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    1. VOLTAIRE##


VOLTAIRE. PRINCIPALES ŒUVRES

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dorcet (Note de Condorcet dans l'édition de Kehl) et le Système de la nature.

A Barcelone, le grand Inquisiteur, pour des motifs qui n’ont rien de religieux ni de moral, veut faire brider un jeune prisonnier anglais, Jenni. Les Anglais, entrés dans la ville, délivrent Jenni et se conduisent avec modération. D’où supériorité du protestantisme. (', . i et ii. Kntre le père de Jenni, Freund, le sage, et le bachelier de Salamanque, dom Mingo y Medrosa, s'élève la controverse des mais. Sujet : l'Église romaine est-elle d’institution divine ? Ni l'Évangile, ni les Actes des Apôtres ne le disent, soutient Freund. Il faut s’en tenir a l'Évangile interprété par la raison et réduit à la morale : « Je crois avec Jésus-Christ qu’il faut aimer Dieu et son prochain, pardonner les injures et réparer ses torts. » Le bachelier s’avoue convaincu.

La seconde partie du roman est une longue discussion sur l’athéisme. Cela se passe en Amérique où vit Jenni, tombé sous l’influence d’un athée, Birton. Laissant de côté les preuves métaphysiques de l’existence de Dieu qu’a données Clarke, Freund invoque contre le Système de la nature les causes finales : Dans l’univers et dans le vivant, tout est art, harmonie voulue. P. 534. — Mais, objecte Birton : 1° Rien ne peut venir de rien : la matière est donc éternelle. — Qu’importe ? répond Freund, pourvu que vous reconnaissiez un maître de la matière et de vous. 2° Peut-on croire en Dieu en face du mal physique et du mal moral ? — Du mal physique, répond Freund, l’homme peut s’arranger et il faut voir aussi les bienfaits. Quant aux malheurs des hommes, presque tous sont de notre faute. — Birton insiste : Ou Dieu est impuissant ou il est barbare. La réponse est toujours la même : « Le mal ne saurait empêcher Dieu d’exister. Si Dieu dirige tout, il est alors responsable du mal. Sa Providence serait ridicule si elle s’exerçait à chaque moment sur chaque individu. Il est juste. Soyez donc justes. » P. 565-567. Mais, comme le dit le Bon sens d’Holbach, ne pouvait-il faire des lois générales n’entretenant pas tant de malheurs particuliers ? « Le Dieu contre lequel s’insurge d’Holbach est le Dieu des scolastiques et non le Dieu de Socrate. Et d’Holbach croit-il avoir anéanti le maître pour avoir dit qu’il a été souvent servi par des fripons ? » P. 567. En face de la nuit étoiléc qui arrache au sauvage Parouba le cri du psalmiste : « Les cieux annoncent la gloire de Dieu », Birton accepte qu’il existe un Dieu. P. 568. Mais, dit-il, s’il s’occupait de l’univers, il n’y ferait que des heureux. — Toutes les âmes honnêtes, répond Freund, sont convaincues que, si elles ne sont pas heureuses ici-bas, elles le seront un jour. La justice de Dieu le veut. Dieu peut récompenser éternellement ou punir. Et Freund précise : Je ne dis pas que Dieu vous punira à jamais ni comment ; mais « si vous avez abusé de votre liberté, il vous est impossible de prouver que Dieu soit incapable de vous en punir. Soit, dit Birton, mais je ne serai pas puni quand je ne serai plus. » Freund, l’inspirant peut-être du pari de Pascal, répond sans se prononcer : « Le. meilleur parti est d'être honnête homme, i P. 571-572.

Mois s’engage une discussion sur l’immortalité de l'âme. Tout périt, dit Birton, qui se souvient de Lucrèce. Rien ne périt, répond Freund ; tout

change Seulement. Pourquoi Dieu ne conserverait-il pas le principe qui nous fait penser et agir ? La croyance en un Dieu rémunérateur et vengeur est « le

seul frein des hommes puissants… et fie ceux qui Commettent adroitement des eiimes secrets. L’athée

et le fanatique sont les deux pôles d’un univers de confusion et de folie ». P. 673. Cf. sur les mêmes iin Die Lettrée de Memmius à Cicéron, 1771 (xxviii, 437).

