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VIEUX-CATHOLIQUES VIGER (MARC

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leurs traitements, l’évoque de Uàle, Mgr Lâchât, fut déclaré déposé (29 janvier 1873) ! Le gouvernement bernois arracha à leurs paroisses 69 curés du Jura catholique et les remplaça par des prêtres apostats ou tarés. Même lorsque les curés exilés eurent reçu l’autorisation de rentrer dans le pays, ils ne purent remplir aucun ministère religieux. Les catholiques furent brimés sans pitié. Les églises catholiques de Berne et de Bienne furent transférées aux vieux-catholiques. A Zurich, la même mesure avait été prise, dès 1873. A Berne, fut fondée une « Faculté de théologie vieille-catholique » avec le concours de Friedrich (novembre 1874). Le but des gouvernements protestants suisses était de provoquer la formation d’une Église catholique-nationale. A Genève, la persécution contre les catholiques fidèles ne fut pas moins odieuse. On exigea des ecclésiastiques un serment d’État qui tendait formellement à l’apostasie. Après de nombreuses intrigues dans les divers cantons, il fut procédé à l’élection d’un évêque vieuxcatholique. L’élu fut un ancien curé d’Ilten, devenu curé vieux-catholique de Berne, Herzog, qui alla se faire sacrer, le 18 septembre 1876, à Rheinfelden (canton d’Argovie), par Reinkens assisté de deux prêtres. Au premier synode de leur secte, à Porrentruy, le 15 octobre 1875, les vieux-catholiques suisses abolirent le célibat ecclésiastique, l’obligation de la confession et le port de la soutane. Malgré tant d’efforts et en dépit de l’appui des pouvoirs civils, le nombre des dissidents ne dépassa pas 73.000, répartis en 46 paroisses (chiffre de 1877 — en 1890 : 45.000 ; en 1910 : 22.000).

En Amérique, le vieux-catholicisme fut transplanté par un certain Vilatte. Il prit le nom d’Église catholique-polonaise. Son premier évêque fut Kozlowski, sacré à Berne par Herzog, en 1897. Actuellement, la secte forme, aux États-Unis, trois branches distinctes : l’Église catholique nord-américaine, siège central à Chicago, 27 églises et près de 15.000 membres ; V Église catholique américaine indépendante, avec 11 églises et environ 1.400 membres ; et YÉglise vieille-catholique d’Amérique, 9 églises et 1.900 membres.

Dans ces diverses Églises vieilles-catholiques, on fait profession d’admettre intégralement les sept premiers conciles œcuméniques et d’employer comme Symbole de foi le Credo de Nicée-Constantinople, sans le Filioque naturellement.

Dans les autres pays, le vieux-catholicisme n’a guère réussi qu’à créer d’étroites et éphémères chapelles. En France, la patrie du gallicanisme, la soumission au concile avait été générale et, en certains cas, admirable. Il n’y eut que quelques faits isolés d’apostasie. Le plus connu fut celui de l’ex-religieux carme Hyacinthe Loyson, qui vint assister au premier congrès vieux-catholique, à Munich, en 1871. Il se maria ensuite, se fit prédicateur ambulant, puis fonda, à Paris, V Église catholique gallicane, en 1879, dont il se fit le recteur, et qu’il réunit, en 1884, à l’Église vieille-catholique hollandaise. Il ne devait mourir qu’en 1912. Un abbé Michaud, vicaire de la Madeleine à Paris et le chanoine Junqua, de Bordeaux, imitèrent sa défection. En Italie et en Espagne, l’opposition au concile ne groupa guère que des incroyants et des francs-maçons. L’Église nationale -italiennecatholique ne fut qu’un titre ronflant, en dépit de la protection de l’État et des efforts de Domenico Panelli, qui se fit archevêque de Lydda, de sa propre autorité, mais fut bientôt renié par ses propres adhérents. En Autriche, surtout en Bohême et en Styrie, il y eut de petits groupes vieux-catholiques, dont le chiffre total ne paraît pas avoir dépassé 15.000.

En résumé, Hergenrôther a bien eu raison de nom mer les vieux-catholiques des néo-protestants. Chez eux, les éléments conservateurs se sont peu à peu évanouis. Us n’ont presque plus rien gardé de catholique. En la plupart de leurs groupes, le modernisme a fait de tels ravages qu’il est parfois difficile de savoir ce qu’ils gardent même de chrétien, surtout en Amérique. Leur histoire n’est qu’un chapitre attristant ajouté à la longue histoire des sectes.

