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BAPTÊME DANS L’EGLISE LATINE DEPUIS LE VHP SIÈCLE


2. la remise des peines dues au péché ; 3. la grâce sanctifiante et les dons surnaturels ; 4. le caractère baptismal ; 5. l’incorporation à Jésus-Christ et à l’Eglise ; 6. la question de savoir si le baptême produit les mêmes effets chez tous ceux qui le reçoivent. Nous n’avons pas à examiner ici les conditions requises pour la production de ces effets (voir Sacrements), non plus que la question de savoir comment ces eflets, ayant été empêchés au moment de la réception du sacrement, peuvent ensuite faire leur apparition dans l'âme, une fois l’obstacle levé. Voir Fiction.

I. rémission des PÉcaÉs.

Il faut entendre par là la rémission, non seulement du péché originel contracté par tous, mais aussi des péchés actuels que les adultes ont pu commettre avant le baptême. Les scolastiques sont unanimes à proclamer cette vérité fondamentale, enseignée d’ailleurs clairement par l'Écriture et la tradition. Voir plus haut. Le concile de Florence la définit en ces termes : Hujus sacramenti [baptismi] effectus est remissio omnis culpse originalis et actualis. Denzinger, Enchiridion, n. 591. Les anciens scolastiques se posent à ce sujet une question intéressante. Ils examinent le cas où les adultes se présenteraient au baptême avec la foi, la charité et une vraie contrition préalable. Sont-ils justifiés avant la réception du sacrement ? Et s’ils le sont, que peut bien leur remettre le baptême ? Les docteurs du xii° siècle sont un peu embarrassés pour répondre. Roland Bandinelli croit que la contrition obtient vraiment la rémission des péchés, et que le baptême est une manifestation ou déclaration officielle de ce pardon : In baptismo remittuntur [peccata], id est in baptismo remissaostenduntur, et certificatur Ecclesia tune de remissione fada. Die Sentenzen Rolands, édit. Gietl, p. 203. Ou encore, dit-il, on peut entendre à la fois par rémission du péché le pardon de la faute ou coulpe (culpa), et la remise des peines dues au péché. Or la contrition obtient sans doute le pardon de la faute, ainsi que la remise de la peine éternelle, mais non la remise de la peine temporelle. Au reste, ajoutet-il, il y a une opinion d’après laquelle la contrition n’obtiendrait pas la rémission des péchés, avant la réception du baptême. Loc. cit. Cette opinion que Roland mentionne sans l’apprécier, paraît être celle du pseudoHugues, l’auteur de la Somme des Sentences, dont l’enseignement est d’ailleurs assez vague. D’après lui, la contrition produit la justice, mais non la justification ; elle ne délivre pas l'âme de la dette du péché, mais se contente de montrer la blessure au divin médecin, blessure dont le baptême seul est le remède. Sum. Sent., tr. V, c. vii, P. L., t. clxxvi, col. 133. Pierre Lombard est moins imprécis. « Par la foi et la contrition, dit-il, les adultes sont purifiés sans doute de la souillure du péché et délivrés de la peine éternelle ; mais ils restent néanmoins tenus à une satistaction temporelle. Le baptême les en délivre, accroît en eux la grâce et les vertus, les renouvelle intérieurement et diminue en eux le foyer du péché. » Sent., . IV, dist.IV, n.6, P. L., t.cxcn, col. 849. Saint Thomas, beaucoup plus précis et plus exact, enseigne que).a contrition peut justifier les adultes avant le baptême, mais à la condition qu’elle comprenne le vœu au moins implicite du sacrement. Et il donne la raison théologique de cette loi : Nullius peccati remissio fieri potest nisi per virtutem passionis Christi… unde motus humanx voluntatis, qui est in psenitente, non sufficeret ad remissionem culpse, nisi adesset fides passionis Christi, et proposition participandi ipsam, vel suscipiendo baptismum, vel subjiciendo se clavibus Ecclesisc. Et ideo cjuando aliquis adultus pxiiitens ad baptismum accedit, consequitur qu’idem remissionem omnium peccatorumexproposito baptismi, perfectius autem ex reali susceplione baptismi… Remissionem peccatorum aliquis consequitur ante baptismum, secundum quod habet baptismum in

voto vel explicite vel implicite, et tamen cum rcaliter suscipit baptismum, fit plenior remissio quantum ad liberationem a tota pœna. Sum. llieol., III a, q. lxix, a. 1, ad2um ; a. 4, ad2um. Les théologiens postérieurs ne lont guère que reproduire la doctrine de saint Thomas. Voir Contrition et Justification.

