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BIENS ECCLESIASTIQUES

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l’influence de l’intrigue, de la simonie, de la mainmise de l’État, en attendant le schisme définitif. Les Églises d’Occident, envahies par les barbares, restent sous le régime du Code théodosien. Le système de la personnalité des lois, qui laisse les hommes et les choses d’Église sous le régime ancien, leur assure le maintien de leurs droits essentiels. Les rois barbares accordent à l’Église de nouvelles dotations territoriales et multiplient surtout les couvents. Sous les Mérovingiens, toutes les donations royales en faveur de l’Eglise, dont il reste des traces, sont des concessions de plénum doniinium à la mode romaine. Nulle part n’apparaissent les concessions à caractère restreint de forme germanique qui sont, au contraire, fréquentes sous les Carolingiens. Ces dernières ne permettent pas au bénéficiaire d’aliéner, ni, s’il est simple particulier, de transmettre, sans contrôle, à ses héritiers. On voit d’ailleurs que, pour des établissements dont la succession ne s’ouvre jamais, la seconde clause des donations à forme germanique n’avait aucune importance ; quant à la défense d’aliéner, elle était en conformité avec les canons, et allait d’ailleurs à protéger l’intégrité du patrimoine ecclésiastique. L’Église occidentale augmente surtout ses fonds par la pratique des contrats de précaire, dont on peut voir les formules dans Marculfe, Capitularia région francorum, édit. Baluze, Paris, 1780, t. i. Un particulier y obtenait d’un autre une concession de terres, moyennant redevance ; c’était un souvenir de ce qui se pratiquait autrefois à l’égard du fisc impérial. L’usage s’introduisit peu à peu, chez les petits propriétaires gênés, de céder leurs biens à de puissants protecteurs, en s’en réservant l’usufruit par un contrat de précaire. Ce fut surtout à l’Église qu’on s’adressa, parce que ses biens étaient mieux administrés, ses tenanciers souvent mieux traités, et surtout parce que l’établissement ecclésiastique avait l’habitude de donner en précaire, non seulement l’usufruit de ce qu’on lui avait cédé, mais encore une égale quantité de terre à prendre sur son domaine. Esmein, Cours élémentaire d’histoire du droit français, Paris, 1898, p. 131-133. Les Églises s’enrichissent aussi aux mêmes époques des profits annexés à l’exercice du pouvoir temporel. Dagobert avait déjà donné à l’évêque de Tours, non seulement le droit de nommer les officiers royaux de la ville, mais aussi celui de lever l’impôt. Charlemagne multiplia les principautés temporelles entre les mains des évêques de France, et Louis le Débonnaire en fil autant pour ceux d’Allemagne. Le droit de battre monnaie accompagne souvent celui de rendre la justice. Les mêmes concessions se perpétuent dans l’âge suivant, en sorte que Pascal II (10991118j crut un instant devoir s’y opposer, par crainte de voir les évéqnes absorbés par les préoccupations de l’ordre temporel.

Nous assisterons à partir du XIIIe siècle, dans la troisième partie de ce travail, à l’histoire des restrictions apportées par l’État au droit d’acquisition de l’Église, Sauf quelques coutumes louables inconnues de l’antiquité, et que nous allons étudier, la charité des chrétiens n’a à peu près rien innové, depuis cette époque, dans la manière de subvenir aux besoins du culte.

6° Quelques louables coutumes, relativement modernes. — Le IV* concile de Latran (1215) s’en remet aux évéques pour empêcher d’une part les exactions, et faire observer d’autre part les louables coutumes relatives aux funérailles et à l’administration des sacrements. C. Ad apostolicam, 12, De simonia, , 3. La pratique de l’Eglise a été très variable, en ce qui concerne l’autorisation de percevoir, à l’occasion des sacrements, les moyens de subsistance que les fidèles doivent d’une façon générale à leurs prêtres. La crainte de manquer an iiiii, i gratis accepistis, gratis date fait que les usages qui nous occupent se sont généralisés relativement lard. Vers 300, le concile d’Elvire va jusqu’à interdire

