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    1. TRINITÉ##


TRINITÉ. CONTROVERSES

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lités pour comprendre un tel discours, qui prétend démontrer philosophiquement la Trinité par les choses extérieures et ce, en vertu d’arguments non seulement probables, mais nécessitants. Tout le raisonnement porte sur les rapports des trois côtés du triangle isocèle 1 Cela posé, à l’aide de textes de l’Ancien et du Nouveau Testament, Garnier expose le mystère, exhortant les fidèles à réfléchir souvent à ces vérités quæ simplici sermone vix leneri poteranl, col. 721 A.

3. Controverses.

L’histoire du IIIe concile du Latran montre quelles étaient, vers la fin du xiie siècle, les préoccupations des controversistes. Voir ici t. viii, col. 2647 sq. Les adversaires du dehors étaient, en plus des vagabonds de toute sorte, les albigeois, les vaudois, les Juifs et les Sarrasins musulmans. Mais, dans l’Église même, les apologistes eurent à combattre les erreurs de quelques théologiens. Soit du dedans, soit du dehors, les attaques ont visé, plus d’une fois, le dogme trinitaire.

a) Les hérétiques du dehors.

Au concile de Vérone de 1184, Lucius III, de concert avec l’empereur Frédéric Barberousse, promulgua un décret contre tous les hérétiques de son temps, nommément « les cathares, les patarins, les humiliés ou pauvres de Lyon (vaudois), les passagiens, les josépins, les arnaldistes ». Décret. Greg. IX, t. V, tit. ii, c. 9. Voir le texte latin, ici t. viii, col. 1547. Les recherches consacrées à ces sectes ou à leurs fondateurs n’ont pas toujours permis d’identifier complètement leur doctrine. Il semble qu’on puisse les partager en trois grandes classes qui, par la force de leur opposition à l’Église, se sont pratiquement unies dans la même rébellion et ont mérité le même anathème.

D’une part, on trouve les partisans d’un néo-manichéisme, que caractérise la croyance en un double principe : les albigeois, t. i, col. 678, ou les cathares, t. ii, col. 1993, avec toutes les nuances qui différencient leurs sectes et que nous fait connaître un converti, Rainier Sacconi, Summa de catharis et leonistis, publiée dans Martène et Durand, Thésaurus noous anecdotorum, Paris, 1717, t. v, col. 1761-1776. Voir aussi un autre converti, Bonacorsi, Vita hærelicorum, P. L., t. cciv, col. 775 ; Ermengaud, Contra hæreticos, ibid., col. 1235 sq., et Moneta de Crémone, Adoersus catharos et valdenses libri V, Rome, 1743. Voir la bibliographie à l’art. Cathares, t. ii, col. 1997. Faut-il rapprocher des cathares les josépins ? Le problème est obscur ; voir, t. viii, col. 1547. Mais, à coup sûr, doivent leur être identifiés, tout au moins dans ! a pensée de Lucius III, les patarins. Voir t. xi, col. 2243.

Une deuxième classe serait constituée par les hérésies principalement antiecclésiastiques, faisant écho aux idées de réforme alors en l’air, dans lesquelles pouvait parfois se mêler une certaine dose de manichéisme, mais où l’on trouvait surtout une volonté de révolte contre l’autorité. C’est le cas des pétrobrusiens, dénoncés dès le début par Pierre le Vénérable, P. L., t. clxxxix, col. 719 sq., voir Bruys (Pierre de), t. ii, col. 1153 ; des henriciens, voir Henri, t. vi, col. 2182 et, en général, des vaudois ou pauvres de Lyon. Cf. Bernard de Fond-Cauld, Adversus waldensium seclam, P. L., t. cciv, col. 793 sq. De ces sectes, il faut rapprocher les arnaldistes, voir Arnaud de Brescia, t. i, col. 1973 ; cf. Bonacorsi, op. cit., P. L., t. cciv, col. 791-792. Sans être nommément désignées, ces sectes virent plusieurs de leurs doctrines condamnées par le IIe concile du Latran, can. 23 ; voir t. viii, col. 2642-2643.

