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CANADA (CATHOLICISME)

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surrectionnel. auquel la plupart des Canadiens étaient restés étrangers, réveilla les malveillances contre tous et fournit aux ennemis de la race et de la religion des Franco-canadiens l’occasion depuis longtemps désirée d’accomplir l’union des deux Canadas. L’acte d’union passa au Parlement britannique le 23 juillet 1810.

Avant cet acte d’injustice et de despotisme (cf. Turcotte, Le Canada sous l’Union, p. 60, en note le discours de sir La Fontaine), qui marque une date importante dans l’histoire du Canada, plusieurs faits s’étaient accomplis, plusieurs œuvres avaient été créées qui intéressent l’Église. Les centres d’éducation secondaire s’étaient multipliés : collèges de Saint-Hyacinthe (1809), de Sainte-Anne de la Pocatière (1829), de l’Assomption (1832), de Sainte-Thérèse (1825), dont les élèves fourniront des recrues au clergé et aux professions libérales. Pour l’instruction primaire, à côté de l’Institution royale protestante, dont nous avons parlé plus haut, avait été fondée la Société d’éducation de Québec, société catholique dont le but était l’instruction des enfants pauvres et la formation d’instituteurs pour la campagne. Plusieurs autres sociétés poursuivant le même but se formèrent sur différents points du Canada. En 1824, fut portée la loi des écoles de fabrique, qui autorisait les fabriques à acquérir et à posséder des biens, meubles et immeubles, pour fonder et entretenir des écoles élémentaires dans les paroisses. Elles pouvaient établir une école pour 200 familles et consacrer à cette œuvre un quart de leurs revenus. Le curé et le marguillier en charge étaient de droit commissaires de l’école. En 1827, lord Dalhousie tenta « avec la coopération de l’évêque et du clergé de l’Église romaine, ainsi s’exprimait-il, de former un comité séparé de l’Institution royale, lequel conduirait et surveillerait seul les écoles catholiques romaines », mais ce projet n’eut pas de suite. Enfin, en 1836, le Parlement fit un statut pour établir des écoles normales avec le concours du clergé.

A Ms r Plessis, mort en 1825, avait succédé Ma r Panet, qui eut une grande part dans les progrès réalisés en vue de l’instruction élémentaire. Il mourut en 1832, l’année même où le choléra, faisant son apparition au Canada, fit périr en cinq semaines plus de 4 000 personnes, parmi lesquelles un grand nombre de prêtres et de religieuses dévoués au soin des malades. Le coadjuteur de Ma r Panct, Ma’Signay (prononcez Sinaï), le remplaça. Son épiscopat fut signalé par beaucoup de malheurs : nouveau choléra (1834), guerre civile (1837-1838), deux incendies qui réduisent la ville de Québec presque entière en un amas de ruines ( 1 8 45), typhus apporté par les Irlandais chassés de leur patrie par les terribles évictions de 1847.

Signalons plusieurs érections d’évêchés : Kingston (1826), Charlottetovvn (ile du Prince-Edouard), 1829, Montréal (1836). Cette même année 1836 vit l’établissement au Canada de l’œuvre de la Propagation de la foi : bénie par Grégoire XVI, enrichie des mêmes privilèges et indulgences que la société inaugurée à Lyon on 1822. Affiliée à celle de Lyon en 1843, elle le resta jusqu’en 1876, époque où elle continua de fonctionner indépendante. Son but est, par suite de cette séparation, restreint au Canada.

A cette période aussi appartient la solution d’une question pendante depuis la conquête, nous voulons parler de la reconnaissance par la couronne des biens de Saint-Sulpice a Montréal. Parmi les articles de la capitulation de Montréal, il s’en trouvait un (le 23 » ) tendant à reconnaître les biens des jésuites, des récollets H des sulpiciens. Mais le général Amherst l’avait refusé « jusqu’à ce que le plaisir du roi soit connu ». Ce « plaisir du roi » à l’égard des possessions des jésuites et des récollets aboutit à la spoliation, ainsi que nous l’avons dit. Les biens des premiers, après de longs débats entre la province et la couronne, furent abandonnés à la

