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BAPTÊME DES HÉRÉTIQUES (CONTROVERSE RELATIVE AU)

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quand il est conféré selon la formule trinitaire ; mais illicéité quand celui qui le confère pèche par défaut d’orthodoxie ou de moralité. Le sujet bien disposé, croyant ce que croit l’Église catholique et ne recourant au baptême donné par les hérétiques qu’en cas de nécessité, sans pactiser avec l’hérésie, reçoit immédiatement la grâce du baptême. De bapt., VI, 2, 4, ibid., col. 199. Mais, tout en recevant la réalité du sacrement, il peut empêcher son effet immédiat, ou parce qu’il persévère dans ses mauvaises dispositions, ou parce qu’il pactise avec l’hérésie de ceux qui lui confèrent le baptême. L’effet ne devient actuel que lors de l’admission du baptisé dans l’Église. A ce moment-là, l’obstacle disparaît, rend utile ce qui était inutile, De bapt., I, 1, ibid., col. 109, guérit le mal, De bapt., I, 8, 11, ibid., col. 116, Tait que le sacrement reçu devient profitable, De bapt., i, 5 ; 12, 18 ; 13, 21, ibid., col. 113, 119, 121, et que les péchés sont remis. De bapt., ni, 13, 18 ; VI, 5, 7, ibid., col. 146, 200. C’est la charité qui procure le plein effet du baptême, charité qui ne se trouve que dans l’unité. De bapt., ni, 16, 21, ibid., col. 149. Il en est de même, observe saint Augustin, pour les catholiques qui, en recevant le baptême, n’ont renoncé au siècle qu’en paroles et non par les actes : ils ne perçoivent l’effet du sacrement dans sa totalité que lorsqu’ils renoncent effectivement au siècle. De bapt., iii, 3, 4, ibid., col. 141. Le baptême ne profite ni aux aperle foris ni aux intus occulte separalis : utrique auteni correcto prodesse ïncipit, quod ante non proderat, sed tamen inerat. De bapt., v, 18, 24, ibid., col. 189. Car aliud est non habere, aliud non uliliter habere. Qui non habet, est baptizandus ut habeat ; qui auteni non uliliter habet, ut utiliter habeat, corrigendus. De bapt., iv, 17, 24, ibid., col. 170.

