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CENSURES ECCLÉSIASTIQUES

HG

Theologia moralis, 2 in-fol., Venise, 1719, t. I, tr. V, part. I, c. I, t. I, p. 87 ; Lacroix, Theologia moralis, 2 in-fol., Venise, 1720, t. VII, c. i, dub. I, n. 1, t. ii, p. 468 ; S. Alphonse, Theologia moralis, t. VII, c. i, dub. i, n. 1, t. vii, p. 144 ; d’Annibale, Summula théologie moralis, 3 in-8°, Rome, 1889-1892, part. I. tr. VI, tit. ii, c. i, a. I, t. i, p. 312.

Expliquons, en quelques mots, les termes de cette définition.

1° La censure est une peine, car elle suppose une faute.

2 » Elle est une peine spirituelle, soit parce qu’elle est portée par la puissance spirituelle pour l’utilité spirituelle des chrétiens, soit parce qu’elle prive des biens spirituels.

3° La censure est une peine médicinale. Même quand l’Église punit, elle est mère. Ce qu’elle veut, avant tout, c’est l’amendement des coupables. Quand un de ses fils la contrisle par ses égarements, elle ne néglige rien pour l’amener à résipiscence. D’abord, elle l’avertit, et l’exhorte ; puis, elle le menace de le priver de certains biens, dont elle a la disposition et dont elle accorde, à son gré, la jouissance. Enfin, si la menace ne suffit pas pour l’arrêter dans le chemin de la perdition, elle exécute sa men : ice, et prive de ces biens le délinquant, jusqu’à ce que, revenu à de meilleurs sentiments, il reconnaisse sa faute, la regrette et donne des signes non équivoques de conversion.

4° La censure ecclésiastique est une peine fulminée contre les contumaces. Elle n’est pas, en efiet, purement vindicative, c’est-à-dire destinée à punir les délits commis. Comme elle a pour but principal, soit de prévenir le mal, soit de corriger les coupables qui auraient le malheur de le commettre, et de les empêcher d’y persévérer, elle doit, en général, avant d’être infligée, être précédée de monitions canoniques ou avertissements officiels. C’est lorsque l’obstination dans le mal a été constatée par le mépris que fait le coupable de ces multiples avertissement, que la censure est proclamée. Un voit par là que la censure est une peine essentiellement temporaire, car elle doit cesser dès que le coupable est revenu à de meilleurs sentiments. Les peines vindicatives, au contraire, peuvent être perpétuelles de leur nature. Elles ne cessent point par suite de la correction du pécheur ; mais la censure ne serait pas médicinale, si elle était perpétuelle et sans espoir de rémission. Cf. S. Augustin, De correptione et gratia, c. xv, P. L., t. xi. iv, col. 944 ; S. Uonaventurc, In IV Sent., dist. XVIII, a. 1, q. il, 7 in-fol., Lyon, 1668, t. v, p. 219 ; Suarez, De censuris, disp. I, sect. i, n. 8, t. xxiii, p. 3. Les monitions faites en vue de constater la contumace ne sont pas nécessaires, quand les censures sont infligées prr modum pœnse vindicatives. Ceci arrive lorsque les censures sont prononcées contre ceux-mémes dont on n espère plus la conversion. Elles sont alors des peines purement afllictivespour les pécheurs obstinés ; maiselles nt médicinales pour l’ensemble de la communauté, en ce sens qu’elles sont un obstacle à la contagion du crime, soiten inspirantaux fidèles une crainte salutaire, soit en séparant les bons des méchants. Décrétai., t. II, tit. xii, De exceptionibus, in 6°, c. i ; S. Thomas, Sum. theol., I a II’, q. lxxxvii, a. 8, ad 2°" ; Salmanticenses, tr. X, De censuris, c. i, p. i. n. 10, t. H, p. 290 ; Coninck, /> acramentis et censuris, 2 in-fol., Anvers, 1611), disp. XII, dub. i, n. 9. Dans ce cas, les monitions canoniques sont remplacées par la citation du délinquant. Cl. Reiffenstuel, Jus canonicum universum, 1. Y, lit. xxxix, n. 13, 14, t. v, p. 310 ; Suarez, De censuris, disp. XXV, sect. i, n. 3, t. xxiii b, p. 2 ; S. Alphonse, Theol. moral., I. VII, c. l. dub. iv, n.’ri, t. vil, p. 175.

