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vrage fut édité, à l’insu de Biel, par les soins de son élève et ami Wendelin Steinbach en 1488, à Rutlingen. L’auteur se plaignit vivement de cette publication ; son travail ne lui paraissait pas digne de l’impression, il le trouvait trop peu personnel, il déclarait avoir tout emprunté aux anciens maîtres ; la Lectura, selon lui, n'était que la reproduction, avec quelques additions et retouches, des enseignements d’Eggeling de Brunswick, prédicateur de la cathédrale de Mayence. Cependant, la comparaison minutieuse de cet ouvrage avec le Collectorium établit manifestement que Biel, dans son travail sur le canon de la messe, nous livre sa propre pensée. Cet écrit a obtenu, à bon droit, grand succès et a été souvent réédité : Tubingue, 1499 ; Cologne, 1499 ; Bàle, 1510, 1515 ; Lyon, 1514, 1527, etc. Gaspard Haslach l’a enrichi d’une très bonne table. Il a paru deux résumés du Lectura de Biel : Epithoma expositionis canonis missnn, Tubingue, 1499 ; Spire, s. d. ; et un abrégé plus court : Expositio brevis et interlinearis sacri canonis missse, s. 1. n. d. Hain, Bepertorium, n. 3178-3183.

2° Une série de sermons pour l’année ecclésiastique : Sermonesde festivitalibus Christi ; sernwnes de festivitalibus beatse Mariai Virginis ; sernwnes de sanctis, s. 1. (Tubingue), 1499 ; Semaines dominicales de tempore, Tubingue, 1500. liai ii, n. 31 84-31 85. On a annexé à ce recueil plusieurs appendices : Contra pestilentiam sernwnes médicinales ; De non timendo rnortem tempore pestis ; Qusestio de fuga pratts ; et enfin le Defensorium obedientise apostolicee ad Pium papam II destinatum et ab eo approbalum. Ces sermons ont été réimprimés plus tard à Haguenau, 1510 ; Bàle, 1519, 1520 ; Brixen, 1583. Destinés à un auditoire très cultivé, les sermons de Biel sont du plus haut intérêt pour l’historien et le théologien. Sans être indifférent aux abus de l'époque, le prédicateur songe moins à flageller le vice qu'à exposer la vérité. Il s’efforce surtout de faire connaître, accepter et aimer la doctrine chrétienne. Aussi, les sermons de Biel sont de véritables dissertations sur des sujets parfois très ardus. On y trouve, à côté de mouvements oratoires et d'élans d’une tendre piété, des exposés doctrinaux qui complètent et souvent expliquent les thèses du Collectorium. L’auteur ne se contente pas d’invoquer les Pères : il cite Aristote et les scolastiques. Tschackert est obligé d’avouer que Biel l’emporte sur les prédicateurs ses devanciers. Realencycl. fur protest. Theol. u. Kirche, art. Biel, Leipzig, 1897, t. iii, p. 210. Janssen affirme que ses sermons, à l'égal de ceux de Henri Herp et de Geiler, sont les plus remarquables de l'époque. L' Allemagne à la fin du moyen âge, trad. franc., Paris, 1887, p. 31.

3° ISermo historialis passionis dominiez, Rutlingen, 1498 ; Mayence, 1509 ; Bàle, 1519 ; lla-uenau, s. d. Hain, n. 3186.

4° Epithoma parilcr et collectorium circa quatuor Sententiarum libros egregii viri magistri Gabrielis Biel sacrse theologiæ licenciali bene meriti. — L’ouvrage a été édité en 1499, Coppinger, n. 3187, puis en 1501 par Wendelin Steinbach, à Tubingue, Hain, n. 3187. Depuis, il a été plusieurs fois réimprimé : Bàle, 1512 ; Lyon, 1514, etc. C’est l'œuvre capitale de Biel, la seconde série de leçons qu’il donna à l’université de Tubingue. Suivant l’usage de l'époque, l’auteur commente le livre des Sentences, mais en prenant Occam pour guide. Chacun des quatre livres qui forment l’ouvrage se divise en distinctions, au début desquelles se trouve un court résumé de la doctrine de Pierre Lombard. Puis Biel pose une ou plusieurs questions qui, toutes, se subdivisent en trois articles. Le premier contient des notions préliminaires : ce sont des définitions, des distinctions souvent très subtiles, claires pourtant et toujours très précises. Parfois aussi, Biel présente les diverses opinions émises sur le sujet, établit les prémisses de la thèse. Celle-ci est exposée et prouvée dans un second

