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BAPTÊME D’APRÈS LE CONCILE DE TRENTE

’Mais si les évêques s’accordèrent à condamner les erreurs protestantes, ils ne tinrent pas tous le même langage. Les uns, la majorité, recoururent exclusivement aux expressions et aux explications théologiques du moyen âge. D’autres, moins nombreux, employèrent des locutions plus augustiniennes. Ainsi, à la première question : quel est le remède contre le péché originel ? presque tous les Pères répondirent : Ce sont les mérites de la passion de Jésus-Christ et le baptême en fait à l’homme l’application (l’archevêque d’Armagh ajouta : Dieu pourrait, s’il le jugeait bon, employer un autre moyen). Mais l’évêque de Syracuse préféra s’exprimer ainsi : Le remède, c’est la foi et le baptême. Séripandi, général des ermites de Saint-Augustin, dit même : C’est la foi, car le baptême n’agit que par elle. Pas de discussion non plus sur les eflets de ce sacrement : rémission du péché originel et des autres fautes, des peines éternelles et temporelles, justification, droit au ciel. Quelques-uns demandèrent qu’on indiquât aussi la production des vertus infuses. Plusieurs insistèrent sur la nécessité de baptiser les enfants même, ajoutait l’archevêque d’Aix, Filhol, s’ils sont fils de chrétiens. Tous s’accordèrent à affirmer que le sacrement n’a pas seulement pour effet d’empêcher que la faute originelle nous soit imputée. La concupiscence demeure en nous, il est vrai ; mais c’est afin que nous ayons l’occasion de lutter et de mériter. Elle n’est pas, à vrai dire, une faute, tous les Pères l’admettent. Beaucoup ajoutent que si, au sens large, on peut l’appeler péché, c’est qu’elle vient du péché et porte au péché. C’est ce que montra bien Bertani. L’évêque de Syracuse discuta longuement les deux thèses protestantes : la concupiscence est un péché que Dieu n’impute plus au baptisé ; elle retarde l’entrée au ciel. Dans le langage de certains Pères, on peut trouver quelques expressions particulières. Si nous ne consentons pas, dit incidemment Cortes de Prato, évêque de Vaison, la concupiscence n’est pas imputée à péché, et Séripandi lit remarquer qu’on ne peut sans autre explication affirmer de la concupiscencequ’elle est ou qu’ellen’est pas péché. Selon l’évêque de Cava, Thomas de Saint-Félix, le péché originel consistant dans la privation de la justice originelle et dans la concupiscence, le baptême a deux effets : nous ne sommes plus privés de la grâce, la concupiscence ne nous est plus imputée par Dieu à péché. Il prétendait s’appuyer sur saint Thomas et saint Augustin.

Ainsi éclairés sur la pensée des Pères, les légats préparèrent un décret. Pour le rédiger ils consultèrent Lippomani, évêque de Vérone, Castelli, évêque de Bertinoro, Pierre Bertani, et les théologiens Alphonse de Castro et Vita de Pattis. Ils se servirent de phrases empruntées à saint Paul, à saint Augustin et à saint Thomas ; ils mirent aussi à profit les affirmations des membres du concile. Le canon 3° était assez semblable à celui qui fut définitivement adopté. Voir plus loin. Mais, au lieu de : Si quis hoc Adæ peccatum… transfusum. .. omnibus incst… tolli… meritum unius mediatoris, on lisait : Si quis mortem hujus originatis peceati… diffusum resiâet… auferri… meritum unius. A la place de per baptisnii sacramentum… applicari se trouvait cette phrase : per /idem et baptismi sacramentum applicari, enfin le anathema sit était suivi de cette remarque : Iluic enim omnes prophétie testimonium perhibent remissionem pcccalorum accipere per nomen ejus omnes qui credunt in eum neque aliud nomen est sub cselo, etc. Le 4° et le 5° canons du décret actuel n’en formaient qu’un seul. Après les mots : introirein regnum Dei, là où nous lisons : Si quis per Jesu… odit Drus, on avait écrit : liane fidem et sanctorum l’ulrum tiormam iiiiiliuidajiirc sancta synodus fateturac déclarât in baptismale per Jesu Çhristi grattttin quam confert « continet, non modo remilti reaimii original18 peceati, sed totum id auferri, quod veram cl propriam peceati rulionem liabel ; auferri