5° Seuls les fidèle » peuvent tic atteints par les cen-Bures, car ceux qui ne sont pas baptisés ne sont pas sujets de l’Eglise. Elle ne peut donc ni leur imposer ses lois, ni les traduire i mjii tribunal.

6° Les censures privent les coupables des biens spirituels dont l’Eglise a la disposition, et dont elle accorde la jouissance. Ces biens sont : les prières et suffrages publics, les indulgences, les sacrements, l’assistance à la messe, les fonctions sacrées, la juridiction spirituelle. Mais les censures ne sauraient enlever à l’homme les biens purement intérieurs, comme le caractère sacramentel et la puissance d’ordre ; ni les biens personnels et privés, comme la foi, la grâce, les vertus, le mérite. Les censures, en effet, sont du ressort du for extérieur, et sont une conséquence de la juridiction contentieuse, quoiqu’elles obligent en conscience, quand elles sont encourues. Cf. Schmalzgrueber, Jus ecclesiasticum universum, t. V, tit. xxxix, n. 1, t. v, p. 324. Tout en étant du ressort du for externe, les censures sont néanmoins des peines spirituelles, puisqu’elles atteignent directement l’âme, en la privant des biens spirituels et surnaturels. Les peines vindicatives, au contraire, peuvent êlre temporelles et même corporelles, comme, par exemple, la privation des bénéfices et des dignités, l’amende, l’exil, la prison, etc.

Par tout ce qui précède, il est manifeste que les censures diffèrent de la déposition et de la dégradation, qui ne sont des peines ni médicinales, ni temporaires, mais vindicatives et perpétuelles, étant inlligées pour des fautes passées, même pardonnées. Cf. Suarez, De censuris, disp. I, sect. i, n. 4, t. xxiii, p. 2. Les censures diffèrent également des irrégularités, qui peuvent être contractées sans aucune faute, et simplement par suite de quelque défaut physique du corps ou de l’âme ; de sorte qu’elles ne sont pas précisément des peines, mais des empêchements canoniques, des déclarations d’incapacité, quoique, parfois, elles puissent être considérées aussi comme des peines, quand elles sont décrétées en punition de quelque délit. Cf. Suarez, De censuris, disp. I, sect. i, n. 3, t. xxiii, p. 2 ; disp. XXV, sect. i, n. 3, t. xxiii b, p. 2. La cessatio a divinis, affectant plus les lieux que les personnes, n’est pas une censure, mais un moyen employé par l’Église pour obtenir réparation d’une injure ou d’un dommage qu’on lui a faits. Cf. S. Alphonse, t. VII, De censuris ecclesiastiris et irregularitatibus, c. i, dub. i, n. 4, t. vii, p. 145.

Parmi les censures, celles qui, quoique médicinales, étant ordonnées principalement à la correction, sont néanmoins quelquefois imposées comme vindicatives, sont la suspense et l’interdit. On reconnaît qu’elles sont vindicatives et non plus médicinales, quand elles sont infligées uniquement pour des fautes passées, et qu’elles sont perpétuelles, ou pour un temps déterminé, par exemple pour plusieurs mois ou plusieurs années. Quant à l’excommunication, vu son extrême gravité, elle est toujours fulminée de telle manière qu’elle puisse, et même doive être retirée, dès que le pécheur est revenu à résipiscence. Elle est donc toujours une censure, et jamais une peine vindicative. Cf. Suarez, De censuris, disp. I, sect. I, n. 7, 8, t. xxiii, p. Il sq. ; Schmalzgrueber, Jus ecclesiasticum universum, t. V, tit. xxxix, n. 5, t. v, p. 325.

Lorsque, vu son mode d’emploi et le but que se propose celui qui l’inflige, une censure est devenue peine vindicative, elle n’est plus censure qu’au sens matériel du mot. Dans ce cas, celui qui la viole n’encourt pas l’irrégularité propicr violatam censurant. Cf. Suarez, De censuris, disp. XXV, sect. i, n. 2, 3, t. xxiii b, p. 2.

De là découle aussi une différence notable entre les actes juridiques par lesquels cessent les peines médicinales et les peines afflictives ou vindicatives. Les censures sont enlevées par l’absolution, qui est un acte de justice, car celui qui est bien disposé a droit à ce que la peine médicinale, qui tendait à sa correction, ne lui soit plus imposée, quand sem amendement s’est produit. et. Schmalzgrueber, t. V, lit. xxxtx, n. 107, i.v, p. 335, -