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VIOL

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pas condamner le stupre et le frapper de peines. Les textes conservés, parce qu’ils font état de l’injure faite aux parents, imposent corrélativement à ceux-ci des devoirs précis pour sauvegarder la vertu et l’intégrité de leurs filles. Le concile de Pavie de 850 formule ainsi son 9e canon : Les parents doivent marier leurs filles plus tôt. S’ils ne le font pas, et si une fille commet une faute, les parents seront condamnés à la pénitence. S’ils font commerce de leurs filles, on leur imposera une pénitence plus considérable que celle imposée à la fille coupable. Une fille ainsi violée ne doit se marier que lorsqu’elle et ses parents auront accompli la pénitence publique qui leur sera imposée. Hefele-Leclercq, Hist. des conciles, t. iv, p. 187. L’ancien droit canonique avait fait siennes les dispositions de la loi mosaïque telles qu’elles étaient formulées dans l’Exode, xxii, 15-16 (cf. Decr. Greg. IX, t. V, tit. xvi, c. 1), à savoir : le coupable devait doter sa victime et l’épouser. S’il refusait, il devait subir la fustigation, être excommunié et relégué dans un monastère pour y faire pénitence jusqu’à ce qu’il fût autorisé à en sortir. Telles étaient les directives données par saint Grégoire I er vers 593. Decr., t. V, tit. xvi, c. 2. Cette norme ne connut d’application stricte que dans l’État pontifical. Dans la pratique, les commentateurs insinuèrent que la double obligation de doter la victime et de l’épouser devait être entendue de façon disjonctive : l’une ou l’autre. Le mariage s’imposait lorsque le séducteur en avait fait sérieusement la promesse ; la dotation était nécessaire lorsque le corrupteur était déjà lié par un empêchement d’ordre sacré ou de lien ; il en était de même lorsque la victime ou ses parents refusaient le mariage.

Celui qui a déshonoré des vierges consacrées à Dieu doit être excommunié s’il est laïque, déposé s’il est clerc. (Le droit romain, Cod., t. I, tit. iii, condamnait le coupable à la peine capitale.) Cf. Grat., caus. XXXVI, q. ii, c. 3.

Le prêtre ou l’évêque qui aura forniqué avec sa pénitente ou sa « fille spirituelle » sera déposé ; de plus, il fera une pénitence de quinze années s’il est évoque, de douze années s’il est prêtre et ce dernier entrera ensuite dans un monastère. Quant à la femme, si elle est laïque, elle distribuera ses biens aux pauvres et s’enfermera dans un monastère jusqu’à sa mort. Grat., caus. XXX, q. ii, c. 8, 9, 10.

Immédiatement avant le Code, les peines sévères de l’excommunication, de la fustigation, de la réclusion n’étaient plus appliquées aux stuprateurs. Le coupable était frappé d’infamie et d’autres peines jerendæ sententiie. Cf. Cocchi, Commentarium in Codicem, 1. Y, n. 212. Les clercs n’étaient plus déposés comme jadis, mais pouvaient être condamnés par le juge à doter la victime, frappés d’amende ou de suspense, ou enfermés dans une maison de correction, avec d’autant plus de rigueur que leur faute avait été accompagnée de violence ou d’autres circonstances aggravantes. Wernz, Jus Decrelalium, t. vi, n. 388. L’application de ces châtiments était subordonnée à la réalisation de la condition contenue dans Grat., caus. XXX, q. i, c. 10 : si lumen in conscientia populorum dcvrnrrit, c’est-à-dire si le crime était public ou i on ii ii.

Aucune de ces peines n’était réservée. Les prescriptions du concile de Rome de 898, dont le 12e can. réservail a l’évêque le jugement des fautes charnelles, ne passèrent pas dans la discipline générale de l’Église. Dans U-Code actuel, trois canons, 2356, 23.Y7, 2.’i"i ! S, sont consacrés aux peines qui frappent les délits de la chair. I.e viol y est nommé explicitement

.i plusieurs reprises (stuprum) et. dans les paragraphes oA le moi ne figure pas, il est certainement compris

dans le groupe des délits rontra srjliim.

