et d’autres prières. Ibid., p. 489. Les aumônes de la chrétienté permettaient à leurs pasteurs de continuer leur pénible ministère. Il y eut un moment où les franciscains furent obligés de se réfugier en Slavonie. Tour à tour les Turcs leur avaient enlevé les couvents de Rama, de Modric, de Srebrenica, d’Olov, de Visok, de Dolnji-Tuzla. Fra Batinic, Djelovanje Franjevaca u Bosni i Hercegovini za prvih sest viekova njihova boravka, Agram (Zagreb), 1881-1887. Au XIXe siècle la province franciscaine de Bosnie-Herzégovine fut partagée en deux. L’Herzégovine eut unecustodie autonome en 1852, et une province indépendante en 1892.

Pour ce qui concerne les évêques bosniaques, lorsque les Turcs étendirent leur domination sur la Bosnie tout entière, la résidence épiscopale fut transférée à Djakovo. Depuis le xiiie siècle cette ville était un fief de l’ancien évêché bosniaque. Theiner, t. i, p. 297 ; Racki, Bogomili i Palareni, t. vii, p. 172. Plus tard, la Propagande y envoya des évêques in partibus : Trébinje et Stolac furent attachés au siège métropolitain de Raguse. V. de Caix de Saint-Aymour, Les pays sud-slaves de l’Austro-Hongrie, Paris, 1883, p. 108-135. Quelques-uns de ces évêques eurent maille à partir avec les franciscains, au scandale des Turcs eux-mêmes. Acta Bosne, p. 135. En 1735, la Propagande érigea la Bosnie-Herzégovine en vicariat apostolique, et en confia la direction aux franciscains. En 1773, l’évêque de Bosnie et Djakova (episcopus Bosniensis et Djakovensis) prit aussi le titre d’évêque de Sirmium, à la suite de la fusion des deux diocèses par ordre de Clément XIV : Sirmiensem et Bosniensem Ecclesias in perpetuum unimus, itaquod dictarum unitarum ecclesiarum viius præsid et episcopus sit. Juris pontificii de Propaganda fide, part. I, t. iv, p. 194-195. En vertu de la convention conclue, le 8 juin 1881, entre le saint-siège et l’empereur d’Autriche, ibid., t. vii, p. 342343, Léon XIII rétablissait, le 8 juillet suivant, la hiérarchie catholique en Bosnie-Herzégovine. Milach, Rimokatulichkata propaganda, neinoto natclialo i segaclmoto i ustroistvo (en bulgare), Sofia, 1901, p. 150. Voici le texte du document pontifical : Sedem urbis Seraiensis, quæ Bosniensium urlnum princeps habetur, archicpiscopali et metropolitana dignitate auximus, ac Verhbosnensem appellari jussimus : eidenique sedes episcopales très, nempe Banial ucensem, Mandetriensem seu Dumniensera, Mcrcanensem et Tribuniensem Ragusini episcnpi administrationi concreditam, tanquam provinciales adsignavimus et addiximus, earumque sedium episcopos archiepiscopi Verhbosnensis suffraganeos futures decrevimus. Civiltà cattolica, série XIIe, t. vii, p. 351352. Les deux provinces, réunies sous la juridiction du métropolite de Sarajevo, eurent trois évêchés suffragants (Banjaluka, Markana-Trébinje, et Mostar-Duvno). Les origines de l’évêché de Marcana, dont il est fait mention dans ce document, remontent, d’après Farlati, t. vi, p. 292, au xive siècle. Mais cet évêché n’eut jamais de titulaire : nunquam fere hos litulos in duas personas distractos, sive in duos episcopos invenio. Les évêques de Trébinje, ayant obtenu la juridiction sur l’église et l’abbaye bénédictine de cette obscure localité, pri-