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ment connaître. C’est de cette même capacité absolue que parlera plus tard le concile du Vatican, sess. III. can. 1, De revelatione.

Cuni certitudine.

La démonstration rationnelle

dont la possibilité vient d’être affirmée est donc une démonstration réellement inattaquable en bonne philosophie et qui défie toutes les attaques ou dénégations du criticisme subjectiviste, du positivisme et de l’agnosticisme ou les affirmations similaires des iidéistes et des traditionalistes, pour ce qui concerne la valeur de la seule raison humaine. Le concile du Vatican a adopté une expression presque identique, loc. cit.

4° L’objet sur lequel peut porter cette connaissance certaine de la raison est désigné nommément : l’existence de Dieu, la spiritualité de l’âme et la liberté de l’homme. Autant d’expressions qui ont dans le langage de l’Église un sens absolument déterminé et constant. L’existence de Dieu, c’est l’existence du Dieu un et véritable, créateur et maître de toutes choses. Aussi ces attributs ont-ils été formellement désignés par le concile du Vatican, sess. III, c. il, et can. 1, De revelatione, comme pouvant être certainement démontrés par la raison. Rien n’est nécessairement affirmé des autres attributs d’ailleurs évidemment compris dans l’infinie perfection divine. La spiritualité de l’âme humaine, d’après l’enseignement de l’Église, c’est non seulement sa distinction mais surtout son indépendance intrinsèque de la matière sous le rapport de l’existence et de l’action ; ce qui entraîne son immortalité ou sa survivance constante dans une autre vie. Voir Ame, Sa spiritualité, t. i, col. 1021 sq. ; Vacant, Études théologiques sur les constitutions du concile du Vatican, Paris, 1895, t. i, p. 234 sq.

La liberté de l’homme c’est, au sens des définitions de l’Église, la répudiation des erreurs fatalistes ou déterministes et l’affirmation de la responsabilité morale de l’homme dans la mesure absolument nécessaire pour l’existence et la sanction de l’obligation morale, dans quelque état que l’homme puisse se trouver. C’est ce qui résulte : 1. de la condamnation formelle de la proposition 36 » de Luther le 16 mai 1520, des propositions 46 e et 65e de Baius le 1 er octobre 1567, de la proposition 38 e de Quesnel le 8 septembre 1713, de la première des propositions réprouvées le 7 décembre 1690 par Alexandre VIII, de la proposition 3e de Jansénius, 31 mai 1653 ; 2. des définitions du concile de Trente, sess. VI, c. i, v, xi, et can : 4-6 ; 3. de l’enseignement de Léon XIII dans l’encyclique Libertas præstanlissimum du 20 juin 1888.

5° Bonnetty ne se contentait point d’affirmer que la raison laissée à elle-même est incapable de démontrer les vérités de la religion naturelle. Il soutenait encore que ces vérités ne peuvent être établies que par l’autorité de la révélation. Aussi après avoir affirmé le pouvoir absolu que possède la raison de démontrer ces vérités, la deuxième proposition enseigne que la foi ne peut être convenablement alléguée comme preuve, soit de l’existence de Dieu contre les athées, soit de la spiritualité de l’âme et de la liberté humaine contre les partisans du naturalisme et du fatalisme. Cette assertion est appuyée sur la nature même de la foi. Acte de rationnelle et libre adhésion à la révélation divine, la foi suppose nécessairement l’existence préalable de cette révélation non seulement dans l’ordre objectif de la réalité, mais aussi dans l’ordre subjectif de notre connaissance. En d’autres termes, l’assentiment à la vérité révélée présuppose non seulement le fait de la révélation, mais encore une connaissance suffisamment certaine de ce fait, ainsi que des raisons spéculatives et pratiques d’adhérer à cette révélation et même des vérités religieuses nécessairement comprises dans les prœambula fidei. C’est surtout dans ce sens subjectif que doit ici s’entendre l’assertion : fides posterior est revelatione. Il est dés lors évident que cette connais sance des vérités naturelles préliminaires à l’acte de foi et ce jugement préalable sur le fait de la révélation et sur les motifs d’y adhérer ne peuvent, sans un cercle vicieux, provenir de la foi elle-même. Par conséquent la foi ne peut être invoquée comme moyen de démontrer les vérités religieuses naturelles contre ceux qui n’ont point encore adhéré à la révélation. D’ailleurs nous allons voir dans la 3e proposition que l’exercice de la raison doit précéder la foi, en fournissant les motifs spéculatifs et pratiques du jugement préalable de crédibilité.

