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2593 — VAUDOIS. DOCTRINES


à la pauvreté apostolique. Ce qu’ils attaquaient donc, en réalité, c’était le système régnant de sustentation du clergé. Disons à ce sujet que les vaudois ne pouvaient pas non plus esquiver le problème de la sustentation de leur propre clergé et qu’ils y pourvoyaient par des quêtes et des ofïrandes volontaires. Quoi qu’il en soit, les textes invoqués par eux contre le purgatoire et les prières pour les morts étaient les suivants : « La lumière n’est plus que pour un temps au milieu de vous. Marchez pendant que vous avez la lumière, de peur que les ténèbres ne vous surprennent. .. « Joa., xii, 35. — « Nous tous, il faut comparaître devant le tribunal du Christ, afin que chacun reçoive ce qu’il a mérité étant dans son corps, selon ses œuvres, soit bien, soit mal. » II Cor., v, 10. — « Au temps favorable, je t’ai exaucé, au jour du salut, je t’ai porté secours… Voici maintenant le temps favorable, voici le jour du salut. » Ibid., vi, 2. — « Pendant que nous avons le temps, faisons le bien envers tous et surtout envers les frères dans la foi. » Gal., vi, 10. Ils tiraient de là la conclusion que notre sort se règle ici-bas sans rémission ni changement, opinion qu’il est inutile de discuter ici, car chacun en voit l’inopportune application à la doctrine du purgatoire.

La profession de foi d’Innocent III disait à ce sujet : « Nous croyons au jugement qui se fera par Jésus-Christ et que chacun, selon ce qu’il aura fait dans la chair, recevra ou des peines ou des récompenses. Nous croyons que les aumônes, le sacrifice (de la messe) et les autres bénéfices peuvent être utiles aux fidèles défunts. » Denz.-Bannw., n. 427.

Il n’est pas douteux que c’était pour rencontrer la doctrine vaudoise de la pauvreté et des moyens de sustentation du clergé que la même profession de foi ajoutait : « Ceux qui restent dans le siècle et qui ont des propriétés, au moyen desquelles ils font des aumônes et d’autres bienfaits, nous croyons et confessons qu’en observant les préceptes du Seigneur ils seront sauvés. Les dîmes, prémices et oblations, nous croyons qu’elles doivent être payées aux clercs en vertu du précepte du Seigneur. » Ibid.

Au sujet de l’article du purgatoire, si étroitement lié, dans la pensée des vaudois, à celui de la pauvreté du clergé, il convient d’observer en terminant que les textes les plus anciens permettent de conclure à une certaine hésitation de la part des disciples de Valdès. Alain de l’Isle ne mentionne pas cette négation du purgatoire, dans son exposé de leurs erreurs. Selon Bernard de Fontcaud, qui écrivait vers 1188, ils étaient partagés à ce sujet. Les écrits postérieurs leur attribuent au contraire cette négation à tous. On a remarqué que, dans la profession de foi d’Innocent III, le mot de purgatoire n’est pas prononcé, ce qui serait surprenant si les hérétiques avaient ouvertement rejeté son existence. Ce fut donc par l’affirmation de l’impossibilité de venir en aide, par des prières, aux âmes des défunts, que le dogme fin purgatoire fut abordé et repoussé chez les pauvres de Lyon.

5. Contre tes indulgences.

Toutes nos sources signalent le rejet des indulgences par les vaudois. La profession fie foi d’Innocent III n’y touche que sous cette forme très générale : Aux pécheurs vraiment pénitents, nous croyons que le pardon est concédé par Dieu et nous communions très volontiers avec eux. » Denz.-Bannw., n. 421. Sans doute, dans ce texte, il s’agit avant tout du pouvoir d’absolution, mais la dernière partie de la phrase Implique le pouvoir d’octroyer des indulgences, car celles ci avaient pour résultat de remettre les pénitents dans la pleine

communion de l’Église.

