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CATHARES

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du xe siècle ; do là, en suivant la roule de l’ouest, il a passé in Dalmatie, en Italie, et en France, tout en se répandant dans la direction septentrionale et en pénétrant, par la Hongrie et la Bohême, jusque dans I Allemagne <lu nord ; le bogomiliame ne fut pas, comme on l’a dit. le catharisme primitif, mais une de ses branches. Ch. Pfister, Études sur le règne de Robert le Pu Paris. 1886, p. 326, rejette, avec Schmidt, la provenance manichéenne des cathares, ifiais n’est pas d’accord avec lui sur leur itinéraire. « C’est au nord de la France, dit-il, « [ne l’hérésie se propage d’abord ; c’est là que des documents certains nous la font découvrir en premier I eu ; du nord elle a gagné le rnidi de notre pays, puis l’Italie ; enfin, seulement à une époque postérieure, on la trouve en Dalmatie. » Cf. sur ces diverses opinions, (1. Steude, Ueber den Ursprung dèr Kalharer, dans Zeilschrift fur Kirchengeschichte, Gotha, 1882, t. v, p. 1-12.

On le voit, les origines des cathares sont obscures. Ce qu’on peut dire avec certitude, c’est qu’entre le manichéisme et le catharisme il y a des ressemblances et des différences telles qu’il est impossible d’affirmer ou de nier sans hésitation que l’un dérive nécessairement de l’autre. Le catharisme n’a du manichéisme ni sa métaphysique complexe, ni sa mythologie astronomique, ni son vaste symbolisme païen, ni son culte de Manès. En revanche, à l’instar du manichéisme, il possède les dogmes fondamentaux du dualisme et de la malice de la matière, et, comme corollaires théologiques, la doctrine d’un Christ fictif et le rejet de l’Ancien Testament, comme conséquences morales, l’interdiction du mariage et l’abstinence de la chair animale. L’organisation des deux sectes a des traits importants communs, surtout la distinction des élus et des simples fidèles. Les points de contact en matière de culte sont nombreux. D’une étude sur le consolamentum cathare, J. Guiraud, Revue des questions historiques, Paris. 1904, t. lxxv. p. 112, a cru pouvoir conclure qu’il y a, dans le catharisme, « non pas seulement une résurrection, mais la continuation ininterrompue à travers les siècles, avec ses rites, sa morale, sa théologie et sa philosophie, du manichéisme lui-même. » Dans l'état actuel de la science, « on peut donc considérer que la question des origines du catharisme n’est pas résolue. » A. Rébelliau, Bossuet historien du protestantisme, Paris, 1891, p. 48't, note ; et. p. 475-183. Toutefois il semble que l’hypothèse qui fait du catharisme un manichéisme modifié en plusieurs de ses parties, après avoir paru discréditée à la suite des travaux de Schmidt ; cf. P. Meyer, Revue critique, Paris, 1879, 2' série, t. VIII, p. 81 ; C. Molinier, Revue historique, Paris, 1891, t. Liv, p. 157, tend à reprendre du crédit. Cf. Rébelliau, op. cit., p. 483, note.

Si les attaches du catharisme avec le manichéisme demeurent incertaines, il est, au contraire, maintenant établi que les cathares ne s’identifient point avec les vaudois. Longtemps on a cru qu’ils se confondirent. Dès avant le protestantisme, cette opinion fut acceptée. Les protestants la soutinrent en masse ; ils virent il.ms les vaudois et les cathares les précurseurs de la Réforme, purs de ce manichéisme qui ne leur fut imputé que par calomnie, formant un seul et même corps d'Église, et remontant jusqu'à l'âge de Constantin, ou un prétendu Léon de Constantinople, indigné de la prétendue donation de Constantin au pape, aurait protesté contre l’enrichissement de l'Église de Rome, infidèle à sa mission el à jamais dévoyée. De leur côté, les catholiques admirent que les vaudois ne furent pas distincts

des cathares, quitte à attribuer à ceux-ci le dithéisme

manichéi a i I ses conséquences morales que les chroniqueurs du moyen âge mettaient sur le compte de ceuxlà. Bossuet, qui avait d’abord adopté la manière de voir

de ses contemporains, éprouva le besoin d regarder de près quand il composa VUistoirc des variations.