On note d’une façon générale que ce n’est pas seulement la faute extérieure qui est visée ici (comme dans tous les délits), mais la faute particulièrement scandaleuse, soit en raison de sa notoriété, soit en raison des circonstances odieuses dans lesquelles elle a été commise. Le viol étant frappé de peines dans la plupart des législations civiles, comme dans le droit ecclésiastique, c’est un délit mixte (fori mixii). Voici les dispositions pénales du Code canonique :

1. Les laïcs qui ont été légitimement condamnés (par le juge civil) pour viol exercé sur la personne de mineures de moins de seize ans encourent, par le fait même, l’infamie de droit (can. 2293-2294) et peuvent en outre être frappés d’autres peines au jugement de l’Ordinaire. Le même délit, commis sur des personnes de plus de 10 ans, exclut après condamnation légitime son auteur « des actes légitimes ecclésiastiques » (can. 2256), jusqu’à ce qu’il ait donné des signes de vrai repentir. Can. 2357.

2. Les clercs mineurs qui se sont rendus coupables de viol seront punis, selon la gravité de leur faute, de peines pouvant aller jusqu’à l’exclusion de l’état clérical, si les circonstances du délit conseillent cette mesure. Can. 2358.

3. Les clercs majeurs, séculiers ou réguliers, qui se seraient rendus coupables de stupre commis avec des mineures au-dessous de 16 ans, doivent être suspendus, déclarés infâmes, privés de tout office, bénéfice, dignité ou emploi qu’ils auraient dans l’Église, et, dans les cas plus graves, ils seront déposés. Can. 2359, §2.

Nous avons dit qu’en raison du caractère mixte du délit le viol en droit canonique pénal sera entendu au sens où l’entendent les Codes civils modernes, à savoir : un acte charnel consommé accompli avec violence (physique ou morale) sur une personne honnête, vierge ou non.

Le droit français punit le viol des travaux forcés à temps. Si la victime a moins de quinze ans accomplis, le coupable subira le maximum de la peine des travaux forcés à temps. Code pénal, art. 332. Lorsque les coupables sont des ascendants de la victime ou des personnes ayant autorité sur elle, la peine sera les travaux forcés à perpétuité, art. 333. Cf. Code pénal italien, art. 520, 527, 530 ; Code hongrois, § 232, 236.

IV. Réparation du dommai.e. — Certains dommages, qui sont les conséquences habituelles du viol (p. ex. perte de l’intégrité charnelle pour une vierge, infamie pour une femme honnête si le crime est public), ne sauraient être réparés en eux-mêmes et directement. On peut concevoir cependant qu’ils puissent être l’objet d’une certaine compensation, qui serait imposée par sentence du juge : amende ou indemnité (dommages et intérêts), dont l’exécution sera obligatoire en conscience. Il ne semble pas toutefois qu’une telle réparation soit due avant la sentence ; bien qu’elle soit équitable et même, dans certains cas, nécessaire, elle ne sera jamais ad eequalttatem, parce que réalisée au moyen de biens d’un autre ordre. Cf. S. Thomas, [IMI", q. Util, art. 2 ; S. Alphonse. Theol, mor., 1. III. n. 627.

Dans la plupart des cas, le principal dommage que subira la victime du viol, c’est la difficulté plus grande dans laquelle elle va se trouver de contracter mariage, tant à cause de sa défloration (si elle était vierge), que de l’infamie encourue (si la faute est connue), Un autre dommage peut être imposé à la femme violentée

par la Burvenance d’enfant, dont les frais d’éducation et d’entretien retomberont pratiquement sur elle.

(.’est de ces deUX sortes de dommages que nous traiterons ii i.

L’obligation de les réparer revêt des formes et des