6. Contre l’obéissance ecclésiastique au.r supérieurs

indignes. — Alain de l’Isle mentionne expressément cette opinion des vaudois que l’obéissance n’est due qu’aux membres du clergé qui mènent la vie des apôtres. Ce sentiment n’est qu’une extension de la doctrine donatiste que nous rencontrons aussi chez les vaudois, comme on va le voir.

7. Contre le pouvoir d’ordre proprement dit, indépendamment du mérite de celui qui le possède. — Les vaudois rejetaient totalement le pouvoir d’ordre. Non seulement ils s’attribuaient à eux-mêmes le droit de baptiser, de confirmer, de consacrer l’eucharistie, d’ordonner, de confesser et d’absoudre, en raison de leur seul mérite et sans avoir reçu aucun ordre catholique, mais ils refusaient ce même droit aux prêtres et évêques catholiques ne pratiquant pas ce qu’ils considéraient comme la pauvreté apostolique obligatoire. Alain de l’Isle leur prête cette formule : Magis operatur meritum ad consecrandum vel benedicendum, ligandum et solvendum, quam ordo vel o/ficium. Il ne semble pas toutefois qu’ils soient arrivés dès le principe à un donatisme complet. Ce qui l’indique, c’est que, tout en prêchant un anticléricalisme agressif et en décriant les mœurs du clergé catholique, trop riche à leur gré, ils ne s’opposaient pas à ce que les amis de leur secte continuassent à fréquenter les églises catholiques et à recevoir les sacrements, sauf, autant que possible, celui d’eucharistie. Mais la profession de foi qui est imposée aux convertis vaudois, par Innocent III, est très explicite sur ce point : « Les sacrements qui y sont célébrés (dans l’Église catholique), avec la coopération et l’inestimable et invisible vertu du Saint-Esprit, bien qu’ils soient administrés par un prêtre pécheur, pourvu qu’il soit approuvé par l’Église, nous ne les réprouvons aucunement et nous ne rejetons rien des offices ecclésiastiques ni des bénédictions accomplies par ce prêtre, mais nous les acceptons comme ceux d’un prêtre très juste, avec un cœur sincère, car la malice d’un évêque ou d’un prêtre ne nuit pas au baptême d’un enfant, pas plus qu’à la consécration de l’eucharistie ni à la célébration des autres offices ecclésiastiques envers leurs sujets. » Denz.-Bannw., n. 424.

Un peu plus bas, la même profession revient à la charge, à propos du sacrement de l’eucharistie, i dans lequel, dit-elle, nous croyons que rien de plus grand n’est accompli par un bon prêtre, ni rien de moins par un mauvais, parce que tout s’y passe non par le mérite du consécrateur mais par la parole du Créateur et la vertu du Saint-Ksprit. » Ibid.

Puis, le texte affirme la nécessité absolue du pouvoir d’ordre pour consacrer et cela en termes si énergiques, que l’on doit regarder ce point comme l’un des principaux griefs de l’Église contre les vaudois : « C’est pourquoi nous croyons et confessons ferme ment que, si honnête, religieux, saint et prudent que l’on soit, on ne peut ni ne doit consacrer l’eucharistie ni célébrer le sacrifice de l’autel, à moins d’elle prêtre, régulièrement ordonné par un évêque visible et tangible. » Ces derniers mots sont une allusion évidente à la prétention de Valdès d’avoir été ordonné par la puissance invisible de Dieu. Pour cet office (la sainte messe), poursuit le document, trois choses, selon notre foi, sont nécessaires : à savoir une certaine personne, c’est-à-dire un prêtre, comme il a été dit, constitué par un évêque pour cette fonction propre, et les paroles solennelles qui ont été inscrites par les Pères dans le canon et l’intention fidèle de l’officiant. Aussi, croyons-nous et déclarons-nous fermement que quiconque, sans avoir reçu l’ordination épiscopale, comme nous l’avons dit. croit et soutient qu’il peut accomplir le sacrifice de l’eucharistie, est hérétique, participant de la perdition de C.oré et.le