article qui, d’ordinaire, contient plusieurs conclusions. Enfin, un troisième article écarte les objections, soulève de nouveaux problèmes et complète la solution principale. L'œuvre de Biel est inachevée : le livre IV, dist. I-XXIII, ne contient que les traités des sacrements en général, du baptême, de la confirmation, de l’eucharistie, de la pénitence et une courte étude de l’extrême onction. Wendelin Steinbach a complété l'œuvre de son maître Supplementum inXXVll distinctiones ultimas Sententiarum, Tubingue, 1520. Le tout, 5 in-4°, Brixen, 1574.

5° Tractatus de potestate et utilitate monetarum, imprimé d’abord à Oppenheim en 1516, et dans la suite plusieurs fois réédité. Hain, n. 3188. C’est une dissertation d'économie politique et de théologie morale sur la monnaie. Biel a aussi étudié cette question dans le Collectorium, 1. IV, dist. XV, q. IX.

6° Tractatus artis grammaticæ, s. 1. n. d. (Spire). Hain, n. 3189. — Linsenmann mentionne l’existence de lettres inédites conservées aux archives municipales de Darmstadt. Kirchenlexikon, art. Biel, Fribourg-enllri ^gau, 1883, t. ii, col. 808.

III. Doctrine.

Traits caractcristiijues.

Biel

déclare qu’il prend Occam pour maître, il veut s’attacher à lui sans mépriser les autres docteurs. Il se propose de l’abréger quand il étudiera les questions qui ont été longuement discutées par lui. Il consultera les autres maîtres sur les sujets qu’Occam a négligé de traiter ou d’approfondir. Mais il déclare que même dans ce cas, il ne s'écartera pas de son guide : il mettra d’accord avec les principes d’Occam les conclusions des autres écoles. Prohemium prologi, 1. I, dist. XLVI1I ; 1. ii, prol. ; 1. III, dist. XV.

Biel a exécuté son programme. Sans doute, il connaît, il cite et souvent il suit les autres nominalistes, Pierre d’Ailly, Marsile d’Inghem, Holkot, Henri de Oyta, Grégoire de Rimini, Nicolas d’Oresme, Gerson. Il tait aussi de nombreux emprunts aux théologiens des diverses écoles ; nous nommerons ici seulement ceux qui sont le plus souvent cités par Biel : saint Anselme, Hugues et Richard de SaintVictor, saint Bernard, Alexandre de Halès, saint Thomas, saint Bonaventure, Henri de Gand, Duns Scot, Pierre de Palude, Durand, Bichard de Middletown, Thomas de Strasbourg. Il sait aussi être personnel et n’est pas un simple compilateur. Mais l’acceptation des thèses fondamentales du nominalisme donne à l'œuvre de Biel uue puissante unité ; c’est en disciple d’Occam qu’il accueille, expose et prouve les thèses des autres maîtres ; et comme il le dit, s’il parait parfois contredire son guide, c’est pour rester fidèle à ses principes.

Et certes, jamais le nominalisme ne fut présenté dans une exposition plus claire. Sans doute, la leclure de Biel exige un effort du lecteur moderne, peu préparé par son éducation théologique à le comprendre. Mais, il faut avouer aussi que l’amour de l’ordre et de la précision dont le professeur de Tubingue fait preuve, le soin minutieux qu’il met à tout définir, expliquer, distinguer, permettent de suivre aisément l’exposé de thèses souvent très subtiles et très compliquées.

Cet art de la composition s’unit à de précieuses "qualités de iond. Biel a un esprit très judicieux, ses études de théologie morale en font foi, il a un sens pratique très affiné. Il a fait, dans son Collectorium, une place assez large aux problèmes de droit, de morale et d'économie politique, il a (réquenté et connaît bien les juristes et les casuistes ; il sait mieux que beaucoup de théologiens de son temps et de son école, s’arrêter discrètement devant le mystère ; il ne néglige pas de montrer les conséquences pratiques des doctrines, il approfondit avec une complaisance visible les problèmes de la théologie qui ont un rapport immédiat avec la conduite de la vie : tentation, ange gardien, prière pour les défunts, fruit du sacrifice, réparation du péché, etc.