Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 2.2.djvu/465

Cette page n’a pas encore été corrigée
2239
2240
CHARITE


se sont réalisés dans le bienheureux larron. Pour la réalisation du martyre il s’appuie sur l’assertion de saint Cyprien, Episl., lxxiii, n. 22, P. L., t. iii, col. 112’t sq., à laquelle il ne paraît cependant point donner pleine créance : Baptismi sane vicem aliquando implere passioneni de lalrone illo cui non baplizato diction est : Hodie mccam eris in paradiso, Luc, xxiii, 43, non levé documentum idem beatus Cyprianus assumit. Cette raison ne pouvant le convaincre entièrement, il cherche dans ce bienheureux larron l’accomplissement du second mode de suppléance, per fideni conversionemque cordis, qui lui paraît dans la circonstance le principal moyen de salut : Neque enini latro ille pro nomme Christi cruciftxus est, sed pro meritis facinorum suori < » > : ncc quia credidit passus est, sed duni palitiir credidit. Mais quelle que soit à cette époque la pensée d’Augustin sur le cas du bon larron, sa doctrine sur la suppléance du baptême per (idem conversionemque cordis dans le cas de nécessité en reste essentiellement indépendante, avec sa base scripturaire, Rom., x, 10 : Corde creditur ad justifiant, ore auleni confessio fit ad salutem. Aussi quand Augustin modifie plus tard (419420) ses explications relativement à ce larron pénitent, De anima et ejus origine, t. I, c. IX, P. L., t. xliv, col. {80 sq. ; Qusest. in Heptateuchum, t. III, c. lxxxiv, P. L., t. xxxiv, col. 713 ; Relract., t. II, c. xviii, P. L., t. XXXII, col. 638, sa doctrine sur la suppléance du baptême n’en souffre aucune atteinte. Il ne fait que changer sa position relativement à ce cas particulier, surtout en n’y affirmant plus aussi absolument l’absence du baptême : Cum dicerem vicem baptismi posse habere passionem, non salis idoneum posni illius latronis exemplum qui iilrum non fuerit baptizatus incertum est, Jietract., loc. cit., ou même en admettant plutôt le fait du baptême, cum sit incertum magisque illurn baplizaluni fuisse c.redendum sit. Retract., t. II, c. lv, n. 3, P. L., t. xxxii, col. 653.

Quant à l’assertion d’Augustin, nemo fit membrum Christi nisi aut baptismate in Christo aul morte pro C/trislo, De anima et ejus origine, loc. cit., elle ne contredit pas nécessairement l’affirmation si formelle du De baptismo qui n’est nullement rétractée ni ici ni ailleurs. Aussi bien, d’après tout le contexte, Augustin se préoccupe principalement de défendre contre les pélagiens la nécessité absolue du baptême pour les enfants. C’est le point de départ de son argumentation au commencement du c. ix ; c’en est aussi la conclusion à la lin du même chapitre. Pour ces enlants, la parole reste strictement vraie : dans l’ordre actuel aucun ne peut obtenir le salut éternel nisi aul ba]Uismate in Cliristo aut morte pro Cliristo. Il est vrai qu’Augustin applique cette conclusion au cas du larron pénitent et qu’il s’eflorce d’expliquer comment, d’après cette doctrine, son salut a pu être obtenu. C’est une preuve décisive que la conclusion est universelle, pour les adultes comme pour les enfants. Mais toute universelle qu’elle est, elle ne s’entend point dans le même sens strict dans l’une et l’autre hypothèse.

Car finalement le salut de ce pénitent, s’il n’a vraiment point été baptisé, est principalement attribué à ses excellentes dispositions de foi, d’espérance et de charité envers Jésus mourant, dispositions qui autorisent à considérer sa mort comme équivalente au martyre : Tiiuto nanique pondère appensum est, tantumque valuit apud cum qui novit hxc appendere, quod confessus est Doniimtm crucifixum, quantum si fuisset pro Domina crucifixus. VA un peu plus loin : Sed eliam noelrum qui » <<<</< comideret, , quanta ftde, (/uanta spe, quanta caritate ntortem pro Christo vivenle mteiperc potuit, qui vitam in moriente quxsivit. Il ne s’agit point du martyre véritable, mais seulement d’une sorte d’équivalence au martyre, provenant surtout des parfaites dispositions actuellement réalisées, implication

