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BOrSGELIN — BOLGENI


peuple sera la loi des ministres de la religion » . Discours au clergé d’Aix, janvier 1789.

Le clergé d’Aix choisit son archevêque pour le reprétenter. A peine les États sont-ils réunis (5 mai 1789), que la question de l’existence des ordres se pose à propos de la vérification des pouvoirs. Si libéral qu’il soit, M.deBoisgelin craintles réformes fondamentales précipitées : il s’oppose à une fusion que réclament les curés, c’est-à-dire la très grande majorité des représentants du clergé et quelques prélats comme l’archevêque de Bordeaux, de Cicé. Mais la fusion des ordres s’opère finalement le 27 juin 1789. Les évëques, déjà séparés des curés rattachés au tiers par tant de liens, ne forment plus qu’un petit groupe dans la nombreuse Assemblée ; M. de Boisgelin en est le guide, souvent le porte-parole. Il ne vaut à la tribune ni l’abbé Maury, ni l’abbé de Montesquiou ; son éloquence a moins de force que de grâce ; mais il sait en toutes circonstances « montrer la foi, le courage qui font les évêques, le coup d’oeil, l’esprit de décision qui tont les hommes d’Etat » . Sicard, L’ancien clergé de France, part. II : Les évêques pendant la Révolution, c. il, p. 154. Il ne laisse passer sans protester aucune des atteintes portées par la Constituante aux droits du clergé. Sa vigueur à défendre ces droits n’a d'égale que son esprit de conciliation. L’Assemblée reconnaît cette modération en le chargeant de répondre en son nom à une adresse des Amis de la Révolution de Londres et en l'élevant à la présidence (25 novembre5 décembre).

M. de Boisgelin parle donc contre la suppression sans rachat des dîmes (Il août 1789), contre la confiscation des biens ecclésiastiques proposée par Talleyrand le 10 octobre 1789 et votée par l’Assemblée le 2 novembre. Mais en même temps qu’il défend le droit de propriété du clergé, il propose, se rendant compte de la détresse de l'État, d’emprunter les 400 millions nécessaires à l'État en donnant hypothèque sur les biens du clergé, ou d’organiser une banque « dont le fonds social, gagé sur le patrimoine de l'Église, doit couvrir le déficit » . Discours du 31 octobre 1180 et du 12 avril 1100. Il n’est pas écouté. Son intervention sert du moins à prouver quel esprit anime la Constituante.

Le 24 mai 1790, Treilhard, au nom du comité ecclésiastique, présente son rapport sur la Constitution civile du clergé. La loi est votée le 12 juillet et sanctionnée par Louis XVI, le 24 août. Cette Constitution n’eut pas d’adversaire plus résolu que M. de Boisgelin. Il rédigea cotte Exposition des principes sur la Constitution du clergé, qui parut le 30 octobre, signée de trente évêques députés, à laquelle adhérèrent tous les autres évêques de France sauf quatre, et qui, dans le long silence de Rome, fixa la foi des prêtres et des fidèles. On vit l’effet de cette Exposition doctrinale quand, le 27 novembre 1790, un décret de la Constituante imposa à « tous les ecclésiastiques fonctionnaires publics » le « serment constitutionnel » .

Mais, suivant son habituelle modération, en même temps qu’il défend les principes avec vigueur, M. de Boisgelin cherche un terrain de conciliation. Ce qu’il condamne plus que tout dans la Constitution c’est qu’elle est l'œuvre du seul pouvoir civil. Au début, il demande, un concile national qui s’entendra avec l’Assemblée, et, même la loi votée, il renouvelle cette proposition. Puis quand Rome a parlé (10 mars et 13 avril 1791), que tout espoir de faire reviser la loi est perdu, il s’entend avec les autres évêques pour adresser au pape la lettre du 3 mai 1791, où tous lui demandent discrètement de sanctionner l’ensemble de la Constitution, légèrement modifiée, et, pour faciliter les choses, lui offrent leur démission. M. de Boisgelin insiste plus clairement dans des lettres particulières. Le pape repousse cet arrangement et M. de Boisgelin, qui a naturellement refusé le serment (4 janvier 1791], voit à la fin de l’Assemblée constituante

son siège occupé par un intrus. A ce moment, il ne demande plus que la liberté des cultes. Mais déjà la persécution s'élève : il émigré en Angleterre.