! première, à destination exclusive d’instruction (1832). L’église des récollels à Québec fut livrée au culte protestant. Les sulpiciens avaient à redouter le même sort. Pour conjurer une mesure si funeste aux intérêts de l’Église du Canada et enlever tout prétexte à la spoliation, Saint-Sulpice de Paris renonça spontanément à tous ses droits sur les biens de la Compagnie à Montréal et en fit l’abandon, sans réserve ni condition, aux sulpiciens de cette ville. Un moment ceux-ci purent craindre l’extinction (1789). Mais bientôt le Canada fut ouvert à leurs confrères de France et, d’ailleurs, ils s’étaient aggrégé plusieurs prêtres canadiens de naissance. Une proie échappait à la horde hostile et persécutrice qui entourait les gouverneurs au commencement du xixe siècle. En 1800, le gouverneur demanda au séminaire un état de tout son personnel, de ses biens et revenus. M. Roux, alors supérieur, le fournit. Quatre ans plus tard (1801), le procureur général Sewell remit au gouverneur un rapport où, s’appuyant sur deux décisions antérieures, l’une de sir James Marriott en 1773, l’autre du procureur de 1789, il concluait au droit du gouvernement sur les biens de Saint-Sulpice et suggérait cinq plans différents pour s’en emparer. Sir R. Milnes envoya ce rapport et d’autres à Londres et attendit des instructions qui ne vinrent pas. En 1810 et 1811, Ryland, envoyé par sir James H. Craig en Angleterre, pressa la question avec sa violence ordinaire, mais encore sans effet. Les discussions continuaient quand M. Roux publia un mémoire qui réduisit au silence les ennemis du séminaire (1819). En même temps, il fit passer à Londres M. Lartigue, plus tard évêque de Montréal, pour faire valoir les droits de Saint-Sulpice. Celui-ci fit le voyage avec M9 r Plessis, qui, dans le mémoire par lui remis à lord Bathurst, insista sur le même point et contribua plus que personne, de l’aveu même de M. Roux, à mettre fin aux attaques répétées des fonctionnaires du Canada. Il disait, en substance, que les attaques contre les biens du séminaire provenaient, ou de ce que l’on ne croyait pas les sulpiciens vrais propriétaires, et dans ce cas, eux-mêmes offraient d’en donner des preuves satisfaisantes ; ou du profit que le gouvernement tirerait de leur possession, et l’évêque montrait l’irritation que produirait une telle mesure chez les habitants du pays « témoins journaliers de l’emploi vraiment exemplaire et honorable que les ecclésiastiques de ce séminaire font de leurs revenus », et qui dans ce dépouillement d’une communauté verraient « le signal de la spoliation de toutes les autres > ; il ajoutait que c’était priver « l’Église du Canada d’une de ses principales ressources pour l’instruction de la jeunesse, comme pour la formation et la propagation de son clergé » ; qu’attaquer les biens du clergé, c’était paralyser son inlluence sur les peuples, influence dont l’Angleterre avait bénéficié la première. Il concluait que ceux qui avaient suggéré une pareille mesure au gouvernement, n’avaient consulté « ni sa dignité, ni sa gloire, ni les vrais intérêts et le mérite d’une province qui, par sa fidélité soutenue, paraît avoir des droits particuliers à la bienveillance et à l’affection paternelle de son souverain ». Les mêmes attaques se renouvelèrent en 1829 ; et Saint-Sulpice lassé envoya en Angleterre deux de ses membres, chargés de proposer au ministère un arrangement pour la cession d’une seigneurie qui excitait tant de convoitises, et obtenir en retour une rente annuelle. Les deux mandataires se rendirent à Rome pour informer le saint-siège et connaître ses sentiments sur l’aliénation de biens que Saint-Sulpice avait toujours regardés, il est vrai, comme patrimoniaux, mais dont il n’entendait bien user que dans l’intérêt de l’Église. Cette négociation entamée à l’insu de l’épiecopat canadien transpira et donna l’alarme au » catholiques. Tout le clergé du Canada, ayant i sa léle les évoques, adressa une requête au gouvernement pour réclamer contre cette transaction forcée et injuste ; et députa