3° Au sujet de la coutume, il importe de distinguer la question de fait et la question de droit. Sur la question de fait, Cyprien et Firmilien se sont étrangement abusés. Sans doute, personnellement, ils n’innovaient pas ; ils citaient des décisions prises soit à Carthage, soit à Iconium ou à Synnada, mais de date récente ; ils étaient même obligés de convenir que leur coutume était loin d’être générale, que plusieurs évêques autour d’eux pensaient et agissaient comme Etienne. La coutume romaine avait pour elle l’ancienneté et l’universalité ; elle condamnait donc la coutume récente et particulière à certaines Églises d’Afrique et d’Asie. Cyprien et Firmilien crurent, du moins, avoir la vérité et firent valoir ses droits. Cyprien avait écrit à Quintus : Non de consuetudine prsescribendum sed ratione vincendum. Epist., lxxi, 2, P. L., t. iii, col. 1106. Il écrit à Jubaianus : Frustra qui ratione vincuntur consuetudinem nobis opponunt. Epist., lxxiii, 13, P. L., t. iii, col. 1117. Et, quand Etienne proclame qu’il faut s’en tenir à la tradition, il demande : d’où vient-elle ? Epist., lxxiv, 2, P. L., t. iii, col. 1129. Coutume présomptueuse et humaine, Epist., lxxiv, 3, ibid., col. 1130, qui n’a pas la vérité : consuetudo sine veritate velustas erroris est. Epist., lxxiv, 9, ibid., col. 1134. Par conséquent, déclare-t-il : Non quia aliquando erratum est, ideo semper errandumest. Epist., lxxiii, 23, ibid., col. 1125. Et Firmilien raisonne de même. Epist., lxxv, 19, P. L., t. iii, col. 1170. Leur bonne foi ne saurait être mise en doute ; mais elle a manqué de lumière. En affirmant que la coutume, que leur oppose Etienne, est erronée, purement humaine et nullement apostolique, ils commettent une erreur de fait. Mais ils ne se trompent pas sur la question de droit : ils savent toute la valeur d’une tradition d’origine évangélique ou apostolique ; et, loin de songer à la nier, ils s’en réclament. Cyprien surtout n’a pu oublier le célèbre traité des prescriptions de son maître favori, ni la force du cuneus veritalis, ni des principes comme ceux-ci : Quod apud niultos unum invenitur, non est erratum, sed traditum, Prxscr., 28 ; id esse dominicum et verum quod sit prius traditum, Prsescr., 31, P. L., t. H, col. 40, 44 ; ni ce qu’il avait écrit dans son De unilate Ecclesise. Voilà pourquoi, loin de répudier une tradition d’origine vraiment apostolique, il se contente de prétendre que celle qu’on lui oppose n’a pas ce caractère, et il décide qu’il faut revenir ad originem dominicani et ad evangelicam atque apostolicam traditionem. Epist., lxxiv, 10, P. L., t. iii, col. 1136. Firmilien ne pensait pas différemment. Epist., lxxv, 19, ibid., col. 1170. Mais ni Cyprien ni Firmilien, en agissant comme ils le firent, ne crurent point faire œuvre de schisme ou d’hérésie. L’évêque de Carthage enseignait que l’Église est fondée sur Pierre, centre de l’unité, que l’évêque de Rome est le successeur de Pierre, que l’Église romaine est YEcclesia principalis, unde unitas sacerdotalis exorta est, Epist., lv, 14, P. L., t. iii, col. 818, qu’il faut la reconnaître et la tenir comme Ecclesiæ catholicsa radicem et malricem. Epist., xliv, 3, P. L., t. iii, col. 710. Et l’évêque de Césarée remarque bien qu’Etienne de episcopatus sui loco gloriatur et se successioneni Pétri tenere contenait, super quem fundamenta Ecclesiæ collocalasunl, Epist., lxxv, 17, P. L., t. iii, col. 1169, mais ne lui reproche que de ne pas respecter suffisamment la dignité de son siège, en ce qu’il approuve le baptême des hérétiques. L’un et l’autre reconnaissent la nécessité d’adhérer à l’Église romaine et de s’entendre avec elle sur l’enseignement. Et pourtant, en fait, ils refusent de souscrire au décret pontifical. Une telle dérogation à leurs principes ne s’explique que par l’état d’indécision où se trouvait alors la question du baptême des hérétiques. Comme dit saint Augustin : Nondum erat diligenter illa baptismi quxstio pertraclata… DUigentius inquisita veritas docuit, quæ post magnos dubitationis fluctus ad plenarii concilii confirmât ioneni perducta est. De bapt., ii, 7, 12, P. L., t. xliii, col. 113. Noluit vir gravissimus (Cyprien) rationes suas, etsi non veras, quod eum latebat, sed tamen non vidas, veraci guident, sed tamen nondum assertæ consuetudini cedere. De bapt., il, 8, 13, ibid., col. 134. Aujourd’hui, qu’une telle question est élucidée et nettement définie, ni Cyprien ni Firmilien ne parleraient ou n’agiraient comme alors ; mieux instruits, plus éclairés, ils tiendraient le langage de tous les enfants soumis de l’Église : Roma loculæst, causa finita est.

4° Les évêques de Carthage et de Césarée n’auraient-ils vu dans l’affaire du baptême des hérétiques qu’une question de pure discipline ? On se l’est demandé. L’auteur de la Defensio declarationis conventus cleri gallicani a prétendu qu’il s’agissait d’une question de foi. Prsev. diss., 71 ; Œuvres de Bossuel, édit. Lefèvre, Paris, 1836, t. IX, p. 41. Contrairement à cette prétention, des théologiens français, dans leur Dissertatio historico-dogmatica, de 1710, P. L., t. iii, col. 1357 sq., ont cherché à prouver que les rebaptisants n’y avaient vu qu’une question disciplinaire. La question, il est vrai, touche en même temps et au dogme et à la discipline ; reste à savoir si, dans l’esprit de ceux qui prirent part à la controverse, il s’agissait exclusivement ou d’un point dogmatique ou d’une mesure disciplinaire. Incontestablement, saint Cyprien, en rappelant la décision d’ordre pratique prise par Agrippinus, en la traitant de religieuse, de légitime, de salutaire, Epist., i.xxi, 2, P. L., t. iii, col. 1109, de magis pertinent ad sacerdolalem auctoritatem et Ecclesiæ catholicx unitatem, Epist., lxxii, 1, ibid., col. 1046 ; en la comparant au différend survenu entre Pierre et Paul au sujet de la circoncision ; en laissant à chaque évêque la pleine liberté de ses actes, Epist., lxix, 17 ; lxxii, 3 ; lxxiii, 26 ; Conc. III, proœm., P. L., t. ni. col. 1151, 1050, 1126, 1051, chacun devant suivre ce qu’il estime de meilleur et de plus utile, Epist., lxxi, 2, ibid., col. 1107 ; en protestant ne pas vouloir rompre avec ceux