37° Discours de Me Belleguier, ancien avocat. Sur le texte proposé par l’Université de Paris pour le sujet des prix de l’année 1773, in-8°, s. 1. n. d. (Genève, 1773). Réimprimé au t. x de V Évangile du jour (xxix, 7-18). — Coger, recteur de Sorbonne, avait mis au concours cette pensée : Non magis Deo quam regibus infesta est isla quæ vocatur hodie philosophia. Voltaire, qui ne lui pardonnait pas d’avoir écrit, contre le xve chapitre de Bélisaire, un Examen du Bélisaire de M. Marmontel, in-8°, Paris, 1767, s. m. d. a., poussé d’un autre côté par d’Alembert, lettre du 26 décembre 1772, lui joua le tour de traduire : Celle qu’on nomme aujourd’hui philosophie n’est pas plus ennemie de Dieu que des rois. Les véritables philosophes, soutient-il, sont en effet les défenseurs de l’idée de Dieu. Ils ne raisonnent point comme l’auteur du Système de la nature. Le cours des astres leur révèle « l'éternel géomètre, … un grain de blé… l'éternel artisan ». En eux, « l’homme moral qui cherche un point d’appui à la vertu », reconnaît la nécessité « d’un être aussi juste que suprême ». S’il y a eu tant d’athées chez les Grecs et les Romains, la faute en est aux prêtres qui rendaient la Divinité odieuse ou ridicule.

Quant aux gouvernements, « tous ont toujours avoué qu’un citoyen doit toujours être soumis aux lois de sa patrie ; qu’il faut être bon républicain à Venise et en Hollande, bon sujet à Paris et à Madrid, sans quoi ce monde serait un coupe-gorge ». Ce ne sont point des philosophes qui auraient condamné à être brûlée « cette héroïne champêtre », Jeanne d’Arc.

38° Un chrétien contre six juifs, in-8°, Londres (Amsterdam), 1777 ; et La Bible enfin expliquée par plusieurs aumôniers de S. M. L. B. D. P. (Sa Majesté le Roi de Prusse ? de Pologne ?), 2 in-8°, Londres (Genève), 1776. -- En 1769, l’abbé Guénée, cf. ici t. vi, col. 1893-1894, dans ses Lettres de quelques juifs portugais, allemands, polonais, à M. de Voltaire… in-8°, Paris, avait développé la respectueuse Apologie pour la nation juive…, in-12, Amsterdam, 1762, qu’un juif portugais, Isaæ Pinto, avait adressée à Voltaire, pour réfuter quelques-unes de ses accusations contre les juifs. A Pinto, Voltaire promit des rectifications dans une Lettre du 12 juillet 1762, de par tout le reste injurieuse et signée : Voltaire chrétien et gentilhomme ordinaire de la chambre du roi très chrétien ; puis il redoubla contre eux. Des Lettres de Guénée, il ressort que Voltaire, dans ses attaques contre les juifs est « 1° un controversiste de mauvaise foi, renouvelant éternellement des difficultés cent fois résolues », et comme si elles ne l'étaient pas ; 2° « un auteur très superficiel, réduit à copier les Tindal, les Bolingbrocke… ; 3° un écrivain sans jugement qui écrit au hasard, se contredit à chaque page ; 4° un homme… qui fait montre des plus vastes connaissances et qui est convaincu de l’ignorance la plus complète. Ignorance des langues » : du latin, « qu’il traduit comme un écolier » ; de l’hébreu, dont il parle et « qu’il ne sait même pas lire » ; du grec, qu’il écrit et traduit comme « un homme qui ne l’a jamais entendu. Ignorance des auteurs et des ouvrages, transformant un poème en un homme… Ignorance de l’histoire », confondant tout, i Ignorance des arts…, qu’il fait parade de connaître. … des usages et des coutumes des différents peuples. Préface de l'édi tion de 1781. Le livre eut du succès, quénée en donna quatre nouvelles éditions, 1771, 1772. 1776, 1781, sans parler de deux éditions BUbreptices. Vol taire se sentit touché. Lettre à d’Alembert du.s dé eembre 1776 (i.. I 18). Cette année-là il publia donc : Lc vieillard du mont C.auvasr aux juifs portugais, allemands et polonais ou Réfutation du livre intitulé : Lettres de quelques juifs, in-12. Par ce livre qui de ien