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CALIXTE I er (SAINT)


tations les plus graves : il représente ce pape comme un esclave infidèle, un banqueroutier, un homme possédé de la manie du suicide, un intrigant, un courtisan, un flatteur malhonnête, un hérétique. C’est un libelle, un réquisitoire, que s’empressèrent d’exploiter Bunsen, Hippolylus and his âge, Londres, 1852 ; Wordsworth, Hippohjtus and the Church of Rome, Londres, 1853 ; "Volkmar, Hippohjtus und die rômische Zeilgenossen, urich, 1856 ; de Pressensé, Lu tte entre Hippolyte et Calliste, Paris, 1856 ; de Rémusat, Revue des Deux Mondes, 15 juin 1863 ; Al. Réville, Revue des Deux Mondes, 15 juin 1865. Il convient de remarquer que nous n’avons là que le récit d’un adversaire doctrinal, Philos., IX, il, 11, 12, édit. Cruice, Paris, 1860, p. 426, 435, 436, peut-être même d’un concurrent malheureux au siège de Rome, ibid., >X, II, 12, p. 441 ; il est donc suspect de partialité et de parti pris. Les faits rapportés n’ont rien d’invraisemblable, mais ils sont dénaturés et prennent un sens et une portée qu’ils n’avaient pas. Soumis à une critique impartiale, contrôlés par le contexte, rapprochés de ce que nous savons par ailleurs, ils permettent de voir que Calliste est loin de mériter le titre de désorganisateur de la discipline et la note d’hérétique. Par là ce libelle diffamatoire, ce réquisitoire passionné, sert à défendre la mémoire du pape et se change en une apologie, d’où Calliste sort grandi. Calliste apparaît comme un pape qui, au milieu de circonstances difficiles, non seulement fut irréprochable dans ses mœurs, mais encore prudent et sage tant dans ses décisions doctrinales que dans ses mesures disciplinaires. Et c’est ce qu’ont très justement fait ressortir Dôllinger, Hippohjtus und Kallistus, Ratisbonne, 1853 ; Cruice, Etudes sur de nouveaux documents historiques empruntés à l’ouvrage récemment découvert des « Philosophumena » , Paris, 1853 ; Armellini, De prisca refulatione hæreseon… Philusophamenon litulo recens vulgata commentarius, Rome, 1862 ; De Rossi, Bullettino di archeologia, Rome, 1866 ; Hagemann, Die Rômische Kirche, Fribourg-en-Brisgau, 1862 ; Le Hir, Études bibliques, Paris, 1869, t. ii, p. 325-387 ; Freppel, Origine, 3e édit., Paris, 1888, t. I, p. 151-171 ; du Smedt, Disserlationes, Paris, 1876, p. 190-218 ; Duchesne, Les origities chrétiennes, 2e édit. (lith.), Paris, 1886, p. 275-301. Il importe de résumer brièvement ce débat pour dégager l.i vérité et venger la mémoire de Calliste contre les calomnies des P/tilosophumena, en parcourant ce qui a Irait à la vie de ce pape soit avant sa, nomination à la charge d’archidiacre, soit pendant sa collaboration avec le pape Zéphyrin, soit pendant son propre pontificat.

1° Vie de Calliste avant sa nomination à la charge d’archidiacre. — 1. D’après les Pltilosophumena, Calliste, né esclave, devenu chrétien, appartient au chrétien Carpophore, de la maison de César. Chargé des intérêts de son maître dans une banque, il les compromet, prend la fuite vers le port d’Ostie et s’embarqee sur un vaisseau en partance. Uès qu’il voit apparaître son maître accouru pour l’arrêter, il se jette à l’eau, mais il est saisi par les matelots de l'équipage. Phil., IX, II, 12, p. 437. Il s’agit là d’une catastrophe financière ; mais elle n’est pas mise sur le compte de la malhonnêteté ; elle est la suite de mauvaises opérations. L’esclave banquier a été victime, et, très vraisemblablement, des juifs, puisque les Philotophumena vont nous dire que c’est à eux qu’il court réclamer le paiement de créances, Ibid., p. 138. S’il fuit, s’il se jette ; i la mer, c’est qu’il redoute son maître qui n’i si pas tendre et qui va le condamner à tourner la meule. Voilà une tentative de suicide pour ut solliciter le texfe.

2. Calliste, rendu à son propriétaire, est condamné

ipplice de la meule ; puis, i la prière de ses frères,

il l Si h' il dit avoir des créances à recouvrer.

imena prétendentqu’il cherche le martyre.