3. Rationîs ususfidempræeeL’usage de la raison précèc’o

dit et ad eam hominem ope rela foi et y conduit l’homme velationis et gratias conducit. avec le secours de la révéta-Propositio subscripta a Baution et de la grâce. Propositainio, 8 sept. 1840. tion souscrite par Bautain,

le 8 septembre IS’iO.

Bonnetty avait émis ce principe que la révélation divine et la foi par laquelle on y adhère, sont seules capables de conduire l’homme à la connaissance certaine des vérités religieuses naturelles. A rencontre de cette assertion la 3e proposition : 1° affirme que l’exercice de la raison doit précéder la foi. Il ne s’agit ici que de la foi surnaturelle. On laisse entièrement de côté la question philosophique de la priorité de la raison vis-à-vis de la foi purement humaine qui est l’adhésion au témoignage humain, individuel ou universel. —2° Elle indique en quoi consiste cet exercice préalable de la raison. Celle-ci ne l’ait que préparer ou disposer à la foi, ac ? eam hominem conducit. Comment s’aeccomplit ce travail préparatoire, la proposition ne le dit point. L’encyclique de 1846 l’indiquait suffisamment par cette déclaration formelle, que la droite raison démontre la vérité de la foi, ut recta ratio fidei veritatem demonstret, ce qui ne peut s’entendre que de la démonstration de sa crédibilité, comme l’explique ultérieurement le même texte. Plus tard le concile du Vatican, sess. III, c. iii, en donnera cette raison, que l’assentiment de la foi, pour être conforme à notre nature, doit s’appuyer sur la présence d’infaillibles signes divins, critères assurés du fait de la révélation divine. C’est ce qu’indiquait déjà saint Thomas quand il esquissait cette profonde analyse de l’acte de foi : Ille qui crédit, habet sufficiens inductivum ad credendum ; inducitur enim auctoritate divins ; doctrinse miraculis confirmatæ et quod plus est, interiori instinctu Dei invitanlïs ; unde non leviter crédit ; lamen non habet sufficiens inductivum ad sciendum ; et ideo non lollitur ratio merili. Sum. llieol., IL » II*, q. ii, a. 9, ad 3 un >. — 3° En affirmant le rôle préparatoire de la raison, la proposition se garde de toute tendance rationaliste, par cette déclaration expresse : ope revelatiorns et gratiæ. Dans quelle mesure ce double secours, l’un extérieur, l’autre intérieur, est-il nécessaire, nous devons le demander à d’autres documents. Le concile du Vatican, sess. III, c. ii, a défini en quel sens la révélation est moralement nécessaire au genre humain, pour une connaissance suffisante des vérités religieuses naturelles, et absolument nécessaire pour la manifestation des vérités surnaturelles. D’autre part, en 529, le IIe concile d’Orange, can. 5-7, avait déjà défini la nécessité de la grâce surnaturelle même pour Vinilium fidei ipsumque credulitatis affeclum et pour toutes les dispositions positives à l’acte de foi, si lointaines qu’elles fussent ; ce qui s’applique infailliblement au moins à l’ensemble du jugement spéculatif et pratique de crédibilité.

4. Methodus qua usi sunt

D. Thomas, D. Bonaventura et

alii post ipsos scholastici non

ad rationafismum ducit neque

causa fuit cur apud scholas

hodiernas philosophia in natu ralismum et pantheismum im pingeret. Pruinde non licet in

La méthode dont se sont

servis saint Thomas, saint Bo naventure et d’autres scolas tiques après eux, ne conduit

pas au rationalisme et n’est

point cause que dans les écoles

contemporaines la philosophie

est tombée dans le naturalisme