scilicet, non radi neque tantum non imputari. In illis enim nihil odit Deus, etc. Après baptisma in mortem, on ne lisait pas les mots : qui non secundum carnem ambulant. Au lieu de veterem… induentes, on avait écrit : veteriexuto homine etnoco qui secundum Deum creatus est induto. La phrase matière était ainsi rédigée : Manere autem in baptizatis concupiscentiam vel fomitem, naturse infirmitatem ac morbum non solum apostolicis Scripturis, sed ipsa experienlia docta pariter fatetur et sentit quac tamen nocere non consentientibus non valeat ; has peceati reliquias quas beatus Paulus aliquando peccatum vocat, Ecclesiam calholicam nunquam intellexisse quod vere peccatum sit, sed… Après cette phrase il n’y avait pas d’anathème. Mais le décret se terminait par deux propositions qui n’ont pas été maintenues dans le texte définitit. La première, empruntée à saint Augustin, affirmait en termes un peu obscurs la permanence, après le baptême, de la concupiscence, reste du péché. Elle est vaincue et supprimée, tant qu’un consentement illicite ne lui rend pasla vie. La seconde proposition légitimait l’emploi de l’axiome reçu dans l’École : le baptême enlève ce qu’il y a de formel dans le péché, il laisse l’élément matériel. C’est par ces mots que se terminait le décret.

On le transmit aux membres de l’assemblée le 7 juin et le lendemain, en congrégation générale, on le discuta minutieusement. Sur les canons 3e et 4e, de nombreuses corrections furent demandées. Quelques retouches proposées étaient de pure forme. Afin que le texte devint plus clair, on proposait d’ajouter mediatoris à unius, de rendre plus intelligible ou de supprimer les mots auferri scilicet non radi (can. 4), d’ajouter nunquam intellexit. .. peccatum appellari, àe modifier l’ordre des mots justitia, sanctificatio, redemptio (can. 3). A auferri peccatum (can. 3) on ferait bien de substituer la locution biblique : tolli peccatum, etc. Pour donner aux penséesune plus grande précision, on proposa quelques additions. Au lieu de dire : nous n’imitons pas, tuais nous contractons le péché d’Adam, qu’on mette : non seulement nous imitons, mais… Le baptême confère la grâce, c’est vrai, mais à titre d’instrument de la puissance divine. La concupiscence ne nuit pas si nous résistons à ses sollicitations : on pourrait même ajouter qu’elle est une occasion de mérites si nous luttons. Et puis, ne convient-il pas de mieux affirmer que pour commettre un péché mortel, il faut pleinement consentir aux sollicitations de la passion ? Cette question fut agitée par beaucoup de Pères. Le décret ne signale que la concupiscence parmi les pénalités que ne détruit pas le baptême : il ne serait pas inutile de mentionner au moins d’une manière générale les autres infirmités qui demeurent chez les chrétiens. Plusieurs additions furent demandées : condamner ceux qui déclarent que le péché originel atteint les enfants avant le baptême, mais ne leur est pas imputé, parler des enfants morts sans baptême, dire que le baptême des adultes est aussi efficace que celui des enfants, affirmer que toutes les peines sont remises chez quiconque reçoit ce sacrement. D’autres corrections proposées étaient moins justifiées : certains Pères, oubliant qu’on envisageait ici le baptême par rapport au péché originel, voulaient qu’on traitât du sacrement : rite, effets, sujet, dispositions. En revanche, des suppressions furent demandées ; la phrase : Huic o » i » ies(can. 3), était considérée comme superflue par plusieurs évêques ; on lit remarquer que les mots : la grâce contenue dans le baptême, préjugeaient la question du mode d’eflicacité des sacrements. A quoi bon encore légitimer la locution reçue dans l’Ecole sur l’élément matériel et l’élément formel de la faille originelle, d’autant plus que cet axiome, inconnu des anciens Pères, peut être mal compris ? Mais ce que les évêques prirent à cœur de signaler, ce sont les mois dont les protestants auraient pu abuser. Il y a danger à affirmer que le péché originel est