Schulte, Der Altkalholizismus, Leipzig, 1896 ; Kannengieser, Les origines du vieux-catholicisme et les universités allemandes, Paris, 1901 ; Michæl, Ignatius von Dôllinger, Inspruck, 1892 ; Friedrich, I. v. Dôllinær, .’i vol., Munich, 1898-1901 ; J.-M. Heinkens, Joseph Hubert Reinkens, Gotha, 1906 ; Herzog, lieitrâge zur Vorgesehiclite der christkatholisehen Kirche in Schweiz, Berne, 1896 ; ParKot, Mgr Vilatte, fondateur de l’Église vieille-catholique aux États-Unis d’Amérique, Tours, 1899 ; Ém. Ollivier, L’Ê<ilise et l’État au concile du Vatican, 2 vol., Paris, 1879 ; G. Goyao L’Allemagne reliaieuse, le catholicisme, Paris, 1909 ; P. Gschwind, Geschiehte der Entslehung der christkatholischen Kirche der Schvjeiz, 2 vol., Berne, 1901-1910 ; Troxler, Die neuere Hnlwicklung des Altkalholizismus, 1908.

— Se référer aussi aux articles parus ici même : Constitution CIVILE DU CLERGÉ ; DÉCLARATION DE 1682 ; Décrétales (Fausses) ; Dœllinger ; Gallicanisme ; Honorius I er ; et surtout Vatican (Concile du), où l’on trouvera la bibliographie sommaire relative au concile.

L. Cristiani.


VIGER Marc, frère mineur, cardinal (14 161516). — I. Vie. II. Œuvres et doctrine.

I. Vie.

Emmanuel Viger naquit, en 1446, à Savone, dans la république de Gènes, d’Urbain Viger et de Nicolette Grosso. Sa mère était la petite nièce de Maître François de la Rovère, fameux prédicateur et théologien, de l’ordre des frères mineurs ; son oncle paternel, Marc Viger († 1447) d’abord frère mineur, puis évêque de Noli, avait été professeur de François de la Rovère. Ce dernier, devenu en 1464 général de l’ordre, poussa son petit-neveu à prendre l’habit franciscain (à Savone bien probablement) et à choisir, en souvenir du défunt évêque de Noli, le nom de frère Marc. Envoyé, après sa profession, au Sludium générale de Padoue, frère Marc de Savone devint maître en théologie de cette université. Pierre-Ant. de Venise, Gloriose memorie délie vite et falti illustri delli sommi ponleficie cardinali assonti dal Seraflco Ordine di S. Francesco, lui, Trévise, 1703. Il professa la théologie au Studium quelque temps avant que d’être nommé co-régent des études avec son illustre confrère, Antoine Trombetta, dit Tuba.

François de la Rovère promu cardinal (18 sept. 1467), puis, sous le nom de Sixte IV, souverain pontife (9 août 1471), fit la fortune de son jeune parent. Vers 1471 Sixte IV nomma Marc Viger lecteur en théologie au collège de la Sapience, à Rome, aux appointements annuels de 300 ducats, puis l’éleva, le 7 octobre 1476, sur le siège de Sinigaglia et lui conféra de nombreux bénéfices ecclésiastiques. Pendant son épiscopat, le prélat s’adonna au culte des lettres, au redressement des abus dans son diocèse et s’efforça de réparer les désastres causés par les guerres. Neuf ans après la mort de Sixte IV (1484), l’évêque termina la reconstruction de son palais (1493). Le 21 août 1503, après la mort d’Alexandre VI († 18 août), on le voit, en qualité de gouverneur du château Saint-Ange, prêter serment de fidélité aux cardinaux conclavistes. Le cardinal Julien de la Rovère, son parent, qui avait été peu de temps frère mineur, ayant été élu souverain pontife (1 er nov. 1505) sous le nom de Jules II, Marc Viger fut promu préfet de Rome, puis quelques jours plus tard (1 er déc. 1505) cardinal-prêtre du titre de Sainte-Marie Irons Tiberim et cardinal protecteur de l’ordre franciscain. L’année suivante, le cardinal Marc Viger présida à