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2427 LTRECHT (ÉGLISE I)'). RAPPORTS WKC LES VIEUX-CATHOLIQUES 2428

van Buûl, évêque d’Haarlem, posa une question délicate. Depuis longtemps déjà, le chapitre de Haarlem s'était soumis à Rome et refusait d'élire son évêque. C’est pourquoi l’archevêque d’Utrecht, en sa qualité de métropolitain et en vertu du droit de dévolution, nommait l'évêque de Haarlem..Mais Pie IX avait supprimé le chapitre de Haarlem en 1853, lorsqu’il avait nommé un évêque à Haarlem ; dès lors, l’archevêque d’Utrecht ne pouvait user du droit de dévolution, puisqu’il ne pouvait plus arguer de la négligence du chapitre, celui-ci n’existant plus. D’autre part, les curés du diocèse de Haarlem considéraient qu’il était inutile de nommer un chapitre pour un clergé qui ne comptait que quelques membres ; ils résolurent de revenir au droit commun et ils choisirent eux-mêmes Lambert de Jong. L’archevêque d’Utrecht, après avoir hésité quelque temps, confirma cette élection et Lambert de Jong fut sacré le 30 novembre 1X1)5 par Herman Heykamp, évêque de Deventer.

Mais l’affaire n'était pas terminée. Pour la régler, Lambert de Jong, le 3 octobre 1866, assembla son clergé et invita l’archevêque d’Utrecht et l'évêque de Deventer. Celui-ci répondit seul à l’invitation. L’assemblée rédigea une instruction canonique, qui fut signée par l'évêque de Haarlem et par tous les membres du clergé et approuvée par l'évêque de Deventer. L'évêque de Haarlem étant mort en 1867, le clergé conformément à l’instruction de 1866, élut GaspardJean Rinkel ; mais l’archevêque d’Utrecht, Loos, refusa de reconnaître la compétence du clergé et de consacrer l'élu. L’affaire ne s’arrangea que sous le successeur de Loos, Jean Heykamp, qui approuva l'élection et sacra Rinkel, le Il août 1873, à Rotterdam, en même temps que Reinkens, l'évêque vieuxcatholique, comme nous le verrons plus loin.

C’est surtout après le concile du Vatican que l’archevêque d’Utrecht manifesta son opposition à Rome. Pas plus que l'évêque de Deventer, il n’avait été invité au concile, alors que les évêques de l'Église grecque, depuis longtemps séparés de l'Église de Rome, avaient reçu une invitation. Les » jansénistes » se montrèrent froissés et il y eut des polémiques assez vives avec le journal catholique, le Tijd.

Le concile s'était ouvert le 8 décembre 1869. Les évêques de Hollande refusèrent de reconnaître l'œcuménicité de ce concile, car, disaient-ils, sur plus de 1 000 évêques convoqués, 759 seulement y assistaient, parmi lesquels 50 cardinaux, 100 vicaires apostoliques, 50 généraux d’ordre, 100 évêques de la Propagande et 276 évêques italiens. Il y avait, en tout, disent les historiens jansénistes, 183 évêques à peu près indépendants. De plus, la bulle Apostolieæ Sedis du 15 octobre 1869 avait anathématisé ceux qui n’acceptaient pas la suprématie du pape, et la bulle Multipliées du 29 novembre ôtait aux évêques le droit de se fixer un règlement, de choisir les secrétaires, de nommer les présidents de commission ; bref, toute liberté était enlevée aux évêques, à qui, le 3 janvier 1870, fut imposée la signature d’un postulatum en faveur de l’infaillibilité personnelle du pape, sur quoi, le 23 janvier, 140 évêques environ avaient présenté une réclamation à Pie IX, demandant que ne fût pas proposée au concile la doctrine de l’infaillibilité. Après des incidents que les jansénistes et leurs futurs alliés, les vieux-catholiques, se plaisent à grossir, le dogme fut voté et le 18 juillet 1870, fut proclamée l’infaillibilité du pape. C’est sur tous ces faits que l’on polémique à Utrecht.

