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BAPTÊME PAR LE FEU


baptême de lumière des Templiers, symbolisé dans leur Baphomet ((Uxfr, M^-reo ;, baptême de Météou de la Sagesse). Mais Raynouard, dans le Journal des savants, 1819, a démontré que Baphomet n’était qu’une corruption du nom de Mahomet. Il est, d’ailleurs, difficile d’admettre que les Templiers étaient les héritiers des ophites. Giraud, Ophitæ, p. 282-291.

On.i souvent affirmé au xvie et au xviie siècle que les jacobites, les Abyssins et les Éthiopiens imprimaient le signe de la croix avec un fer chaud sur le visage ou sur le front des enfants, avant ou après l’immersion baptismale, et on rattachait cette pratique au baptême par le feu. Mais leurs rituels ne contiennent aucune mention d’une cérémonie de ce genre. Voir Baptême chez les Coptes, chez les Syriens. Cf. Assémani, Bibliotheca orientaîis, Rome, 1721, t. ii, Diss. de monophysitis. Les anciens voyageurs ont pris pour des stigmates du baptême de feu de simples traces de cautères ou des croix marquées sur le front comme signes de christianisme pour échapper à l’esclavage des mahométans. Voir Renaudot, dans La perpétuité de la foi, Paris, 1713, t. v, p. 105-108 ; Denzinger, Ritus orientalium, Wurzbourg, 1863, 1. 1, p. 14.

Une secte fanatique de Sibérie, nommée bezpopovtebina, c’est-à-dire sans prêtre, et faisant partie des raskolnicks, regardait la mort volontaire par le feu comme un devoir du ebrétien. Vers la fin du xviie siècle, Daniel Donatien, son chef, réunit dix-sept cents personnes qui, malgré les représentations d’Ignace, métropolitain deTobolsk, mirent le feu à leurs cabanes et périrent au milieu des flammes afin de se purifier par le feu. Grégoire, Hist. dessectes religieuses, 1828, t. iv, p. 160 sq. ;.1. Gehring, Die Sekten der russ. Kirche, 1898, p. 94-95 ; I. Stchoukine, Le suicide collectif dans le raskol russe, 1903.

II. Pour les Pères de l’Église. — Les Pères qui ont admis un baptême par le feu l’ont entendu autreiin-nt que les hérétiques. C’est Origène qui le premier a parlé d’un baptême par le feu. Commentant Luc, iii, 16, il se demande quand Jésus baptise par l’Esprit et quand il baptise par le feu, et s’il le fait au même temps ou en des temps différents. Il répond que les apôtres ont été baptisés par l’Esprit après l’ascension, mais que l’Ecriture ne dit pas qu’ils l’aient été par le feu. A son sentiment, de même que Jean-LSaptiste se tenait sur les rives du Jourdain pour baptiser tous ceux qui se présentaient, ainsi le Seigneur Jésus sera debout dans un fleuve de feu auprès du glaive de flamme pour baptiser dans le fleuve quiconque au sortir de cette vie désire passer au paradis et a encore besoin d’être purifié ; il ne baptisera pas dans le bain de feu celui qui n’aura pas la marque des premiers baptêmes, car il est nécessaire d’avoir été baptisé dans l’eau et l’Esprit et d’avoir conservé la pureté de ce baptême pour mériter de recevoir le baptême de feu en Jésus-Christ, in Luc, homil. xxiv, P. G., t. xiii, col. 1864-1865. Ce n’est pas là une afiirmation dite en passant, c’est un enseignement qu’Origène a répété à diverses reprises, mais avec des divergences qui rendent sa pensée indécise. Ainsi il place cette purilication par le feu après la résurrection et il y fait passer tous les hommes. De ce que les femmes juives étaient purifiées trente jours après la naissance de leurs enfants mâles, il conclut, dans un sens spirituel, que la véritable purilication ne viendra pour nous que post tëmpus. Ego puto quod et post resurrectionem ex morluis indigeamus sacramento eluente nos algue purgante, nemo enim absque sordibus resurgere poteril, nec ullam passe animam reperiri quai universis statim vitiis careat. Il avait dit à la page précédente qimil polluli et sordidi resurgamus. lu Luc, homil. xiv, ibid., col. 1835, 1836. Il maintient parfois la distinction entre les justes, qui ont reçu le baptême du Saint-Esprit et n’ont pas besoin du baptême de feu, el les pécheurs qui, à la seconde résurrection, ne sont pas entièrement