LYtude des sources le conduisit à ces conclusions que

l’antiquité dis vaudois est uns Gable et que les vaudois

i très différents des cathares, car les auteurs

catholiques du moyen V vaudois,

mais les cathares Seuls, d.- c ! fut

mal accueiliii ; des catholiques et des protestants, surtout des protestants ; elle n’obtint qu’un petit nombre

d’adhésions complètes ou partielles, durant tout le

xxiiie siècle et la première moitié du xix « . Vers le milieu du xixe siècle, la question a été reprise presque simultanément en France, en Allemagne, en Angleterre. I travaux qui lui furent alors consacrés et ceux qui les ont suivis ont confirmé les conclusions de ho^ Ce n’est pas à dire que l’antique opinion soit évanouie — les erreurs historiques ont la vie longue — mais il est devenu impossible de la prendre au sérieux. Tout ce qu’on doit accorder c’est que vaudois et cathares, comme le remarque F. Tocco. L’eresia nel niedio evo, Florence, 1884, p. 143, exercèrent une action efficace les uns sur les autres et eurent ensemble bien des analogies. Sur le fond même de leur système ils furent en désaccord, les cathares professant un dualisme que les vaudois rejetèrent. Ni ils ne formèrent une secte unique, ni ils ne constituèrent deux sectes diverses d’une même famille : entre eux il n’existe pas une filiation proprement dite. C’est à tort, en particulier, qu’on a fait des vaudois les pères des cathares ou albigeois ; les vaudois ne datent qce de la fin du xiie siècle, et il n’y a plus que des ouvrages sans valeur, tels que Les vaudois, par Al. Bérard, Paris, 1902, pour admettre encore leurs lointaines origines. Voir un bon résumé de ce qui a été écrit sur cette question dans Rébelliau, op. cit., p. 232-252. 345453, 380-llv 175-484, 530-533. IL Histoire. — 1° France et Espagne. — Quoi qu’il faille penser des textes qui affirment que les cathares de France reçurent leurs doctrines d’Italie, il est incontestable que les documents, qui ne se contentent pas d’affirmer leur existence mais qui nous les montrent à l'œuvre, permettent de les découvrir et d assister à leur propagande d’abord dans la France centrale. Un concile se tint à Orléans, en 1022, qui jugea, en présence du roi Robert le Pieux, treize hérétiques de cette secte, tous clercs, dont dix étaient chanoines de la collégiale de Sainte-Croix et dont un autre avait été le confesseur de la reine Constance. Des trois principaux centres de propagande que le catharisme paraît avoir eus. du commencement du xie siècle jusqu’au milieu du xui'. en Occident, à savoir le Milanais, le midi de la Fran la Champagne, ce dernier ne fut pas le plus important ; il fut cependant très actif. l"ne légende, recueillie par Albéric des Trois-Fontaines. racontait que le manichéen Fortunat, après avoir été forcé par saint Augustin de quitter Hippone, avait converti à ses croyances le fabuleux prince Widomar en Champagne. Le château de Montvvimer, plus tard appelé Montaimé, dans le diocèse de Chàlons-sur-Marne (et non Mont, 'limar dans le Dauphiné, comme l’ont cru Martène et Durand. Yeterum scriptorum aniplissima collectio. Puis. 1734, t. i. col. 777), aurait tiré son nom de ce Widomar. Cf. Albéric, Chrome., édit. Leibnitz, dans Ai Leipzig, 1698, t. n. p. 569. lue lettre de l'Église de Liège au pape Lucius 11 11Il témoigne qu’on croyait, au XIIe siècle, que de la le catharisme s'était répandu per diverstu terrarum partes. ]'. L., t. clxxix, co ! Le château de Moiitwimer fut peut-être le plus ancien foyer du catharisme en France, et sûrement le principal de la France du centre et du nord. De Montwimer l’hérésie rayonna un peu partout, spécialement dans la Flandre, la Picardie, la Bourgogne, le Nivernais. Parfois la secte rentrait dans le mystère ; c’est ainsi que, pendant la seconde moitié du xi r siècle, la France septentrionale ne laist oir aucune trace des cathares. Mais brusquement elle reapparaissait -m c