Donc, un jour de sabbat, il se rend à la svnagogue, fait

du tapage, est roué de coups et livré au préfet Tuscianus pour avoir troublé une réunion juive et parce qu’il se dit chrétien. Carpophore accourt pour le sauver, prétend qu’il n’est pas chrétien, qu’il ne faut pas l’en croire, mais qu’il cherche la mort. Les juifs répliquent par des cris. Le préfet, après avoir fait frapper de verges le délinquant, le condamne aux mines de Sardaigne. P/nl., IX, il, 12, p. 439. Ce récit prouve que Calliste a essayé de recouvrer certaines de ses créances, mais sans y réussir. Les juifs, mis en demeure de payer leurs dettes, ré-> pondent par des coups et une accusation et réussissent, malgré l’intervention de Carpophore, à se débarrasser de leur créancier. Si, en réalité, Calliste eût voulu disparaître par la mort ou par le martyre, il avait un moyen plus expédilif et plus sûr, celui, par exemple, de courir à un temple païen et d’y briser les idoles.

3. Marcia, concubine de Commode, dans le but de faire une bonne œuvre, demande au pape Victor la liste des chrétiens condamnés qu’il désire voir rendre à la liberté ; elle la confie à l’eunuque Hyacinthe qui se rend en Sardaigne. Or, sur la liste, le nom de Calliste est, dit-on, omis à dessein par le pape ; mais Calliste n’en est pas moins libéré. Victor apprend la nouvelle avec peine ; il exile Calliste à Antium et l’y aide à vivre par des subsides mensuels. Phil., IX, ii, 12, p. 439-441. L’omission du nom de Calliste peut avoir été fortuite ; quant au mécontentement du pape, il ne concorde guère avec le fait des mensualités accordées. Plus vraisemblablement l’auteur a voulu enlever à Calliste le titre de confesseur qui, selon l’usage de l'époque, lui donnait droit d’entrer dans le clergé. Par suite l’exil à Antium est plutôt une mission ecclésiastique, directement rétribuée par la caisse pontificale, pendant laquelle Calliste put franchir les degrés de la hiérarchie, puisque, à l’avènement de Zéphyrin, il est nommé par le nouveau pape archidiacre de l'Église romaine et administrateur du cimetière. Phil., IX, II, 12, p. 411. Un tel choix, consigné par l’auteur, réduit à néant ses insinuations malveillantes. La vérité est que Calliste était regarde, malgré un insuccès passager, comme très entendu en affaires et comme un clerc digne des plus hauts emplois.

2° Vie de Calliste sous le pontificat de Zéphyrin (200218). — 1. D’après les Philosophumena, Zéphyrin, esprit faible, sans portée, sans instruction, sans clairvoyance et avide d’argent, est circonvenu par la ruse adulatrice et les présents intéressés de Calliste. Phil., IX, II, 12, p. 441. N’est-ce pas plutôt que le pape aurait eu tort de préférer les conseils et le concours de Calliste à ceux de l’auteur des Pltilosophumena, et que Calliste, chargé de l’entretien du clergé et des veuves, de l’administration du cimetière auquel il lit faire de grands travaux, et de la réparation des maux occasionnés par la persécution de Septime-Sévère, en 202, dut chercher des ressources et réussit à s’en procurer ?

2. Quoiqu’il en soit, Calliste est accusé en outre d’avoir inspiré à Zéphyrin, sur la question trinitaire, deux professions de foi erronées, l’une par laquelle il déclarait ne reconnaître qu’un seul Dieu, Jésus-Christ, et en dehors de lui aucun autre qui ait été engendré et qui ait souffert, Phil., IX, II, 11, p. 435 ; l’autre par laquelle il affirmait que ce n’est pas le l'ère qui est mort I le Fils. Ibid., p. 436. Or ces deux professions de foi. rapprochées et complétées l’une par l’autre, sont orthodoxi. la première, en proclamant la divinité' de Jésus-Christ et sa consubstantialité contre les théodotiens et les ^rtémonites, la seconde, en distinguant le l'ère du Fils et en condamnant les patripassiens, le ! unitairi s

et modalistes. La vérité c’est que l’auteur 'les Philosophumena n’envisageait pas la question au même point de vin' et la tranchait dans un s, ns différent. Il subordonnait tellement le Fils au Père que la distinction des personnes devenait une séparation >t Introduisait la dualité dans l’unité de la nature divine : d’où le re-