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YAUIMHS. DOCTRINES

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ses complices et doit être rejeté de toute l’Église romaine. » lbid.

8. Sur le droit de prêcher des laïques.

En dehors du pouvoir d’ordre, l’Église professe qu’il existe un pouvoir de juridiction et que nul ne doit exercer un office religieux sans une mission régulière, émanant d’une autorité reconnue dans l’Église. Les pauvres de Lyon, au contraire, à la suite du refus d’autorisation qui leur avait été opposé au concile du Latran, en 1179, cherchaient à s’attribuer le droit de prêcher en s’appuyant sur les Écritures. Le droit de prêcher des laïques et même des femmes leur paraissait établi par les textes suivants : « Celui qui sait faire ce qui est bien et ne le fait pas commet un péché », Jac, iv, 17. — « Et l’Esprit et l’Épouse disent : « Venez ! » Que celui qui entend dise aussi : « Venez ! » Que celui qui a soif vienne. Que celui qui le désire prenne de l’eau de la vie gratuitement ! » Apoc, xxii, 17 ; — le passage de Marc, ix, 37-39, où le Christ, répondant à Jean qui lui signalait un homme chassant les démons sans être de la suite de Jésus, dit : « Ne l’empêchez pas, car personne ne peut faire de miracle en mon nom et aussitôt après mal parler de moi ! » — « Quelques-uns, il est vrai, prêchent aussi Jésus-Christ par envie et par esprit d’opposition, mais d’autres le font avec des dispositions bienveillantes », Phil., i, 15 ; — « Plût à Dieu que tout le peuple de Jahvé fût prophète et que Jahvé mît son esprit sur eux ! » Num., xi, 29. — Plus spécialement, en faveur des sœurs prêchantes, ils en appelaient au passage de l’épître à Tite, ii, 3, où saint Paul parle des « femmes âgées » qui doivent être de « sages conseillères, capables d’apprendre aux jeunes femmes à aimer leurs maris et leurs enfants » ; — et ils alléguaient l’exemple donné par saint Luc, ii, 38, d’Anne, fille de Phanuel, qui, « survenant à cette heure, se mit à louer le Seigneur et à parler de l’Enfant à tous ceux qui, à Jérusalem, attendaient la Rédemption ». On a dit toutefois que les sœurs ne furent jamais très nombreuses dans le ministère de la prédication. A partir du début du xive siècle, dans la branche française, on renonça à leur confier aucun ministère et, dans la branche lombarde, elles vécurent, à la façon des béguines, dans des maisons hospitalières.

Cette prétention au pouvoir de prêcher, sans mission régulière, fut condamnée avec force, dans la profession d’Innocent III, puis au concile du Latran, de 1215. Dans la profession, on lit ces lignes : « Nous croyons que la prédication est très nécessaire et louable, mais qu’elle doit être pratiquée par l’autorité et avec la licence du souverain pontife ou la permission des prélats. » Denz-Bannw, n. 426. Le décret contre les vaudois, au c. m du concile du Latran, dit : « Comme certains, sous prétexte de piété, mais rejetant, selon le mot de l’apôtre, sa vertu, s’arrogent le droit de prêcher, alors que le même apôtre déclare : « Comment prêcheront-ils, « s’ils ne sont envoyés ? » tous ceux qui, en ayant reçu l’interdiction ou n’en ayant pas mission, en dehors de l’autorité émanant du Siège apostolique ou de l’évêque catholique du lieu, auront osé usurper, publiquement ou de manière privée, l’office de la prédication, sont frappés d’excommunication cl, à moins de résipiscence aussi prompte que possible, punis des autres peines convenables. » Denz-Bannw, n. 434.

En dehors des divers articles que l’on vient de résumer, il semble que l’on ait reproché, sinon à tous les vaudois, du moins à certains d’entre eux de professer des opinions nettement dualistes, empruntées de toute évidence aux cathares : « Nous croyons que le diable n’est pas mauvais par sa condition originelle, mais qu’il l’est devenu par son libre-arbitre. Nous croyons de cœur et confessons de bouche que la

résurrection se fera dans cette chair que nous portons et non dans une autre. » Denz-Bannw, n. 427.