Le journal Oud-Katholiek de 1890 a exposé, ultérieurement, d’une manière systématique, les conditions d’un concile vraiment œcuménique : les évêques du monde entier doivent venir ou au moins être

invités pour témoigner de la croyance de leurs diocèses ; ils doivent montrer dans l'Écriture et dans la tradition le fondement des définitions dogmatiques ; ils doivent siéger, discuter en pleine liberté et définir avec une unanimité morale. Or, écrit le journal, le concile du Vatican n’a point réuni ces conditions essentielles, qui auraient pu le rendre légitime, car le concile ne compta jamais plus de 759 membres, dont 202 quittèrent Rome avant la fin du concile ; [dus de cent n’avaient pas de diocèse et ne pouvaient, par suite, témoigner de la foi de leurs fidèles. Enfin la liberté de discussion n’existait pas. C’est pourquoi l'Église d’Utrecht et le grand synode de Cologne, en 1889, refusèrent de reconnaître l'œcuménicité du concile du Vatican. Cette même thèse fut reprise, en novembre 1904, dans une conférence tenue à Hilversum et publiée en brochure par M. Kenninck, alors professeur à Amersfoort et plus tard (1920-1937) archevêque d’Utrecht. Aussitôt après le concile, l'Église d’Utrecht s'éleva contre les décisions du concile et unit ses protestations à celles qui partirent de France, d’Angleterre, et surtout de Suisse et d’Allemagne. Dans les congrès de Bonn et de Munich, ceux qui se nommèrent les vieux-catholiques, ayant à leur tête Dollinger, constituèrent une nouvelle Église, avec laquelle l'Église d’Utrecht allait vite entrer en rapports et dont elle adopta en grande partie les idées. De la sorte la question de l’infaillibilité pontificale va revenir sans cesse dans les écrits de l'Église d’Utrecht.

Après la mort de Loos en 1873, le chapitre d’Utrecht élut, le 15 décembre 1874, Jean Heykamp, qui fut sacré le 8 avril 1875 par Gaspard-Jean Rinkel, évêque de Haarlem. Le nouvel archevêque était déjà connu par ses écrits. En 1870, il avait publié, sous le pseudonyme d’Adulfus, un ouvrage contre l’infaillibilité. Devenu archevêque, il protesta contre l’encyclique du 10 février 1880, dans laquelle Léon XIII condamnait le mariage civil. Dans sa brochure intitulée L’instruction de Sa Sainteté Léon XIII sur le mariage, il soutint que le mariage était de droit naturel et que le sacrement chrétien n'était qu’une bénédiction religieuse ; il attaquait la doctrine ultramontaine de Léon XIII, en faisant appel à l'Écriture, à la Tradition, aux conciles et à quelques papes, en particulier à Benoît XIV, pour prouver que le mariage proprement dit était distinct du sacrement. Dans des articles publiés par le Oud-Katholiek, revue mensuelle qui paraissait à Rotterdam depuis 1885, Heykamp prit à maintes reprises la défense de son Église. Dans Signes des temps, il signale l’obscurcissement de la vérité dans l'Église, où le pape se donne des attributs qui n’appartiennent qu'à Dieu ; il prend la défense de l'Église d’Utrecht « contre les agissements perfides des jésuites qui s’obstinent à la faire passer pour janséniste et il demande qu’on observe le bref aux évêques de Belgique, du 6 février 1694, dans lequel le pape Innocent XII défend d’appeler jansénistes « ceux qui ne soutiennent pas expressément les cinq propositions de Jansénius dans leur sens naturel ».


XV. L'Église d’Utrecht et le vieux-catholicisme. — Après la promulgation des décrets du concile du Vatican, les trois évêques hollandais avaient protesté contre la définition dogmatique de l’infaillibilité pontificale. Ils ne tardèrent pas à entrer en relations plus intimes avec les vieux-catholiques d’Allemagne et de Suisse. Déjà Loos, archevêque d’Utrecht, en vertu du droit de dévolution, avait fait une tournée épiscopale en Bavière. Cependant le docteur J.-H. Reinkens, ancien professeur d’histoire ecclésiastique à l’université de Brestau et l’un des opposants les plus connus au concile du Vatican, avait été déclaré suspens le 20 novembre 1870 et excom-