bien conforme à celle du De baptismo, loc. cit., où saint Augustin disait à propos du larron repentant : Quod etiant atque eliam considerans invenio non tantumpassioncm pro nontine Christi id quod ex baptismo deerat posse supplere, sed eliam /idem conversionemque cordis, si forte ad celebrandum mysterium baptismi in angustiis temporum succurri non potest. Explication nullement rétractée dans la suite. Car dans ses Rétractations, t. II, c. xviii, P. L., t. xxxii, col. 638, Augustin, revisant cet endroit du De baptismo, ne (ait que cette seule remarque : Non salis idoneum posui illius latronis exentplum qui utruni non fuerit baptizatus incertum est. Sur quoi Hugues de Saint-Victor, De sacramentis, t. II, part. VI, c. vii, P. L., t. clxxvi, col. 454, remarque justement : In hoc loco exempilum tantum quod ad probationem senteutix adduxerat correxit, ijisam sententiam non reprobavit. Pierre Lombard raisonne de même : Retractavit quidem exemplum, sed non sententiam, Sent., 1. IV.dist. IV, n. 4, P. L., 9 t. cxcii, col. 848, ainsi que saint Bernard, Traclatus de baptismo, c. ii, P. L., t. clxxxii, col. 1036. D’ailleurs, si la parole citée du De anima avait un sens aussi exclusif, comment pourrait-on la concilier avec ce passage presque contemporain dans lequel Augustin affirme que le centurion Corneille avait été déjà sanctifié avant de recevoir le baptême : Ncc superflua judicala est visibilis sanctificatio quam invisibilis jam prx cesser at. Qusest. in Heptateuchum, t. III, c.lxxxiv, P.L., t. xxxiv, col. 713. Pour toutes ces raisons nous ne pouvons admettre d’une manière absolue avec M. Turmel, Histoire de la théologie positive, Paris, 1901, p. 125, qu’en 419 dans le De anima, le saint docteur ne parla plus que du martyre comme supplément au baptême. Le texte presque identique de saint Fulgence, De veritale prsedestinalionis, t. III, c. xix, n. 29, P. L., t. lxv, col. 667 : Sed manifestum est omnem qui non fuerit aut in nomine Cliristo sanctificato lalice, aul pro Christi nomine et ejus Ecclesia proprio sanguine baptizatus, iguis xterni combustione damnandum, s’applique immédiatement aux seuls enfants qui meurent sans avoir été régénérés par l’eau du baptême, ou sans la grâce du martyre. C’est ce qu’indique tout le contexte de ce passage où Fulgence traite directement le problème de l’origine de l’âme humaine. De ce que les enfants non régénérés par le baptême ou par le martyre sont éternellement damnés, il conclut que l’âme elle-même a été souillée par le péché originel, ce qui lui parait se concilier difficilement avec la création immédiate de l’âme par Dieu. L’aflirmation de Gennade, De ecclesiaslicis dogmatibus, c. XLI, P. L., t. xi.ii, col. 1220 : Baptizalis tantum iter esse salutis credamus. Nullum catechumenum quamvis in bonis operibus defunctum, vitam œlernam habere credamus, excepta martyrio ubi iota baptismi sacramenta complentur, paraît signilîer que seuls le baptême effectif et le martyre assurent l’immédiate possession du salut, parce que seuls ils effacent ou éteignent entièrement tous les péchés : illi peccataopiniadimitliuitur, in istoexslinguuntur. liaban Maur († 856), De universo, t. IV, c. x, P. /… t. exi, col. 102, ne fait que reproduire littéralement le texte de Gennade, auquel il laisse ainsi son sens originel. Au XIIe siècle, lingues de Saint-Victor, De sacramentis, I. ii, part. VI, c. vil, P. L., t. cr.XXVl. et saint Bernard, Tractatus de baptismo, c. ii, n. 7, mentionnent une erreur niant la suflisance du baptême chez les adultes même en cas de nécessité. Celle erreur ne peut être que celle d’Abélard, formulée dans sa Theologia christiana, t. II, P. /--. t. CLXXVIII, col. 1205, où il considère la suflisance do baptême de désir dans les catéchumènes comme opposée a l’Évangile et â la tradition : Cttni hoc non solum Evangelio vevum ci sanetis docloribus advei’Mri penittu videatur. Saint Bernard, loc. cit., réfute cette erreur en s’appuyant sur l’enseignement