Enfin, une troisième classe renferme les hérétiques faisant figure de judaïsants, sans toutefois l’être réellement, ainsi que G. Lacombe l’a démontré contre Schmidt et Newman. Voir G. Lacombe, La vie et les œuvres de Prévostin, Kain, 1927. Tels étaient les passagiens, dénoncés par Bonacorsi et par Prévostin de Crémone ; voir ici t. xi, coï. 2206. Quant aux juifs et aux mahométans, leur monothéisme rigide et leur opposition au Christ les plaçaient avec les passagiens au premier rang des adversaires de la Trinité.

A la fin du xiie siècle, toutes ces sectes se sont pour ainsi dire compénétrées et toutes subissent plus ou moins indirectement l’effet de préjugés antitrinitaircs ou déformateurs de la vérité trinitaire ; voir plus loin. Des apologistes, comme Alain de Lille, ont attaqué de front toutes ces hérésies simultanément, De flde catholica contra hæreticos sui temporis, P. L., t. ccx, col. 305 sq.

Toutefois le dogme de la Trinité est directement nié par les passagiens, les juifs et les « sarrasins ». La loi mosaïque, retenue par les passagiens, les empêchait d’admettre la divinité du Christ. Les personnes divines ne sont donc pas d’une seule substance : le Fils est inférieur au Père, et le Saint-Esprit, inférieur au Père et au Fils. C’est de l’ébionisme pur. Bonacorsi consacre trois chapitres de sa réfutation à i établir la vérité du dogme trinitaire, c. ii-iv, t. cciv, col. 788. Dans sa Summa contra hæreticos, Prévostin distingue nettement les passagiens des cathares ; il réfute les premiers qui n’admettent qu’un principe, le Père toutpuissant, personne unique. Le Fils n’est ni de la même substance, ni de la même dignité que le Père ; il est Dieu par adoption. Cf. Lacombe, op. cit. Par contre, il semble que, dans sa Summa theologica, Prévostin n’ait pas saisi la doctrine catholique de la relation, si nécessaire cependant pour rendre raison de la distinction des personnes, puisqu’il enseigne que les personnes divines sont constituées par elles-mêmes et se distinguent l’une de l’autre par leur propre réalité : donc, négation des relations et des notions ; cf. S. Thomas, Sum. theol., I », q. xxxii, a. 2. Cette opinion singulière a trouvé deux timides approbateurs au xive siècle, Guillaume de Rubione et Gauthier de Catton. Cf. M. Schmaus, Der « Liber Propugnatorius » des Thomas Anglicus und die Lehrunterschiede zwischen Thomas von Aquin und Duns Scotus. n. Die Trinitarischen Lehrdifjerenzen, II Band, Anhang, Texte, Munster-en-W., 1930, p. 389, 544-547. Un seul auteur du xive siècle a soutenu franchement cette opinion, c’est Grégoire de Rimini († 1358), In I am Sent., dist. XXVI, q. i, a. 2.

Les controverses antijuives ont existé de tous temps. Voir Juifs (Controverses avec les), t. viii. col. 1870 sq. Le dogme trinitaire a été spécialement défendu contre eux. Nous avons déjà rencontré sur notre chemin Isidore de Séville et Pierre Damien avant le xiie siècle. Les auteurs cités t. viii, col. 1881 omettent ou ne font qu’effleurer accidentellement la question de. la Trinité. Des auteurs mentionnés col. 1888, on ne retiendra que quelques noms : le pseudo-Guillaume de Champeaux, P. L., t. clxiii, col. 1056 D1060 C ; Guibert de Nogent, dans son De incarnatione contra Judœos, t. III, c. x, P. L., t. clvi, col. 525 C526 D ; Pierre de Blois, Contra perfidiam Judœorum, P. L., t. ccvii, où l’auteur veut établir la vérité de la Trinité et de l’unité de Dieu par l’Ancien Testament, c. v, col. 828 A-834 B, mais où il ajoute les arguments du Nouveau Testament « pour l’édification et la consolation des chrétiens », c. vi, col. 834-835 A. De l’anonyme Traclatus adversus Judœum, P. L., t. ccxiii, col. 749 sq., la première partie est consacrée à la preuve du mystère : existence du mystère, génération du Fils, divinité du Saint-Esprit, procession de la troisième personne a Pâtre Filioque ; le tout appuyé par des textes de l’Ancien Testament. La démonstration se clôt par une preuve générale, tirée de la vision d’Abraham, n. 2-9, col. 750 A-756 A. L’auteur trouve