n. remise des peixes dues aupécbé. — Le baptême remet non seulement le péché proprement dit (reatus culpse), mais toutes les peines dues au péché (reatus pœnse), peine éternelle et peines temporelles. C’est l’enseignement unanime des scolastiques, confirmé par le concile œcuménique de Florence qui s’exprime ainsi : Hujus sacramenti effeclus est remissio omnis culpse originalis et actualis, omnis quoque pœnse quse pro ipsa culpa debetur. Proplerea baplizatis nulla pro peccatis præleritis injungenda est satisfactio ; sed morientes, anlequam culpam aliquam commitlant, statim ad regnum cselorum et Dei visionem perveniunt. Denzinger, Enchiridion, n. 591. Saint Thomas explique comment le baptême a la vertu de remettre ainsi les peines temporelles : Per baptismum aliquis incorporatur passioni et morti Christi, secundum illud (Rom., vi, 8) : Si mortui sumus cum Christo, etc. Ex quo palet quod omni baptizato communicatur passio Cltristi ad remedium, ac si ipse passus et mortuus esset. Passio autem Christi… est suf/iciens satisfactio pro omnibus peccalis omnium hominum. Et ideo ille qui baptizatur, liberatur a reatu totius pœnse sibi debitse pro peccalis, ac si ipse sufficienter salisfecissct pro omnibus peccatis suis… Et ideo ei qui baptizatur, pro quibuscumque peccatis nonest aliqua satisfactio injungenda ; hoc enim esset injuriam facere passioni et morti Christi, quasi ipsa non esset suf/iciens ad plenariam salisfactionem pro peccalis baptizatorum. Sum. tlieol., III a, q. lxix, a. 2 ; q. lxviii, a. 5. Les théologiens concluent de là que le baptême ouvre la porte du ciel : Effectus baptismi [est] apertio januse regni cselestis. S. Thomas, Sum. theol., III a, q. lxix, a. 7. En effet, dit le docteur angélique, ouvrir la porte du ciel, c’est écarter tous les obstacles qui en ferment l’entrée. Le baptême, ayant précisément pour effet de remettre à la fois le péché et les peines qui lui sont dues, enlève ipso facto tous les obstacles qui s’opposent à l’entrée immédiate au ciel des chrétiens qui meurent avec l’innocence baptismale.

Mais le baptême ne délivre pas des peines, ou plutôt des pénalités qui sont la conséquence du péché originel, comme l’ignorance, la souffrance, la concupiscence et la mort. En d’autres termes, tout en nous rendant l’amitié et la grâce de Dieu, il ne nous restitue pas les dons préternaturels qu’Adam a perdus par le péché. Dieu a maintenu ces pénalités pour trois raisons principales, d’après saint Thomas. Elles constituent d’abord, la concupiscence exceptée, un trait de ressemblance nécessaire entre le Christ et nous ; car il convient ut id agatur in membro quod est actum in capite. Sum. theol., III a, q. lxix, a. 3. Elles sont en outre un moyen providentiel de mériter la couronne éternelle, par les luttes qu’elles supposent et les vertus qu’elles 'demandent. Il était à craindre, d’ailleurs, qu’on n’eût reçu le baptême pour les avantages simplement temporels qu’il aurait procurés, s’il eût délivré les chrétiens des misères de cette vie. Voir pour le développement de ces trois idées le catéchisme du concile de Trente, part. II, n. 48. Qu’on ne s'étonne pas de voir le baptême remettre toutes les peines dues au péché personnel, et laisser néanmoins subsister les peines ou pénalités qui sont la conséquence du péché originel, bien que nous soyons moins responsables de celui-ci que de l’autre. Dans le péché originel que nous contractons, dit saint Thomas, c’est la nature qui souille la personne. Jésus-Christ suit l’ordre inverse dans son œuvre de réparation. Il guérit d’abord les blessures de la personne, réservant pour la vie future l’entière guérison de la nature proprement