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UNIVERSITES. ORGANISATION


pavillon du général) ; le collège de Montaigu, aujourd’hui Bibliothèque Sainte-Geneviève, etc.

Comme dans tous ces établissements scolaires, situés sur la montagne Sainte-Geneviève, on parlait latin, le quartier tout entier s’est appelé, aujourd’hui encore « quartier latin », bien que ce nom soit aujourd’hui moins intelligible. Ajoutons que de ces importantes fondations, rien ne subsiste aujourd’hui. La Révolution détruisit leurs derniers vestiges et ils furent submergés dans la réforme universitaire de l’Empire. Leurs bâtiments eux-mêmes ont à peu près disparu ; sur leur emplacement s’élèvent aujourd’hui des établissements portant d’autres noms. Il en faut dire autant des collèges érigés en d’autres cités universitaires comme Montpellier, Orléans, Angers, Toulouse, etc. Un seul a subsisté en Europe continentale, c’est le collège hispanique de Bologne. On peut voir également encore aujourd’hui à Rome le collège Capranica, fondé au milieu du xve siècle, par un cardinal de ce nom.

Tout autre fut le sort de ces institutions en Angleterre. Les fondations de collèges s’y développent à l’instar de Paris et peu de temps après. Trois collèges d’Oxford remontent au xiiie siècle. Ceux de Cambridge sont contemporains ou du xive siècle. Or, en Angleterre, les collèges sont restés les foyers de la vie universitaire. Sans eux et hors d’eux il n’y a pas d’université. A rencontre de ce qui se passa sur le continent, l’université anglaise se décentralisa dans ses multiples collèges, qui finirent par l’absorber ; tandis que sur le continent, c’est l’université qui absorba les collèges.

5. Les études.

Dans la ligne même de sa fondation, l’université s’était donné pour mission de former les étudiants à toutes les disciplines scientifiques. Cependant nous avons noté, dès l’origine, une tendance à la spécialisation.

a) La théologie. — Paris, néanmoins, bien que sans rival pour la théologie, avait au Moyen Age une renommée universelle. Les papes ne tarissaient pas d’éloges à son endroit ; on y accourait de partout, et les grades conférés à Paris étaient considérés, dans toutes les Églises, comme la meilleure recommandation pour les clercs en quête de bénéfices. On sait que la méthode d’Abélard y était restée en honneur. La condamnation de ses erreurs ne lit pas de tort à la vogue de sa dialectique et de ses procédés d’enseignement. Le Livre des sentences de P. Lombard, qui fut longtemps le texte officiel que commentaient les maîtres et les bacheliers, ne s’en écartait pas. D’ailleurs, Abélard lui-même n’est pas l’inventeur de la méthode, bien qu’il l’ait perfectionnée et popularisée. Le vrai maître, au xiir siècle, c’est Aristote.

Cet engouement pour le philosophe grec et ses commentateurs arabes n’était d’ailleurs pas sans danger au point de vue doctrinal. Était-il bien sain de ouloir étayer ou même établir des thèses théologiques, en mettant en ligne des arguments purement philosophiques empruntés principalement au Stagyi il c, alors que les vraies sources de la théologie demeurent l’Écriture et la Tradition ? Ce n’est pas que ces i lieux théologiques » aient élé alors totalement négligés ; mais peut-être ne leur donna-t-on point à cette époque, la place à laquelle ils ont droit, c’est-à-dire la première. Si les leçons i des bacheliers comportaient une « lecture », c’est-à dire un commentaire de la Bible, et si les lectiotieB magistrales des docteurs en théologie (magistri in sucra pagina) comportaient

obligatoirement une étude de la tradition et des gloses des anciens l’eus, il n’en reste pas moins que

ce travaux étaient conduits superficiellement, quasi

cursoric, et sans grand souci d’approfondissement, lui revanche, les argumentations (disputationes), me

nées suivant toutes les ressources de la dialectique, dont les étudiants avaient été imbus à la faculté des arts, jouaient un grand rôle dans la faculté de théologie.

L’âge d’or de la « reine des sciences » ne fut pas de longue durée. Dès le début du xive siècle, la décadence commence pour cette faculté, illustre entre toutes, et elle se poursuit jusqu’au temps du Grand Schisme. Les causes peuvent se ramener à trois principales, au dire du P. Denifle, Chart. Paris., t. ii, préface. Cf. Mabillon, Traité des études, t. II, c. VI.

a. — Tout d’abord, infidélité aux statuts et règlements primitifs. Devant les longs stages exigés des candidats et la rigueur des examens en vue des grades, on se départit de la sévérité originelle, par des dérogations trop fréquentes et même des dispenses, trop facilement obtenues des papes. De là l’abréviation des épreuves, la facilité des jurys, qui amenèrent rapidement l’abaissement du niveau des études et l’avilissement des grades en théologie. C’est surtout au xive siècle que cette décadence fut manifeste. Dès après les épreuves du Grand Schisme, la Sorbonne reprendra son hégémonie sur l’enseignement théologique en Europe.

b. — Un autre abus consista à équiparer fréquemment, pour l’obtention des charges, honneurs et bénéfices, les gradués « par faveur », pcr saltum, à ceux qui avaient obtenu des diplômes réguliers après une scolarité rigoureuse et des examens normaux. D’où abaissement du nombre des étudiants et relâchement des maîtres, tant dans renseignement que dans la collation des grades. Les gros bénéfices se trouvant à la portée de théologiens médiocres, le niveau des cadres ecclésiastiques va s’abaissant, ce fut une des sources d’abus qui furent si préjudiciables à l’Église aux xv et xvie siècles.

c. — Enfin, l’érection de facultés de théologie dans les diverses universités, tant par les papes d’Avignon que par ceux de Rome, durant la période du Grand Schisme. La qualité des maîtres et celle des études eut à souffrir de cette multiplication. Paris cessa d’être la grande école de théologie, où venaient s’instruire les meilleurs étudiants de l’Europe. Le mouvement se poursuivit au xve siècle par la multiplication des universités elles-mêmes. Paris s’en plaint et supplie le pape de ne plus accorder de nouvelles chartes de fondation. Cf. Chart. Paris., t. iv, n. 2250.

b) Le droit. — Quant à la faculté de Décret, c’était avant tout une faculté de droit canonique. Le Décrel de Gratien et les Décrétales constituaient la base obligatoire de renseignement. Si le droit romain avait eu sa place à Paris aux origines de l’université, le pape Honorius III en avait interdit l’enseignement dès 1219. Mais il faut croire que cette défense était restée lettre morte, puisqu’en 1251 les bacheliers enseignaient encore les « lois », c’est-à-dire le droit romain. D’ailleurs, il n’était pas possible délie lion canoniste sans être aussi romaniste. Aussi les liai lie

tiers, avant d’être proclamés » lecteurs » >u Décret, devaient justifier de trois ans d’études des a lois i dans quelque studium générale. Les professeurs marquants ne Faisaient pas défaut dans les chaires parisiennes île droit ecclésiastique et leur Influence fut

Considérable dans l’orientation de l’université durant

la période trouble du Grand Schisme.

Cependant le vrai centre d’études juridiques en France restait Orléans. On y cultivai ! les deux droits. Dans une Ici ire de 1235, Grégoire l approuva expressément l’enseignement du droit civil, ce qui prouve que le Saint Siège n’avait aucune prévention contre celle discipline, s’il l’interdisait a Paris, c’était pour obliger le studium a concentrer ses efforts sur la théologie et la philosophie. Montpellier eul aussi, des