Il rentre en France après la signature du Concordat, quand il a donné sa démission d’archevêque d’Aix au pape qui la lui demande (août 1801). Avec quatre autres d’entre les dix-huit prélats réfugiés en Angleterre, il a résisté aux sollicitations des Bourbons qui veulent empêcher l’exécution du Concordat et entraver ainsi la marche de Bonaparte vers le pouvoir. Fn 1802, il est nommé archevêque de Tours. Il prononce à Notre-Dame de Paris, le jour de la restauration officielle du culte, 28 germinal an X, 18 avril 1802, le discours de circonstance, publié sous ce titre : Discours à la cérémonie de la prestation du serment des archevêques et évêques, in-8°. En 1803, M. de Boisgelin fut nommé membre du Sénat conservateur. Il meurt l’année suivante.

En dehors des discours et oraisons funèbres indiqués, du commentaire sur Montesquieu laissé en manuscrit par M. de Boisgelin, on a de lui : 1° des œuvres profanes : Le temple de Gnide, poème imité de Montesquieu, in-8°, Philadelphie (Paris), 1782 ; Recueil de poésies diverses, in-8°, Philadelphie (Paris), 1783 ; Traduction des Héroides d’Ovide, in-8°, Philadelphie (Paris), 1786. Ces publications l’ont fait comprendre dans le Dictionnaire des athées de Sylvain Maréchal. Rien n’est plus injuste. Ces œuvres ne devaient être tirées qu'à très peu d’exemplaires destinés à des amis. Elles étaient si peu connues, que le successeur de M. de Boisgelin à l’Académie, Dureau de Lamalle, n’en parle pas ; 2° Considérations sur la paix publique, adressées aux chefs de la Révolution, in-8°, Paris, 1791 ; 3° Le Psalmiste, traduction des Psaumes en vers français, précédée d’une dissertation sur la poésie sacrée, in-8°, Londres, 1799, ouvrage qu’il publia pour venir au secours de quelques familles d'émigrés. On a réuni ses Œuvres, in-S°, Paris, 1818.

M. de Bausset, Notice historique sur M. de Boisgelin, in-12, Paris, 1804 ; Sicard, L’ancien clergé de France, 3 in-8° Paris, 1894-1903 ; Sciout, Histoire de la Constitution civile du clergé, 4 in-8°, Paris, 1872-1881 ; 2e édit., 1887.

C. Constantin.

    1. BOLGENI Jean-Vincent##


BOLGENI Jean-Vincent, né à Bergame le 22 janvier 1733, entra chez les jésuites dans la province de Rome le 31 octobre 1747 et prononça ses derniers vœux le 2 février 1766. Pendant plusieurs années il enseigna la philosophie et la théologie à Macerata et semblait devoir parvenir par son talent aux premiers emplois de la Compagnie, lorsque parut le décret suppressif deClémentXIV.

Fidèle aux principes qu’il avait reçus au cours de sa formation religieuse, Bolgeni ne cessa de les défendre avec beaucoup de précision et de vigueur contre les jansénistes dans les premières années de la sécularisation. Pierre Tamburini, le célèbre professeur de Pavie, venait de publier son livre acrimonieux sur La véritable idée du saint-siège. Bolgeni lui oppose aussitôt YEsame délia « Vera idea délia santa sede » , in-12, Macerata, 1785, ouvrage plusieurs lois réimprimé ; puis Il critico corretlo ossia ricerche critiche sopra la lettera m di tin teologo Piacentino…, in-8°, Macerata, 1786. Ce critique corrigé n'était autre que Pierre Tamburini, qui avait imprimé en guise de défense une prétendue Lettre d’un théologien de Plaisance à Ma r Nani, évêque de Rrescia. L’archiprètre de Cividate di Valcamonica, JeanBaptiste Guadagnini, s'étant permis alors d’intervenir pour censurer ses deux ouvrages, Bolgeni lui répond victorieusement par la Confutazione délia Censura ail' Esame délia Vera idea délia S. sedee al Critico corretto, in-12, Macerata, 1786. L’année suivante, pour faire pièce à deux factums jansénistes sur le droit d’appel au concile publiés à Plaisance en 1784 et dont l’un était certainement de Tamburini, paraît la Riposta la questio ; Cosa è un appellante ? in-8°, Macerata, 1787.