Ces deux propositions imposées aux convertis de l’hérésie vaudoise, par Innocent III, n’ont pas dû être rejetées par l’ensemble de la secte, mais seulement par les éléments plus ou moins infectés de catharisme.

Dans la proposition au sujet du mariage, on discerne un élément cathare et un élément vaudois proprement dit : « Nous ne nions pas que les mariages charnels doivent être contractés, selon l’Apôtre, mais nous interdisons absolument de rompre ceux qui ont été régulièrement contractés. » lbid., 424 fin. On sait, en effet, que les cathares condamnaient le mariage, tandis que les vaudois, sans le condamner, croyaient pouvoir le dissoudre, par le simple fait de l’entrée de l’un des conjoints dans la société des maîtres ou des maîtresses. C’est encore à une contamination cathare qu’il faudrait attribuer, chez les vaudois, le végétarianisme intransigeant. Mais ils ne l’ont jamais professé officiellement. La profession de foi contient pourtant la phrase suivante : « Nous n’incriminons à aucun degré la manducation des viandes. » lbid., n. 425. Cette même profession, dans sa première partie, prenait la peine de rappeler les principaux mystères de la foi : trinité, création « ex nihilo », incarnation, Église, septénaire sacramentel, lbid., n. 420, 421, 422, 423, 424. Ce n’est pas, croyons-nous, que l’on eût, en général quelque chose à leur reprocher sur ces divers points, si ce n’est une habituelle négligence à parler du dogme, dans leurs discours, en se renfermant dans les points spéciaux admis par la secte. On a dit que leurs sermons ne roulaient que sur les thèmes favoris de la pauvreté apostolique, sur le serment, le mensonge, etc.

La profession de foi insiste pourtant sur un point qui est à noter : « Nous croyons de cœur et confessons de bouche, disait-elle, qu’il n’existe qu’une Église, qui n’est pas celle des hérétiques, mais la sainte Église romaine, catholique et apostolique, en dehors de laquelle il n’est point de salut. » lbid., n. 432. La secte vaudoise ne paraît cependant pas avoir condamné, en bloc, tous les membres de l’Église catholique, du moins au début, mais, sous la pression de la persécution, elle y arriva très vite. Les documents inquisitoriaux, tels que la Practica inquisitionis de Bernard Guy, composée vers 1321, donnent de la secte vaudoise, au début du xive siècle, la description suivante : 1° le costume apostolique, robe longue et sandales, a disparu comme trop dangereux ; — 2° Les vaudois constituent dès lors une société secrète. Ses membres circulent sous les déguisements les plus divers, pèlerins, pénitents, barbiers, savetiers, ouvriers agricoles, colporteurs surtout, voire jongleurs ; — 3° Ils sont devenus les ennemis acharnés de l’Église catholique. Ils ne la regardent plus que comme l’ecclesia malignantium, la maison du mensonge, parce qu’elle autorise les serments et n’impose pas à son clergé la pauvreté apostolique ; — 4° Ils lui dénient le droit d’exiger l’obéissance, d’excommunier les délinquants, d’administrer les sacrements par ses prêtres, encore que sur ce point, devant les tribunaux, il leur arrive de faire des concessions ; — 5° Ils refusent d’admettre les miracles des saints et leur intercession pour les catholiques, ne veulent au surplus conserver que le culte de la sainte Vierge, en rejetant tous les autres saints ; — 6° Ils prétendent constituer seuls la véritable Église, hors de laquelle il n’y a pas de salut.

Enfin, il faut signaler deux particularités de moindre importance, dans la doctrine vaudoise : la première, c’est l’affirmation de la supériorité de la prière dite en secret dans une chambre à celle qui