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    1. VULGATE##


VULGATE. CONCILE DE TRENTE

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nouveau dans les siècles suivants, parmi lesquels il convient de signaler la revision d’Etienne Harding, abbé de Cluny au xiie siècle, qui, par une confrontation entre les manuscrits de la Vulgate et les textes hébreu et grec, lit disparaître additions et interpolations. Au xiiie siècle, les nécessités de l’enseignement théologique donnèrent naissance aux Correctoria, qui constituaient un commencement de travail critique sur le texte de la Vulgate, et dont le meilleur est le Correctorium Yaticanum, œuvre des franciscains. Ces correctoires furent utilisés pour les premières éditions imprimées de la Bible latine, et c’est en particulier l’un des moins bons, le Correctorium Parisiense, dont se servit Robert Estienne pour l’établissement du texte de sa Bible latine, publiée en 1528, premier essai d’une édition critique de la Vulgate. Au xvie siècle, les éditions corrigées d’après le grec et l’hébreu se multiplièrent, tant chez les protestants que chez les catholiques, tandis qu’on publiait aussi des versions nouvelles faites directement sur les textes originaux. Parmi ces dernières, celle du Nouveau Testament publiée par Érasme en 1516 n’était guère qu’une refonte de la Vulgate. Mais on doit signaler la version intégrale de la Bible donnée par le dominicain Santés Pagnino qui ne visait qu’à faciliter l’étude de l’Écriture, et celle du cardinal Cajétan inspirée par les besoins de la controverse avec les protestants, qui récusaient le texte de la Vulgate, et n’entendaient se fier qu’aux originaux. Par suite de cette multiplication de textes différents d’où résultait une confusion croissante, comme aussi du discrédit jeté par les protestants sur le texte des versions latines alors en usage dans l’Église, on sentait de plus en plus le besoin d’un texte biblique officiel, auquel tous les catholiques pourraient se référer : de là l’intervention du concile de Trente.

2. La Vulgate au concile de Trente. — La question de l’autorité de la Vulgate fut d’abord soulevée indirectement, à propos de la canonicité des Livres saints. Luther avait établi entre les livres de la Bible des catégories de valeur différente, et rejeté plus ou moins du Canon scripturaire plusieurs d’entre eux. D’autre part, non seulement les protestants, mais des catholiques tels qu’Érasme, et même le cardinal Cajétan, avaient exprimé des doutes sur l’authenticité de certaines parties du texte biblique en usage : la finale de l’évangile de saint Marc, le récit de la femme adultère dans saint Jean, le Comma johanneum. Le concile de Trente fixa les conditions qui devaient garantir la canonicité d’un livre ou d’un fragment de livre dans la Bible : Si quis autem libros ipsos integros cum omnibus suis partibus, prout in Ecclesia catholica legi consueverunt, et in veleri vulgata latina editione habentur, pro sacris et canonicis non susceperit…, anathema sit. Denz.-Bannw., n. 784. Ainsi le concile voulait que l’on tînt pour caractère essentiel d’un livre ou fragment biblique authentique l’usage ecclésiastique dont la présence de ce livre ou fragment dans la Vulgate devait être considéré comme le signe le plus clair. — Ce décret, d’un caractère dogmatique, fut suivi d’un autre décret, de nature plutôt disciplinaire, dont l’objet était de déterminer un texte biblique officiel qui ferait autorité dans l’Église. On pensa d’abord à choisir un texte officiel en chacune des trois langues : hébraïque, grecque et latine. Mais la valeur des textes originaux, hébreu et grec, était d’un autre ordre que celle d’un texte latin, qui n’était qu’une version, et on se décida à sanctionner seulement, en la rendant officielle, l’autorité de la Vulgate : Insuper eadem sacrosancta Synodus considerans non parum ulililalis accedere posse Ecclesiæ Dei, si ex omnibus latinis editionibus, quæ circumferuntur, sacrorum Librorum, quænam pro authentica habenda sit, innotescat ; statuit et déclarât, ut huec ipsa velus et vulgata edilio, quæ longo lot sseculorum usu in ipsa Ecclesia probatu est, in publicis lectionibus, disputationibus, prædicationibus et expositionibus, pro authentica habeatur, et ut nemo illam rejicere quovis prœlextu audeal vel præsumat. Denz.-Bannw., n. 785.