les oblations spontanées à l’occasion du baptême. Mansi, t. il, col. 13. Il est vrai qu’ailleurs et plus tard, par exemple à Braga (573), on défend seulement aux clercs de rien réclamer. Mansi, t. ix, col. 840. La discipline continue de varier d’église à église, suivant le plus ou moins grand danger de simonie, et les ressources de différentes communautés. De la leciure des nombreux canons cités par Thoinassin, op. cit., c. i.xxii, lxxiii, il semble résulter que : 1) jamais on n’a rien exigé comme condition préalable à la collation des sacrements ; 2) on a permis assez généralement, sauf le cas de danger sérieux de simonie, de recevoir ce qui était spontanément otlert ; 3) on a permis de réclamer parfois les louables coutumes après la réception du sacrement ; le concile de Latran témoigne qu’au commencement du xiiie siècle, la pratique générale était fixée dans ce sens ; 4) il semble que ces coutumes s’introduisirent d’abord dans les villes, où les dîmes étaient à peu près improductives ; 5) encore défend-on aux ecclésiastiques intéressés de se faire justice à eux-mêmes ; ils doivent recourir à l’autorité des évéques. Ces derniers finissent par établir des tarifs qui, dès le xve siècle (concile de Salzbourg en 1180), apparaissent fixés après accord avec le pouvoir civil. Cf. concile de Cambrai, en 1565.

Parmi ces louables coutumes, les honoraires de mes ?e et les pénitences pécuniaires tiennent une place à part. Voir Honoraires de messe et Pénitence.

II. USAGE DES BIENS ECCLÉSIASTIQUES ; LEUR PAR-TAGE entre les intéressés. — L’emploi régulier des revenus ecclésiastiques est déterminé par les intentions des donateurs, exprimées ou du moins présumées. Tout se ramène à pourvoir aux besoins du culte, assurer la subsistance du clergé, enfin soulager les pauvres. Suivant les circonstances de temps et de lieu, c’est tantôt l’un et tantôt l’autre de ces mobiles qui met surtout en mouvement la générosité des fidèles.

Aux temps apostoliques, c’est le soin des pauvres qui préoccupe surtout les administrateurs du temporel de l’Eglise. Le culte est réduit à la plus grande simplicité ; les apôtres, évangélistes, prophètes, docteurs, vivent du fonds commun avec les pauvres. I Tim., v, 17 ; Didachè, c. xiii, Funk, Patres apostolici, t. i, p. 30, 32, Encore les plus parfaits vivent du travail de leurs mains, à l’exemple de saint Paul. Act., xx, 34j ICor., iv, 12. L’apôtre note même, dans le premier passage, qu’il nourrit de son travail d’autres que lui-même ; il pratique ainsi en perfection le liabentes alimenta et quitus tegamur, his contenti sumus. I Tim., vi, 8. Le patrimoine ecclésiastique se coniond ainsi parfaitement avec celui des pauvres. La discipline des Canons apostoliques, bien plus ancienne que la rédaction que nous en a transmise la fin du ive siècle, nous montre que la théorie n’a pas varié : Ex lus autem quibus indiget, si tamen indiget (sïye Seoito) ad suas nécessitâtes… ipse percipial (episcopus), ut nihil omnino possit ci déesse. Can. 4P (40), P. G., t. cxxxvii, col. 124. Et cependant les pasteurs ont, à la générosité des fidèles, d’autres titres que leur pauvreté. Aussi tout en les nourrissant de l’aumône, on leur affecte certaines offrandes, auxquelles les pauvres ne participent qu’à défaut des clercs. C’est ainsi que certaines prémices, celles que l’ancienne loi ordonnait de consacrer à Dieu, sont réservées par la Didachè aux prophètes et aux docteurs. C. xiii, 3, op. cit., p. 32. Ces mêmes prémices sont encore soigneusement distinguées des dîmes et des prémices des choses non prévues par les Nombres, xviii, et attribuées exclusivement aux clercs par les Constitution

  • apo8tolique8, l. VII, c. xxix ; 1. VIII, c. xxx, P.C.,

t. I, col. 1020, 1021, 1126. Théodore ! († 185) suppose encore la même répartition. Hist. relig., c.. /’. G., t. lx, col. 147, Entre la Didachè et cette date extrême, se placent les témoignages concordants de saint Épiphane (310-103), // « T., i.xxx, /’. C., t. xi. ii, col. 761, 765, et de