purifiés et doivent passer par le feu pour consumer ce qui leur reste de bois, de foin et de paille. In Jer., homil. ii, n. 3, ibid., col. 281. Mais ailleurs, il déclare que tous doivent venir à ce feu purificateur, qui est préparé pour les pécheurs et qui éprouve les œuvres de chacun. El, ut ego arbitrer, omnes nos ventre necesse est ad illum ignem, même saint Pierre et saint Paul. Toutefois, les pécheurs y viendront ; ils n’y passeront pas comme ces apôtres. Les Égyptiens sont venus à la mer Rouge comme les Hébreux, mais tandis que ceuxci l’ont traversée, les premiers y ont été engloutis. Les pécheurs qui ont obéi au diable, représenté par Pharaon, seront submergés, eux aussi, dans le fleuve de feu. Les bons, rachetés par le sang de l’Agneau sans tache et ne portant point de levain de malice, entreront dans ce fleuve, où le feu formera un mur qui leur laissera le passage libre, sans les toucher. In Ps. xxxvi, homil. iii, n. 1, P. G., t. xii, col. 1337. Origène renouvelle la distinction entre les pécheurs qui, au jour du jugement, seront livrés aux flots de feu, et les saints, qui marchent sur les eaux. Il ajoute toutefois : Idcirco igitur qui salvus fit, per ignem salvus fit, ut si quid forte de specie plumbi habuerit admistum, id ignis decoquat et resolvat, ut efficiantur omnes aurum bonum. Il conclut : Veniendum est ergo omnibus ad ignem, veniendum est ad conflatorium, et il décrit la manière différente dont le Seigneur purifie les justes et engloutit les pécheurs. In Exod., homil. vi, n. 3, 4, ibid., col. 334-335. Il répète encore que purificatione indiget omnis qui exierit de prselio vitx hujus. Celui qui aura vaincu le diable aura lui-même besoin de purification, parce qu’il s’est souillé par le contact du démon dans la lutte. Saint Pierre et saint Paul ont été souillés à ce contact et ils auront besoin d’être purifiés pour entrer dans la sainte cité de Dieu. In Num., homil. xxv, n. 6, ibid., col. 769, 770. En présence de ces variations de pensée, les interprètes d’Origène hésitent dans l’explication de sa doctrine. Sixte de Sienne et Génébrard avaient reconnu dans ce feu purificateur l’embrasement dans lequel le monde actuel doit passer à la fin des temps. Quelques textes des livres Cont. Celsum justifieraient cette interprétation qui ne cadre pas avec toutes les aflirmations d’Origène. Maldonat, Comment, in quatuor eva » g., Paris, 1617, p. 42, et Suarez, InlII"*, disp. L, sect. i, n. 13, Paris, 1877, t. xix, p. 917, entendaient les textes patristiques relatifs au baptême par le feu comme signifiant les peines du purgatoire. Cette interprétation qu’ils rejetaient d’ailleurs est trop bénigne et ne rend pas compte de tous les textes. On s’est demandé si ce feu était matériel ou métaphorique. En bien des passages Origène n’y voit que le remords de la conscience ; mais d’autres ne peuvent s’entendre que d’un feu matériel. Que ce feu purificateur ait atteint les justes et les impies à la fin du monde, c’est, au jugement de dom Delarue, P. G., t. xiii, col. 1835-1836, not. 39, une erreur d’Origène.

Elle a été adoptée par d’autres Pères de l’Église. Lactance, Dtv. instit., 1. VII, c. xxi, 1’. L., t. vi, col. 801, 802, trouve dans l’Écriture des preuves d’un feu éternel, d’une autre nature que le feu de cette terre, qui brûlera les impies ; sed et justos cum judieaverit, etiam in igni eos examinabit. Tum quorum peccata vel pondère vel numéro prsevalucrint, perstringeutur igui atquc amburentur ; quos autem plena juslitia et maturxlas virtutis incoxerit, ignem illum non xcntient ; habent enim aliquid in se Dei quod vim flamnui’repellalac rexpuat. S. Ililaire, Comment, in Matth., c. i, P. L., t. ix, col. 926, distingue le baptême dans le Saint-Esprit du baptême par le (eu : Baptizatis in Spiritu Sancto, reliquum est consum-mari ignejudicii. Cf. Tract. in cxviu I’s., lit. iii, 5, 12, ibid., col. 519, 522. Saint Ambroise s’est visiblement inspiré de la doctrine d’Origène. Il distingue plusieurs baptêmes, dont l’un est