3. La Vulgate depuis le concile de Trente. — La Vulgate, que le concile venait de déclarer authentique, ne pouvait être, dans l’état des choses tel qu’il était alors, qu’une Vulgate idéale, que ne représentait aucune des éditions courantes de la version hiéronymienne, car le texte, plus ou moins fautif, de ces éditions ne pouvait faire foi. Le concile de Trente se préoccupa de remédier à cette situation, et fit demander au pape par les légats de faire corriger le plus tôt possible la Bible latine, et, s’il se pouvait, la Bible hébraïque et la Bible grecque. Les travaux de correction commencèrent à Rome dès 1546, mais n’avancèrent qu’avec une extrême lenteur jusqu’à l’élévation de Sixte-Quint au souverain pontificat. Ce pape, comprenant la nécessité urgente d’une édition officielle de la Bible latine, excita le zèle des membres de la Commission établie pour la revision de la Vulgate. Cette commission, présidée par le cardinal Caraffa, prit pour base l’édition publiée à Louvain en 1565 par le dominicain Jean Henten, et la corrigea d’après quelques excellents manuscrits. Commencé en 1586, le travail de la Commission dura deux ans, mais le pape, pressé d’aboutir, voulut intervenir lui-même, il substitua en partie sa propre revision à celle de la Commission qui eût donné un résultat plus satisfaisant, car la critique moins stricte de Sixte-Quint laissa subsister un certain nombre de leçons, de tendance harmonisante, qui avaient été interpolées dans le texte original de la version de saint Jérôme. La Bible de Sixte-Quint fut publiée en avril 1590, avec la bulle ^Eternus ille, datée du 1 er mars 1590, qui la promulguait. Elle se heurta immédiatement à une sérieuse opposition, venant en particulier des imprimeurs lésés par le monopole que le pape avait accordé au typographe de la Vaticane (cf. sur ce point la correspondance du représentant à Rome de la République de Venise, publiée par F. Amann, Die Vulgata Sixtina von 1590, Fribourg, 1912), et elle n’avait pas eu cependant le temps de se répandre beaucoup, quand le pape mourut (27 août 1590). La Commission cardinalice, qui avait vu avec regret l’intervention personnelle de Sixte-Quint, fit alors arrêter la vente de la nouvelle Bible, et annuler pratiquemet les dispositions de la bulle Mlernus ille, qui en rendait l’usage obligatoire dans un délai fixé. En même temps, le successeur de Sixte-Quint, Grégoire XIV, chargeait la Congrégation de l’Index de reviser la Bible Sixtine. En quelques mois (février-juin 1591), sous l’impulsion des cardinaux Tolet et Bellarmin, ce travail fut achevé. L’impression ne commença cependant qu’après l’élection de Clément VIII au souverain pontificat. Pour ne pas porter atteinte à la mémoire de SixteQuint, c’est sous le nom de ce pape, conformément à la suggestion faite par Bellarmin, que la nouvelle Bible fut publiée à la fin de 1592 : Biblia sacra Vulgatæ edilionis Sixti Quinti Pont. Max. jussu recognita et édita, comme si Sixte-Quint, ayant reconnu luimême l’imperfection (on parlait plutôt d’incorrection typographique) du texte qu’il avait édité, avait pris l’initiative de faire faire la nouvelle revision. Ce ne fut qu’en 1604 que le nom de Clément VIII fut introduit dans le titre à côté de celui de Sixte-Quint et la nouvelle édition fut alors connue sous le nom de Bible Sixto-Clémentine, et devint la version latine officielle dont l’usage était rendu obligatoire pour les catholiques. Bien que Clément VIII reconnût luimême que son édition n’était pas parfaite, il interdit